en la fête de saint Pamphile
pour Genor
Ma très chère enfant,
Si tu lis cette lettre, c'est que Rabbi Baruch t'as retrouvée et que tu es saine et sauve. Il ne se passe pas un jour que je ne prie le Très haut qu'il te tienne sous sa sainte Garde. Tu me manques tant. Certes mes frères sont pieux, saints et savants... Mais dans les froids couloirs de notre infirmerie je rêve encore à toi, à tes galopades, tes rires et tes colères de petite peste ... Tu étais mon rayon de soleil... Et ta mère ..mon rayon de miel ...
J'espère que tu as reconnu rabbi Baruch, qui t 'avait appris les lettres à toi et à ta mère. Accueille le bien et si tu sais, recueille-le...Je l'ai envoyé vers toi car il semblerait que l'Helvétie est terre plus accueillante à ses coreligionnaires, à ma grande honte et à mon grand chagrin. Il a tout perdu... Des bandes armées sont arrivées et ont massacré sa femme et ses filles, brûlé sa maison pendant qu'il était chez nous à étudier les textes...
J'espère que tu as trouvé, toi, le bonheur...
A la mort d'Alienore,tu t'en souviens, je t'ai confiée à un groupe de marchands qui se rendaient en Helvétie... Car je désirais que tu te rapproches de tes origines...
Car très chère enfant, il est temps de te le dire maintenant, ce sont tes origines... Alienore était ta mère selon le coeur et sa grande âme...Mais elle ne pouvait avoir d'enfants, combien de fois m'a-t-elle demandé d'encore fouiller mes grimoires pour trouver un remède à sa stérilité...
Tu te souviens peut-être qu'elle recevait de temps en temps des lettres... c'est d'ailleurs pour les lire sans intermédiaire qu'elle avait demandé à Baruch, puis à moi de lui enseigner la lecture.
Ces lettres venaient de Lausanne, de bourgeois assez âgés qui, ne pouvant s'occuper de toi, de l'enfant de leur fille qu'ils avaient cloîtrée t'ont confiée à Aliénore... Elle était guérisseuse et était passé par là dans l'une de ses pérégrinations. C'était un très bon choix... et le Très Haut , veille sur toi, Genor. j'en suis sûr...
Comme je suis sûr que cette révélation te touchera, mais ne te détruira pas... Et je ne connais nul meilleur messager que ce vieillard en pleurs qui fut ... et est toujours un grand savant, un homme sage et pieux, comme on en rencontre peu...
Les voies de l'esprit écrivent en lignes courbes... Qu'elles t'apportent chère enfant mon amitié, mon tendre souvenir et ... mes prières...
Benoît