Briana.
- [Domaine de Beaumont s/Sarthe - Suite à l'aube]
Prime... Levée des aurores aux petites heures sur fond de son de cloches qui sonnent encore et encore. Ce matin, n'aura pas vu traîner la demoiselle dans sa couche. L'enthousiasme qui s'est emparé d'elle est bien trop grand. Oubliée la lassitude des jours passés. Corps tenu hors du lit, les hautes et lourdes tentures eurent vite fait d'être tirées avant que les épais volets de bois ne soient à leur tour ouverts, faisant se dissiper l'obscurité qui, sans se battre, laissait désormais place aux premières lueurs rosées que diffusait à l'horizon un soleil qui ne tarderait plus à se montrer.
Regard sur cours... Le visage s'empreint d'un sourire. La journée s'annonce des plus belles. Le ciel laisse présager de sa clémence, même si les vents, eux, semblent bien moins décidés à aller trouver le repos. Mais qu'importe. Avec les vents, elle s'apprêtent justement à aller communier. Il en est toujours ainsi lors de ces grandes chevauchées matinales auxquelles elle aime parfois s'adonner. Il y avait de cela longtemps que ça n'était plus arrivé.
Il aura fallu, pour lui faire recouvrer l'envie, les bienfaits de retrouvailles.
Longtemps espérées, le jour J s'était enfin présenté, quelques jours auparavant, lui ramenant Alexandre. Fini les longs courriers pour entretenir le lien le temps de la séparation. Privilège était à la présence physique à présent, bien plus appréciée de la jeune MacCord.
Quittant les abords de la fenêtre, se parant d'une tenue adéquate à l'occasion, braies taillées à la mesure de ses formes dans un cuir aussi noir que l'ébène, blouse ample à jabot en dentelle qui saura aller en la faveur de mouvements qu'elle pourra effectuer en toute liberté, gilet bordé et doublé d'un duvet d'hermine... Elle ressemblerait presque à un jeune jouvenceau. Restaient sa chevelure maintenue libre, et les traits fins et efféminés de son visage pour la trahir.
Dernier regard qui se plonge sur le miroir qui orne l'un des pans de mur de sa chambre, et s'attarde sur le reflet qu'il renvoi. Les mains rajustent étoffes, chevelure... avant d'abandonner l'endroit et de s'élancer dans les longs corridors qu'elle doit traverser avant de rejoindre la partie du château qui accueille les invités.
Il en est un qui s'y trouve. Endormi à moins qu'il ne soit déjà réveillé. C'est la question qui se pose à l'esprit, tandis qu'elle n'est plus qu'à quelques pas de la chambre qu'il occupe.
La veille, Alexandre lui a dit qu'il serait surement éveillé. Mais elle n'a pas oublié non plus sa prétention à vouloir traîner par pur plaisir d'avoir à être réveiller par la Blonde. Mauvaise habitude qu'il prendrait ? Traîner, il semblerait que le Corsaire s'en donne à coeur joie, tout comme la veille au soir où elle l'avait laissé la reconduire et que pour gagner en temps à ses côtés, il faisait mine de se perdre dans les venelles mancelles.
Au souvenir, un sourire tandis qu'elle fait halte devant la porte. Gestuelle machinale. Le bras se lève, main prête à cogner pour s'annoncer. Seulement, le geste diffère de l'envie qui la prend. Le poing ne viendra pas toquer à la porte. Les doigts se resserrent simplement sur la poignée... la font pivoter.
Mais peut-être la trouvera-t-elle close, fermée à clef.
D'une poussée, la porte s'entrouvre pourtant. Dans la pièce règne encore la nuit. La Blonde s'enfonce sans qu'invitation ne lui soit faite d'entrer. Le regard scrute, plissé pour mieux percevoir ce qui l'entoure. Cette chambre, elle la connaît et c'est sans chercher que l'attention se tourne vers la couche. Il a beau faire sombre à l'intérieur, les yeux qui peu à peu s'acclimatent aux ténèbres dans lesquelles semble être plongée la pièce, distinguent la forme humaine qui s'y tient allongée.
Le plus discrètement possible, elle continue d'avancer, vers l'une des fenêtres, repoussant légèrement une des tentures, la lumière du jour se répandant par les interstices des volets qu'elle garde fermés.
La main glisse le long de l'étoffe rouge et soyeuse finissant par la lâcher et s'éloigner. Autour d'elle, tout est silence pour l'heure et seule la respiration de celui qui s'y repose se fait entendre, venant se mêler au faible bruit émit par la sienne. Dans une retenue, elle s'approche, doucement alors que le bras se tend, élevé dans les airs, juste au dessus d'Alexandre. Nouvelle grande inspiration, le bras s'affaisse, la main quant à elle se pose sur le bras masculin. Là sous les doigts, elle sent le muscle qui se dessine et qui lorsqu'elle le presse doucement pour se faire sentir, se contracte.
Elle ne sait à quelle réaction s'attendre. Vive ou pas ? Elle se prépare à reculer d'un pas au cas où. Mais avant d'en arriver là, dans un souffle elle appelle au réveil :
" Alexandre ?... Vous dormez ? "