Izolde
Grosse.
Elle est grosse.
Le mot résonne, rebondissant d'un bout à l'autre de son cerveau bien occupé à prendre toute la mesure de la situation. Grosse, c'était pas beau à entendre, pas bien joli à l'oreille. Pas grosse-grosse, j'entends, mais plutôt grosse comme grosse. Pas grosse dans le sens ou elle était grosse mais grosse.
Grosse.
Ses pieds lui semblent d'un coup bien plus lourd à soulever pour les ré-écraser sur le sol, ses jambes sont aussi lourdes à impulser vers l'avant, elles-aussi. Son petit pas claque discretement contre les dalles parisiennes, traversant le coeur de l'île de la cité pour aller rejoindre la cause de tout ces soucis comme une brave gosse à peine défleurée en mal d'amour. Elle est grosse. Ça lui prend dans l'estomac, à moins que ce soit cet être suceur de sang dans son corps qui s'y mette. Que faire si ce n'était suivre le chemin que lui dictait ses gros pieds enflés jusqu'à celui à qui elle devait cette absurde situation.
La brune était totalement paniquée. Sa tête la fait souffrir comme jamais, ses seins encore plus imposants qu'ils ne l'avaient été, son ventre cri famine et pourtant elle n'a nul envie de la soulager cette famine. Elle ne mange pas pour elle, elle mange pour lui. Niché là, tout au fond tapit dans l'ombre à attendre le bon jour pour montrer le bout de son nez et mettre un point d'honneur à achever le semblant de dignité et d'innocence qu'elle avait pu se targuer d'avoir.
Les ruelles sont sombres, ses pieds rebondissent en cadence tandis qu'elle essaie de prendre la mesure de ce qui lui arrive. Qu'elle essaie, seulement, beaucoup trop obnubilée par l'obscurité alentour qu'elle fixait d'un oeil bovin en quête d'un espèce miracle qui mettrait un point final à une souffrance qui jusqu'alors ne l'avait presque jamais effleurer si ce n'est à la mort de ses parents, et encore.
Izolde s'en voulait, elle se dégoûtait. Pas parce qu'elle était grosse, mais parce qu'elle était grosse, ce qui, à première vue, lui avait semblé revenir au même.
Il fait déjà nuit, alors, et se promener n'est pas bien recommandé lorsqu'on a seulement qu'une quinzaine d'années à son actif et surtout lorsqu'on était dans son état. Mais Izolde n'était pas très au fait du danger, surtout en cet instant ou tout lui semblait se jouer sans que sa présence ou son attention soit requise. Son corps allait, son esprit tentait de suivre. Son corps ne lui était plus particulier, il ne lui appartenait plus tout à fait.
Cette fois là elle semble connaître la direction, peut-être dans sa panique n'a-t'elle plus le soucis de se perdre. Il fait sombre, elle ne voit pas grand chose, mais comme par un sordide hasard elle sait où se diriger. Jusqu'à la rue des Deux-Ecus, par là-bas. Elle y imagine le nain paisiblement endormit dans son lit où elle avait été invitée à passer plusieurs nuits. L'homme a qui elle s'était offerte en toute ignorance consistait selon elle en un remarquable exemple de vertu, d'un bourgeois qui savait rondement mener ses affaires et rester modérée, c'est à peine si elle l'imaginait boire d'autres verres que ceux qu'ils avaient partagé ensemble.
Mais où avait-il bien pu avoir la tête pour oser franchir le seuil de la bienséance avec elle? Comment cet homme qui d'apparence paraissait sage et tranquille, honnête de surcroît, avait-il pu abuser d'elle sans l'avoir préalablement prévenu des risques encourus par ce genre de pratique?
Quel odieux personnage ! Quel odieux nain ! Quel nain tout court ! Quel pouilleux putain d'merde ! Lui qui en première instance lui avait paru si bon n'avait fait que profiter de sa jeunesse et de sa naïveté. Comment avait-elle pu se laisser avoir, pire, s'être autorisé à se laisser hanter par ce personne pendant des jours et surtout des nuits? Le laisse infiltrer ses moindres pensées et ainsi avoir accompagné les moindres et de ses faits et gestes depuis qu'elle l'avait quitté jusqu'à maintenant?
Izolde réajuste sa capuche, remonte ses manches, tourne à droite puis à gauche avant de prendre par ici, bien décidée à en découdre.
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« Sérieusement, on dirait une vieille chèvre asmathique à l'agonie ! »
Elle est grosse.
Le mot résonne, rebondissant d'un bout à l'autre de son cerveau bien occupé à prendre toute la mesure de la situation. Grosse, c'était pas beau à entendre, pas bien joli à l'oreille. Pas grosse-grosse, j'entends, mais plutôt grosse comme grosse. Pas grosse dans le sens ou elle était grosse mais grosse.
Grosse.
Ses pieds lui semblent d'un coup bien plus lourd à soulever pour les ré-écraser sur le sol, ses jambes sont aussi lourdes à impulser vers l'avant, elles-aussi. Son petit pas claque discretement contre les dalles parisiennes, traversant le coeur de l'île de la cité pour aller rejoindre la cause de tout ces soucis comme une brave gosse à peine défleurée en mal d'amour. Elle est grosse. Ça lui prend dans l'estomac, à moins que ce soit cet être suceur de sang dans son corps qui s'y mette. Que faire si ce n'était suivre le chemin que lui dictait ses gros pieds enflés jusqu'à celui à qui elle devait cette absurde situation.
La brune était totalement paniquée. Sa tête la fait souffrir comme jamais, ses seins encore plus imposants qu'ils ne l'avaient été, son ventre cri famine et pourtant elle n'a nul envie de la soulager cette famine. Elle ne mange pas pour elle, elle mange pour lui. Niché là, tout au fond tapit dans l'ombre à attendre le bon jour pour montrer le bout de son nez et mettre un point d'honneur à achever le semblant de dignité et d'innocence qu'elle avait pu se targuer d'avoir.
Les ruelles sont sombres, ses pieds rebondissent en cadence tandis qu'elle essaie de prendre la mesure de ce qui lui arrive. Qu'elle essaie, seulement, beaucoup trop obnubilée par l'obscurité alentour qu'elle fixait d'un oeil bovin en quête d'un espèce miracle qui mettrait un point final à une souffrance qui jusqu'alors ne l'avait presque jamais effleurer si ce n'est à la mort de ses parents, et encore.
Izolde s'en voulait, elle se dégoûtait. Pas parce qu'elle était grosse, mais parce qu'elle était grosse, ce qui, à première vue, lui avait semblé revenir au même.
Il fait déjà nuit, alors, et se promener n'est pas bien recommandé lorsqu'on a seulement qu'une quinzaine d'années à son actif et surtout lorsqu'on était dans son état. Mais Izolde n'était pas très au fait du danger, surtout en cet instant ou tout lui semblait se jouer sans que sa présence ou son attention soit requise. Son corps allait, son esprit tentait de suivre. Son corps ne lui était plus particulier, il ne lui appartenait plus tout à fait.
Cette fois là elle semble connaître la direction, peut-être dans sa panique n'a-t'elle plus le soucis de se perdre. Il fait sombre, elle ne voit pas grand chose, mais comme par un sordide hasard elle sait où se diriger. Jusqu'à la rue des Deux-Ecus, par là-bas. Elle y imagine le nain paisiblement endormit dans son lit où elle avait été invitée à passer plusieurs nuits. L'homme a qui elle s'était offerte en toute ignorance consistait selon elle en un remarquable exemple de vertu, d'un bourgeois qui savait rondement mener ses affaires et rester modérée, c'est à peine si elle l'imaginait boire d'autres verres que ceux qu'ils avaient partagé ensemble.
Mais où avait-il bien pu avoir la tête pour oser franchir le seuil de la bienséance avec elle? Comment cet homme qui d'apparence paraissait sage et tranquille, honnête de surcroît, avait-il pu abuser d'elle sans l'avoir préalablement prévenu des risques encourus par ce genre de pratique?
Quel odieux personnage ! Quel odieux nain ! Quel nain tout court ! Quel pouilleux putain d'merde ! Lui qui en première instance lui avait paru si bon n'avait fait que profiter de sa jeunesse et de sa naïveté. Comment avait-elle pu se laisser avoir, pire, s'être autorisé à se laisser hanter par ce personne pendant des jours et surtout des nuits? Le laisse infiltrer ses moindres pensées et ainsi avoir accompagné les moindres et de ses faits et gestes depuis qu'elle l'avait quitté jusqu'à maintenant?
Izolde réajuste sa capuche, remonte ses manches, tourne à droite puis à gauche avant de prendre par ici, bien décidée à en découdre.
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« Sérieusement, on dirait une vieille chèvre asmathique à l'agonie ! »