Capeblanche avait une nouvelle fois confondu son cornet en cuivre pour mieux ouir avec un eunuque-jombarde.. Il utilisait souvent l'instrument pour se distraire, mais jamais le bon. Il n'entendait ainsi... rien.
Bonzhor Colineau ! 'Mint é qu'i balye ? Comment ? Vous n'auriez point de haine à m'entendre conter une politiqu'action qui n'en serait point maussade ? Bon, et bien j'étais venu vous acheter une charrette, mais puisque vous vendez peu cher et que vous aspirez à un cours théorique d'économie politique, je commencerai ainsi par celui-ci. N'oubliez pas toutefois que "de la théorie à la pratique, il y a de loin et certaines choses ne doivent pas trop sortir des ouvrages d'économie" comme disait en ses grandes heures le baron de Miolans. Ce cours n'est ni de lui ni de moi, mais peut-être peut-on en tirer quelque chose au point de vue théorique.
Aussi, vous vendez assez peu cher. Certaines personnes pensent qu'il est pertinent de vendre à bas prix afin d'aider les autres. Ce long cours que je vais vous conter de mémoire a pour but de vous prouver qu'il n'en est rien et que cela provoque juste un appauvrissement général de toute la population. Mais il vous montrera aussi qu'il existe bien d'autre moyen d'aider efficacement son prochain. Le cours est très long, mais je vais essayer de faire long, puisque vous êtes si avide de connaissances.. mais sachez toutefois que toute personne s'intéressant un peu à l'économie ou ayant une idée sur le sujet se doit de l'entendre.
Tout d'abord quelques généralités : Comprenons qu'il faille faire un choix, soit l'on fait des économies soit l'on augmente ses caractéristiques. Faire les deux en même temps est quasiment impossible. Pour être riche et puissant il faut donc du temps. Pour les personnes qui désirent systématiquement vendre leur production dans la demi-journée, rappelons le temps de passage moyen d'une classe de la population à l'autre à partir du moment de son apparition, si l'on respecte les consignes bien sur. Pour le niveau le paysan : 1 à 2 semaines, pour l'artisan : 3-4 mois environ et pour devenir un notable, comptez bien 1 an à 1 an et demi.
Il faut donc penser à long terme, ne penser qu'à court terme ne peu que rallonger ces durées. Ne pas vendre immédiatement sa production n'est donc pas bien grave. Précisons également que certaines personne on mis beaucoup plus de temps, mais ce sont des personnes qui n'ont pas suivi les recommandations faites. Que ce soit volontaire ou pas, le résultat reste le même : une progression plus lente.
Maintenant que vaut-il mieux avoir pour s'enrichir rapidement : Un marché avec des prix élevés ou un marché avec des prix bas ?
En fait un village est incapable d'écouler l'intégralité de sa production sans l'aide de la mairie, la production étant supérieure aux besoins de la population. La mairie achète donc beaucoup de produits sur le marché, essentiellement du blé et du maïs mais pas uniquement. Au total environ 10% de la production globale est ainsi achetée. Dans l'ensemble, la population vend donc plus de produits qu'elle n'en achète. Et c'est justement cela qui nous permet de nous enrichir car, si l'on achète plus que l'on ne vend, on s'appauvrit. C'est une évidence mais certains ont tendance à l'oublier. Ne soyez pas de ceux-ci Colineau !
Ensuite, tout est affaire de pourcentage : Il est plus intéressant de vendre pour 100 écus et d'acheter pour 90 que de vendre pour 50 écus et d'acheter pour 45. Le pourcentage n'a pas changé mais, le gain final est doublé.
Un marché fort est donc l'assurance d'un enrichissement plus important. Comme l'on vend plus que l'on achète, il faut donc se placer du coté du vendeur et non de l'acheteur, pour permettre à chacun de s'enrichir plus rapidement. Bien sûr, ceci n'est valable que si le marché est équilibré au niveau des prix, les grilles indicatives sont justement là, pour ça.
Maintenant, voici quelques chiffres : nous allons prendre un exemple concret avec le pain. Pourquoi le pain ? C'est un produit de base, accessible à tous et que toutes personnes désireuses de faire des économies consomment. De plus, la production de sa matière première (le blé) n'est pas soumise à des aléas comme les carcasses, cela rend les calculs plus simples.
Voyons ce qu'il se passerait si l'on désirait faire baisser son prix de 15 deniers (0.15 écus).
Pour obtenir ce résultat, nous pouvons agir sur 4 éléments différents : le prix du blé, le prix du bois, le salaire du boulanger et le salaire du meunier. Étudions les cas un par un.
Le prix du blé : plus de 50% de la production est faite par les paysans, ce serait un peu donner d'une main pour prendre de l'autre, il n'y a donc pas grand intérêt puisque ça revient à vouloir faire gagner de l'argent à tout le monde sur le dos des personnes les moins riches. Au final il n'y aura donc que les riches qui en profiteront vraiment. Il vaut donc mieux s'axer sur les autres points.
Le prix du bois : pour obtenir une baisse de 15 deniers sur le prix du pain, il faudrait une baisse de 90 deniers sur le prix du bois : actuellement, un bûcheron expérimenté gagne en moyenne 21 écus (5 stère à 4.20), cela ramènerait sont salaire à 16.50 écus (5 stères à 3.30). Soit, une perte de 4.50 écus par jour, 135 écus par mois, et un salaire à peine plus haut que celui d'un mineur. Alors que cela nécessite beaucoup de force et de préférence l'intelligence qui va avec pour être efficace. Ceci ne me semble pas acceptable.
Le salaire des boulangers : en une journée, le boulanger produit 36 miches de pains. Baisser son prix de 15 deniers provoque donc une perte journalière 5.40 écus, 162 écus sur un mois. Avec une telle baisse de salaire les boulangers ne travailleront plus beaucoup dans leur échoppe, préférant postuler à des offres d'emplois visibles à la mairie. Il y aura donc moins d'offre intéressante pour les paysans puisqu'elles seront prises d'assaut par des personnes à fort charisme qui ne travaillent plus dans leurs échoppes et, un risque de pénurie de pain.
Le salaire des meuniers : les meuniers devraient vendre leur farine 45 deniers moins chers, soit une perte journalière de 4.50 écus, 135 écus par mois. Elle est un peu plus faible que pour les boulangers mais reste conséquente et l'on obtient donc des effets identiques. A ceci il faut ajouter les effets de bords. Les artisans sont les plus gros consommateurs de nourriture comme la viande, le lait et les légumes. Diminuer leur salaire fera qu'ils en consommeront moins. Cela provoquera donc un ralentissement économique. On vendra moins, on sera donc moins riche et l'on évoluera moins vite.
Nous venons de voir que les pertes seraient plutôt importantes, occasionnant de gros sacrifices pour certaines catégories de la population. Mais, qu'y gagnerait un mangeur de pain ? Il gagnerait 0.15 écus par jours, soit 4.50 écus par mois. Au bout de 4 mois, il aura gagné à peine plus que l'équivalent d'une dure journée de labeur à la mine, les artisans et les bûcherons auront perdu eux, plus de 500 écus soit l'équivalent d'une cinquantaine de légumes par exemple. Presque la production d'un champ de légumes sur la même période. C'est donc l'équivalent de la production de plusieurs champs qui ne trouveront plus acquéreur donc, un enrichissement moins rapide.
Bien sur un artisan en particulier, ne travaille pas tous les jours dans son échoppe mais, il faut voir la profession dans son ensemble.
Certain pourrait penser qu'il serait pertinent de partager les pertes entre les meuniers, boulangers et bûcherons. On voit bien que de toute façon le gain est ridicule mais, les pertes restent conséquentes. Les partager n'enlevant pas le fait que la perte est bien la. Lorsque l'on s'engage sur cette voie sans réflexion, on ne comprend généralement pas pourquoi l'on ne gagne pas plus d'argent qu'avant, et l'on a tendance à vouloir continuer à faire baisser les prix pour obtenir l'effet escompté, aggravant en fait, le problème. C'est un cercle vicieux dans lequel il est dangereux de s'aventurer.
Maintenant plaçons-nous dans un autre cas de figure : prenons une personne fort riche et qui n'a pas besoin d'argent et qui décide de produire quand même pour vendre sa production à très bas prix.
On peut penser que l'on aide quelqu'un en vendant à très bas prix. Certes, la personne qui a profité de l'aubaine gagne quelques écus mais, c'est à nouveau se placer du mauvais coté, puisqu'il a été montré qu'il fallait se placer du coté du vendeur et non de l'acheteur pour s'enrichir.
Voici un exemple concret : un maraîcher vend un légume à 7 écus au lieu de 11. La personne qui l'achète gagne donc 4 écus. Mais vu la différence de prix, ils seront certainement nombreux à le vouloir. Celui qui l'obtiendra aura donc certainement un haut charisme donc, probablement pas le plus démuni.
La somme n'est pas négligeable mais, que pourra t-il acheter avec les 4 écus ainsi gagnés ? Mis à part un sac de maïs, il n'y a pas grand chose. Mais à coté de cela, un maraîcher va se retrouver avec un légume à 11 écus qui n'a pas été vendu. Une personne avec un faible charisme certainement, une personne qui aurait certainement bien eu besoin
des 11 écus de cette vente.
On a donc d'un coté, une personne aisée qui a gagné 4 écus et de l'autre, une personne de moindre expérience qui en a perdu 11. Pas terrible comme aide.
Et avec les 11 écus en question, qu'aurait-il pu acheter ? Une bouteille de lait par exemple, ce qui est déjà mieux qu'un sac de maïs. C'est donc un éleveur bovin qui se retrouve lui aussi avec un invendu. Et, comble de l'ironie, cet éleveur c'est peut être la personne qui a acheté le légume à 7 écus, lui occasionnant une perte indirecte de 11 écus.
Ainsi l'on voit bien l'effet boule de neige que l'on obtient avec cette action que l'on voulait altruiste au départ.
Le tout pour vous dire que ce n'est même pas la peine d'y répondre puisque le cours n'en vaut même pas la peine, et vu qu'il y a de loin de la théorie à la pratique (...)
(...) J'aimerai vous acheter une charrette à bas prix, qui profite à un démuni tel que moi, va engendrer de grosses conséquences néfastes pour la ville en boule de neige - vu qu'il y en a sur ce marché et j'en ai vu, me demandant les raisons pour lesquelles elles ne fondaient pas - mais qui serait un bon geste. Aurais-je le droit à un quatrain ?