Tynop
Se frottant larrière du crâne, le vagabond laissa échapper un soupir. Ça avait pourtant bien commencé. Le mari de la cheffesse semblait rejoindre son point de vue, ce qui nétait pas négligeable, puisquil avait été le premier à la reprendre. Là où ça nallait pas, cest quau lieu den rester là, il était en train de reprendre les Corleone. Plus la discussion avançait, plus on séloignait du sujet initial, plus le groupe se divisait. Il mettait même les deux cousines au défi de partir. Si Enjoy aurait quelque scrupule à sexécuter, les menaces de Laell se devaient dêtre prises au sérieux. Il fallait la rassurer, et le voilà en train de la blâmer. Si les Corleone retirent leur soutien, lentreprise est dès lors vouée à l'échec, le barbu peut dire adieu à sa vengeance, sa famille à son honneur, et les autres à leur butin.
Même la nattée jusque-là muette et méfiante semblait convaincue par ses propos et prête à lui laisser une chance. Elle connaissait Sarah, se doutait que lEcossaise était capable de régler son compte au blondinet si jamais il savérait que ce soir un traitre.
Puis livrogne prit la parole. Des propos dénués du moindre sens aux yeux du vagabond. Justement sil tenait à ce que lentreprise continue, cela était censé démontrer quil était motivé à y prendre part. Quel intérêt aurait-il, en tant quespion, à tenter de faire survivre un projet de pillage de mairie alors quil pourrait au contraire le laisser mourir dans luf et de cette manière éviter la menace quil représentait pour cette ville ?
Devait-il vraiment prendre la peine de lui répondre ? Non, cela ne servirait à rien, elle se serait probablement rendormie entre temps, ou alors comprendrait un mot sur deux de ce quil essayerait de lui dire. Puis ce nétait pas devant elle quil devait se justifier. Mais voilà que la laideronne sortait son couteau et exhortait les autres à le dépecer. En cet instant il comprit quelle nétait pas si stupide quelle en avait lair. Elle cherchait à détourner les regards suspicieux sur lui, alors que jusquà présent ils étaient braqués sur elle. Le blondinet pensa que les autres personnes arriveraient à la même conclusion que lui. Bien que vaillante, cette tentative était quelque peu grossière.
Mais le barbu lui donna tort, et voilà comment il se retrouvait ici, sur le sol, une douleur à larrière du crâne quil se frottait, sans avoir eu le temps de comprendre ce qui lui arrivait. Pas vraiment le temps de réfléchir, le voilà sujet à la toute la haine que lEcossais avait difficilement contenu jusquici. Et apparemment il ne semblait pas décidé à en rester là. Non, le voilà en train de dégainer lépée, et de le fixer. Tynop soutint son regard. La haine, la colère, mais surtout, la détermination se discernaient dans les yeux de l'Ecossais. Bizarrement, ce nétait pas la peur qui dominait le blond .Elle était présente, bien entendu, vu que la mort semblait prête à laccueillir à bras ouvert, et le blond faisait quand même du mieux quil pouvait pour ne pas la laisser paraitre. Quil crève, tant pis, mais il ne lui laissera pas le bonheur de croire quil lavait terrorisé. Plus que tout, il sen voulait davoir été aussi stupide. Pourquoi était-il venu ici désarmé, pourquoi avait-il si tôt annoncé sa relation avec la sauvageonne, pourquoi ne sétait-il pas contenté de se taire et de se faire tout petit après lapparition de son frère ? Il était évident que le barbu chercherait la moindre occasion pour se débarrasser de lui.
Il mourrait denvie de lui répondre, de lui cracher la vérité à la figure. « Je suis un crevard ? Et toi, tu es qui pour tattaquer à un homme désarmé ? Tu es qui pour ne pas pouvoir régler tes problèmes tout seul et risquer la vie de ta famille pour venger ton honneur ? La mairie, je vais la piller, nen doute pas, mais je ne le ferais pas pour toi. » Mais au lieu de parler, le blond restait là, sans rien faire, à fixer celui qui sétait octroyé le droit de mettre fin à ses jours, incapable de sortir la moindre parole de sa bouche. Il allait mourir ici, de la plus stupide des manières, et pour la plus stupide des causes.
Cétait sans compter sur lintervention salvatrice de Sarah. En quelques secondes, le barbu qui semblait ivre de rage et sur le point de le tuer se prend lune des plus belles gifles de mémoire dhomme et se fait rassoir de force puis sermonner par lEcossaise. La voilà qui revient vers lui pour administrer la plus belle des consolations en venant déposer un baiser sur ses lèvres. Et pourtant même cette consolation laisse un goût amer dans la bouche du vagabond. Le barbu ne lui avait même pas laissé une chance, navait pas cherché à en savoir plus sur lui, mais était passé à deux doigts de le tuer dès quil en a eu un semblant doccasion. Peu rassurant pour la suite des évènements, de savoir que celui censé se battre à vos côtés meurt denvie de vous tuer.
Encore en cet instant le blond désirait plus que tout faire comprendre au barbu la stupidité de son acte. Les personnes présentes allaient se battre pour restaurer son honneur, et le voilà qui par cet acte venait de condamner encore un peu plus la réussite de lentreprise. Car si le vagabond avait fait son possible pour tenter de rassurer la Corleone sur les risques de fuites, le barbu venait de prouver une fois de plus que la cohésion ici nétait quillusion, et que la discorde régnait au sein du groupe. Et là, Tynop ne pourrait rien trouver à redire si lItalienne décidait de ne pas engager les Corleone. Comment pourrait-il, alors que la cheffesse de famille semble aussi experte dans le pillage de mairie quun frère du monastère ? Comment le pourrait-il, alors quune ivrogne sortie don ne sait où insulte sa compagne, sendort quand on lui pose des questions et saisit la moindre occasion pour semer la discorde ? Comment le pourrait-il alors que le barbu semblait plus enclin à étriper le compagnon de sa sur que de discuter stratégie pour tenter de faire en sorte que toute sa famille sen sorte indemne ? Non, la pièce transpirait lamateurisme, et ça, même le dernier des amateurs que pouvait être Tynop le savait. Sil ouvrirait la bouche, ce serait pour lexpliquer au barbu, le féliciter de sa stupidité. Tant pis, après il navait quà courir très vite, il ne serait pas ralenti par le poids dune épée, contrairement au barbu sil lui prenait lenvie de se lancer à sa poursuite.
Mais Sarah darda son regard dans le sien. Elle était inquiète. Il ne devait pas répondre, ou sinon il la perdrait. Elle venait peut-être de lui sauver la vie, mais cela ne voulait pas dire quelle désirait faire un choix entre son frère et lui. Et lui ne voulait pas la perdre. Sil disposait dencore un peu de bon sens, il quitterait la pièce maintenant, pour ne plus jamais revenir. Ils étaient deux, et pas des moindre, à vouloir lui faire la peau : la pocharde et le barbu. Si ce nétait pas eux, alors les défenseurs de la mairie sen chargeraient probablement. Mais il nétait pas question de partir, car cela signifiait abandonner Sarah, abandonner celle qui venait de le défendre contre son propre frère, celle avait qui chaque moment passé était la chose la plus savoureuse au monde.
Ravalant sa fierté, et sa langue, il plongea son regard dans celui du barbu. Non pas menaçant, mais neutre, dénué de la moindre expression, puis alla reprendre sa place. Plus un mot ne sortirait de sa bouche, en tout cas pas tant quon ne se soit adressé expressément à sa personne. Au final, le barbu devrait faire avec lui. « Prie pour que je ne sois pas rancunier » se dit-il « Autrement je risque bien de devenir le traitre que tu maccuse dêtre. »
Même la nattée jusque-là muette et méfiante semblait convaincue par ses propos et prête à lui laisser une chance. Elle connaissait Sarah, se doutait que lEcossaise était capable de régler son compte au blondinet si jamais il savérait que ce soir un traitre.
Puis livrogne prit la parole. Des propos dénués du moindre sens aux yeux du vagabond. Justement sil tenait à ce que lentreprise continue, cela était censé démontrer quil était motivé à y prendre part. Quel intérêt aurait-il, en tant quespion, à tenter de faire survivre un projet de pillage de mairie alors quil pourrait au contraire le laisser mourir dans luf et de cette manière éviter la menace quil représentait pour cette ville ?
Devait-il vraiment prendre la peine de lui répondre ? Non, cela ne servirait à rien, elle se serait probablement rendormie entre temps, ou alors comprendrait un mot sur deux de ce quil essayerait de lui dire. Puis ce nétait pas devant elle quil devait se justifier. Mais voilà que la laideronne sortait son couteau et exhortait les autres à le dépecer. En cet instant il comprit quelle nétait pas si stupide quelle en avait lair. Elle cherchait à détourner les regards suspicieux sur lui, alors que jusquà présent ils étaient braqués sur elle. Le blondinet pensa que les autres personnes arriveraient à la même conclusion que lui. Bien que vaillante, cette tentative était quelque peu grossière.
Mais le barbu lui donna tort, et voilà comment il se retrouvait ici, sur le sol, une douleur à larrière du crâne quil se frottait, sans avoir eu le temps de comprendre ce qui lui arrivait. Pas vraiment le temps de réfléchir, le voilà sujet à la toute la haine que lEcossais avait difficilement contenu jusquici. Et apparemment il ne semblait pas décidé à en rester là. Non, le voilà en train de dégainer lépée, et de le fixer. Tynop soutint son regard. La haine, la colère, mais surtout, la détermination se discernaient dans les yeux de l'Ecossais. Bizarrement, ce nétait pas la peur qui dominait le blond .Elle était présente, bien entendu, vu que la mort semblait prête à laccueillir à bras ouvert, et le blond faisait quand même du mieux quil pouvait pour ne pas la laisser paraitre. Quil crève, tant pis, mais il ne lui laissera pas le bonheur de croire quil lavait terrorisé. Plus que tout, il sen voulait davoir été aussi stupide. Pourquoi était-il venu ici désarmé, pourquoi avait-il si tôt annoncé sa relation avec la sauvageonne, pourquoi ne sétait-il pas contenté de se taire et de se faire tout petit après lapparition de son frère ? Il était évident que le barbu chercherait la moindre occasion pour se débarrasser de lui.
Il mourrait denvie de lui répondre, de lui cracher la vérité à la figure. « Je suis un crevard ? Et toi, tu es qui pour tattaquer à un homme désarmé ? Tu es qui pour ne pas pouvoir régler tes problèmes tout seul et risquer la vie de ta famille pour venger ton honneur ? La mairie, je vais la piller, nen doute pas, mais je ne le ferais pas pour toi. » Mais au lieu de parler, le blond restait là, sans rien faire, à fixer celui qui sétait octroyé le droit de mettre fin à ses jours, incapable de sortir la moindre parole de sa bouche. Il allait mourir ici, de la plus stupide des manières, et pour la plus stupide des causes.
Cétait sans compter sur lintervention salvatrice de Sarah. En quelques secondes, le barbu qui semblait ivre de rage et sur le point de le tuer se prend lune des plus belles gifles de mémoire dhomme et se fait rassoir de force puis sermonner par lEcossaise. La voilà qui revient vers lui pour administrer la plus belle des consolations en venant déposer un baiser sur ses lèvres. Et pourtant même cette consolation laisse un goût amer dans la bouche du vagabond. Le barbu ne lui avait même pas laissé une chance, navait pas cherché à en savoir plus sur lui, mais était passé à deux doigts de le tuer dès quil en a eu un semblant doccasion. Peu rassurant pour la suite des évènements, de savoir que celui censé se battre à vos côtés meurt denvie de vous tuer.
Encore en cet instant le blond désirait plus que tout faire comprendre au barbu la stupidité de son acte. Les personnes présentes allaient se battre pour restaurer son honneur, et le voilà qui par cet acte venait de condamner encore un peu plus la réussite de lentreprise. Car si le vagabond avait fait son possible pour tenter de rassurer la Corleone sur les risques de fuites, le barbu venait de prouver une fois de plus que la cohésion ici nétait quillusion, et que la discorde régnait au sein du groupe. Et là, Tynop ne pourrait rien trouver à redire si lItalienne décidait de ne pas engager les Corleone. Comment pourrait-il, alors que la cheffesse de famille semble aussi experte dans le pillage de mairie quun frère du monastère ? Comment le pourrait-il, alors quune ivrogne sortie don ne sait où insulte sa compagne, sendort quand on lui pose des questions et saisit la moindre occasion pour semer la discorde ? Comment le pourrait-il alors que le barbu semblait plus enclin à étriper le compagnon de sa sur que de discuter stratégie pour tenter de faire en sorte que toute sa famille sen sorte indemne ? Non, la pièce transpirait lamateurisme, et ça, même le dernier des amateurs que pouvait être Tynop le savait. Sil ouvrirait la bouche, ce serait pour lexpliquer au barbu, le féliciter de sa stupidité. Tant pis, après il navait quà courir très vite, il ne serait pas ralenti par le poids dune épée, contrairement au barbu sil lui prenait lenvie de se lancer à sa poursuite.
Mais Sarah darda son regard dans le sien. Elle était inquiète. Il ne devait pas répondre, ou sinon il la perdrait. Elle venait peut-être de lui sauver la vie, mais cela ne voulait pas dire quelle désirait faire un choix entre son frère et lui. Et lui ne voulait pas la perdre. Sil disposait dencore un peu de bon sens, il quitterait la pièce maintenant, pour ne plus jamais revenir. Ils étaient deux, et pas des moindre, à vouloir lui faire la peau : la pocharde et le barbu. Si ce nétait pas eux, alors les défenseurs de la mairie sen chargeraient probablement. Mais il nétait pas question de partir, car cela signifiait abandonner Sarah, abandonner celle qui venait de le défendre contre son propre frère, celle avait qui chaque moment passé était la chose la plus savoureuse au monde.
Ravalant sa fierté, et sa langue, il plongea son regard dans celui du barbu. Non pas menaçant, mais neutre, dénué de la moindre expression, puis alla reprendre sa place. Plus un mot ne sortirait de sa bouche, en tout cas pas tant quon ne se soit adressé expressément à sa personne. Au final, le barbu devrait faire avec lui. « Prie pour que je ne sois pas rancunier » se dit-il « Autrement je risque bien de devenir le traitre que tu maccuse dêtre. »