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[RP] Ma pauvre muse, hélas ! qu'as-tu donc ce matin ?

Lanceline.


~ Jour douze. ~
    « Ouais. C'était encore une putain de bonne idée, ça. »
    Lanceline devenant vulgaire car ayant l'impression qu'on l'a prise pour un pigeon, Eauze.

Personne.
Vraiment personne.
Hier, la journée avait été animée -enfin plus ou moins-. Un homme très -trop- enthousiaste. Une brune qui ne pipait pas un mot et était repartie aussi silencieusement qu'elle était venue, et un sorcier. Qui disait lire « sa fiche de profil ». Et avait résumé son caractère en ceci : le teint sérieux et le regard méfiant -le Limousin-, brune (les cheveux), sérieuse, très rigide -la Gascogne-, pleine de vie, mais bornée comme un âne -l'Armagnac-... et bientôt le teint blafard, pâlot -la Guyenne-. Mouais. C'est dingue tout ce qu'on pouvait lire dans sa cicatrice. Bientôt, on y prédirait l'avenir « Ah nan madame, désolée, votre couple bat de l'aile il s'est cassé sans vous le dire. Comment ? Ah ouais, il a mis votre sœur enceinte, au passage. Ah bah il vous l'a pas dit ? C'est ballot ça. Cent écus. Cent-cinquante et je vous en dis plus ». Bizness is bizness.
[1]
Et enfin. Elle avait vue sa sœur. Qui allait on ne peut mieux. Tant mieux. La Balafrée respirait de soulagement. Elles avaient évoqué rapidement la bataille qui l'avait mené à être dans cet état.

Mais aujourd'hui... Personne. Vraiment. C'en devenait inquiétant. Le silence était pesant, à croire que tout était mort. Mais peut-être était-ce annonciateur d'une mauvaise nouvelle ? Allons, Lanceline. Ne doute pas.

Ce non-bruit (qu'il en était assourdissant !) avait été troublé par un cavalier qui avait fini par la retrouver. Le même que celui qui était venu à elle quelques jours auparavant.
Suspicieuse, elle avait regardé la boîte, l'ayant légèrement soulevé pour constater que c'étaient en effet des biscuits.
Et la lettre. Sans hésiter elle l'ouvrit. Fronça les sourcils. Visiblement il n'était pas dans son état normal quand il l'avait écrite. L'écriture était penchée -trop peut-être ?- et il manquait la fin d'une phrase. Étrange. À moins que ce n'était là un moyen pour lui d'instaurer un nouveau jeu. À elle de deviner ou de mettre les mots qu'elle voulait après. Et, là, elle voyait surtout, après ce « vos mots » suspendu dans les airs, une abeille multicolore en train de danser et chanter « kikiki le petit kiwi ». Et pourtant elle n'avait rien bu d'autre que la tisane. Mais c'est là tout ce que lui inspirait la situation.

Elle releva la tête, ayant cru entendre un bruit. Un chien qui hurlait à la mort, au loin. Elle frissonna. Rien ni personne ne bougea.

Mais au moins, elle avait du temps pour écrire.


Citation:
Mon oie-sive.

    Je serai à Auch vendredi. En espérant t'y voir. C'est bête pour la chemise, j'en avais une mais quelqu'un me l'a achetée. Deux cent écus, tu te rends compte ? Il y a vraiment des désespérés.

    Spirit est très gentille. Elle n'est pas vraiment orpheline, en fait. C'est juste que son père a eu quelques difficultés ; mais tout est réglé désormais.

    Promis je ne touche plus à tes oies. J'avais oublié leur caractère sacré.

    Arnaut m'a envoyé une nouvelle lettre. Avec une boîte de biscuits. S'il croit m'acheter, c'est raté. J'ai appris aujourd'hui par sa cousine qu'il arrivait à Dole demain. Tu te rends compte. Il a mis au courant sa cousine et un ami, mais pas sa fiancée. J'ai vraiment l'impression de n'être qu'un objet pour lui. Si je voulais verser dans le dramatique, je te dirais même qu'il ne me considère que comme un outil pour faire des gosses, qui ne mérite guère plus d'attentions que cela Pour preuve ? (Mais en est-ce vraiment une ?) Il ne finit pas ses phrases. Il m'écrit des mots mais les laisse en suspend. Quel homme ferait cela à sa fiancée, sinon pour lui montrer qu'il ne pense pas vraiment à elle même quand il lui écrit ? J'ose espérer que je suis un peu plus haute dans son estime, tout de même. Sinon ce serait un sacré coup pour mon ego.

    Je m'ennuie. Je n'aurais pas dû venir à Eauze. Je vais repartir, je crois. Loin. Je ne sais pas où. Qui vivra, verra.

    Je t'embrasse. Passe le bonjour à tout le monde.

    Lanceline.


Elle lorgna la lettre d'Arnaut qui était à côté, ainsi que le coffret. Elle l'ouvrit, prit un biscuit et le renifla en plissant ses yeux. Et puis elle le reposa à sa place, à côté de ses confrères d'infortune.

Bon. Et maintenant ?


[1] Le travail, c'est le travail.

_________________
Spirit_a.
~ Jour X ~

Au lieu de touches blanches et noires, de l'encre et du papier ; en guise de partition, la vie : les Von Zweischneidig écrivent leur journal comme deux pianistes installées devant le même clavier pour jouer à quatre mains.
Inspiration brutale de JD Ernst

Et elle fait partie de ce journal. Lanceline de Valdesti. Ce journal momentanément transformé en un simple vélin. En une unique missive que la môme regarde son père rédiger sous ses yeux.

Tout s'était déroulé hasardeusement. La petite blonde avait rencontré la grande blonde quelques semaines auparavant. Une certaine affection était née. Comment pouvait-on être imperméable au charme de la gentille Lanceline ? Elle trouvait en elle un peu de tendresse et d'attention qu'il lui manquait. Et très vite, Spirit s'était persuadée que Lanceline avait besoin d'elle, au moins autant qu'elle avait besoin de Lanceline. Et le fait qu'elles se retrouvent toutes deux abandonnées, délaissées au même moment avait renforcé cette croyance, et ce petit lien qui les unissait. A présent, Lanceline faisait partie de sa vie, et la gamine était bien décidé à faire en sorte qu'elle en fasse partie pour toujours. Lanceline serait sa marraine devant le Très-Haut, et personne n'avait son mot à dire là-dessus.

La séparation des deux blondes avait été un peu brutale, car imprévue. Elles s'étaient dit au revoir, tard le soir, avec un peu d'émotion malgré tout. Spirit s'inquiétait de laisser Lanceline seule. Surtout en ce moment. Elle faisait au mieux, quand elle était près d'elle pour défendre Arnaut - qui l'eut cru ?! Envers et contre tous. Elle avait même commencé à clamer haut et fort qu'elle l'aimait bien et qu'elle serait ravie qu'il soit son parrain. Il ne faut pas toujours chercher à comprendre la psychologie des enfants. Elle l'aimait bien parce qu'il était franc et que ses mots étaient crus. Elle l'aimait bien parce que Lanceline l'aimait et qu'elle n'avait jamais vu la balafrée aussi triste que depuis qu'il n'était plus là.

Le lendemain du départ, la môme se leva tôt, et, comme à son habitude, déboula dans les escaliers, les cheveux en pétard, les pieds nus, et quelque peu débraillée, en appelant - encore dans le brouillard - sa 'Line ! Qu'elle ne trouva pas. A sa place trônait Môsieur Ernst Von Zweischneidig, son père. Spirit s'arrêta net en bas des escaliers. Elle fixa un instant son père avant de regarder tout autour d'elle, un peu perdue. Le réveil était difficile, et elle se mit presque à penser qu'elle rêvait encore. Mais dans ce rêve, il manquait une femme.


- 'Line ?! 'LINE !!

Et Ernst de se lever de sa chaise, et de s'approcher de la tornade blonde qui lui sert de fille. Délicatement, comme à son habitude, il s'accroupit devant elle, pour se mettre à sa hauteur. Une main vint chercher celle de sa fille, et le regard paternel reste posé sur elle un instant. Jusqu'à ce qu'avec le plus grand calme et le plus grand sérieux du monde :

- Tu peux m'appeler papa si tu veux hein. Tsouin, tsouin, tsouin tsouiiiiiin. Regard désabusé de Spirit qui garde le silence en faisant une petite moue sceptique. Qui permit à son père de reprendre : - Elle revient dans une semaine. Tu veux un verre de lait?

En silence, la môme glisse ses bras autour du cou de son père. Un calin parce que c'est pas juste de se réveiller le matin et de constater que 'Line nous manque déjà ! Mais le verre de lait est accepté. Et son père l'emporte vers le comptoir pour commander le dit verre de lait. Qui est accompagné d'une missive. Retour sur la chaise, et une Spirit trônant royalement sur son père lui servant de fauteuil - ou le fauteuil lui servant de père ?! - qui retrouve soudainement sa verve habituelle.

- C'est quoi ?! C'est qui ?! Dis, c'est qui ?! C'est Einar ?

Heureusement que son père est patient. Vois-tu Spirit, c'est une missive. Tu le sais non ? Tu es blonde mais tout de même ! D'ailleurs, tu ferais bien de lui laisser le temps d'ouvrir la dite missive pour qu'il puisse te répondre. Tiens, pendant qu'il œuvre à cela, boit donc ton verre de lait goulument en silence.

- Tu vois? Il suffit de parler de Lanceline pour en voir .. Heu ... La lettre.
Dans la famille blonde je demande... Le Père ET la Fille !
- C'est 'Line ?! Elle dit quoi ?! Elle dit quoi ?! Tu m'la lis !!

En somme, le verre de lait fut bu, la missive lu, et le silence disparut. Il fallait lui répondre, et ils le feraient, sauf que, pour le moment, le père et la fille allait profiter d'être un peu ensemble, rien que tous les deux. C'était rare que Spirit puisse avoir son père pour elle seule. Et elle était bien décidée à en profiter, et à l'obliger à se faire pardonner pour l'absence trop longue qu'il lui avait imposé. Ils passèrent la journée ensemble, et le soir venu, la môme alla se changer dans sa chambre, juste le temps de jouer un instant avec Espérance - sa précieuse poupée - et de redescendre pour constater une visite surprise qui lui volait déjà le privilège du duo seul au monde. La réponse à Lanceline fut donc reportée de quelques jours jusqu'à ce qu'un matin...

PAPA !!! faut écrire à 'Line !!!
Oui, viens, on va le faire ensemble.


Et Ernst entreprit donc de rédiger la dite réponse à la missive Lancelinienne, demandant parfois confirmation à sa fille. Réponse qu'il lu à Spirit dès qu'il eu terminé. Ou pensé terminer. La gamine réfléchit un instant en marmonnant un "hum", avant de regarder son père avec un petit sourire angélique et de balancer :

Faut lui dire qu'elle me manque aussi. Et que j'ai hâte qu'elle revienne. Et que si elle y pense et tout, faut qu'elle écrive à Arnaut pour lui demander s'il veut bien être mon parrain. Et... Voilà.



A vous, Lanceline de Valdesti ;
De nous, Spirit et Ernst au-nom-qui-s'éternue

Changer de nom? J'avoue que la difficulté de prononciation de notre nom de famille en fait tout son intérêt. Il est même assez plaisant de s'en amuser. Spirit a une bonne technique pour le prononcer. Je suppose que cette technique doit être valable à l'écrit. Ca donne quelque chose qui ressemble à "Yvonne j'vais chez Digue", je crois. Spirit me le confirme, c'est bien cela. Je trouve, quant à moi, la prononciation peu approchante ceci-dit.

Nous sommes ravis de savoir votre voyage sans encombre. Nous souhaitons un prompt rétablissement à votre soeur. Agen est une ville assez animée, vous vous méprenez. La famille von Zweischneidig y met beaucoup d'ambiance.

J'ai le regret de vous annoncer qu'il semble que votre fiancé ne soit pas encore apparu. Bien que ne l'ayant jamais croisé, je fais confiance à Spirit et à son sens de l'observation. Vous me direz, un visage inconnu à Agen, je l'aurais probablement remarqué, vu l'affluence.

J'ai embrassé Spirit pour vous. Elle vous embrasse en retour.

Les von Zweischneidig

PS : Spirit me demande de préciser que vous lui manquez. Elle a hâte de vous revoir. Elle demande, également, s'il vous serait possible de contacter votre fiancé afin de confirmer, ou pas, ça présence en tant que parrain.


Ainsi la missive fut-elle envoyé à Eauze.

RP rédigé à trois mains : les deux miennes et une seule pour le feignant JD Ernst !

_________________
Lanceline.

~ Jour quatorze. ~
    « Y'a plus d'ambiance ici, j'me casse ! »
    Lanceline.

Aah, Eauze. Ses déserts, ses silences, ses fous. Car la Blonde en était désormais persuadée. La ville était peuplée de fous. S'il y avait bien un patelin à éradiquer, c'était celui-ci.
Il y en avait un particulièrement qu'elle rêvait de voir brûler sur le bûcher. Mais son rêve ne s'accomplirait pas, ou seulement quand elle serait dans les bras de Morphée, tranquille.
Il débitait des choses sans queue ni tête. La Valdesti se disait qu'il gèlerait sur l'astre lunaire. Et elle l'espérait fortement.

La veille, il y avait eu dispute avec sa sœur. À propos d'Arnaut -qui d'autre ?-. Elle-même s'était vue traitée d'idiote. Charmant de la part de son sang.

Alors elle s'était isolée pour répondre à quelques lettres. Hireo d'abord, juste quelques mots.


Citation:
J'espère que le tapis rouge est prêt. Ou, à défaut, une chope de bière, une fois n'est pas coutume. Mon voyage est avancé, j'arrive demain.


Puis les Von Zweide... Ahem.

Citation:
À vous, famille Yvonne j'vais chez Digue réunie,
De moi, Lanceline de Valdesti.


    Va pour cette écriture. Qui s'en rapproche, si on n'y prête pas très attention. Ne vous en faites pas. Je trouverai bien quelque chose qui vous satisfasse tous les deux.

    Je reprends la route ce soir. Ma sòr va mieux, les médecins disent qu'elle en a encore pour une vingtaine de jours à souffrir de ses blessures.

    Dans quelques jours je serai à Agen. Si tout se passe bien.

    Il est fâcheux que mon fiancé n'ait pas reparu. Toutefois, si j'en crois les rumeurs -qui sont de source plus ou moins fiable-, il est à Dole en ce moment même. Ou en est reparti il y a peu.

    Quant au parrainage, je préfère lui demander de vive voix.
    Les lettres sont toujours plus impersonnelles.

    À très vite.

    Lanceline.


La lettre était envoyée. Sur le parchemin voisin, des esquisses de ce que sa main se rappelait d'eux. Quand elle fermait les yeux, elle les voyait... Ensemble.
Sourire.

À Arbeles, maintenant.


Citation:
Quel bout ? Je suis étonné que vous me posiez la question. Je ne puis que vous souhaiter d’en tenir le bon, bien évidemment. Comment pourrait-il en être autrement, lorsque l’on ne veut le meilleur pour ses amis ( ?) ?

J’ai effectivement vu le nom d’Arnaut sur le panneau d’affichage de la mairie de Villefranche, cependant, ce jour-là, malgré ma très grande et abusive présence en taverne, je ne l’ai pas croisé, ou peut-être mes excès de boisson auront eu raison de ma vision d’ordinaire acérée.

Il m’avait fait état d’un déplacement pour aller chercher sa sœur et de son passage en Languedoc, lorsque nous nous sommes croisés la dernière fois, à Agen… Après, je n’en sais plus, et ne risque sans doute pas de le voir de sitôt, il doit cavaler alors que moi je me traine à pieds, arrivant, enfin, demain "chez moi".

Je vous dirais bien d’occuper vos mains à autre chose, mais vous verriez encore malice en mes mots, chose dont je suis certes capable, mais qui n’est nullement en mon esprit au moment où je vous réponds. Du tricot, peut-être ? Parait que ça détend.

Arbeles.


Et elle de répondre.

Citation:
Ah, il vous l'avait dit.

Il vous porte plus en son estime que moi. Fort bien.

Je suis parfaitement calme. Et mes mains s'occupent à dessiner plutôt que coudre. C'est une occupation comme une autre.

Je l'attends donc, patiemment.

Êtes-vous bien arrivé chez vous ? Avez-vous trouvé veau, vache, cochon en bonne santé ? Ceci n'est qu'une formule, attention. Je préfère préciser, ne sait-on jamais. D'ailleurs, je ne sais pas. Avez-vous de la famille ? Quelqu'un qui vous attendait avec impatience ?

Lanceline.


Elle enchaîna avec Arnaut.

Citation:
À vous, Arnaut de Bazaumont Noldor.
De moi, Lanceline de Valdesti.


    Mercé pour les Croquants. Ils sont très bons, mais j'en garde pour votre retour. Que vous devriez avoir amorcé, puisque j'ai ouï dire que vous étiez -enfin- arrivé à Dole.

    Vous devez bien peu m'aimer pour que je peuple désormais vos cauchemars qui, cela ne m'étonnerait pas, sont désormais nombreux puisque, selon vos dire, vous pensez sans cesse à moi.
    Si la peur de me perdre est « bien trop grande », je me demande quelle est la qualité de mes mots, pour qu'elle vous semble si effrayante que vous n'osiez l'évoquer par écrit.

    Vôtre.

    Lanceline.


Et voilà, tout était fait. Plus tard, elle écrirait à Ellya. Chaque chose en son temps.

Ses doigts suivirent délicatement le contour des visages dessinés sur le vélin, pensive. Elle hésitait. Les avait-elle bien représentés ?
Bah. Elle verrait bien.

Plus tard, elle remontait à cheval, roula ses épaules, savourant l'absence de douleur à la gauche, et lança sa monture au galop, sans même un regard en arrière. Elle respirait déjà mieux qu'en compagnie de cet étrange homme qui avait fini par reparaître après avoir disparu, montrant par là son échec à prouver qu'il était feu Cosme de Trévière, et qui s'était fait passer pour un illustre inconnu.

_________________
Ernst.
~ Un jour de plus en moins ~
    « Quand les enfants sont assoupis, les parents dansent. »
    Ernst.


Spirit dormait encore. Ernst avait pour habitude de se lever aux aurores. Ce matin-là, en descendant les escaliers, il fut surpris par le sourire que lui tendait le tavernier. Sourire qui était assorti d'une missive, soit dit en passant. Ernst regarda l'homme en se méfiant quelque peu. A vrai dire, le sourire tendu ressemblait à ces sourires que tendent parfois ceux qui pensent être dans la connivence d'un grand secret. Ernst s'approcha du comptoir lentement, en passant la main dans la blondeur de sa chevelure en mode "c'est l'matin, j'fais c'que j'veux". Il prit la missive, commanda une légère collation et alla s'asseoir à une table. Le temps qu'il décachette le pli, le tenancier était arrivé avec un plat chargé de quelques victuailles et lança un léger "héhé" à l'adresse d'Ernst. Après quelques lignes de lecture (surtout les deux premières), le germain compris qu'il s'agissait de Lanceline. Un oeil sur le plat, l'autre sur la la missive, Ernst piochait, grignotait, se souvenait de la jeune femme, tout ça en même temps, dans la joie et l'allégresse. La lettre fut terminée avant le déjeuner.

Ernst se leva et ramena le plateau au comptoir. Sans faire du bruit, ou presque, il monta à sa chambre et redescendit avec son nécessaire d'écriture. Il s'accorda un moment de réflexion afin de mieux revoir le visage de la blonde balafrée puis se laissa porter, plume au vélin.


Citation:
De moi, Ernst von Zweischneidig,
A vous, Lanceline de Valdesti,

Spirit dort paisiblement. Elle ne cesse de parler de vous. Ce que ne me dérange aucunement d'ailleurs. Agen est bien vide. Votre absence se fait sentir bien plus qu je ne l'aurais imaginé. A bien y réfléchir, je me dis que ce n'est pas plus mal si votre fiancé n'est pas là. Au fond de moi, je crois que j'en viens à espérer qu'il ne reparaisse pas du tout.

Je ne sais pas si mes pensées sont bien ou malvenues. Elle ne sont probablement pas des plus courtoises vis-à-vis d'une femme fiancée. Nous nous connaissons à peine, pourtant, vous avez quelque chose de fascinant. Je me sens bien maladroit soudain. Peut-être devrais-je cesser là avant que ma plume ne dérape plus qu'elle ne le fait déjà.

Je vous souhaite bonne route. Nous vous attendons avec impatience, surtout Spirit ... Ou moi, difficile à dire.

Ernst



Le blond sécha, plia, cacheta, et cætera la missive qu'il amena au tavernier. Un nouveau sourire entendu fut échangé. Cette fois-ci, Ernst lança un clin d'oeil à son partenaire de secret. Ca lui suffirait, probablement, à les croire amis. Ernst comptait sur la sympathie de l'homme pour en tirer quelques informations et, à l'occasion, facilités de paiement. On n'est pas négociant de génération en génération pour rien.
_________________
Popsas.





Vous me manquez..

Quelques mots prononcés par le Bazaumont dans un soupire tremblant à la vue du fermail qu'il tenait fermement dans sa dextre depuis déjà plusieurs jours au point de pouvoir s'étonner qu'il ne se soit pas déjà ancré dans la main du malheureux. Voilà à quoi il s'était réduit en laissant sa blonde derrière lui. Il en était devenu tellement dépendant qu'il donnerait sa vie pour protéger ce petit objet circulaire qui était devenu son "précieux". Les mains liés lui rappelaient encore et toujours au point d'avoir cette honteuse et odieuse pensée alors qu'il se trouvait à l'entrée de Montélimar : Je n'en peux plus , je dois retourner près d'elle , si cela se trouve ce n'est même pas ma soeur qui se trouve ici. Bien que ce n'était pas une réelle pensée mais bien des mots qu'il avait prononcé devant ses compagnons de voyage , paroles qui lui ont d'ailleurs valu un regard noir lancé par sa cousine , sans doute outrée par ce cousin qui s'apprêtait à abandonner sa soeur à son sort pour les bras de la Valdesti. Et au-delà de ces paroles qui vont à l'encontre de ses valeurs familiales et du grand amour qu'il porte à sa soeur , ses compagnons voyaient à présent en lui un homme faible , drogué à cause par cette odeur de violette que dégageait la balafrée. Il fallait le voir depuis Rodez , il n'avait plus cette prestance qui le caractérisait , et puis sa façon de chevaucher , il errait juste. De meneur il était passé à suiveur et suivait donc ses compagnons qui le guidaient à travers le Languedoc. Aaah ce chagrin d'amour.

Finalement , tout s'est bien passé. La raison l'emporta de nouveau et il décida de se reposer à Montélimar une journée avant de se rendre à l'hospice du coin et de voir sa soeur allongée sur cette petite couche au milieu de vieux qui attendaient leur heure. Il avait versé une larme qui , en fait se résumait à une goutte d'eau salée qui brillait telle une pierre précieuse tant il était rare de voir le Bazaumont pleurer. C'était sans doute même la première fois qu'un tel liquide se déverse de sa cavité orbitaire. Et encore , si quelqu'un l'avait vu il aurait prétexté la fameuse poussière dans l'oeil à laquelle on ne peut rien faire.

Malgré l'état , plutôt grave de la brunette , il avait décidé de continuer sa route en l’emmenant avec lui , et plus pour s'assurer qu'elle ne parte on ne sait où -comme si- que par raison pratique , il la transportait sur son cheval. Et il appréciait énormément cette proximité avec sa soeur , collée à lui , il ressentait de nouveau sa chaleur et se laissait volontiers aller à la nostalgie en se remémorant sa petite jeunesse dans le château de son oncle , jouant avec sa soeur , et à l'époque déjà , il prenait son rôle de protecteur très au sérieux et ne retenait pas ses pains qu'ils offraient aux fils des paysans qui osaient l'approcher , elle sa soeur. Ceci dit , il n'avait pas changé à l'exception qu'il ne faisait plus aucune distinction sociale , il réglera son compte plus tard au petit noble rouergat.



Citation:
À vous , Lanceline de Valdesti.
De nous , Arnaut de Bazaumont Noldor.



    Je vous aime.

    Je pense qu'il n'y a pas meilleure manière de débuter une lettre qui vous est adressée que de vous dire , que je vous aime.

    Je ne terminerai pas cette missive par dire que vous me manquez puisque depuis ce courrier que vous m'avez fait envoyer non loin de Rodez , j'ai cette peur que notre bel amour se termine ainsi. Alors , je vous le dit entre ces mots , vous me manquez. Et cela ne s'arrange pas. Je ne serai apaisé que lorsque je vous reverrai , que lorsque je pourrai vous toucher , et lorsque mes lèvres auront rejoint les vôtres.

    Sachez que j'ai revu ma soeur. Il faut croire que c'est la prière qui l'a sauvé tant ses blessures sont graves. C'est donc à vous et vos prières quelle doit son salut. Mais je ne peux m'arrêter là et revenir. Son état m'inquiète toujours et je dois la présenter à des médicastres de renommée et je les trouverai à Dole.

    A l'instant où je vous écris cette lettre je me trouve à la frontière du Saint Empire et de Royaume beaucoup moins saint. Et lorsque vous la recevrez je serai déjà sur le chemin du retour , à quelques jours de vous retrouer. Du moins si nous ne faisons pas de mauvaises rencontres. Avec ma soeur blessée nous avançons moins vite que d'autres voyageurs et de ce fait nous faisons figure de bonne cible pour les brigands. Mais j'ai foy. Je vous reviendrai sain et sauf puisque telle est la volonté du Très Haut que de nous voir unis.

    Quant à l'amour que je vous porte , je vous prie de cesser d'en douter , s'il vous plait. Je vous aime comme aucun homme de ce temps ou d'un ancien temps n'a jamais aimé. Il y a des choses que je ne peux vous dire à travers cette encre. Je ne veux pas que des mots soient mal interprétés sans que je puisse avoir à la justifier et ce avant qu'il ne soit trop tard.

    Je fini cette lettre en posant de nouveau ces mots qui me font tendre les lèvres à votre simple évocation.

    Je vous aime.

    Je suis vôtre à jamais ,

    Vôtre époux en devenir.

    Arnaut.


De nouveau la terre effritée dans la senestre du muscadin tombait lentement sur la lettre enracinant pour toujours l'encre sur le bout de papier , décidé à l'envoyer à fiancée après avoir pris connaissance de la lettre qu'elle lui avait fait parvenir.

Une fois la lettre remise à son homme de main qui ne montrait aucun signe d'agacement devant tous ces allers-retours avec pour seul repos et pour seule alimentation la radinerie de son maître qui ne semblait pas se soucier de son état. Lui qui était déjà fatigué par ce voyage qui n'arrivait qu'à sa moitié , il aurait pu tout de même plaindre ce pauvre Factotum qui avait fait quatre fois cette moitié de voyage. Non , pas même un soupire compatissant.

Adossé à un tronc d'arbre il laissa apparaître un sourire timide , plongeant ses yeux ébène dans les flammes qui dansaient devant lui , se remémorant la discussion qu'il a pu avoir , deux jours avant cela à Lyon tant que Factotum , lui partait rejoindre la Valdesti.


_________________
Lanceline.

~ Jour seize. ~
    Cauchemar : (ancien français caucher, presser, du latin calcare, et germanique mar, démon) État qui finit par un réveil en sursaut après une anxiété extrême. Par extension, tout rêve effrayant.
    Le Littré.

    « Tu vas répondre, oui ? »
    « Je... Je ne vois pas de quoi vous parlez. »


    La gifle retentit. La Blonde hoquette de stupeur. La lumière vive est dirigée dans ses yeux. Elle commence à pleurer, à supplier.

    « Pitié... Je ne comprends pas... »
    « Eh bien ça peut s'arranger. »


    Nouvelle gifle, plus forte que les précédentes. Elle sent un liquide chaud s'échapper de son nez. Instinctivement elle y porte sa dextre, regarde à travers le voile posé sur ses yeux. C'est bien du sang.

    « Qu'est-ce... Qu'est-ce que j'ai fait... ? »
    « Rien encore. Justement. Mieux vaut prévenir. On. Veut. Savoir. »
    « Savoir quoi... ? »
    « Ce que tu comptes faire à leur sujet. »


    Elle veut les voir, ses détracteurs ; mais elle ne distingue rien qu'une ombre à cause de la lumière trop forte. D'ailleurs, comment est-ce possible que ce soit si violent ? Ont-il réussi l'exploit de soumettre le soleil ?

    « Où... Où suis-je ? »
    « Peu importe. »


    La silhouette attrape le menton de la Valdesti, le relève vers elle. Au loin une porte claque, des pas retentissent sur le sol.

    « Tu comptes leur répondre ? Et quoi ? »
    « Mais à... À qui... ? Je vous en prie... »
    « Non volontaire pour répondre aux questions. Je vais te passer sur le billard, moi, on verra si tu es toujours aussi peu loquace. »
    « Sur le... ? »


    Soupir. Les pas sont plus proches.

    « À la Question, si tu préfères. »

    Gémissement de la Blonde. Les pas s'arrêtent, elle entend un léger chuchotement sans percevoir pourtant ce qui se dit. Soupir de l'interrogateur(trice ?).

    « Et vous pouviez pas le dire plutôt qu'il y avait incohérence temporelle ? Bande d'incapables. »
    « ... »
    « Enfin, oui, bien sûr, le temps lévanesque. Enfin ! Je suppose qu'elle saura bientôt. Ou pas. Parce que vu comme c'est parti, c'est pas gagné. »


    L'ombre approche sa tête de la Balafrée et lui murmura :

    « Ça ira pour cette fois. Mais méfie-toi. »

Elle ouvrit les yeux, haletante, se demandant où elle se trouvait. Que s'était-il passé ?
Ses noisettes se voilèrent pour réapparaître. Lentement elle se redressa. Quel rêve affreux. Effrayant.
L'avertissement résonnait encore à ses oreilles. Se méfier ? De qui ? De quoi ? De ces horribles personnages ?
Elle se passa une main sur le visage. Elle était arrivée tôt à Lectoure et avait filé directement dans son vieux chez-elle, au cinquante-sept, quartier de la fontaine Diane. La porte était toujours ouverte. Personne ne s'y était aventuré jusque-là. Fermant les yeux pour ne plus voir les fantômes, elle avait rejoint sa couche aussitôt le seuil passé. Vêtue de sa simple chainse ainsi que de la chemise, elle descendit à pas lents les petits escaliers de bois. Elle remit en ordre sa longue chevelure blonde.
Elle n'avait pas faim. Le cauchemar l'avait chamboulée. Se méfier de qui ? De quoi ? Pourquoi ? Qu'est-ce qu'ils lui voulaient ? Répondre quoi, à qui ? Comment ?

La réponse, ou plutôt
les réponses à toutes ces questions -et aux lettres précédemment envoyées- arrivèrent, comme de par hasard, en même temps.
Hagarde, elle lut la première lettre. Elle fronça les sourcils, se demandant bien pourquoi Arnaut avait pris la peine de changer son écriture et pourquoi il parlait de lui à la troisième personne du singulier. Sans trop comprendre elle passa à la seconde, qui lui parut plus familière point de vue graphisme. Elle eut un léger sourire amusé qui disparut bien vite. Barbouillée. Oui, c'était cela, elle était barbouillée. Elle délaissa les missives, se dirigeant vers le baquet d'eau qu'elle avait abandonné quelques jours plus tôt -aucune chancissure encore en vue pourtant-, y plongea les mains puis le visage entier. Elle resta comme cela quelques instants, agenouillée près de la cuve en bois, yeux ouverts, fixant un fond qu'elle ne pouvait voir.
Et puis elle refit surface, attrapant à l'aveugle un essuie pour se sécher.
La Valdesti secoua la tête, avant d'aller s'asseoir à la table qui trônait au milieu de la pièce.

Côte à côte.

Les deux lettres étaient côte à côte. Relisant la première en fronçant les sourcils -pourquoi Arnaut lui en avait-il écrit deux ?- elle comprit.

Ernst.

Qui était resté à Agen. Et qui avait dit qu'il l'attendrait. Drôle de situation. Elle regarda tour à tour les lettres côte à côte. D'un côté, celle où le blond faisait un pas vers elle. De l'autre, celle où le brun réaffirmait sa possession. Son
droit (et pourtant il ne répondait pas à sa question). Il suffisait de le voir aux deux dernières formules écrites : « Je suis vôtre à jamais » ; « Votre époux en devenir ». La Blonde avait envie de lui demander quand cela serait. Un jour, peut-être. À la mort d'un Roy qui semblait s'accrocher à son pouvoir comme des sangsues à un corps bien portant.
« Méfie-toi ». Était-ce en rapport ? Faisait-elle des rêves prémonitoires ? Elle frissonna.


Citation:
À vous, Ernst von Zweischneidig,
De moi, Lanceline de Valdesti.


    Vous dites cela, assurément, parce que votre fiancée est loin. Je ne doute pas que vous en ayez une, le contraire serait curieux.
    Peut-être aussi parce que vous pensez Arnaut indigne de moi ?

    Je suis curieuse de connaître vos motivations...

    Lanceline.


Quant à Arnaut... Eh bien, elle le ferait attendre un peu. Après tout, elle avait bien attendu quatre jours un signe de vie de sa part.
Oui, elle pouvait être rancunière, des fois. Surtout en ce qui le concernait, lui.

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Ernst.
~ Quatre mots sur un vélin ~

Pas de tavernier ce matin-là. Quand Ernst descendit, de bonne heure comme à l'accoutumée, il ne vit rien d'autre que deux plis posés sur le comptoir, à côté du repas qu'il commandait chaque jour. Le blond s'occupa, dans un premier temps, de sa collation. Les lettres attendraient. Seules deux personnes lui écrivaient ces derniers temps. Dans les deux cas, il redoutait plus qu'il n'espérait de réponse. Le plateau terminé, il le reposa à sa place. Il pris sa respiration et se saisit des missives avant de retourner s'asseoir. Il hésita. Les cachets ne laissaient aucune place à la surprise. La première lettre fut longue à lire, la réponse presque un déchirement. Il connaissait le poids de certains mots. Il savait que rien de tout cela ne serait sans conséquence. Ils ne se reverraient probablement pas, peut-être jamais. Cela faisait beaucoup d'éventualités, de suppositions, d'inconnues. Sa mâchoire se serra imperceptiblement. Il y a des moments dans la vie où un homme est confronté à des choix. Le choix d'Ernst était pénible mais en était-il vraiment un? Ne s'agissait-il pas, plutôt, d'une évidence? Instinctivement, il tourna le regard vers les escaliers. Spirit. Elle était son évidence. Dans un spire plus long qu'il ne l'aurait souhaité, Ernst cacheta la première des deux missives qu'il avait à envoyer.

La seconde était plus évidente. Un léger sourire éclaira son visage.

- Lanceline.

Plume, encre et vélin se mêlèrent dans une réponse monochrome.

Citation:
De moi, Ernst von Zweischneidig,
A vous, Lanceline de Valdesti,

Une fiancée? L'idée est assez plaisante. Elle aurait pu être vraie. Vous aurez compris qu'elle ne l'ai pas. Vous trouverez donc cela curieux. Je trouve curieux que cela puisse vous interpeller. Aurais-je donc quelque chose de si plaisant que me savoir célibataire soit surprenant?

Je ne connais pas votre fiancé. Je ne me permettrais pas de le juger. J'ai toutefois un avis sur la situation. Je répondrais à votre question par une autre. Est-il digne pour homme d'abandonner la femme qu'il aime aux tourments de l'attente? Comme je le répète, je ne le connais pas. Je ne connais pas les raisons de votre séparation, fut-elle temporaire. A vrai dire, je ne vous connais pas non plus. Je ne sais de vous que le son de votre voix, votre sourire. Je ne peux que deviner le grain de votre peau, le goût de celle-ci ainsi que tout le reste. Tout ce qu'on ne dévoile qu'à l'être élu.

Mes motivations? Je connais certaines personnes qui vous affirmeraient qu'à part le bien-être de ma fille, je ne veux rien. Ce n'est pas l'exacte vérité, bien que ça n'en soit pas dénué. Vous connaissez Spirit. Vous connaissez probablement une partie de son histoire. J'imagine que ça doit suffire à vous donner une bonne image du but que je me fixe quant à son bonheur. En ce qui concerne mes motivations à votre propos, j'aurais tendance à dire que je ne vous veux que du bien. Je vous laisse apprécier les sens que l'on peut donner à cette phrase. Je ne me vois pas comme un briseur de couple, aussi éviterais-je d'être trop entreprenant. Si cela est encore possible.

J'ai appris, un peu à mes dépends, qu'il y a des choix qui ne dépendent que d'une seule personne. On se retrouve, par moments, à devoir définir sa propre route, son propre chemin de vie. De ces décisions dépendent, bien souvent, le destin d'autres vies que la nôtre. Cela peut être effrayant. L'inconnu l'est toujours. Faire un pas en avant, quelque soit la direction, c'est plonger un peu plus vers cet inconnu. Quand tout ceci doit régir l'ensemble d'une vie, voir de plusieurs par ricochet, les décisions sont loin d'être évidentes.

Quelle que soit la voie que vous déciderez de suivre, je ne peux que vous souhaiter le meilleur du monde. Si vous me trouvez énigmatique, je serais là demain à vous accueillir. Vous aurez toute liberté de m'interroger ... Avec douceur malgré tout, si possible.

A demain,

Ernst



Les lettres partiraient dans la foulée. Quelques écus bien placés peuvent faire des miracles.
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Popsas., incarné par Lanceline





Une seule journée avait suffis au Bazaumont pour récupérer ses coffres et pour mettre quelques affaires en ordre dans la capitale comtoise. La capitale , toujours fidèle à elle même , calme , très calme. C'était une chance ce silence qui régnait en maître dans les tavernes doloises , malgré tout. Il pouvait se reposer avant de débuter son travail nocturne , oui oui , mais au début il ne le savait pas ça. Il a eu la surprise le soir venu , donc , lorsqu'il a fallu qu'il tienne deux chandelles à deux couples. Le premier était celui d'une bonne connaissance dont il n'avait plus de nouvelles. Et bah , elle était mariée. C'est le genre de nouvelles que l'on généralement aux amis , même lorsqu'ils n'ont pas été invités. Le second , bien plus intéressant puisqu'il avait réussi à agacer le brun. Son cousin , frère jumeau d'un cousin dont il était très proche qui se faisait mener par le bout du nez par sa fiancée , imposée. Du moins c'est ce qu'Arnaut a pu analyser. C'est ça , il s'est bien fait chier. Bien qu'il a su apprécier le fait de revoir deux personnes en particulier. Les seules qui avaient de quoi payer à boire , en fait. C'est dire à quoi tient son attachement à une partie de ce qui faisait son passé.

Le départ ne s'était donc pas fait attendre , sans aucun regret , d'autant plus qu'il était maintenant sur le chemin du retour pour retrouver sa moitié. Elle ne cessait de faire des apparitions partout où il posait les yeux , elle le hantait. Deux jours après son départ de Dole , deux jours après le début d'une nouvelle errance sur les routes , il avait pris la décision d'offrir du repos aux hommes , mais avant tout aux montures qui commençaient à perdre le rythme , pas sûr qu'il retrouvera sa fiancée avec ces cheveux là. La mort guette.
Et ce tronc là aussi guette. Il parlait pas , mais guettait , petit gland allait être son seul compagnon puisqu'il avait décidé de s'isoler du groupe , trouvant la compagnie des autres ennuyante. Oui , elle lui manque. Au point de la voir dans les flammes qui dansaient devant lui , réussissant même à lui extirper un large sourire.


Oui mon amour.

Il commençait légèrement à délirer , se faisant une conversation avec sa fiancée qui , d'après lui , lui demandait de narrer son petit séjour à Dole. Fallait il voir la dedans la culpabilité d'une promesse non tenue ? Il se rattrapera , il lui fera visiter l'Empire si elle l'attendait toujours à son retour. Il faut dire qu'elle lui a foutu la frousse avec sa menace de lui faire vivre ce que , elle , vit , abandonnée. Sa dextre allait encore avoir du travail , elle allait s'agiter de nouveau. Pour écrire la lettre , hein.

Citation:
À vous , Lanceline de Valdesti.
De nous , Arnaut de Bazaumont Noldor.



    J'ai quitté Dole et comme annoncé dans le précédent courrier , je suis sur le chemin du retour. Je serai demain à Lyon et de là , je vous ferai envoyer ce courrier.

    Je suis seul , posé sur un tronc d'arbre avec pour seule compagnie un petit feu de camp. Je ne vous dis pas cela pour me faire plaindre mon aimée , mais depuis plusieurs jours déjà , il m'est difficile de partager un moment de repos avec quiconque. A chaque arrêts mes compagnons se désaltèrent avec les boissons locales que l'on a pu acheter au passage d'un marché , et ils rient. Mais je n'arrive pas à partager leurs rires , ni mêmes leurs sourires. Vous n'êtes pas là , je n'ai pas le coeur à cela.

    Il y a deux jours de cela , à Dole , j'ai revu une amie avec qui je n'étais plus vraiment en très bons termes. Nous avons discuter et tout est de nouveau entrer en ordre. Cela aurait pu me réjouir , mais je n'ai su exprimer cette joie. Le temps que j'ai passé sans avoir de ses nouvelles , elle , elle l'a passé à se marier. Elle semble heure , et j'aurai du m'en réjouir. Mais rien , je n'ai su exprimer une joie sincère. J'ai revu mon cousin , Elias , le frère de Félix Auguste , et j'ai appris par la même occasion qu'il était fiancé. Là encore ma réaction n'était pas digne. J'ai passé ma soirée à Dole en taverne avec eux et pourtant je ressentais comme un vide autour. Bien qu'ils discutaient en élevant la voix à plusieurs reprises , je n'entendait que du brouhaha. Je repensais à ces soirées que l'on passait , à deux , dans des tavernes semblables et je n'ai pu rester plus longtemps en taverne.

    A ce moment là , une chose s'est passée , un sentiment nouveau m'a traversé l'âme sans que je puisse dire ce que c'est. Je sais juste que mes paroles , sincères , sont mis à la rudesse de la pratique : je ne puis vivre loin de vous. Parce que , oui , je ne vis plus. Je prend nul plaisir dans ce voyage , je ne suis qu'un tas de chair qui se déplace sur un cheval au bord de l'agonie , tant il a galopé.

    Ma douce , je serai bientôt auprès de vous , je pourrai de nouveau vous serrer dans mes bras , et j'ose espérer que vous me pardonnerez ce départ dont mon amour ne lui trouve plus d'excuses.

    Pardonnez , mon aimée , parce que qu'une fois cette lettre lue , je serai en train de chevaucher en terres d'Auvergne.
    Je vous aime.

    Je vous embrasse avec tendresse ,

    Tout mon être vous réclame.

    Arnaut.


Et comme une promesse qu'il souhaite honorer , une fois le sol lyonnais foulé , il déposa quelques écus dans le pigeonnier du coin et le courrier était parti , vers l'infini et au-delà.

Il profita de ce retour dans cette capitale qu'il a appris à apprécier pour se débarrasser des carcasses qu'il avait promis à un boucher du coin et puis surtout pour faire cette rencontre. Une rencontre qu'il qualifiera d'intéressante. Il a pu se faire passer pour un cannibale et effrayer quelques voyageurs qui passaient dans cette taverne où seule la tisane coulait à flot -Si c'est pas honteux..-. Les longues heures passées avec Axelle a faire l'idiot lui auront valu un index entaillé , puisque madame ne voulait pas se faire trancher la gorge. Il avait profité de cet petit accident sans incidence pour se faire plaindre et goûter au sang enivrant. Une expérience comme une autre en somme. Et cette fois , le départ s'est fait avec un léger regret et une promesse d'échanges épistolaires.


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Lanceline
~ Jour dix-huit. ~
    Elle attend que le monde change
    Elle attend que change les temps
    Elle attend que ce monde étrange
    Se perde et que tournent les vents
    Inexorablement, elle attend

    Jean-Jacques Goldman, Elle attend.

Peinture. Amour. Encre.

Citation:
À vous, Arnaut de Bazaumont Noldor,
De moi, Lanceline de Valdesti.


    Je vous attends.

    À mon tour de débuter cette missive. Et quoi de mieux que de vous dire ce qui est ?

    Je suis heureuse pour votre sòr, heureuse car je sais que, par ricochet, vous aussi allez sûrement mieux. L'inquiétude a dû quitter vos yeux et vous m'en voyez ravie.
    Dans votre dernier pli, vous ne m'en parlez plus. « Pas de nouvelles, bonnes nouvelles », comme l'on dit. Je préfère y lire entre les lignes ce dicton plutôt qu'un autre. Si vous ne m'en parlez pas, c'est que les médicastres l'ont dit tirée d'affaire. Tant mieux ! Car ce qui fait son bonheur et le vôtre, fait donc le mien également.

    Dans la première lettre que vous m'aviez écrite, vous aviez évoqué ce lien qui faiblissait. Je constate avec peine que, malgré ce que je vous avais écrit, ce n'est pas le cas. Il ne vous rend pas plus fort, plus sûr de cet amour que nous avons en commun. Et comme je vous l'avais déjà écrit à l'époque, ce devrait être le cas pourtant.

    J'ai hâte de vous voir.

    Je vous attends.

    Lanceline.


« Vous connaissez les deux manières de faire rougir une femme ? Une droite, et une gauche ! » [1] Mais qu'est-ce que ça venait faire là, ça ?

[1] Jérémy Ferrari.

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Popsas., incarné par Lanceline


    ~ L'amour , ça crains ~


Là. Une nouvelle ville , une nouvelle taverne.


Il se disputait encore avec la même personne , toujours sur le même sujet et toujours sans trouver d'accord pour y mettre fin. Il le savait , demain , ce sera la même histoire , juste une autre ville et une autre taverne. En chemin , il se refusait de lui parler , ou de parler tout simplement. Emilliane. Lanceline. Pourquoi les deux femmes qu'il aimait ne pouvaient s'aimer ? Du moins , une seule n'aimait pas l'autre. Sa soeur , bien entendu. Cette jeune femme qui était venue une peste jalouse , selon les dires d'Arnaut , qui , pourtant ne devait pas s'étonner du comportement de sa soeur qui était la parfaite copie du sien , avec l'arrogance , la colère et sans même , le meurtre en moins. Il l'avait prévenu. Lui qui aimait peu de gens , il lui avait bien dit qu'il l'aimait , sa soeur , autant qu'il aimait sa fiancée. Du moins , ça , c'était avant. Avant qu'il ne lui dise ces mots pleins de sens : "Sachez que je n'y renoncerai pas pour vous." C'était dit. L'être le plus cher qu'il avait jusqu'à présent venait de perdre sa première place détrôné avec succès par la nouvelle venue , la terrriiible , la redoutaaaaableee fiancééééééee !

Un combat , sans combattre gagné par K.O. Le message était lancé , même son sang ne lui enlèvera pas son amour. Emilliane a essayé et en a perdu ses ailes. Pour son frère , elle n'était plus un ange. Il le lui a fait comprendre : " Pourquoi Sybelia...pourquoi est ce que c'est toi qui est partie..." Il regrettait donc que le Très Haut se soit trompé de soeur lorsqu'il avait appelé l'une d'elle à ses cotés. On ne pouvait pas faire plus explicite. Oui , il aurait préféré voir Emilliane morte plutôt que Sybelia , qui elle , aurait aimé , adoré même , sa blonde. Le regret , chose qu'il ne connaissait que très peu , venait de faire de sa violente apparition chez le Bazaumont. Il se rendit compte qu'il venait d'être odieux avec sa soeur , qui avait pour seul défaut d'aimer égoïstement son frère. Pourtant ,

Après cette séquence dramatique où du sang a coulé , des tignasses arrachées , et des chicots décollés , il se devait d'oublier en plongeant la tête la première dans l'alcool , son plus fidèle ami. Il aurait bien pu aller se confesser dans la paroisse du coin , mais il le savait bien , dans une autre ville , une autre taverne il tiendra des mots toujours aussi durs , alors autant cumuler le tout pour s'en débarrasser dans une unique confession.

Alors qu'il contemplait encore le bout de tissu sur son index , les mots qu'Axelle lui avait écrit lui revinrent à la mémoire : Ne craignez pas que j'oublie votre fiancée, vous nous la rappelez à chaque occasion. Il radotait. Il se surprenait à se faire plaindre pour se faire payer à boire. Il pouvait vite en devenir ennuyant , pour ne pas dire chiant à force de bloquer sur le même sujet. Oui mais , voilà , il s'inquiétait. Facto n'était pas encore revenu. Il tardait. Sa fiancée avait décidé qu'elle avait trop attendu ? Elle avait transmis la lettre de rupture au pauvre serviteur qui avait décidé de prendre ses jambes à son cou plutôt que de perdre la vie en lui annonçant la nouvelle ? Oui , il avait peur. Mais comme un signe de ce destin qui les avait réunis , au moment où il s'effondrait de l'intérieur pour mieux paraître insensible à l'extérieur , les nouvelles de sa dulcinée arrivèrent à la sa rescousse.

Citation:
À vous , Lanceline de Valdesti.


    J'ai tant attendu votre courrier. Je l'ai tant espéré. Tant que j'ai cru un instant qu'il ne viendra pas.

    Je vous prie de ne pas voir en cela un quelconque doute dans l'amour que vous me portez. Mais c'est uniquement moi dont je doute.

    Comment puis je rester si prétentieux en me ventant d'être si parfait lorsque j'ai face à moi la plus belles des créatures , qui elle est bien parfaite ? Chaque jour que le Très Haut fait me montre un peu plus la chance que j'ai d'avoir votre amour pour moi , seul. Mais chaque jour je vois mes défauts. Chaque jour , je doute un peu plus , de moi même.

    Je vous confis à vous ma tendre demoiselle que j'ai peur. La peur de vous décevoir devient plus grande au fil des jours. L'on dit que l'espoir fait vivre mais comment puis je vivre lorsque mon espoir c'est vous et que cette peur de vous perdre m'envahit à chaque fois que ce départ qui m'a éloigné de vous me revient à la mémoire en me hantant tel un mauvais esprit du passé ?

    J'ai peur et à cet instant où je vous écris , je ne ressens nulle honte à vous confier cela. Ma défunte mère me disait qu'il ne fallait point ressentir la honte d'une confidence à sa moitié puisque ce n'est qu'ainsi que l'on pouvait faire qu'un. J'essaie de le faire à travers cette lettre mais c'est une chose qui m'est difficile puis qu’à chaque instant où je pose ces mots sur ce papier j'ai de nouveau cette peur qui revient et vous n'êtes pas là pour m'apaiser par vos paroles , par votre simple regard.

    Pardonnez la faiblesse de votre fiancé , mais il se sait fautif de sa propre peine et de la votre.

    Je vous aime.

    Arnaut.



Il était perturbé , il se remettait en question mais n'arrivait toujours pas à laisser couler ses sentiments dans cette encre qui avait fini par sécher. Il lui fera part de ses états d'âme lorsqu'elle sera dans ses bras puisqu'il prenait de nouveau conscience de ce que représentait pour lui l'inconnue de Périgueux , espérons qu'il ne soit pas trop tard. Parce que cette nuit là , il parla encore d'elle. Et oui , elle était parfaite , parfaite au point qu'il n'arrivait pas à la décrire que lorsque l'on lui faisait la demande , pour lui , il n'y avait nul mot assez fort pour faire naître son image dans l'imagination de malheureux qui n'ont eu la chance de la croiser au détour d'une ruelle.

Le pli remis au coursier , il espérait que son rapide retour auprès de la blonde allait sans doute lui faire comprendre que le fiancé était à quelques lieues d'elle et que les retrouvailles n'allaient plus tarder.

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Lanceline
~ Jour dix-neuf. ~
    Encore un matin
    Qui cherche et qui doute
    Matin perdu cherche une route
    Encore un matin
    Du pire ou du mieux
    A éteindre ou mettre le feu

    Jean-Jacques Goldman, Encore un matin.

Peinture, encore. La rue, cette fois, mais vue de haut. Personne, alors la Blonde s'installa tranquillement, profitant des rayons de soleil sur sa peau. Elle était montée sur la tour de la Sénéchaussée, découverte la veille par elle et Ernst. Elle se leva et se pencha pour mieux voir. La lettre tomba à ses pieds. Elle se pencha, la relut, eut un léger sourire.

Ses yeux dérivèrent de la missive à une silhouette en contrebas. Taniet. Qui lui avait parlé de Lili Corleone. Une gamine qui l'avait faite passer pour sa mère à Aurillac et qui se rappelait ainsi inopinément à son bon souvenir. Comme pour lui rappeler le contrat. La Valdesti eut un sourire. La question était de savoir pourquoi elle avait choisi son nom à elle parmi la pléthore de ceux qu'elle avait à disposition. Le destin était vraiment curieux, à les unir et les désunir sans cesse. Il faudrait qu'elle lui écrive. Le temps était loin d'être venu cependant. Elle reporta son attention au loin. Là-bas, un oiseau avait pris son envol et s'élevait vers le soleil. Elle le suivit de ses noisettes avant de le perdre, disparu dans l'énorme masse lumineuse.

« Von Zweischneidig ». « Von Machiondich ». Ainsi avait-il été rebaptisé en taverne. Le sourire se fit un tantinet moqueur. Elle lui avait dit : « Trop dur à porter ».
Elle s'appuya au muret où elle s'était tenue la veille. Passa une main dans ses cheveux blonds, remit une mèche en place derrière son oreille.

Cinq personnes en taverne. Incroyable. Mais évidemment, aucune d'elle n'était d'Agen. La ville était fantôme. Elle avait pourtant eu un vague espoir, vite balayé : tous des voyageurs, qui restaient deux jours. Eh bien ! Elle s'en contenterait. C'était toujours ça de pris.

Elle finit par quitter son appui et redescendit l'escalier en colimaçon. À pas lents elle se dirigea vers la grande porte. Le messager d'Arnaut l'y attendait, prêt à repartir. Elle resta là à le fixer quelques instants. Elle s'avança enfin vers lui.

Aucun mot ne fut prononcé. Elle échangea juste un long regard avec lui. Puis lui fit un simple « non » de la tête. Les épaules de l'homme s'affaissèrent comme s'il poussait un soupir -un regret ? une crainte ?- puis il lança sa monture au galop.

Elle se tourna afin de le regarder disparaître dans un nuage de poussière. Reviendrait-il ? Ça, c'était la question à deux cent écus.

Elle fit demi-tour et retourna sur son promontoir, se réinstallant sur la chaise elle reprit son pinceau et se remit à peindre la rue qui s'offrait à elle. Rue par ailleurs vide de monde, si ce n'était Taniet qui revenait du marché.

Léger soupir.

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Popsas., incarné par Lanceline


    ~ Un chemin semé d'chandelles. ~



Je me sens pas bien...Ahhbbeeuargh. Il venait de tout larguer , là , devant la grande porte de Murat. Un bon litre de bière et quelques bouts de pain allaient faire verdoyer le coin et nourrir les oisillons. Merci qui ? Arnaut , le chandelier.

Il était maudit. Depuis plusieurs jours , dans chaque ville où il passait , il se retrouvait à tenir la chandelle à des couples qui ne cessaient de se caresser et de s'embrasser. Au début , il en souriait , il en riait presque même. Il voyait le pauvre homme se contenter de sa femme à la beauté inexistante. C'était beau , l'amour. Il buvait. Il patientait , la chandelle , il la tenait volontiers parce qu'il savait qu'il rentrait rejoindre l'être aimée , une perle rare dont lui seul pouvait caresser et embrasser. Haaa , pauvre homme , c'est cela serre la , serre ta rombière dans tes bras. Pensait-il. Il y a ce court moment -et celui populaire[1]- où il savourait la vie , où il savourait cet amour naît lors d'une nuit de garde à surveiller que l'ennemi ne s'attaque aux fûts d'armagnac et exécuter leur plan machiavélique. Et puis , il y a cet autre moment où son ambiguïté erratique reprend le dessus et en vient à jalouser tous ces couples entrelacés dans tout cet amour , qui pour certains n'était qu'éphémère. Vous voulez des noms ? ouiiiiiiii. Une pensée à S et N d'Auvergne. Une semaine , c'est déjà trop.

Bref. Lorsque son doute refaisait surface , il vomissait littéralement -il l'a fait- tout cet amour. Il tâtait la poignée de son épée du bout des doigts en se demandant quel était le meilleur moment pour leur trancher la tête : Lorsque les langues sont entremêlées ou bien lorsqu'elles sont rentrées dans leur cavité ? Il se tâtait. Heu , la réflexion , bien entendu. Il avait pensé aussi à laisser tomber la chandelle et faire cramer la taverne entière tout en tenant la porte fermement fermée depuis l'extérieur. En plus de la mort qu'il causerait , il savourerait ce moment où l'homme tentera d'ouvrir la porte de toutes ses forces poussant la femme dans les flammes pour les occuper en espérant avoir un peu de répit , mais au final , lui aussi prendra part au barbecue en laissant comme dernière image de lui à cette femme dont il avait déclaré sa flamme -c'est ironique hein?- , l'image d'un homme égoïste qui ne intéressait que son entrejambe. Et ce n'est pas dégueulasse. Voyez la beauté de la chose. Arnaut aura démontré par là que l'homme ne tenait pas tant que cela à son amante tandis que lui , il donnerait sa vie pour Lanceline. Et cela , il était prêt à le faire à Auch , il n'avait donc pas à le prouver.

Mais tout cela s'était passé dans son cerveau de détraqué -à l'exception de l'amour sans doute démesuré qu'il porte à sa fiancée-. Il avait laissé sa galette , il s'était essuyé la bouche à l'aide d'un tissu après avoir crachoté quelques morceaux remontés plus tôt avec son dégoût. Maintenant il fallait partir , quitter Murat et rejoindre Factotum à Aurillac. Lunatique qu'il était devenu , il avait retrouvé un semblant de sourire. Il savait qu'il se rapprochait de sa fiancée et pour le faire patienter , il allait pouvoir lire les mots réconfortants de son affection. Croyait-il. Cela lui aurait permis de tenir encore jusqu'à la prochaine ville , jusqu'au prochain couple. Mais la Valdesti avait , semble-t-il décidé qu'il en saurait autrement. Elle allait pour le coup se montrer terriblement cruelle. Elle qui était pourtant si bonne -et pleine de bonté aussi-. Le savait-elle ? Lui en tout cas , il ne le savait pas encore , y avait qu'à le regarder galoper avec son cheval , ses cheveux flottants dans les airs , et arborer un sourire qui s'étirait jusqu'aux oreilles. Ralentis , arrêtes toi mon pauvre ami , ne sois pas si pressé , tu cours vers une déception , tu t'élances vers la désillusion. Facto n'a rien pour toi. Il ne t'apporte pas de quoi aviver ta flamme. Je t'en prie , ne vois-tu pas cette lumière qui s’éteint ?

Si seulement il avait pu entendre cette voix , il aurait pu faire preuve de tempérance , il ne se serait pas enivré d'espoir. S'il avait entendu..il ne se serait pas jeté sur son coursier , pressé de récupérer sa dose. Il s'en gratterai presque l'épaule et l'avant bras.


Et bien alors ? Qu'attends tu ? Il arborait ce visage qui était à mi-chemin entre le rire et le sourire , les gants étaient même enlevés , prêt à lui envoyer une nouvelle lettre en réponse à la sienne. Bien que presque arrivé , c'était son seul moyen de communiquer avec elle , alors il en profitait.
Maitre , je..heu..j'ai.. Vous voyez la goutte de sueur qui commence à couler de son front là ? Qu'est ce que t'as mon vieux ? Regardes tes braies , tu perds les eaux. Elle ne m'a rien donné. Il l'a dit , il l'a lâché comme s'il poussait son dernier souffle. Les yeux emplis de compassion et de crainte acceptée. Il avait de bonnes raisons d'être compatissant. Parce qu'il l'était pour lui même en premier lieu. Une telle nouvelle , ou absence de nouvelle pour le coup , allait faire du Bazaumont un véritable taureau furieux.
Rien ? Comment ça rien ? Coupé dans son élan. Il avait pourtant était prévenu , pourquoi n'écoute-t-il pas ce que l'on lui dit ? Souffres maintenant Arnaut. Mais , elle t'a bien dit quelque chose ? C'est ça , accroches toi à une dernière branche.
Une moue pour bien faire et la tête qui se balance de gauche à droite en slow motion[2].
Non maître. Elle n'a prononcé aucun mot , ses yeux disaient juste qu'elle n'avait rien à me donner. Ce fameux regard qui disait tout. Plus aucun sourire n'essayait de tenter sa chance et son âme se faisait la malle. Alors tu l'as trouves comment ta branche ? Elle picote hein ?

Arnaut ? Houhou ! Il ne bougeait plus , il était resté perclus. Il regardait Facto sans réellement le regarder , son regard était vide , sa bouche légèrement entre-ouverte. Respirait-il encore ? Etait-il encore vivant ? Il semblerait que oui , son index sautillé tout comme sa paupière , signe de sa nervosité. Une aussi grande chute pouvait que le paralyser , à défaut de le tuer. Sa joue reprenait le relais , elle tambourinait à un rythme irrégulier , il commençait à perdre la boule. Il fallait réagir là et vite.


Maître ? Facto s'inquiétait de l'absence de colère du brun et s'était risqué à poser sa main sur son épaule pour le faire revenir sur terre. Rien. Il ne réagissait pas. Il fallait attendre l'arrivée de ses compagnons pour qu'il se remette en mouvement , faisant comme si de rien n'était.

En route.

Il ne leur dira rien. Ils sont remontés en selle et ont repris la route se dirigeant vers le Rouergue sans trop savoir s'il souhaitait vraiment refouler le sol guyennois. Fuir ? Non. C'était chez lui. Il ira pour y mourir. Mais ça , lui seul le savait. Et puis le barbu aussi. Celui qui lui avait joué un mauvais tour en lui faisant croire qu'elle lui était destinée. Il se devait bien se marrer en le voyant sur son cheval à vaciller à chaque mouvement de patte. Il donnait une impression de nonchalance causée par une simple fatigue. Il ne laissait rien transparaître , il se sentait déjà bien assez con d'avoir crié sous les toits qu'il aimait. Il va leur dire quoi à tous maintenant ? Et sa soeur , après tout ce qu'il lui a balancé à la figure ? Putain ! Pensait-il.

Malgré tout , il y pensait encore à son amour déliquescent. Quel a été le mot de trop ? Ou bien la phrase de trop ? A moins que ce soit la lettre entière ? Il n'aurait jamais dû essayer d'ouvrir son coeur. Il le savait. Il avait déjà fait preuve de faiblesse auparavant , il s'était promis de ne plus reproduire cela. Mais ses sourires et ses regards ont réussi à venir à bout de lui. Et c'était le même refrain pendant une journée entière. Jusqu'à ce qu'il arrive à Villefranche et décide de faire une halte pour se sustenter. Non , il n'en avait pas perdu l'appétit. Le sommeil portait conseil , si l'on écoutait les indécis.

Qu'on soit aimé d'un chien, pourvu qu'on soit aimé ![3]

Le réveil a été difficile. Lanceline avait disparu de ses rêves. Les moutons , 26 au total , l'avaient convaincu qu'il valait mieux être aimé. Oui , mais ! Non pas de mais. Mais... Il insistait. Il ne voulait être aimé que par elle. Juste elle. Et de là le courage était revenu , le poussant à galoper jusqu'à Montauban. Il était tout proche. Et elle ? Un regard lancé à l'ouest de Montauban avant d'entrer en ville. Il tentera tout de même. Qui sait , peut être que cela lui ferait changer d'avis ? C'est ce que l'on appelle ramper. Bon sang , un peu de dignité !


Citation:
Ma dona,
Je suis à Montauban , j'espère que vous êtes à toujours à Agen.
Je vous aime.
Arnaut.


Trop tard. Le message venait de s'envoler pour Agen. Et aucune flèche pour l'abattre. Trop tard.


[1] Pichenette , baffes , balayette , clef de bras , coup de pompe dans les cotes , acclamations , prière de les adresser à JD Lanceline. Moi j'dis "hourra".
[2] Ralenti
[3] Être aimé , Victor Hugo.


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Lanceline
~ Jour vingt-deux. ~

Elle était à nouveau en haut de la tour. Cette fois elle ne peignait pas ce qui se présentait à elle mais ce qui lui passait par la tête. À savoir... Un enfant blond tirant vers le roux. On n'aurait su dire si les traits étaient masculins et féminins. Le fond de la peinture se fondait avec le visage. Tout à coup il apparaissait au milieu alors que l'on suivait les lignes de perspective.
Elle passa une main sur son visage. Il faisait vraiment très chaud.

La Valdesti eut un sourire en repensant au monde vu en taverne. Comment ça « Agen - monde » c'est antinomique ? Enfin, toujours est-il qu'elle avait posé des questions à une voyageuse tout juste arrivée. « Elle est curieuse, faut s'y habituer », avait dit Alizea. Ce à quoi elle avait rétorqué que c'était là un de ses défauts -ou qualité, allez savoir-. Mais comme c'était là propre à toutes les femmes, dans une moindre mesure... Alizea & Taniet s'étaient retrouvées au petit matin devant Agen, alors qu'elles venaient juste de se faire massacrer -c'est exagéré- par une armée. Paraît qu'elles n'avaient pas le laissez-passer adéquat. Aah, l'Armagnac. Comme quoi... Elle avait eu beaucoup de chance. « Une chance de cocue ! », avait-elle dit. Allez savoir...

Et puis un nain avait chanté pour Arnaut. Elle en riait encore, quand elle y pensait. « Tout nu sous la peau d'ours lalala »... … Dégage le piaf. Tu vas saloper son tableau. Pourquoi il lui tournait autour comme ça ? Finalement elle compris. Une lettre à la patte. Curieuse, elle le prit, se demandant si Séphoria s'interrogeait sur ce qu'elle devenait. Elle déplia pour lire la première ligne et reconnut l'écriture. Elle eut un sourire, persuadée qu'Arnaut, cette fois, l'insultait pour sa non-réponse. Finalement la Blonde se décida à le lire tout entier.


- Hiiiiii !

Ah. Eh bien, si tout le village ne le savait pas encore, maintenant, oui. Elle prit le temps de poser son pinceau sur le muret avant de dévaler les escaliers et de se diriger, plus courant qu'elle ne marchait, vers la taverne municipale. Elle poussa la porte, tenant le parchemin entre ses doigts fins, un léger sourire transparaissant sur ses lèvres. Un vague sentiment de paix l'envahissait peu à peu.

- Il sera là. Demain ! Il arrive !

Mais qu'est-ce qu'il avait foutu pendant tout ce temps ? Après tout, Sésé lui avait dit : « S'il trouve que sa monture va pas assez vite, qu'il la porte ! ». Peut-être qu'il était mort d'épuisement, du coup. Peut-être.

Elle rangea le parchemin plein de promesses avant de faire demi-tour. Elle sortit dans Agen et se mit à y déambuler, espérant faire passer le temps plus vite.
Elle croisa Ernst, s'approcha en lui adressant un doux sourire, prit son bras et l'entraîna à sa suite.


- Il arrive.

Ses noisettes transpercèrent les environs. Rien ni personne ; comme c'était étrange. Mais elle s'y faisait, à la longue.

- Ne pensez pas vous débiner pour autant, j'ai votre portrait à finir.
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Popsas

    ~ Chérie j'suis d'retour ! ~


Cela faisait à présent une journée qu'il était arrivé à Montauban. Et ? Et il attendait.


Il n'attendait pas le retour du pigeon envoyé , non lui , il espérait qu'il se soit chopé une crampe de l'aile en plein vol avec atterrissage d'urgence catastrophique -avec explosion et tout-. Il attendait juste que le courage , ou juste l'envie ? lui revienne afin de poursuivre son chemin. Elle était là , il le savait , il le sentait , mais il doutait , encore. Il pouvait d'ailleurs se le permettre , pour une fois.

Il a été réveillé tôt par l'arrivée d'un coursier qui lui apportait des nouvelles de Lyon. L'engrossée lui donnait de ses nouvelles. Pourquoi elle et non sa fiancée ? Pourquoi est ce tout devait être si compliqué. Pourquoi toutes ces femmes -pas tant que ça en fait- le désiraient , lui donnaient de leurs nouvelles , alors qu'il attendait réellement les nouvelles d'une seule personne. Mais rien ne venait. Est-ce parce qu'elle ne le désirait plus ? Non non , impossible. Il ne faut pas. Elle l'a dit. Elle l'aimait et elle l'attendait. Rhaa. Si seulement ces dernières paroles étaient sorties directement de ses lèvres plutôt qu'à travers ces lettres..le doute aurait levé sans même qu'il ai le temps de réellement passer.

Alors , il était posé là , réfugié sous les ramées d'un arbre de la forêt montalbanaise , à l'abri du soleil estival qui faisait un retour éclatant en ce mois de juin. Il avait réussi à apaiser son âme tourmentée , la plume à la main et un bout de papier posé sur un support en bois , plat , il était prêt à répondre aux courriers reçus. De nouveau , il parlera de sa fiancée. Lanceline. Il n'avait que ce nom là à la bouche. Il commençait à agacer bien comme il fallait ses différents interlocuteurs. Rabaissant même certains d'entre eux. Ses yeux avaient pu caresser la véritable beauté et ne souhaitait pas les laisser rêver , en vain. Il s'était fait objecteur de conscience en bon samaritain qu'il était devenu lors de ce voyage.

La lettre écrite , l'encre séché sans avoir à user de sable , la chaleur suffisait amplement , il avait quitté la protection de l'arbre , puis la forêt entière. Quitter l'isolement , envoyer la lettre et rejoindre les autre. Il devait apprendre à redevenir sociable. C'est pas gagné. Et puis , quoi de mieux qu'une taverne pour cela ? La première , tant qu’à faire.

Chanceux comme il était devenu - à force de fréquenter la Lanceline , on devient forcément poisseux- , la taverne dans laquelle il venait de faire son entrée était , juste , vide. Un silence de cathédrale régnait dans ce lieu où seul le tavernier , avec la tronche de Moe Szyslak , était présent derrière son comptoir à nettoyer les chopes. Ça commençait bien. Il voulait voir du monde avant de se mettre en route. Il devra se contenter d'une chope ou deux. Direction le comptoir donc. Le chapeau posé sur le siège à coté. Un écu de sorti. Commande passée.

Un bière. Fraîche.

Au tavernier de lui service une bière.

Pour la fraîcheur faudra r'passer avec c'te chaleur.

Pour l'é..Mmh. Il aurait bien voulu lui dire que pour l'écu il repassera lui aussi , mais il l'avait déjà pris. Pff. Il pris le risque de boire la bière , la soif l'emportait sur la chaleur. Autant boire une tisane. Il venait finalement de repousser la chope sur le comptoir après une simple gorgée. L'alcool , trop chaud , était imbuvable à se demander où il stockait ses fûts. Un écu de perdu. Et le moral qui venait de retomber. Et cela se voyait. Il avait les mains posées sur le bois , la tête légèrement baissée et le regard vide.

Qu'est c'qui t'tracasse mon vieux ?

Les yeux , qui semblaient fatigués , se levèrent et se posèrent sur la tavernier et d'une voix qui se voulait sépulcrale , désabusée , presque.

Ta gueule.

Il se leva , repris son chapeau et pris la direction de la sortie de la taverne , puis celle de la ville. Là , comme à chaque fois , sa soeur , sa cousine , son serviteur l'attendait , le cheval prêt et n'attendait que son fessier et le coup de talons pour se mettre à chevaucher.

Il savait bien que l'auréogonadiautotransmutateur[1] qu'il était ne suffisait pas à la garder. Il n'avait jamais fait état de sa fortune , il se complaisait même à se donner le statut de fauché , plutôt que de radin. Il ne savait pas réellement pourquoi est ce qu'elle l'aimait , il ne s'était jamais posé la question et c'est donc pour cela qu'il se pensait fautif d'une action , fatale.

Tendit qu'à l'approche d'Agen , le chant de sa sirène se faisait entendre dans sa tête , cette voix mélodieuse ayant le pouvoir de faire tomber la foudre : belle qui tiens ma vie...captive dans tes yeux....qui m'a l’âme , ravie..[2]

Descendu de son cheval , il marchait maintenant , la grande porte n'était quelques centaines de pas.

[1]Qui gagne beaucoup d'argent
[2]Belle qui tiens ma vie , de Thoinot Arbeau

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Lanceline
~ Un jour. ~
    L'attente est en proportion du bonheur qu'elle prépare.
    Michel Dupuy, La source et le feu

Elle se retrouvait une fois de plus au sommet de la tour de la sénéchaussée. Elle leva la tête vers le soleil, laissant à l'envi se déverser sur elle ses rayons dorés. Il faisait chaud. Très chaud. Elle plongea le pinceau dans l'eau et admira les couleurs se diluer. Il revenait, elle peignait donc la route qu'elle supposait qu'il foulerait. Elle se redressa, levant son pinceau qu'elle fixa un instant avant de mélanger de nouvelles couleurs et de le reposer sur la toile. Puis, elle regarda en direction de son modèle.

- Ôtez-vous de là, Ernst ! Non que votre vue soit déplaisante à mon œil -au contraire même- mais enfin ce n'est pas vous que je peins aujourd'hui !

Elle partit d'un rire léger, amusé. Il s'écarta un peu tout en lui adressant un sourire tendre. Typiquement le genre de truc la troublait.

- Han.

Et il l'avait bien compris, le bougre, puisqu'il lui en resservit un avant de venir se mettre derrière elle, se penchant pour lui susurrer à l'oreille.

- C'est beau.
- C'est une manie, chez vous, de ne pas regarder ce qu'il faut ?
Rire un peu gêné.
- Mais je regarde où il faut.
- Tss.


Elle reporta son attention sur l'horizon qui s'ouvrait devant eux, préférant ne pas répondre plus avant. Agen était toujours aussi mort. Les seuls bruits étaient ceux des oiseaux et de la nature qui vivait. Peu à peu, elle laissa ses coups de pinceaux se calquer sur la respiration qu'elle entendait derrière elle. Elle frémissait de devoir attendre encore, les minutes s'étiraient à l'infini et la laissaient inquiète de ne rien voir venir. Mais la présence du germain l'apaisait.

- Vous n'avez pas chaud, vous ? Terrain glissant, Line.
- Si. Vous ne voudriez pas enlever vos vêtements ? Elle le sentit arborer un sourire malicieux dans son dos. Elle se renfrogna un peu. Pourtant, tu avais été prévenue.
- Hmpf. Non.

Elle regarda à nouveau le chemin. Quatre silhouettes approchaient. Aussitôt, elle plongea le pinceau dans le noir charbon pour les immortaliser sur la toile. Un... deux... trois... quatre, on y était, le compte est bon. -Tudududududu-. Et paf, ils se retrouvaient scotchés sur le dessin comme des mouches au papier tue-mouche !
En même temps, les gens à Agen, c'était tellement rare qu'il fallait bien ça pour le commémorer. Peut-être bien qu'elle arriverait à la vendre au maire, après tout. Elle se tourna vers le blond, lui adressant un franc sourire.


- Avez-vous vu ? On va avoir de l'animation pour quelques jours et...

Sa voix mourut sur ses lèvres. Arnaut rentrait aujourd'hui. Et d'une certaine manière, elle savait que c'était lui. Elle fit volte-face, considéra la toile quelques instants avant de se lever brusquement, faisant tomber le tabouret. Rapidement, elle dévala plus qu'elle ne descendit les escaliers en colimaçon, allant même jusqu'à abandonner sur l'une des marches le pinceau que sa dextre venait de lâcher, la tachant ainsi de quelques gouttes de noir. Elle le retrouverait plus tard.

Oh, qu'il était long soudainement, ce chemin qui menait à la grande porte ! Elle allait à sa rencontre à la manière de Frénégonde. Bon, avec peut-être un peu plus de classe quand même. Arrivée au-devant de lui, elle freina l'allure pour finir par s'arrêter à un pas ou deux de lui.

Juste assez pour le regarder, lèvres pincées, et lui coller une baffe. Oui, elle lui en avait voulu, et le geste venait de le prouver. Avant de le serrer dans ses bras.

Dire qu'il lui avait manqué était un euphémisme.


- Arnaut... murmura-t-elle seulement.

Elle ferma les yeux et respira à fond, sentant son odeur -camouflée derrière une, plus forte, de sûr, due à la chevauché sûrement- mais présente tout de même.

Par ce seul prénom, elle mettait tout pêle-mêle. Ses inquiétudes, ses peurs, ses doutes, son amour, sa joie de le voir de retour -vivant-. Qu'il fasse son marché et prenne ce qu'il lui plaise, elle, elle avait tout dit.

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