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[RP]L'arrivée à Quiberon, Finn'ment jouée

Marzina
La chose était plutôt bien partie, malgré les contraintes techniques. Qu’était-ce donc, un simple abri à trouver, quand le feu vient dévorer le ventre et engourdir les pensées ? Un stupide contretemps, une gêne dont on se débarrasse bien vite pour passer à la suite. Et puis la Nature était propice à ce genre d’ébats, c’était l’essence même de la vie. Tout comme le sang, dont quelques gouttes viennent perler le dos de la blonde tandis que sa peau s’égratigne sur les épines cruelles des belles de ce jardin, tachant de carmin la chemise auparavant immaculée. Elle grogne et darde sur l’Irlandais des yeux vengeurs, se voyant même retirer le droit de protester par une bouche délicieuse, qu’elle punit d’un coup de dent rageur. Si la blessure agace l’Altesse, elle ne restreint toutefois pas l’envie, et les lèvres finement ourlées reviennent vite à l’assaut de leurs rivales, cherchant à inoculer un peu plus de cette ardeur que la blonde sent croître en elle. Tandis qu’il la parcoure une fois de plus de ses mains, les siennes viennent s’occuper de cet ennuyeux pourpoint. La tentation est grande de sortir une nouvelle fois la dague pour s’en débarrasser plus facilement, mais la leçon a été religieusement apprise : elle n’a pas envie de perdre sa chemise en guise de représailles. Tant pis, les doigts s’agitent fiévreusement sur les boutons, si nombreux, si…irritants. Nouveau grognement, elle ne supporte pas les contretemps, la blonde, et la résistance de ce vêtement est une provocation qu’elle peine à endurer. A peine réussit-elle à défaire les premiers boutons que l’Irlandais contrarie ses plans, ne lui laissant pas le loisir de profiter de sa victoire sur l’ignominieux tissu, la plaquant contre lui. Les yeux noirs viennent à la rencontre de leurs semblables, cherchant la confrontation des âmes alors que celle des corps se précise, les doigts étrangers agrippant une cuisse. Les lèvres laissent passer un léger murmure d’approbation et une fine main d’albâtre vient se glisser le long de la nuque, descendant sous le pourpoint pour moitié déboutonné pour venir caresser la peau du dos, comme une menace de riposte pour les égratignures de son propre dos. Les doigts ne font qu’effleurer la peau pourtant, laissant seulement discerner la présence d’ongles toujours aussi acérés qui narguent l’échine. La peau frissonne sous la caresse du tissu écarté, sous les baisers égrenés. Paisiblement viennent alors se préciser deux aspérités sous le blanc coton, jalousant des baisers dont on ne saurait les priver plus longtemps. Les discrets soupirs servent d’encouragement, jusqu’à ce qu’ils disparaissent brusquement sous les jurons.
La blonde a l’habitude de ce mode de communication de l’Irlandais, et habituellement, elle ne s’en offusque pas. Sauf que voilà, les mots prononcés viennent égratigner sa fierté et la rappeler à une réalité qui la gêne. Et maintenant que la brume laissée par le désir se dissipe par cette pause imprévue, les méninges tournent à plein régime. Et bien que les lèvres adorées viennent à nouveau dévorer les siennes, le nez altier n’en finit pas pour autant de se froncer. Le corps opalin fait pression pour repousser celui qui jusqu’à maintenant était sur le point de l’assaillir. Les frissons se sont tus, les mouvements ne sont plus que fuite désormais, et une gifle vient fendre l’air jusque sur la joue barbue. Profitant de la surprise, l’impudente s’échappe, crachant :


« Votre femme ! Parler de votre femme là ! »

Le minois de l’Altesse est furibond, et les yeux noirs assassinent l’Irlandais. Elle n’en a plus rien à faire qu’on puisse l’entendre, pendant qu’elle hurle, lui assénant une deuxième gifle :

« GAST ! »

Il a parlé de sa femme là, maintenant, alors qu’ils allaient faire l’amour ! Non seulement ça avait mis un coup à sa fierté, à la blonde, mais en plus, ça lui a rappelé qu’il était marié. Pas vraiment le genre de détail qu’elle appréciait. Et sans attendre sa réaction elle part, à grandes enjambées entre carottes et poireaux, ruminant en rajustant sa chemise, la tresse dorée se balançant furieusement dans son dos constellé de tâches rougeâtres. Elle se casse, la sauvageonne, sans un regard en arrière, sans un regret de le laisser sur la béquille.
Oui la chose était plutôt bien partie, jusqu’à ce qu’une Rose se joigne à la partie.

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Finn
Tentant de se réconcilier avec ses lèvres, d'effacer le mauvais souvenir, l'Irlandais sent progressivement se préciser la menace. Son pantin se rebelle. Il lui échappe.

Et d'une baffe. Une !
La mine déconfite dévisage la furie.
Et de deux, histoire de le ramener définitivement sur la terre ferme.

Là, c'est le grognement rageur qui retentit. Contre elle, contre lui, contre cette situation qui sent vraiment pas la noisette. Mais alors pas du tout ! Une main flanquée sur la brûlure de sa joue, le vieux bougre l'observe s'éloigner. Un dernier regard à la tresse qui le nargue d'un balancement furieux et sans appel. Inutile d'espérer la rattraper cette fois, elle en a gros l'Altesse. Tout comme lui, mais à un niveau nettement inférieur. Son désir n'a pas désenflé alors qu'elle le plante comme le dernier des goujats. Pourtant, on peut pas dire qu'il n'ait pas l'habitude des départs sur un mot de trop. Ses répliques tantôt cinglantes tantôt maladroites lui auront joué plus d'un tour avec celle-là.

Mais là... Y'a vraiment de quoi se sentir nouille.

Aussi le pauvre éprouvé abandonne-t-il l'abri de cette arche au goût de défaite pour regagner le calme plat de sa chambre. Et réfléchir à tout ça. À moins qu'une bouteille ne lui fasse de l'œil et qu'il se noie dans son malt aux vertus apaisantes. La journée semble foutue, autant que les suivantes. Une routine s'installe. Levé avec le chant du coq, le futur chevalier se présente à l'entraînement quotidien qu'il s'inflige impitoyablement, seul. La Montfort, elle, reste introuvable. Ses repas dans la grande salle, non moins solitaires. Deux jours ? Trois ? Peut-être même plus. Un soupir agacé franchit le seuil de ses lèvres lorsqu'il repousse un morceau à peine entamé du sempiternel régime auquel ils sont astreints. Y'en a marre. La mie de pain roulée entre ses doigts est expulsée à la tempe de l'intendant de maison.


- « Annoncez-moi à Son Altesse. »

Grimace de l'interpellé.

- « Son Altesse est occupée. »

On te demande pas l'accès aux latrines !

- « Occupée à quoi ? »
- « Elle a demandé à ne pas être dérangée. »

Ben voyons.

- « Elle a déjeuné au moins ? »
- « J'imagine qu'on lui a mené sa collation dans sa chambre, comme les jours précédents. »
- « Sa chambre, vous dites... »

C'est donc là que tu te caches.

- « Quand elle n'est pas sur son cheval, oui. »

Pas besoin d'en savoir davantage pour que le Frisé se lève en abandonnant son écuelle et décrète :

- « Faites seller nos montures. »
- « Elle ne viendra pas. »

Cause toujours, je m'en vais te la chercher moi. Et au trot.

L'irritation arrive à son apogée au détour du couloir prohibé. Sans s'encombrer de ce genre de détails, ses bottes le longent d'un pas vif tandis que l'appréhension naît dans sa poitrine. Le palpitant s'excite, martelant son message d'avertissement. Ne pas réitérer l'entrée fracassante de la dernière fois. Alors, arrivé devant la porte de l'ermite bretonne, l'Irlandais inspire avant de daigner frapper.


- « Vous en avez pas marre de m'éviter ? »

Ton mesuré, mais qui souffre l'absence de courtoisie pour frôler subitement le reproche :

- « Je vous signale que vous m'devez une balade. »
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Marzina
Elle était perdue, la blonde, avec toutes ces émotions fortes qui se bousculaient et qui bataillaient en elle pour passer au-dessus des autres dans son corps fluet. Et quand elle ne sait plus vraiment où elle en est, la blonde se renfrogne et se fait ermite, elle fait le vide autour d’elle et passe ses journées en solitaire. Pour méditer ? Si peu. Pour oublier, pour repousser les problèmes, si elle peut éviter d’avoir à les résoudre en prenant la poudre d’escampette c’est tant mieux, même si ce n’est qu’une fuite en avant, et qu’elle devra tôt ou tard les affronter. Quelque part en elle, elle espère qu’ils disparaitront d’eux-mêmes, comme les bulles de savon quand elles explosent.

Plop.

La dite bulle de savon se reflète un instant dans les yeux noirs, et puis disparait, laissant à peine trace de son existence. Voilà une bulle qu’elle est bien gentille ! Et toute à sa contemplation muette et oisive, elle écoute sans vraiment y prêter attention les babillages de Mathilda qui la tient au courant de ce qui se passe hors des murs où elle reste cloitrée. L’information entre par une oreille, laisse une petite marque là quelque part qui lui fera dire par la suite « Ah oui, je m’en souviens maintenant ! », et puis ressort sans avoir été analysée. Les neurones prennent une pause pendant qu’elle se délasse dans son baquet. Faire trempette est une activité on ne peut plus classique pour une Sirène, et comme elle ne pouvait le faire dans la mer, elle se contentait de sa chambre et des cruches d’eau chaude que lui versait de temps à autre Mathilda. Un peu de saponaire avec ça et plop, quelques bulles ludiques qui font leur apparition pour son plus grand plaisir. Après une guerre, après un voyage, après autant de contrariétés, elle méritait bien un peu de vacances ! Et les vacances consistaient en trois activités principales : l’équitation, les bains interminables, et le shopping. Le souci de ce dernier, c’est qu’il nécessite un budget. Et comme elle n’a aucune envie d’aller faire les yeux doux au frangin pour obtenir de quoi se payer une nouvelle robe, l’activité a tout bonnement été rayée du programme.
Et le chevalier dans tout ça ? Elle préfère ne pas y penser, il trouvera bien de quoi s’occuper : une lice pour rouer de coups un pauvre gueux, une armure ou une épée à briquer, quelques pintes à vider, quelqu’un à invectiver, une femme à qui écrire…Il n’avait pas besoin d’elle pour ça !
A ces pensées, le minois de l’Altesse se renfrogne, et elle glisse silencieusement dans l’eau pour ne laisser dépasser que les deux anthracites. Ca amuse la jeune demoiselle qui se garde bien d’en piper mot et vient verser un peu d’eau chaude sur les cheveux de la mélusine qui viennent se coller à la chemise fine.


« L’Altesse va-t-elle sortir aujourd’hui ? »

Et la blonde de ressortir la tête de l’eau avant de ronchonner :

« L’Altesse ne sait pas. »

Mathilda poussa un peu plus près du baquet la petite table avec le pain et l’eau avant de suggérer :

« Vous avez peut-être faim ? »

Nouveau grognement.

« Marre du pain. »

Il était grand temps que ce deuil se termine, son ventre ne survivrait pas beaucoup plus longtemps à ce régime, elle n’était pas bien grosse, elle allait finir par fondre, et tous ses efforts pour prendre quelques kilos n’auraient servi à rien…
Observant néanmoins la miche de pain méprisée, elle ne peut empêcher ses pensées de dériver vers l’Irlandais, probablement seul à sa tablée. A moins qu’il ne se soit sauvé ailleurs. Partagée, hésitante, elle finit par demander :


« Que fait-il de ses journées ? »

Le tout en jouant avec un nuage de mousse du bout du doigt, songeuse. La demoiselle répond avec une pointe d’amusement, ayant bien compris de qui elle voulait parler :

« Il grogne, Altesse. Messire grommelle chaque fois qu’on le croise, et même probablement lorsqu’il n’y a personne, si vous voulez mon avis. »

A la dite Altesse de grogner à son tour qu’il n’y a donc aucun changement notable, tout en s’étonnant silencieusement qu’il n’ait pas débarrassé le plancher. Le bain continue donc dans une douce quiétude, et Mathilda finit même par réussir à arracher quelques mots à la blonde qui récupère une ombre de sourire. Quelques papotages enjoués de bonnes femmes, des clapotis, et voilà qu’on frappe à la porte. Les deux jeunes femmes tournent simultanément la tête vers la porte, surprises. La chambrière entrouvre alors les lèvres pour poser une question, mais fût devancée par une voix étouffée par la porte, mais reconnaissable.
Ne serait-ce que par le froncement qu’elle induit sur le nez princier.


« Vous ne devriez pas être ici ! »

C’est la première chose qu’il lui vient à l’esprit de répondre. Déjà, parce qu’elle lui avait dit qu’elle ne l’autorisait pas à venir ici, et ensuite, parce que sa présence non prévue ici l’irritait. Et non, elle n’en avait pas marre de l’éviter, à vrai dire, elle n’avait pas encore envisagé de cesser, elle s’imaginait qu’il déguerpirait de lui-même avec les contrariétés qu’il lui causait.
C’est finalement une voix boudeuse qui lui répond à travers la porte :


« Vous avez un cheval, faites-la tout seul votre balade, vous n’avez pas besoin de moi pour ça ! »

Et foutez le camp, nom de Dieu !

Elle lui dit juste pour le contrarier, parce que ça lui dit bien cette balade, avec le beau ciel bleu qui s’affiche au dehors. Mais elle préfère y renoncer et rester là à bouder dans son baquet en attendant que ça se passe, par fierté et par caprice. La compagnie du Gaélique lui manque. Et c’est bien ce qui la contrarie, en définitive.
Mathilda entrouvre finalement la porte et passe sa tête juvénile dans l’entrebâillement avant d’annoncer avec candeur à l’Irlandais :


« Revenez plus tard. »

Elle sera peut-être là. Ou pas.
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Finn
C'est fou ça. Faut-il toujours que les représentantes du beau sexe se cachent derrière une porte close ? Tout se passait sans doute à merveille du temps où un simple trou dans le mur suffisait. Alors pourquoi vouloir le combler ? Ça s'ouvre une porte, mais qui a eu l'idée débile de lui donner la possibilité de se fermer, hein ? Un homme et, de toute évidence, un qui n'aimait pas les siens. Un mal-aimé, brimé, ayant trouvé refuge dans la compagnie des femmes qu'il récompensa en leur offrant le pouvoir d'instaurer une barrière avec l'autre sexe. Le traître...

En cet instant, l'inventeur de cet odieux battant de bois agissant à sa guise ne ferait pas long feu entre les mains du Gaélique. La scène a comme un goût de déjà-vu. La Danoise n'aurait pas fait mieux. Combien de fois s'est-il retrouvé sur un coup de sang de celle-ci à deviser avec sa porte ? Trop pour lui donner l'envie de jongler avec ses souvenirs. Ou de s'en créer un nouveau. Les paroles de la camériste ont beau atténuer la sentence, elles ne font que rapprocher du dégoût le refoulé à l'entrée. Las de se battre, il n'insiste pas. Pour une fois, il ne forcera pas l'entrée qu'on lui refuse. Ni même ne formulera le moindre petit commentaire. La rappeler à ses obligations ? Pour quoi, une stupide promesse de balade à cheval ? Niet. Si elle n'en a pas l'envie, lui n'a pas celle de convaincre. Il n'est pas question de besoin, comme elle se l'était fait marteler d'un index sur le front dès le premier jour. Comme s'il avait besoin de s'infliger la compagnie d'une telle plaie sans autre motif que celui d'en raffoler. L'argent ? Sa radinerie légendaire l'a mis à l'abri du besoin pour plusieurs générations. Sa prétention à la noblesse ? Nulle et non avenue. Alors de besoin il n'est pas.

Lèvres pincées, dans un silence polaire, l'Irlandais tourne les talons. Après un détour par sa chambre, il vide les lieux. Son cheval apprêté à sa demande, il embarque pour la fameuse côte sauvage sur laquelle donnait sa fenêtre. Laissant derrière lui la petite fierté de cette sale gamine capricieuse synonyme de tant de trouble.

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Marzina
Elle attend, la réplique cinglante, l'action démesurée, le genre de truc auquel elle a droit habituellement. Et n'a pour seule réponse qu'un silence si glacial qu'il semble en faire refroidir l'eau du bain. Elle se recroqueville sur elle-même dans son baquet, avec cette inquiétude sourde qu'elle sent grandir en elle devant cette absence de réaction. Serait-elle donc en train de retenir sa respiration?

"Il est parti." annonce Mathilda en refermant doucement la porte.

Le cœur manque un battement. Et ça fait mal, un cœur qui décide de faire la grève comme ça, ne serait-ce que pour un seul battement. Elle la connait drôlement bien cette douleur là, mais on ne s'y habitue jamais vraiment, ça a un arrière-goût amer de mort dont on se passerait bien. Et cette stupide créature futile, ignorante des tenants et aboutissants, qui lui annonce ça comme elle annoncerait que c'est l'heure du dîner! Comment ça, "il est parti"? Où ça? Pourquoi faire? Pourquoi?!
La panique qui monte, avec le mauvais pressentiment. Elle voulait qu'il parte, et il est parti, non?
Et maintenant, elle voudrait qu'il soit resté.
Elle essaie de se détendre. Il est juste parti faire son tour tout seul, comme elle avait dit. Elle avait dit qu'elle restait ici, elle resterait ici. Dans son bain. Il est froid son bain. Y'a même plus de bulles. Mathilda tend une main vers elle, qui est sèchement repoussée. Elle en veut à Mathilda, de ne pas comprendre. Elle en veut à Finn, d'être parti quand même. Et elle s'en veut à elle, de regretter qu'il soit parti. Elle en veut à tout le monde, elle étouffe. Et elle se lève d'un bond, s'arrachant à l'eau parfumée pour se diriger vers la porte. Mathilda toute aussi vive, vient bloquer la porte de sa personne.


"Gast! Que faites-vous, sotte?! M'empêcheriez-vous de sortir?!"

Les yeux noirs se posent, assassins, sur la petite chose qui se met en travers de sa route. Une petite chose qui évite son regard et balbutie:

"Votre Altesse ne peut pas sortir dans cette tenue!"

Le regard de la blonde se détache de la camériste pour se poser sur la chemise de bain collée à elle comme une seconde peau, cachant à peine les détails d'un épiderme laiteux. Un contretemps. Encore.

"Et bien qu'attendez-vous pour faire votre travail?!"

L'âme tourmentée se fait cruelle, tremblante, arrachant presque les vêtements des mains de la jouvencelle qui lui semble excessivement lente. La chemise est ôtée, les dessous bien vite passés, et la robe à peine enfilée la blonde s'échappe. Elle sillonne les couloirs sans trop réfléchir, elle les connait par cœur. Elle répond à une impulsion, encore, elle fonctionne aux coups de sang la blonde.
Le cheval enfourché à cru, elle quitte le château sans trop savoir où aller. Perdue. Paumée. Abandonnée. Et sur une intuition, elle part vers la côte sauvage. N'avait-il pas dit qu'il lui tardait de la découvrir? Et elle espère, en cherchant des yeux sa silhouette, craignant qu'il n'ait disparu pour de bon. Elle le maudit. Elle se maudit. Et enfin elle le voit, là-bas plus loin. Avec tout son bordel sur le canasson. La colère la prend, et elle lui hurle:


"LOUKEZ*!"

Elle est là, juchée sur son cheval fauve, avec une robe enfilée à la va-vite, même pas lacée, complètement trempée, avec ses cheveux dégoulinants qui lui collent à la peau, et ses pieds nus noircis de terre qui se balancent dans le vide, et elle voudrait encore donner l'illusion qu'elle en a rien à faire qu'il parte de son coté.

"Vous m'avez même pas dit au revoir!"

Une excuse comme une autre.
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*couillon
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Finn
L'Irlandais ne s'en est pas allé bien loin. Le coursier tacheté ayant préféré stationner à flanc de falaise pour arracher quelques touffes de verdure, et son cavalier n'ayant pas eu le courage de l'en empêcher, le voilà observant les vagues s'échouer avec perte et fracas contre les récifs. Indécis. Non qu'il hésite à se jeter dans le vide, plutôt que le va-et-vient familier l'apaise par sa violence. Jusqu'à le rendre presque apathique à la perspective de déserter Quiberon. Une partie de sa vie est empaquetée sur la croupe du Napolitain qu'il tente mollement de relancer. Sans conviction.

- « Allez quoi, bouge... »

Au lieu de ça, la tête aux longs naseaux lève un œil dubitatif sur l'occupant de sa selle. Un de ces regards qui l'encouragent d'un « Je sais que tu peux faire mieux que ça, mon gars. ». Visiblement pas près de décarrer et retournant à sa mastication le temps que l'autre frisé décide s'il est mâle ou femelle. Lequel a comme l'impression qu'on se fout un tantinet de sa gueule. Et ce soleil qui lui tape sur le crâne. Et le faux-frère qui lui fait le coup de la panne. Et...

- « LOUKEZ ! »

Le Gaélique se retourne subitement.
Huh ? Kesako ? Plaît-il ?

Il lui faut plisser les yeux pour reconnaître la Montfort derrière le portrait d'une grossière souillon posée sur un cheval. Méconnaissable, l'Altesse d'ordinaire si fière. Aurait-elle décidé de retourner à l'état sauvage ? Chassant la foule d'interrogations qui se bousculent sous ses frisons, le faciès adopte le petit air constipé si cher à son orgueil. Sauver les apparences, c'est tout ce qu'il lui reste après l'échec de sa fuite.


- « C'est que.. je sais pas encore si je pars ! »

Bien joué. Sûr que tu mérites ton titre maintenant : loukez !

Le vieux peste dans la broussaille de sa barbe, l'envisageant un moment. Sa méfiance gagne du terrain. Encore un caprice ? Qu'est-ce qu'elle fout là ? L'Insulaire ne veut pas voir, il ne veut pas comprendre de quoi il retourne vraiment, quelque part blessé. Ce serait trop facile.


- « Vous, retournez vous enfermer dans votre chambre ! J'en ai plein l'cul ! »

Rancœur confuse qui éclate alors qu'il remet sa monture au pas, amorçant une retraite en crabe, l'œil farouchement rivé sur l'échevelée comme s'il craignait qu'elle ne cherche à le rattraper. Comme si...
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Marzina
Il est là un peu plus loin, perché sur SON bout de rocher. SON bout de rocher à ELLE. Il peut pas décider comme ça d'y mettre le boxon, et puis de se casser! Il lui a reproché à elle, et maintenant, il ose faire de même! Ça la rend folle de rage. Elle s'est pas extirpée de son bain et trimballée dans une tenue aussi peu appropriée à son rang pour le regarder se casser, même si c'est elle qui lui a demandé. D'autant plus que c'est elle qui lui a demandé! Ça lui rappelle trop un blond mainois que de rage et de douleur, elle avait renvoyé chez lui. Et qui n'est jamais revenu. Et pour cause, maintenant il était mort, il ne risquait pas de revenir honorer sa promesse. Ça l'avait gravée au fer rouge.

- « C'est que.. je sais pas encore si je pars ! »

Le nez se fronce de contrariété. S'il ne sait pas, elle, elle sait à sa place! Il se casse pas, il reste ici un point c'est tout! Et avec le sourire en plus! GAST!
Le cheval fauve se rapproche en trottinant de son homologue grisâtre. Elle saute à bas de sa monture, n'attendant même pas qu'elle s'arrête pour ça, atterrissant lestement sur ses deux pieds nus sur le sol dur et froid de la côte ouest. Et empoignant le bas de sa robe qu'elle soulève pour trottiner à son tour, elle se plante devant l'Irlandais et sa monture, lui adressant un regard farouche et écartant les bras comme si ça pouvait l'empêcher de passer, un air buté sur le visage.


"J'ai décidé à votre place, vous restez!"

C'est comme ça et puis c'est tout. Le sujet est clos, comme elle dirait!

"M'obligez pas à vous faire tomber de votre cheval!"

Et elle le ferait. Il n'avait qu'à se souvenir du coup du piège à loups, s'il ne l'en croyait pas capable!
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Finn
Elle se rapproche et sa monture esquisse un pas de côté. Au jeu du chat et de la souris, ils sont champions. Un « fuis-moi j'te suis, suis-moi j'te fuis » qui dure depuis que le sort, dans son goût pour les situations foireuses, a eu le malheur de les réunir dans une armée Penthièvre. Un jeu qui perdure alors même qu'il ne joue plus. La retraite est coupée par le rempart Montfort, la Princesse se faisant aussi sauvage que le vulgaire porte-glaive se fait altier en se redressant sur sa selle. Il la toise alors et lui tient tête d'une paire de prunelles noires souffrant le même entêtement.

La Bretonne ne parlemente pas, elle décrète. Elle le somme de rester.
Pourquoi ? Pour qui ? Pour elle ?
Elle le pousse à chercher les raisons de ce revirement.

Ce que chaque parcelle de son épiderme couturé répugne à faire et dénonce d'un âpre frisson lui glaçant l'échine. Se lier par le serment oui, mais s'attacher au-delà de la contrainte professionnelle ne faisait pas partie du contrat. Un long moment, le vieux grison dévisage l'audace qui se targue de menaces. De cette façon qui a précédé des nuits solitaires et sans sommeil, et à plusieurs reprises. Dans l'espoir que peut-être, cette fois encore, les boucles blondes reculeront face à la profondeur de l'entaille creusée dans sa carapace. Celle qui n'a pas la décence de se refermer, visiblement destinée à le lancer chaque fois qu'il croisera ce minois plein de morgue, mais trop pudique pour affronter son œuvre en face.

Déjouant finalement la mise au défi, l'Irlandais abandonne ses étriers pour retrouver abruptement le plancher des vaches. Le dernier pari avait failli entraîner la perte de son pied. Ce fut également le premier, alors il avait payé le prix de son ignorance du degré de culot qui sévissait chez la Montfort. Car contre toute attente, elle avait osé franchir le seuil de sa tente pour y déposer cette saleté de piège à loup. Elle, pas lui.

La distance qui les sépare est réduite à néant, ou presque. À une longueur de bras, son regard n'a toujours pas daigné se détourner, cherchant le sien inlassablement contre l'avis du palpitant qui s'acharne dans sa poitrine « Fuis pauvre fou ! ». Nouveau défi :


- « Vous tenez à ce que je reste ? Prouvez-le. »

Alors.. sur quoi on tire un trait aujourd'hui ?
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Marzina
Elle affronte son regard sans ciller, sans se démonter, parce qu'à ce moment-là, la détermination est bien plus forte que n'importe quelle gêne qu'elle pourrait ressentir, reflétant la devise Montfort. Jusqu'à la victoire, toujours. Plutôt crever que de lâcher quand elle a décidé quelque chose! Et elle a décidé qu'il ne devait pas partir. L'idée lui déplaisait. Plus que ça, l'idée lui faisait mal. Et dans toute l'étendue de son égoïsme, elle décrète que si elle doit souffrir de son absence, alors il doit rester. Elle ne s'interroge même pas sur son point de vue à lui, penser aux autres ne lui est pas naturel. C'est un concept qu'elle apprend avec sa filleule.
Tout comme avec lui elle apprend la confiance. La tendresse aussi.
Et finalement la victoire prend la forme d'un Irlandais à terre. Du moins ses pieds. Un début de victoire seulement, parce qu'alors qu'il s'avance vers elle, elle lit dans ses yeux qu'il ne compte pas lui donner satisfaction si facilement. Alors elle continue de planter des yeux insolents dans les siens, pour lui dire que ce n'est pas la peine d'escompter d'elle qu'elle change d'avis, et elle se tient sur ses gardes parce qu'il s'approche avec l'allure de l'animal blessé qui revient donner une dernière charge avant d'aller crever dans un coin. Et ce regard qu'il pose sur elle! Elle ne l'aime pas. Il semble chargé d'attentes, d'espérance, ça la dérange. Et pourtant elle l'affronte, parce qu'il lui semble bien moins difficile d'y faire front que de se retrouver face à son absence.


- « Vous tenez à ce que je reste ? Prouvez-le. »

Elle s'attendait pas vraiment à ça, la bretonne, et semble décontenancée un moment. Bien sûr qu'elle tient à ce qu'il reste! Il dit ça comme si elle était venue là, débraillée et trempée, à lui débiter des trucs stupides pour ne pas qu'il parte, sans vraiment tenir à ce qu'il reste! En réponse, les yeux noirs agressent les siens un moment, et elle envisage l'espace d'un instant de lui asséner une gifle magistrale, parce qu'elle a quand même l'impression qu'il se paie sa tronche là. Puis elle se dit que comme preuve, on a vu mieux, alors elle n'en fait rien.
Prouvez-le. Comment est-elle donc censé le prouver?! Elle le veut, c'est comme ça, elle le ressent partout en elle, le besoin de l'avoir tout contre elle, un peu plus violent chaque jour. Elle n'arrive pas à l'accepter, parce que ça la tue, mais elle a besoin de lui.
Alors d'un pas elle parcourt les quelques centimètres qui les séparent encore, et elle l'enlace tout contre elle, l'emprisonne de ses bras. Voilà, c'est fait, il ne peut plus partir maintenant, parce qu'elle ne relâchera pas ses bras. S'il part, il devra l'emmener avec lui. Et elle blottit son nez dans son cou, humant le parfum de sa peau à s'en rendre malade, parce qu'elle a bien cru un instant ne plus jamais pouvoir le faire. Et elle frissonne, parce qu'elle a froid, parce qu'elle est trempée, parce que ses pieds sont nus, et parce que maintenant qu'elle est contre lui, elle se rend pleinement compte de la peur qu'elle a eu de le perdre, et ça l'effraie encore plus. Alors elle resserre les bras, désespérément, et d'une voix à peine audible elle implore.


"Partez pas sans moi."
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Finn
Cette Blonde, elle ne sait décidément rien faire comme tout le monde. Le défi semble lui attirer ses foudres un instant qui lui semble le moment propice pour se voir cordialement gratifier d'une de ces fameuses caresses Montfort. Mais même pas, et elle ne recule pas non plus. Le cygne n'est pas près de s'envoler, il fuit vers l'avant. Sa défense c'est l'attaque, on le sait à force. La dépenaillée se jette dans ses bras, décidée à y faire son nid.

Chez lui, la tempête fait rage. Non contente d'éluder la mise à l'épreuve, elle fait voler en éclat ce qui lui restait d'hésitation. Désarmé par une petite poitrine mal boutonnée cherchant la chaleur de son torse, ses poings se ferment à s'en faire blanchir les jointures. Il lutterait bien, si seulement il en était capable. Son corps appelle le sien de tous ses vœux et bientôt ses mots.

Un frisson, encore un, qui cette fois-ci fait écho au sien.


- « Vous avez froid. »

Et une constatation, une, déployant des trésors de perspicacité.

Mais qui achève de le convaincre, mettant un terme à sa résistance. Ses doigts se délient et gravissent avec précaution l'échine trempée tandis que ses bras verrouillent l'étreinte, se resserrant solidement autour de la fine silhouette. Aujourd'hui, il fait trop chaud pour avoir froid.

Et comme pour lui signifier que l'orage est passé, sa paume se greffe sur sa joue, écartant du pouce quelques filins collés à sa peau pour ouvrir son regard sur le sien. Un sourire fugace brisant l'espace d'une seconde l'austérité de ses traits.


- « Montrez-moi votre île. J'ai pas envie de rentrer tout de suite. »

Non, il ne part plus.

Mais revenir s'enfermer au château n'est pas de son goût. Profiter de quelques instants volés à l'abri des regards l'est déjà plus.

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Marzina
Elle attend, un peu anxieuse, sa réaction. Elle a toujours en elle cette peur qu'il la repousse, et qu'il parte quand même, malgré l'étreinte, malgré la supplication. Elle le sent crispé entre ses bras, aussi ne les desserre-t-elle pas. Jusqu'à ce qu'il semble se détendre, et qu'elle vienne à sentir ses mains se poser dans son dos, ses bras qui se glissent autour d'elle. Alors elle se détend à son tour, reprend sa respiration, se blottit doucement contre lui, rassurée. Il ne partira pas. Et elle vient chercher la chaleur de son corps pour réchauffer le sien, glacée par les vêtements trempés qui retiennent la froidure du vent.
Une main caressante chatouille sa joue d'un pouce rugueux, et elle lève vers lui les yeux, scrutant les siens avec précaution. Visiter l'île? Face à face des pupilles, et elle répond.


"Bien. Mais évitons les endroits peuplés, je ne suis pas vraiment en tenue pour aller à la rencontre de mes gens."

Après tout, elle est celle qui gouverne ces terres, elle n'a pas envie de donner cette image d'elle à ceux qui chaque jour travaillent pour elle. Ne serait-ce que pour préserver le sentiment de fierté des habitants d'appartenir à cette île, de l'avoir pour baronne. Elle vient alors déposer un doux baiser sur ses lèvres, tout en retenue, passant à son tour une main caressante sur la joue rêche, les doigts venant finalement se perdre dans les frisons qu'elle aime tant.

"Auriez-vous une cape dans votre foutoir?"

Elle tourne les yeux vers le gris pommelé . Parce qu'à l'idée de quitter ses bras, elle a froid. Et elle grommelle.

"J'ai froid, je vais attraper la mort."

Parce qu'avec lui, il faut toujours préciser les choses.
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Finn
Elle râle et lui s'en amuse. La mort... N'exagérons rien. Son bras s'éloigne juste le temps de se tendre vers le canasson pour répondre à la demande. Sans cérémonial, il l'enveloppe dans sa vieille cape trouée. Simplement. Parce qu'elle a froid et que c'est un peu de sa faute. Culpabilité amortie d'un baiser qui lui effleure à peine les lèvres, à l'image du sien. Les excuses c'est pas son truc. Les mots, pas toujours non plus. Et là, ces prunelles accaparent toute son attention. Il lui faut pourtant s'en détacher afin de regagner sa selle et envisager la suite.

Besoin de s'évader, d'oublier le quotidien réglementé du château et la pression inquisitrice de l'entourage. Pour quelques heures, une journée, qu'importe. S'échapper du carcan étouffant d'une réalité parfois plus compliquée qu'on le voudrait. Car c'est en partie pour ça que l'Insulaire souhaitait tant découvrir son bras de terre. Alors il n'est plus question d'ergoter maintenant qu'il y est. L'Insulaire la hisse aussi sec à l'avant du destrier, sans sommation, et souffle sur les boucles blondes :


- « Aujourd'hui, je vous enlève. »

D'un nouveau baiser, ses lèvres impriment le caprice sur sa nuque tandis qu'il place les rênes entre les mains diaphanes de sa prisonnière. Chose rare, lui qui a toujours refusé que l'on siège sur sa monture. À plus forte raison l'une de ces créatures que l'on nomme femelle. À croire que celle-ci ne doit pas être tout à fait semblable aux autres.
Puis d'une simple pression des genoux sur les flancs de la noble bête et d'un mouvement du bassin qui l'arrime contre sa passagère, il lance la monture au galop.


- « Où va-t-on ?.. »

C'est toi qui mènes, Princesse.
Le sourire renaît, il s'abandonne. Même pas peur.

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Marzina
La cape est jetée sur ses épaules, et elle s’en étonne. Qu’il cède si facilement à la demande, qu’il prête ses affaires, et le tout sans grogner…Elle ne va pas s’en plaindre, loin de là, et s’y emmitoufle sans dire un mot, mais quand même elle est impressionnée, et lui jette un regard à la dérobée. Il ne semble même pas contrarié. La toile a les odeurs du voyage, mélange confus d’où se dégage majoritairement les effluves de fumée et de cheval. Non ! Elle va résister à la tentation de se plaindre… De toute façon, même si elle avait voulu le faire, comment aurait-elle encore pu après le charmant baiser qu’il vient lui rendre ? Elle perd donc momentanément l’usage de la parole, trop décontenancée par sa sollicitude pour oser récriminer contre quoi que ce soit. L’espace d’un instant, elle se demande comment il survit aux hivers dehors avec ça. Car, pour être honnête, ça n’a rien à voir avec la douce chaleur de sa cape à elle doublée d’hermine, à peine ça la protège du vent, et encore, y’a des trous dans le tissu, et elle imagine fort le fourbe vent glacial de l’hiver venir s’y glisser ! Mais pour l’heure, c’est bien suffisant, vu que c’est l’été de toute façon. En tout cas, maintenant c’est sûr, on ne risque plus de la reconnaitre !
Tandis qu’il regagne son cheval, elle fait claquer la langue pour faire revenir le sien, parti brouter l’herbe apparemment plus verte plus loin. Il relève nonchalamment la tête et s’approche en trainant des pattes, dérangé dans son repas mais sachant qu’il ne pourra pas y couper. Elle ne s’attendait pas à être agrippée de la sorte, et encore moins à sentir ses pieds se décoller du sol. Pour atterrir lourdement sur un cheval. Qui n’est assurément pas le sien. Wéééé, mais qui va s’occuper de mon chevaaaal ! Elle jette un regard à Finn, de plus en plus intriguée pour le coup. M’enfin soit. Bien qu’elle doute que ça soit très confortable pour le cheval. Mais qui se soucie du cheval ici ? Un sourire puéril se dessine sur ses lèvres tandis que celles de l’Irlandais se posent dans son cou. Non, personne ne se préoccupe de ce pauvre cheval, et Marzina attrape les rênes qu’il lui tend. Il lance le cheval au galop. C’est étrange, être à cheval, et avoir l’impression de ne pas en maitriser l’allure. Le sentir lui là dans son dos, derrière elle, ça l’est aussi. Pas vraiment étrange en fait, qu’elle se dit, plutôt déroutant. Comme si elle sentait physiquement la protection qu’il avait dit lui accorder. Et là, à ce moment-là seulement, elle se rend compte qu’ils ne sont vraiment que tous les deux. Sûrement plus isolés encore que lors du chemin de retour vers la Bretagne, avec tous les compagnons de voyage si près. Seulement tous les deux. Une situation aussi satisfaisante qu’elle est flippante, un peu. L’impression de sauter sans filet. L’appréhension de ce qui ressemble à une intimité plus grande encore que celle qu’ils ont pu partager.
Où on va ?
Bonne question, où on va !…Ça mérite réflexion aussi ! Il a lancé le cheval au galop comme ça, droit devant, et bim ! Maintenant elle se retrouve avec les rênes et vas-y, démerde-toi pour nous trouver une direction !
Vers le bout du monde alors. Ou du moins de son monde, Quiberon. Elle suivit la côte sauvage aux rochers sculptés par le vent et la houle où venaient mourir les vagues en mugissant. Alors elle se lance et se fait pour la première fois guide de ces terres sur lesquelles elle n’avait jamais laissé se poser un pied étranger.


« La côte sauvage s’étend sur environ vingt-quatre kilobinious et des poussières*. Je vous emmène à son extrémité sud, la pointe du Conguel. A Saint-Pierre-Quiberon vous avez l’autre extrémité, la pointe du Percho, d’où vous pourrez voir Belle Ile, et l’île de Groix qui devrait revenir à Alix Ann, sur les terres du cousin Marick duc d’Hennebont. »

Tout autour d’eux, les petites fleurs parsemaient la lande de tâches de couleur violette et jaune parmi la végétation basse qui rampait sur le sol dur. Elle lui désigna de la main une plage en contrebas.

« Il y a quatre plages comme celle-ci de ce côté de la côte, les vagues y sont violentes et à marée basse le sable est couvert de gros rochers. Ici, à l’ouest, la mer ne se calme jamais, elle est toujours déchainée. Il y a beaucoup de vent, c’est pourquoi elle est perpétuellement blanche et l’écume a tendance à s’envoler en petits nuages de mousse quand le vent souffle un peu plus fort. C’est particulièrement beau lors des tempêtes. »

Après réflexion, elle ajouta :

« Il y a aussi quelques grottes bien cachées par ici, la plupart ne sont accessibles qu’à marée basse. J’envisage d’en faire quelques caches, en prévision d’éventuelles guerres. »

Si elle devait en faire son vassal, il était temps de lui faire confiance sur ce genre de choses.
Après avoir galopé un moment, ils longèrent enfin la forêt et s’avancèrent vers la fine langue de sable rejoignant une faible étendue de terre. La Pointe du Conguel. La presqu’île miniature de la presqu’île. Une petite touffe d’arbres à l’entrée, puis la longue étendue de terre plate et désolée venait prendre fin, parsemant l’océan de rochers avant d’y disparaitre. Les fortes bourrasques avaient fait sécher les longues boucles blondes sérieusement emmêlées et venait maintenant les narguer au gré de ses envies. Tandis qu’ils arrivaient à l’extrémité de la pointe, elle fit ralentir le cheval et se tourna vers lui, se penchant alors vers son oreille pour lui parler malgré le bruit du vent, lui désignant de la main ce qu’elle lui décrivait.


« Le premier petit îlot, c’est Toul-Bihan, qu’on peut rejoindre à pied aux grandes marées. Et juste derrière, c’est Toul-Bras, où les ancêtres ont laissé un cimetière. L’île plus loin, c’est Houat. Et la grande île à votre droite, c’est Belle Ile. Le détroit entre l’île d’Houat et ici, c’est le passage de la Teignouse. Il est difficile à passer à cause du vent et des courants, il y a beaucoup de clapot, sans parler des roches invisibles, autant dire que de nuit les marins ne s’y risquent pas. »

Visite du sud est de la côte sauvage, voilà qui est fait. La blonde rajuste sur ses épaules la cape qui menace de s’envoler. Et puis elle relève le visage vers lui, cherchant ses yeux des siens. Et laissant transparaitre un grand sourire radieux, chose rare, elle lui demande entre deux rugissements du vent :

« Alors, ça vous plait ? Vous n’êtes pas trop déçu ? »
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*pour rappel, cf la décision du GD Amalric de Brocéliande : http://www.univers-rr.com/RPartage/index.php?page=rp&id=306&start=0
1 mètre = 3 binious et des poussières

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Finn
Vers le Sud, donc. À l'opposé du continent et de la fuite envisagée, puis avortée.

Drôle de sensation que celle de ne pas maîtriser sa direction, tout juste son allure, qu'il ne freinerait pour rien au monde. Là, filant au vent, avec la voix de son guide en toile de fond, le Gaélique se sent pousser des racines. C'est beau une île, même presque. Petite certes, mais si riche. Au paysage naturel s'ajoute le parfum du sel marin, le fracas des vagues, tous ces éléments susceptibles de les isoler du monde civilisé, extérieur à cette bulle créée de toute pièce par ses commentaires, et s'ouvrant toujours plus sur la mer. Alors il écoute l'histoire, note les précisions, les retient, pour se plonger encore davantage dans son univers. Ses yeux vérifient chaque information, s'accrochent au moindre détail comme s'il cherchait à tout conserver en mémoire. Et quand le lieu n'est pas au rendez-vous, qu'il n'a que le nom à se mettre sous la dent, l'Irlandais se l'imagine.

La Pointe du Conguel se dessine, elle, bien réelle. L'extrémité Sud à portée de mains. L'allure ralentit, de quoi s'attarder un peu sur cette langue de terre que vient lécher une mer de mousse blanche. Le regard tourné vers le large, son désir de prolonger la découverte le presse de relancer la course. Pourtant, ils sont bien là, presque encerclés par l'écume. Une île à l'intérieur de l'île. Pourquoi bouger ? Elle l'a mené le plus loin possible, conformément à son souhait pourtant demeuré secret, comme si elle avait deviné ce qui se tramait derrière cette couche de muscles figés. Lequel profil mort s'épargne la pénible esquisse d'un sourire pour mieux trahir l'émerveillement imprimé dans ses prunelles, une fois braquées sur les siennes.


- « Si, affreusement. Ramenez-moi deux mois en arrière. »

Impossible, puisqu'il fait prisonnières des rênes les mains à qui elles furent confiées, les serrant involontairement entre ses paumes scabres. Et ne fixant plus que le visage qui l'a amené si loin de Chinon et du reste, ses lèvres viennent s'enquérir de son consentement à s'éterniser un peu ici. D'un baiser qui en dit long, plus que des paroles soufflées entre deux caresses :

« Vous avez déjà fait l'amour sur un cheval, Marzina ? »
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Marzina
Les yeux noirs avaient parcouru les siens pour y chercher sa réponse, pour y lire ce que la visite avait bien pu graver en lui. De toute façon le doute n’était pas permis, la côte sauvage quiberonnaise faisait partie des plus beaux paysages que l’on puisse apercevoir sur le continent, il eût été étonnant qu’il ne l’apprécie pas. Ce qu’elle y lut sembla la satisfaire, car le sourire ne la quitta pas, malgré la réponse qu’il lui donne. Le ramener deux mois en arrière ? Comme si c’était encore possible…Trop de choses s’étaient passées depuis, trop de choses avaient été vues, faites, dites durant le voyage avant même d’arriver en Bretagne pour pouvoir espérer faire demi-tour et tout effacer. Alors le sourire se fait espiègle tandis qu’elle lui rétorque.

« Deux mois en arrière ? »

Coup d’œil à gauche, coup d’œil à droite.

« Je ne vois aucune porte sur laquelle prendre appui… »

Les yeux amusés reviennent ensuite narguer les siens à l’évocation de cette nuit passée à l’étage supérieur, dans cette taverne de Chinon. Une nuit qui n’aurait jamais eu lieu s’il ne l’avait pas retenue, la blonde étant sur le point de prendre ses jambes à son cou au moment même où il s’est mis à répliquer à ses provocations. Chose qu’elle s’apprête de nouveau à faire, et elle se demande s’il l’a compris, car ses mains viennent emprisonner les siennes comme pour l’en empêcher. Les yeux princiers contrariés viennent donc se poser sur ces mains qui se font geôlières en se resserrant sur les siennes. Venait-il de lui confier les rênes pour mieux lui confisquer ensuite ? Elle se sent soudainement prise au piège sous ces yeux qui la scrutent, ces mains qui la parcourent, et même ces lèvres devenues trop loquaces sur les siennes. L’indécision pointe le bout de son nez, sentiment on ne peut plus marzinesque auquel toute personne qui la fréquente un tant soit peu se voit confrontée un jour. Elle est bien ici, et elle se sent bien entre ses bras, et pourtant l’instinct vient marteler son esprit d’avertissements paniqués lui intimant une échappée rapide. Ce dernier s’affole un peu plus à ses paroles, perdant les pédales alors qu’il souffle les trois dernières syllabes. Elle retient un rire nerveux et le « Ah vous vous en souvenez ça me rassure » qui manque de passer ses lèvres. Non, à la place c’est un perturbé :

« Hahaha. Vous avez de ces blagues parfois ! »

Oui, prendre ça sur le ton de la blague, parce que le canasson a déjà du mal à les porter tous les deux, alors imaginer quoique ce soit se passer sur ces dos-là semblait juste impensable.
Enfin quelqu’un qui a une pensée pour ce pauvre cheval !
Et enfin elle assène plus sérieusement, récupérant ses facultés intellectuelles.


« Un cheval ça bouge. Et puis nous aussi en plus. Les deux ne sont clairement pas compatibles. Alors moi je m’en fiche bien de faire ça sur un cheval, la porte d’une chambre, par terre ou sur vos sacs de voyage, mais faut savoir être lucide et accepter ses limites Finn. Sur un cheval, c’est techniquement pas possible. »
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