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[RP] Que l’Sans-Nom patafiole tous les Lebergier d’la terre

Adalasie
    « Ça caille. »

    La nuit commence lentement à s'installer, les marchands remballent leurs affaires, les mères appellent leurs marmots, les badauds rentrent chez eux. L'animation de la capitale s'éteint peu à peu.

    « Ça caille, vraiment. »

    Jusque là assise sur un tonneau devant la taverne, Adalasie traversa la rue pour s'installer sous un porche qui la protégerait du froid tout en attendant la morveuse.
    Il fallait vraiment qu'elle s'achète des vêtements plus chauds, et c'est ce qu'elle était venue faire avant de tomber sur Mimi la manchote. Toujours en train de lui poser des problèmes la môme, elle n'avait pas changé.

    La gueuse guettait sa sœur tout en se frottant vigoureusement les bras pour tenter de se réchauffer. Si elle n'était pas sortie dans cinq minutes, elle irait jeter un œil par la fenêtre pour vérifier son état de santé.

    Option 1 : Elle est toujours en vie.
    Dans ce cas, elle entrerait pour lui dire de bouger ses fesses.

    Option 2 : Elle gît sur le sol, une choppe brisée près de la caboche.
    Dans ce cas, elle irait trouver un hôtel toute seule pour passer la nuit. Un tavernier en colère, c'est trop dangereux.

    Heureusement pour la brune, elle n'eut pas besoin d'attendre aussi longtemps. Le museau de sa frangine faisait enfin son apparition.


    … et t’livre aux gardes !

    La brune n'avait pas entendu le début de la phrase, à cause de la distance et du bruit dans la rue, mais la fin l'interloqua.

    C'est à moi qu'elle parle ?

    La brune resta quelques instants abasourdie. Quel culot ! Non seulement elle la poignardait dans le dos mais en plus elle partait à sa recherche pour la dénoncer aux gardes. Sa propre frangine ? Lui faire ça ? Mais pourquoi ? A cause des chevaliers de Bouillon ? Fallait pas se mettre dans des états pareils pour des hommes...

    Se levant précipitamment, elle traversa la foule d'un pas décidé pour aller lui botter l'arrière-train. Leurs retrouvailles ne s'étaient pas trop mal déroulées jusqu’à maintenant, mais si la morveuse voulait les conclure par une castagne, Adalasie était prête.
    En quelques pas, elle arriva juste derrière elle. Et alors qu'elle s’apprêtait à lui choper son hibou crevé pour le réduire en charpie, elle arrêta net son geste.


    Hé, pssst…! Ada ! Ousque t’es ? Tu boudes ? C’tait pour rigoler, t’sais.

    Son heure n'avait pas encore sonné ; elle s'en sortait bien pour cette fois.

    Mouef, c'est ça. Pour prouver ta bonne foi, aide moi à trouver un endroit où pioncer cette nuit.

    Lui choppant le bras, elle la traîna loin de la taverne.

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Minah
Sursaut, hoquet réprimé.
Bordel ! La frangine avait le pied léger ! On ne l’entendait pas arriver.
Elle n’était pas tire-laine pour rien… Et ne devait pas souvent manquer de pain.

Ouah ! M’fous pas la frousse !

Deux fois la journée, ça suffisait comme ça. Nan mais oh.
Surtout que l’écuyère, prompte à la baston, avait posé la patte à l’épée avant même de s’en rendre compte.
Les deux sœurs avaient intérêt à changer de rituel de salutation, et vite, avant que ça ne finisse en attaque. Cardiaque ou ferrailleuse.


Et pis arrête de m’traîner comme ça !

L’animal se tortillait du mieux qu’elle pouvait, tirant, poussant, grognant pour se libérer du joug fraternel.
Et pourtant, elle n’avait d’autre choix que de presser le pas avant de se faire traîner sur les pavés.


J’ai pu cinq ans ! C’pas la peine de m’tenir comme un p’tit chien !

Le ton de la protestation, geignard à souhait, suggérait le contraire. Rien de tel que la famille pour vous renvoyer direct en enfance, que vous le vouliez ou non.
Le Très-haut soit remercié, il n’y avait personne à qui raconter des anecdotes embarrassantes ! Concernant les Lebergier, les anecdotes embarrassantes constituaient une biographie à part entière.

La Châtaigne finit par se dégager et s’ébroua avec mauvaise humeur.


Un coin où crécher ? ‘Vois pas. Les aut’ fois où chuis montée à Paris, j’ai dormi dehors. Mais y f’sait pu chaud qu’ça.


Léger frisson. Le temps fraîchissait vite une fois la fin de l’après-midi tombé.
La couche de crasse protégeait Minah du froid, du moins l’affirmait-elle pour faire taire les incommodés, mais elle resserra tout de même sa pèlerine autour de ses épaules.


Là j’loge ‘vec ma patronne. J’pense pas qu’elle t’laisse entrer dans les appart’ments, mais t’peux p’têt dormir aux écuries dans la stalle de Sel’. Faut s’mett’ sur l’côté sinon elle va t’marcher d’ssus mais sinon c’pas si mal. La paille est fraîche.


Levant le groin pour mieux se repérer, la Bête tourna au coin d'une rue.

Viens, c'par là. J'crois.

Pas citadine, la bestiole, et ça se voit.
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Adalasie
    Adalasie continuait de traîner sa frangine sans ménagement tout en ignorant ses protestations.
    Malgré l'odeur pestilentielle qui émanait de sa jeune sœur, la tenir près d'elle lui coupait le vent et la tenait au chaud. Fallait bien qu'elle serve à quelque chose non ?


    Toi ? Plus une enfant ? Jusqu'à maintenant c'est pas l'impression que tu me donnes.

    La brune s'était retournée vers la môme et la toisait avec une moue moqueuse.

    Comment la sauvageonne qui gesticulait dans tous les sens comme un animal pris au piège avait-elle pu devenir écuyère ? Au fond, savoir qu'au moins une de ses frangines avait choisi une autre vie que celle qui leur était destinée lui faisait plaisir. Ça voulait dire qu'elle n'était pas la seule à avoir déserté le cocon familial, pas la seule à avoir choisi une certaine forme d'indépendance.
    Il est vrai que dans sa quête de « normalité », elle s'était souvent demandé si elle n'aurait pas du rester auprès des siens, épouser un garçon du coin qui la connaissait depuis l'enfance et travailler à ses côtés. Avoir sa frangine à ses côtés, loin de chez elles, la confortait dans ses choix.

    Elle aurait d'ailleurs pu lui dire qu'elle était contente de l'avoir retrouvée... Peut-être même que la manchote aurait apprécié ? Mais il ne fallait pas trop lui en demander à Ada.

    Alors que sa cadette continuait de s'agiter, elle desserra son emprise avant de se faire envoyer valdinguer. Grand bien lui en prit puisque la môme se dégagea quelques instants plus tard.


    Rhhooo, boude pas ! C'était pas méchant.

    La gueuse s'écarta de Minah pour respirer plus normalement et apaiser ses sinus.

    Dis, c'est quand la dernière fois que t'as pris un bain toi ? Tu schlingues.

    Tact et délicatesse ? Vous aviez toujours pas compris qu'ils font défaut chez la brunette ? Maintenant c'est fait.

    Une écurie ? Ça me va.

    Un petit merci quand même ? Non, faut pas rêver.
    Ada était déjà en train de se réjouir intérieurement : de la paille plus un cheval, elle ne mourrait pas de froid ce soir. Puis il y aurait sûrement un abreuvoir, chose pratique pour se rincer de la crasse.
    Et peut-être même qu'elle pourrait aider sa frangine à y faire un plongeon ? Ça ne pourrait que lui faire du bien.


    Je te suis.

    Adalasie emboîta le pas de sœur qui semblait plus ou moins savoir où elle allait. Espérons que ce ne soit pas trop loin, elle n'avait pas envie de finir gelée.

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Minah
Un bain ! Un bain !

Les yeux au ciel, prenant le Très-Haut à témoin, Minah agitait sa patte et demi au dessus de sa tête en signe d’outrage suprême.

Mais qu’est-ce que z’avez tous ‘vec ce mot-là ? Il vous haaaaante, ma parole !

Surtout quand elle était dans les parages. Dingue, cette coïncidence.
La Bête prit une grande inspiration comme si elle appelait tout le courage en elle pour faire entendre raison à son ignare de sœur en matière de crasse.


La crasse, ça protège du soleil pis des moustiques en été. Du froid pis du vent en hiver. Sur l’champ d’bataille, tu t’fonds dans l’paysage. Si t’as croisé quelqu’un qu’t’aime pas, pas d’soucis, sous l’cracra y t’reconnaîtra pas. En plus, c’est assorti avec l’odeur de Philémon. C’te classe. Y’en a pas beaucoup qu’ont l’parfum assorti à c’ui d’leur coiffes, même chez les nob’.

Avec tous ces incultes, il faudrait bientôt écrire un ouvrage sur les bienfaits de la bouillasse.
Les porcs l’avaient bien compris, eux, alors pourquoi pas les hommes ? Il y avait certaines ressemblances entre les deux races pourtant.


Un bain ! Nan mais j’vous jure…

Dernier sursaut d’indignation.

Ah, on y est.

L’écuyère adressa quelques mots à un type qui poireautait dans le coin, sans doute un quelconque gardien des lieux, et poussa la porte de chêne cerclé de fer de l’écurie attenante à un grand établissement de ville.
Si la porte était assez large pour laisser deux chevaux passer de front, le reste de l’endroit paraissait étriqué, coincé entre les épais murs de pierres et le plafond bas. La lumière y était rare, les bougies presque bannies pour ne pas enflammer par mégarde la paille qui jonchait le sol en un épais tapis jaune et craquant. Séparés par des panneaux de bois, la longe nouée à des anneaux coincés dans la pierre, quelques montures somnolaient. Les chevaux de la patronne, la bourrique dont Zehanne avait hérité depuis que Minah avait gagné son propre roncin.


Entre, fit-elle à la frangine Lebergier. Fais comme chez toi. ‘Fin, « emprunte » rin quand même… Là, j’te présente Sel. T’peux dormir ‘vec elle.

D’un geste du moignon, avec une fierté évidente, la bestiole désigna une camarguaise de petite stature et au crin hirsute. Elle avait les jambes gris anthracite, le ventre et les flancs ornés d’un pommelage marqué mais son dos paraissait presque blanc.
Sélène-la-jument-qui-tient-debout (car tel était son nom) dressa une oreille au son de la voix de sa maîtresse puis se replongea dans des songeries très chevalines.


Y’a d’l’eau par là. Le coin pipi, c’dehors. Les ch’vaux sont ben assez nombreux pour souiller la paille. Si t’vois un type louche qu’à l’air bourré et qui sent la putain, c’est Verratruc-chose. Evite-le, c’t’un corniaud.

Gratouillement de caboche, N’à-qu’une-patte ne savait plus quoi ajouter. Les règles de l’hospitalité, elle avait un peu oublié, surtout avec une frangine pas vue depuis des siècles et un lieu qui n’était pas chez elle.
Elle farfouilla dans sa besace, en extirpa une missive qu’elle n’avait pas lue, mais qu’elle gardait en cas d’envie de petit coin, puis en déchira le bout ou, en toute logique, on écrivait le nom du destinataire et le patelin où il vivait.


V’là, quoi. Si jamais chu pas là quand tu t’tires, t’peux m’trouver à l’adresse qu’est marquée d’ssus – ‘fin j’crois.
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Adalasie
    La brune avançait à bonne cadence derrière sa cadette qui s'agitait dans tous les sens à propos de cette histoire de bain. N'écoutant que distraitement les élucubrations de Minah, elle espérait à chaque coin de rue tomber sur l'écurie dont lui avait parlé cette dernière.

    Mouais, c'est ça. En attendant c'est une infection d'être à côté de toi.

    Comment faisaient-ils pour supporter son odeur au Bouillon ? A moins qu'ils soient tous comme ça là-bas. Que des réfractaires au bain réunis au même endroit ? Adalasie oublierait sûrement d'aller rendre visite à sa frangine ; la mort par intoxication étant peu alléchante.

    La brune commençait à s'impatienter, étaient-elles bientôt arrivées ? Elle en avait assez de marcher avec son tibia toujours endolori, les pieds gelés, la goutte qui commençait à perler au bout de son nez... Tout ça la mettait de mauvaise humeur.
    Si elle avait eu quelques années de moins, elle aurait sûrement tiré sur la manche de sa frangine en geignant : « Quand est-ce qu'on arriiiiveuh !? ». Mais désormais il n'était plus question de se comporter comme une enfant, ces créatures étant l'une des choses les plus chiantes jamais crées par le Très-Haut.
    Alors elle se contentait de mettre en pied devant l'autre en se mordant la lèvre inférieure pour évacuer la tension.


    Ah, on y est.

    Enfin...

    Un soupir de soulagement s'échappa de sa bouche.

    « Dépêche toi d'entrer »

    « On s'en fiche de ce type, entre ! »

    « BOUGE ! »

    Second soupir de soulagement, le vent ne lui glace plus les os, elle est à l’abri entre ces murs épais.

    La pièce baigne dans une faible lumière et la paille semble propre, ce sera parfait pour passer une bonne nuit. C'est qu'elle est pas exigeante la gueuse, elle se contente facilement du minimum.


    Pôôh, je vois pas trop ce que je pourrais emprunter... Peut être une bestiole mais c'est trop gros.

    Puis son regard se dirigea vers la jument que lui présentait sa frangine. La brune tendit la main et lui caressa prudemment le museau, fallait quand même faire attention à ces machins, certains étaient de vrais vicieux.

    C'est une belle bête.« Et, pour une fois de la journée, elle est en vie... » ajouta-t-elle dans sa tête.

    Adalasie nota les recommandations de sa sœur dans un coin de sa tête et balança sa besace dans la paille près de Sel. C'est pas qu'elle en avait marre de sa frangine mais la journée avait été plutôt mouvementée et elle n'avait qu'une envie : dormir.

    Silence. Bon.

    La cadette fouille dans son sac et lui donne un bout de papier. « Euh... ? »
    Une adresse ! Enfin, quelque chose qui y ressemble. Va falloir qu'elle déchiffre.
    Concentration maximale, plissement des yeux : lecture en cours.


    Blablabla... Bouillon. C'est bon.

    La brune replia la bout de papier et le garda soigneusement dans sa main. Écrire des lettres, c'était pas sa grande passion mais bon.
    Peut être qu'un jour elle aurait besoin de la manchote alors autant garder l'adresse.


    Si je t'envoie un pigeon, évite de le zigouiller pour t'en faire un chapeau ou je ne sais quoi, hein.

    Moment fatidique du Aurevoir ? Que faire ? Utiliser la formule de politesse classique. Mais après ?

    Bonne nuit Minah.

    Puis, comme les embrassades pleines d'amour c’est trop mainstream*, elle se contenta de lui pincer le pif entre l'index et le majeur comme quand elles étaient petites. Le tout suivi d'un magnifique bon vers l'arrière de la jument pour éviter d'éventuelles représailles.

    S'installant tranquillement dans la paille, elle sentait que le sommeil n'allait pas tarder à l'emporter.


*Adjectif. Mainstream, littéralement « courant principal », est le nom d’un courant de jazz apparu dans les années 50. Aujourd’hui ce mot est employé pour désigner la culture de masse.

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