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[RP] Temple Réformé Aristotélicien de Toulouse.

Asphodelle
Malgré l'argumentation développée, personne dans ce Temple ne pouvait défaire le fait que, peut-être malgré lui, Maleus portait sur lui "l'autorité" spirituelle, non en tant qu'agent gardien qui pourrait punir, mais en tant que "référent". Et malgré toutes les argumentations, rien ne pouvait défaire que cette position, bien qu'égale à quiconque, lui donnait, peut-être malgré lui, un statut de respectabilité, et l'image de l'érudit.

Mais elle ne veut pas envenimer le débat, un parfum d'opposition flotte dans la salle. Et peut-être malgré eux tous, celui qui cherche les réponses du voisin ne se sent ni à l'aise ni enclin à chercher plus loin.
Elle darde son regard sur le Pasteur, avec peut-être un peu trop d'espoir...cela, c'est l'entretien qui suivrait s'il acceptait de la retrouver, qui répondra à son interrogation.

Se tournant vers le Comte*, elle laisse celui-ci terminer sa discussion, s'il souhaitait aller plus avant dans ses réflexions. Peut-être un jour, ils échangeront leurs points de vue, mais, connaissant le caractère un peu fier d'Asphodelle et sa constitution face aux rebuffades en place publique, c'était pour l'instant et au moins jusqu'à une invitation à diner - au moins - compromis.


Pasteur Maleus...si vous me le permettez, j'aimerai vous voir en privé quelques instants...quand vous aurez terminé. Bien entendu, poursuivez votre échange sans gêne, car je vais profiter des derniers rayons de soleil, et ainsi vous attendre sans impatience juste à l'entrée. Elle sourit aux deux protagonistes, sincère, et avant de faire ainsi que dit, d'un regard interrogateur embué de l'invite : Je...je vous attends...?sur le départ, attendant l'entente.


*Mea culpa JD JDC, j'ai bien lu le mot HRP, mais je suis quand même bêtement restée sur l'idée du garde toulousain dans le dernier post et n'ai pas écrit en conséquences, ne me demandez pas pourquoi...fatigue peut-être.^^ Je répare ici.^^

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Jean.de.cetzes
Bon ca regarde noir, ça part dans tous les sens. En gros c'est la fin de la petite sauterie. La réponse du pasteur ne s'était pas révélée pleinement satisfaisante pour le pinailleur de service, bien que compréhensible, claire, et dans une certaine mesure justifiable. Il y avait tout de même matière à batailler mais ce n'était sans doute pas le bon moment. L'idée d'organiser un débat doctrinal et dogmatique, en voyant Asphodelle, fervente représentante de l'EAR, et sachant présent en Toulousain des représentants romains, ne le laissa pas de marbre. Pourquoi pas ? Parce que c'est chi... Oui tiens, peut-être.

Asphodelle passe, il la salue, emboite le pas aux deux "breteuses" qui s'échappent et s'en retourne au conseil laissant l'étrange couple du jour vaquer à leurs "occupations".

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Maleus
"Que le Tout Puissant nous garde... Allez en paix. "

Bien que zélé et passionné par son sujet, le pasteur laissait paraitre sur son visage de légers signes de fatigue. Il lança un regard mauvais à la rouquine et salua sa cousine d’un bref hochement de caboche. Ce fut ensuite au comte de prendre congé et il ne salua d’une courbette, amateur du protocole qu’il était tout en jurant intérieurement d’être tombé sur si grand chipoteur que l’enturbanné. Le cyclope espérait que l’hypothèse soulevée par le de Cetzes quand à l’immanence du Très Haut n’était qu’une manière de le faire suer et débattre plutôt qu’autre chose car il ne pouvait qu’être fâcheux pour l’avenir que sa grandeur ait des points de vue de déviant spinoziste.

D’un geste de la main il fit signe à Asphodelle de patienter et regarda le reste des badauds et coreligionnaires repartir vaquer à leurs occupations.

Une fois que la dernière personne présent eut franchit la porte il poussa un court soupir et profita quelques seconde du calme presque mortuaire des lieux.

" Dimezell Asphodelle, si vous voulez bien prendre place, je suis tout ouïe "

Le borgne s’avança un peu, prit place sur l’un des bancs et invita la demoiselle à faire de même.

" Que puis-je pour vous ? "

Comme de coutume, le borgne gardait faciès de marbre mais sa curiosité le titillait fortement. Que lui voulait-elle ?...

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Adieu Fab'
Asphodelle
Non point ici...

Elle avait parlé un peu vite, peut-être.
Elle s'explique :
ne voulez-vous pas marcher un peu, avec moi?
Le sourire se profile, doux et invocateur : profiter des derniers soleils.

Elle lui tends la main, l'invitant à se lever. Elle ne veut pas d'une discussion protocolaire, dans un lieu de culte quelqu'il soit. Elle souhaitait un échange serein, sans fioritures, avec la Garonne sur le côté et de l'herbe pour s'étendre dans l'herbe. Pour sa première conversation avec un Réformé depuis bien longtemps, il fallait le cadre qui allait avec. Il fallait que ça soit parfait. Parce que l'idée lui donnait plaisir. Parce que Maleus représentait quelque chose à ses yeux. Et parce que fraise.
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Maleus
Le borgne haussa un sourcil, sa curiosité était déjà de base piquée et voila que son interlocutrice le surprenait encore en l’invitant à une "balade ".

Un peu étonné et sans trop comprendre il attrapa la main tendue le temps de se lever du banc et pencha la tête de coté. Il se demandait vraiment ce qu’elle voulait bien vouloir lui dire pour que cela impliqua d’aller prendre l’air.

" Hm. Soit…"

Décidément, entre la question mortelle du comte et la demoiselle qui prenait un temps fou à lui dévoiler ses intentions, le borgne était un peu perdu.
Hochement de caboche.

" Je vous suis dimezell Asphodelle. "

Point de grognement, bien que d’aspect stoïque, le pasteur avait hâte d’en savoir un peu plus.

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Adieu Fab'
Maleus
[Vendredi 25 octobre 1461]

Même lieu, même manège… En ce vendredi le pasteur était d’humeur un peu las mais luttait intérieurement pour ne pas en montrer trop à son auditoire. Il prit place derrière son lutrin et regarda coreligionnaires et curieux prendre place dans la bâtisse puis quand le calme revint il toussa un peu avant de prendre la parole.

" Chers frères, chers sœurs, chers passants et chers curieux… Soyez les bienvenus en ce lieu de partage qu’est ce temple… Ce jourd’hui le culte sera bien différent des autres fois car bien que nous prierons en toute fin, il m’est apparu nécessaire de mettre de coté les prêches et lectures pour expliquer à quelques un d’entre vous ce qu’est la réforme aristotélicienne. "

Le borgne garda donc ses bouquins clos et s’appuya ses paluches sur le lutrin.

" L’Aristotélisme réformé est considéré par beaucoup comme une simple mais farouche opposition à Rome et d’une certaine manière ceux qui pensent ainsi, ne pensent point à tort. Pourtant mes amis, la Nouvelle Opinion ne se résume pas du tout qu’à cela, la foi réformée est avant tout née du souhait de quelques fidèles dévoués de revenir à une foi saine et pure, loin de la corruption et des erreurs dans lesquelles Rome nous avait mené... Notez donc bien qu’il s’agit avant tout d’une volonté de retour aux sources et non pas d’une simple rébellion."

Maleus balaya du regard les personnes présentes puis continua.

" J’entends déjà soupirer et ronchonner ceux qui sont déjà au fait de tout cela mais n’oublions pas qu’il important que tous ceux qui seraient et sont intéressés par la vraie foi aristotélicienne connaissent le chemin sur lequel ils s’engagent.

Pour débuter, passons par les règles fondamentales de notre religion que je vais de suite vous citer et qu’il vous faut garder en mémoire.

- Soli Deo gloria. A Dieu seul la gloire. Nul autre que le Créateur ne doit être vénéré, car Il est l'Unique, le créateur de toutes choses. De ce fait, le fidèle se doit de bannir de sa vie tous les cultes qui ne concernent pas le Très Haut, point d'adoration et vénération des Saints et des Prophètes aussi bons et pieux qu'ils furent cela reste des Hommes.

-Sola fide, sola gratia.
Par la foy seule, par la grâce seule. L'Homme étant pécheur de nature, le fidèle doit garder foi en l'Unique et faire preuve d'un repentir sincère car, c'est par la seule volonté du Très Haut que l'âme trouve son salut et personne ne trompe pas le Tout Puissant. Deos sait être miséricordieux et aimant avec ceux qui lui restent fidèles. Ainsi donc la confession est une aberration papiste qui n'a nul besoin d'exister si ce n'est pour donner un pouvoir qu'ils n'ont pas aux clercs de Rome. La prière peut être par essence une confession et le Créateur est le seul habilité à accorder son pardon.

-Sola Scriptura. Par l'Ecriture seule. Le fidèle puisera l'autorité uniquement dans les textes saints, Religion du Livre oblige, chaque croyant est lecteur et doit donc par obligation morale avoir connaissance des textes ou du moins s’y référer quand il se questionne sur un sujet ayant rapport à la foi. Tous les fidèles sont égaux devant le Très Haut, point de hiérarchie sur ce plan là, tout le monde peut se référer aux textes et même prêcher. Les pasteurs ne sont que des fidèles qui ont fait le choix d'être plus engagés dans la communauté et dans la propagation de la foi."


Il se gratta le menton et marqua une pause… Tout ça il l’avait déjà répété maintes et maintes fois et bien que cela pouvait lui semblait répétitif par moment, cela faisait parti de son devoir et il le ferait autant qu’il serait nécessaire de le faire.

" Nous autres réformés n’avons pas duo mais trio prophétique. Rome a toujours refusé le troisième messager de Deos car il mettait à mal leur pouvoir… En cela encore ils sont dans l’erreur car il n’appartient pas aux hommes de choisir qui ou non est messager de Dieu et surtout pour pas afin de garder le pouvoir… Ces trois messagers sont donc :

- Aristote qui nous apporta le raisonnement.
- Christos qui nous apporta la conscience avant de périr sur la croix.
- Averroes, celui que le Tout Puissant envoya pour nous transmettre la Conduite.

Sachez que le message du Tout Puissant ne sera jamais complet via Rome tant qu’ils refuseront d’accepter Averroës. De plus j’ajouterais afin que nulle erreur ne soit commise, que ces trois prophètes se doivent d’être vu et lu sur le même pied d’égalité. "


Un soupir, s’était-il fait comprendre ? Il était toujours coutume d’oublier des choses mais le borgne espérait que cela ne soit pas le cas.

" Voici mes amis, ce qu’est dans les grandes lignes la réforme aristotélicienne… Oh bien sûr il manque ça et là quelques détails que vous pourrez trouver via la lecture des textes et ou discussion avec moi-même ou autres huguenots… Mais voila qui résume fort bien ce qu’est de base notre belle réforme… Maintenant si vous le voulez bien et avant toute chose, puisque nous sommes tous unis ce jour pour parler et prier… Récitons donc une prière.

Mon Dieu, me voici prêt à faire Ta volonté :
J'irai partout où Tu m'appelleras,
Je consolerai Tes enfants affligés,
Autant que Tu me donneras de vie, de force et de liberté.

Je demande Ton secours et la conduite de Ta bonne et sage Providence,
Afin que je puisse réussir dans mon dessein,
Et exécuter ma résolution à la gloire de Ton nom et à l'édification de Ton Église.
Et quoi qu'il me puisse arriver,
Fais que je Te glorifie partout,
Dans la liberté ou dans la prison,
Au milieu de Ton peuple ou devant Tes ennemis,
Dans la vie ou dans la mort.

Amen
"


Le borgne croisa les bras sur son torse et embrassa l’assemblée du regard. Des questions ou ils verraient plus tard ?... Qu’importe.

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Adieu Fab'
Simeon.charles
En ce jour de vendredi il était venu. Tout de noir vêtu, il était venu, menton haut, sur de sa volonté de venir écouter les lectures. Rome avait causé trop de tord à Dieu, à la France, emmenant peu à peu les hommes à détourner les yeux de Déos pour les tourner vers la simonie. Que le peste rouge soit jetée sur ces mécréants.

Si dans d'autre temps certains se cachaient pour pouvoir prier, lui, il avançait fièrement dans un concentré de franchise et d'indépendance. Il prit place parmi les autres présents et écouta attentivement les paroles du pasteur qu'il avait déjà rencontré à Bouillon.

Un jour peut être, lui aussi rendrait grâce au Tout Puissant.

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Compostelle
Au Saint-Just, un frêle bras y est noué, entité incertaine à l’esprit éthéré se trouve à son bout.
Couple disparate où l’obscure face tannée par le soleil et les années et la mise noire de l’époux s’oppose à l’immaculé visage de madone aux grands yeux inquiets d’azur éculé et la bure moniale blanche où flotte la silhouette fluette de l’épouse.
L’âme encore captive des brumes de chanvre, la carcasse se fait docile et le suit sans mot souffler, il y a juste à l’assise avant l’entame du sermon que la bouche pâle se déclos.


Mon époux… est-ce prudent de venir ici ? Baissant encore un peu la voix déjà ténue. Ce sont des hérétiques…
___- On va touuuuuuuuuutes craaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaamer !
___- Wééééééé un méchoui !

Es-tu certain que l’on ne finira point au bûcher ? Nous ne nous sommes même pas habillées pour l’occasion.
Puis… le curé hérétique, il n’nous aime pas beaucoup.

___- Chuuuuut ça commence.

La Compostelle resserre l'étreinte de son bras.
Elle n'est vraiment pas rassurée, non vraiment pas.

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Maleus
[Vendredi 8 Novembre 1461]

Toulouse ces derniers temps avait un petit air angevin qui amenait le borgne à se souvenir de la belle époque où il arpentait le royaume, épée à la main, fournissant sa lame au plus offrant et profitant du bon temps avec ses camarades. Cette ambiance bien qu’il ne l’avouait que rarement lui manquait mais cela ne lui faisait pas oublier pour autant la grande cause qu’il servait à présent… La vraie foi aristotélicienne, l’aristotélisme réformé.

Le cyclope pasteur passa tranquillement derrière son lutrin et attendit tranquillement que le calme s’installe dans la bâtisse. Après quelques prêches dans ce même lieu il avait appris à patienter et profita de ce moment pour ouvrir à la page qu’il souhaitait le livre des vertus.

" AHEUM "

Quelques toussotements, des grincements de vieux bancs… L’attention était enfin là.

" Bien ! Le bonjour à vous mes chers coreligionnaires, amis et curieux… Une fois de plus, je ne peux que me montrer satisfait de voir que notre culte n’a toujours pas souffert de persécutions ou de sabotages, puisse le Très Haut nous accorder le fait que cela demeure ainsi. "

Un sourire (oui oui !) s’afficha sur la trogne balafrée du pasteur.

" Avant de rentrer dans le vif du sujet, j’ai quelques annonces à faire…

J’ai ouïe dire et je l’avoue cela ne m’a guère enchanté, qu’un prélat papiste était arrivé dans notre belle cité. Il est recommandé que nous autres huguenots n’écoutions pas la messe papiste et je vous encourage à demeurer sur cette position… Espérons mes chers coreligionnaires que cet hérétique, suppôt du pape, ne propage pas l’idolâtrie et l’erreur en Toulouse… Continuons à propager le vrai message et la vraie foi et ne nous laissons jamais avoir par ces escrocs de Rome.

Sont Altesse Agnès de Saint-Just, femme de feu le roi Eusaias, que le Très Haut le bénisse mille fois pour avoir montré son séant au pseudo pape, cherche du personnel pour sa mesnie. Que ceux qui sont ou seraient intéressés par le fait de travailler pour une noble dame la contactent au plus tôt. Promis elle ne mord pas… Quoi que !

Autre sujet, mais non moins important, j’aimerais si cela vous sied, féliciter le sieur Herian, habitué de ces lieux, pour ses fiançailles. Bien que sa compagne soi, de ce que j’en sais, dans l’errance papiste, souhaitons à cette demoiselle, qu’importe le temps que cela prendra, qu’elle rejoigne un jour les rangs solides et grossissants de la vraie foi aristotélicienne.

Enfin, je souhaiterais éclaircir un point car plusieurs fois ces dernières semaines, ce sujet est tombé lors de mes échanges avec quelques fidèles. Qu’il soit su de tous qu’à mes yeux, du moins mon œil en l’occurrence, le baptême n’est en aucun cas obligatoire et que le fait de ne pas l’être n’empêche en rien le fidèle d’entrer dans la communauté, se marier ou je ne sais quoi d’autre encore. Libre à vous d’envisager cela comme il vous conviendra, pour ma part, le baptême n’est point obligatoire mais simplement recommandé comme pacte supplémentaire avec notre Créateur. Pacte qui viendra plus ou moins tôt ou tard selon le cheminement personnel de chaque croyant…

Merci pour votre écoute, nous pouvons commencer… Accrochez vous, c’est long. "


Le d’Assay posa son index sur le bouquin posé devant lui et se racla un peu la gorge avant de commencer sa lecture.


Citation:
" La Création, Chapitre I, " L’univers " :

Au commencement, il n’y avait que Dieu.

Il n’y avait encore ni matière, ni énergie, ni mouvement. Il n’y avait même pas le vide, comme celui qui aujourd’hui sépare le monde des étoiles, car même le vide est quelque chose. Non, ce qui Le composait alors, c’était le Néant. Cela ne se définit pas comme l’absence de toute chose car, lorsque l’on dit de quelque chose qu’il est absent, nous avons conscience de la possibilité de son existence. Le Néant, c’est lorsque même l’idée de l’existence est impossible. Sauf pour Dieu.

Mais Dieu est supérieur à tout, y compris au Néant. Il n’a pas de commencement ni de fin. Il est donc l’Infini et l’Eternel. Il est l’Être Parfait, sur qui rien n’a de prise, rien ne peut agir, rien ne peut interférer. Il Lui suffit d’une simple pensée pour que quelque chose passe du Néant à l’Existence et d’une autre simple pensée pour que cela retourne de l’Existence au Néant. Tout Lui est donc possible et tout Lui doit donc son existence.

Dieu est la Matière Première à partir de laquelle tout est créé. La matière, l’énergie, le mouvement et le temps sont eux-mêmes composés de Lui. Ceci fait que tout ce qui existe, ainsi que le Néant lui-même, fait partie de Lui. Il est aussi le Créateur de toute chose. C’est Lui qui crée tout ce qui existe et lui donne sa forme et son contenu. Il est enfin le Très Haut, car Il est la cause même de l’existence de toute chose, y compris du Néant.

De ce fait, Dieu sait tout, car le savoir même fait partie de Lui, est créé par Lui et trouve sa cause en Lui. On dit ainsi qu’Il est omniscient. De plus, Il est partout car, aussi loin que l’on aille, on se trouve toujours en Lui. On le qualifie donc d’omniprésent. Enfin, Il peut agir partout car, étant partout et sachant tout, rien ne peut entraver Son action.

Dieu pensa et un point minuscule apparut. Ainsi, par la création de cet unique minuscule point, Il venait de faire disparaître le Néant. Dorénavant, Il serait composé de l’Existence et du vide, mais plus du Néant. Il décida de nommer ce point minuscule “univers” et le fit exploser en une myriade d’étoiles, qui vinrent peupler le vide. Jamais plus, elles ne cessèrent de resplendir au firmament céleste.

Alors Dieu créa les deux mouvements : les choses lourdes iraient vers le bas et les choses légères vers le haut. Il créa également les quatre éléments. Le plus lourd était la terre. Puis venaient l’eau, le vent et le feu. Il les disposa dans l’ordre hiérarchique de leur pesanteur. La terre se trouvait donc au centre. Elle fut recouverte par l’eau, elle-même recouverte par l’air. Enfin, le plus léger des éléments, le feu, vint couvrir le tout.

Cette boule de matière, Dieu la nomma Monde. Afin que mouvement se fasse, Il entreprit de défaire l’ordre hiérarchique des éléments. Il plaça le feu au centre de la terre et l’eau dans le ciel, au-dessus de l’air. Les éléments bougeaient, alternant ordre et désordre, retournant systématiquement du désordre à l’ordre. Dieu se plaisait à voir comment Sa création se mouvait pour correspondre à l’ordre hiérarchique de leur pesanteur. "


Le borgne soupira et tourna délicatement une page de son gros bouquin.

" Mais cela mes amis, n’était que le commencement et il importe que nous passions au chapitre suivant pour que nous ayons une vision globale de la chose… "

Paf ! Exit la mouche qui l’ennuyait depuis le début de sa lecture… Le borgne fit comme si de rien était.


Citation:
" Chapitre II, " La vie " :

Mais Dieu était parfait, alors que Sa création était imparfaite. Alors qu’Il était conscient de Lui-même, Sa création ne pensait pas. Alors qu’Il choisissait ce qu’Il faisait, Sa création ne faisait que s’adapter. Alors qu’Il était capable de créer, Sa création ne faisait que se suffire à elle-même. Alors qu’il voulait aimer Sa création et être aimé d’elle en retour, elle en était incapable.

Dieu réunit alors l’amour qu’Il avait en Lui. Il en fit l’esprit, qui ne pouvait être ni touché, ni vu, ni senti, ni goûté, ni entendu, car il était différent de la matière. L’esprit contenait l’intelligence, composée de la raison et des sentiments. Dieu y avait mis le plus de Lui-même: la capacité de choisir et celle de ressentir. Le Très Haut associa la matière à l’esprit, pour que ce dernier puisse exister en harmonie avec le monde, et nomma le tout “vie”.

Mais la vie était imparfaite. Bien que créée par Dieu et composante de Lui, elle n’était pas Lui tout entier. Sa capacité de choisir était partielle, car son savoir et son pouvoir n’était pas illimités. Sa capacité de ressentir était tronquée, car elle était composée de matière, neutre et impersonnelle. Mais Dieu voulait aimer la vie et que la vie l’aime en retour.

Mais, pour que Dieu et la vie puissent s’aimer mutuellement, il fallait que cette dernière s’efforce constamment de se rapprocher de la perfection divine. Car elle était incapable de l’égaler. Le Très Haut créa donc le troisième mouvement: les choses supérieures iraient vers Dieu. Ainsi, la matière dont la vie était composée étant une chose lourde, elle fut posée sur le monde, car elle allait vers le bas. Mais, comme elle était aussi composée d’esprit, qui était une chose supérieure, elle tendrait vers la perfection divine.

Et sur le monde, la vie prit une multitude de formes, des plus petites aux plus grandes. Les végétaux s’emplissaient de la lumière des étoiles, couvrant ainsi le monde d’une couche de verdure. Les animaux gambadaient ou voletaient entre les végétaux. Ainsi, alors que Dieu semblait immobile, la vie se manifestait par un mouvement incessant. En effet, Dieu, étant éternel, n’était pas soumis à ce besoin perpétuel de mobilité qui faisait que la vie était sans cesse en activité. Il paraissait ainsi être immobile. Mais c’est cette action ininterrompue que Dieu aimait par dessus tout observer dans Sa création.

Mais Dieu n’avait pas conçu le mouvement de la vie comme une force infinie et, pour qu’il se perpétue, il fallait que l’animal broute le végétal, que le prédateur dévore la proie, et que les cadavres d’animaux pourrissent pour nourrir les végétaux. Ainsi, la mort faisait partie intégrante de la vie. Mais, pour que cela ne détruise pas Ses créatures, Dieu partagea chaque espèce en deux principes complémentaires, qu’il appela masculin et féminin. Tous deux étaient égaux et devaient se rechercher pour s’unifier, et ainsi perpétuer la vie.

Ainsi, de la vie Dieu créa le temps, où la mort succède à la vie, la vie à la mort, et la progéniture à ses géniteurs. De même, l’eau rejoignait le ciel pour descendre sur terre et alimenter les rivières, et le feu sortait des volcans pour alimenter la terre, qui s’accumulait pour nourrir le feu en son sein. Le monde tout entier était uni dans un mouvement perpétuel de vie, alors que Dieu paraissait immobile, échappant aux contraintes du temps. "


Cette fois-ci il referma sèchement le livre et dévisagea l’assemblée.

" Certains se demandent peut être où je veux en venir après cette longue lecture… J’y viens ! Bien trop nombreux sont les gens qui tournent le dos au Très Haut voir pire ! Réfutent son existence ou son pouvoir ! N’est-ce pas crime mes chers amis de renier notre Créateur alors que par amour Il a tout créé ? N’est-ce pas ingrat de vénérer et remercier autre que Lui alors qu’Il est à la base de tout ? Je pense que si. "

Une petite pause, histoire de reprendre son calme.

" Mes frères et sœurs aristotéliciens, en dénonçant ces pécheurs ou ces égarés, je n’appelle point à la haine ou à la persécution comme le feraient sans nul doute ces hérétiques de Rome… Non jamais au grand jamais… Deos jugera le moment venu et selon Sa vision des choses, selon Ses propres règles qui dépassent, que dis-je surpassent le commun des mortels. Je vous appelle à rester fermes et droits mes amis, gardez confiance en notre Seigneur, aimez le comme Il vous aime et n’oubliez jamais ce que nous Lui devons… Bien entendu certains me diront qu’Il nous a aussi donné le libre arbitre et la volonté, cela n’empêche qu'il ne nous faut pas être ingrats ! Louons notre Créateur et gardons foi en Lui… Et pour ce qui est des égarés, il est de notre devoir, non pas de les pousser, mais de leur indiquer le chemin pour qu’ils y cheminent aussi. Ne valent pas mieux que les mauvais et les païens, ceux qui ne se soucient que d’eux même et se fichent de voir leurs voisins sur le mauvais chemin et ou dans l’errance. "


A trop parler, le pasteur eut d’un coup une grosse soif. Il tendit le bras et attrapa une petite fiasque qu’il déboucha avant d’y boire au goulot. Ceci fait, il porta une fois de plus son regard sur l’assemblée et attendit réactions ou questions avant de réciter le crédo.

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Adieu Fab'
Asphodelle
"L'Indésirable, Le Caillou dans ta chaussure, le Poil à gratter, la Bêêêêêêêête"


"Elle vient pour faire parler, ça la fait marrer.
Elle vient pour provoquer, ça manque d'actions.
Elle vient pour faire ch...suer...parce qu'elle s'ennuie."
Elle, la Bêêêêêê ^^ te....La seule et unique coreligionnaire de son Mouvement, qu'elle forme entre elle et elle, en Pays Toulousain. Et que ça fait parler ! Mais que c'est pratique : elle est souvent d'accord avec elle-même ici, ce qui limite les débats entartés.

Ca fait peur......aussi....

Le Maaaaaaaaaaaaal.

Ni Réformée. Ni Papiste. Papillon étrange qui vit dans une cahutte de 9m², chiottes comprises - grand luxe! - apapeur ni des saintes armées, ni des armagnacais.

Elle fait craindre, oui. Son nom, surtout. Apparemment.
Le cadavre du placard de Toulouse, qu'on aime bien, mais qu'on préfère planquer quand même, au cas où on croirait que....
C'te marrade.
Elle est au bas de la chaîne alimentaire à présent, parce qu'il vaut mieux être un réformé et un papiste en France, qu'un Religionnaire Français...un hérétique Eusaiaside. L'Eusaiaside...un nom ravissant pour un insecte coloré venu d'Orient.


Mais Asphodelle est assise, et la seule chose qu'elle se dit quand on la critique, ou qu'on la surveille d'un oeil torve, ou qu'on raconte des inepties de bonnes femmes qui s'ennuient, ou bien qu'on se dit qu'elle est gentille mais qu'elle doit quand même rester discrète dans son petit coin - surtout que le Romain est en ville maintenant, faudrait pas qu'on croit que... c'est qu'elle a vu !! elle l'a vu !!! et Dieu, qu'elle aimerait avoir là de suite un appareil pour faire un portrait instantané!

Maleus a souri !! Et quel sourire...
"Il est amoureuuuux"..."Il est marié, patatou...." "et sa femme? c'est du Saindoux? il est amoureux de son épouse.......je veux le même."

Et peu importe les rasades des uns et des autres "encore ! tu as vu? elle est Réformée j'te dis ! Sainte Nitouche moi j' te dis" , elle ferme les yeux, le monde et la lumière pour l'office.
Elle écoute, elle apprends. Non pas des écritures, elle n'a pas besoin de se concentrer, elle connaît le Livre des Vertus par coeur. Non pas du Dogme, pas tout à fait : Averroès et elle, avaient un gros souci de communication. Chaque fois qu'ils se rencontraient, c'était l'empoignade :
"mais bordel Averroès ! le buisson c'est non! pas le buisson !" "Aaaaaasphodelle...les plaisirs de la vie sont faits pour être cueillis, juste prémisse avant le jardin des délices..." "Le buisson c'est non !" "le buisson gnagna pucelle effarouchée viens par là t'aurais besoin qu'on te fasse découvrir des chôôses".
Asphodelle était contre l'usage du "buisson", c'est-à-dire les parties de jambes en l'air derrière le.
Le problème du Buisson, c'était la barrière. Averroès et elle ne se comprenaient pas.

Mais entendre parler des Ecritures, lui faisait du bien. Et pour cet office, le raisonnement était le même que le sien. Elle aurait rajouté l'histoire des choses lourdes, et des choses légères, de la matière de l'esprit et du but de l'existence. Mais être simple ne pêchait pas non plus. La simplicité était efficace.

Elle voulait savoir. Et le savoir commence par l'écoute.
User de son Intelligence. De sa Raison.
Peu importe qu'on la comprenne, elle, elle savait très exactement pourquoi ce matin elle s'est levée, a fait ses prières, ses corvées, a lavé sa nuque, ses pieds, passé une tenue propre, passé un fichu sur ses cheveux, et est venue à l'office réformé. Elle était dans une dynamique et à moins de lui faire péter la cervelle, elle persistera dans sa voie.

Il y aura peut-être des nuances. Il y aura peut-être un déclic qui en entrainera un autre. Il y avait l'ambiance du culte, et cela lui manquait. Elle regrette parfois de ne pas être en Guyenne. Là-bas, sa vie serait plus légitime. Mais elle était Toulousaine, et pas Guyennaise.

Cette fois-là, elle ne posera pas de questions.
Et elle n'ira pas voir Maleus. Ce n'était pas le moment.
Elle attends le crédo, et toujours sur ces iris d'étang doux, ses paupières fermés, la lumière éteinte, les gens au-dehors, leur bruit, leur fureur éteinte...le Créateur et elle se regardent.

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Maleus
Calme plat, pas une seule petite réaction, soit. Le pasteur poussa un petit soupir et fit signe à un de ses valets de faire passer et tourner dans l’assistance une large miche de pain et une fiasque de vin… La communion, moment de partage physique et spirituel entre les croyants, honte sur lui, il l’oubliait souvent, préférant les débats.

Une fois que l’auditoire et lui-même eurent partagé le pain et le vin, il jeta un petit coup d’œil à la seule représentante de l’EAF en Toulouse se demandant si elle allait suivre puis leva une main et récita.


" Je crois en Dieu, le Père Tout-Puissant, Créateur du ciel et de la terre.

Révélé par Aristote, le prophète premier, notre meneur,
Fils de Nicomaque et de Phaetis,
Suivi par Christos, le prophète d'amour, notre rédempteur,
Né de Maria et de Giosep.
Ayant souffert sous Ponce, avant d'être crucifié.
Confirmé par Averroës, le prophète ultime, notre précepteur.
Tous trois montés aux cieux,
Sont assis à la droite de Dieu le Père Tout-Puissant,
D'où il viendra juger les vivants et les morts.

Je crois en l'Action Divine, en la sainte Église universelle, la communion des justes, en la rémission des péchés, en la justice de Dieu et en la vie éternelle.

Amen "


Le cyclope fit doucement craquer sa nuque.

" Allez en paix mes frères et sœurs, que le Tout Puissant veille sur nous… Bonne journée. "

Il le salua d’un vague hochement de caboche puis marmonna une prière au Très Haut concernant sa femme qui selon les signes ne passerait surement pas le mois…

"Créateur, accueillez la comme il se doit au jardin des délices..."

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Adieu Fab'
Asphodelle
Elle ne regarde pas le Pasteur.
Elle a vu le sourire, elle préfère rester sur cette image.
Et puis elle est immergée dans sa spiritualité.
Elle ne saisit pas non plus pleinement le silence, le manque de foy peut-être de la communauté toulousaine des réformés eux-même qui ne vont pas à leur office. Elle est trop dans sa foy à elle pour le remarquer.
Manquerait plus que l'une des plus assidues soient une nana de l'EAU ! alors là on aurait tout vu...

Elle est tellement dedans qu'elle débute le crédo à la suite du Pasteur, comme un automatisme, pourtant pas réflexe car elle ressent tous les crédo, toutes les prières qu'elle adresse, jusqu'au bout de ses cheveux.



Je crois en Dieu, le Père Tout-Puissant, Créateur du ciel et de la terre.

Révélé par Aristote, le prophète premier, notre meneur,
Fils de Nicomaque et de Phaetis,
Suivi par Christos, le prophète d'amour, notre rédempteur,
Né de Maria et de Giosep.
Ayant souffert sous Ponce, avant d'être crucifié.
Confirmé par Ave -Non ! pas le buisson ! - euuh Augustin...
waaala le rattrapage de branche à la one again for....et qui n'est paaaas...prophète...d'ailleurs...mais qui est uuuuun précepteur...quand même...
Tous trois montés aux cieux,
Sont assis à la droite de Dieu le Père Tout-Puissant,
......eeeenfin pour Aristote et Christos...euh Augustin je crois pas...
à ce niveau-là les rames ne sont plus utiles à rien on file direct vers les chutes...
D'où il viendra juger les vivants et les morts. Qui ça du coup? Complètement empêtrée ma pauv' fille...
Euh...on rattrape la fin du train et on se raccroche au dernier convoi...gros effort de concentration.

Je-crois-en-l'Action-Divine-en-la-sainte-Église-universelle-la-communion-des-justes-en-la rémission-des-péchés-en-la justice-deuuu...euh Dieu et-en-la-vie-éternelle.

Amen


Han ! souffrance ! la prochaine fois il lui faudra faire attention...
Mais pourquoi ils ont rajouté Averroès? pourquoi ils ont rajouté Averroès? pourquoiiiii?
Bien qu'elle connaisse très bien l'histoire de la réforme et sa source, ayant assisté à sa naissance.

Asphodelle n'est pas réformée, mais elle est revenue différente de son kidnapping qui l'amena en Orient.
Lorsqu'elle fut ainsi raptée, par sa mère, elle menait le front Palois pour la énième croisade qui avait été décrétée sur le Béarn à cette époque, fraîchement adoubée Chevalier d'Isenduil, son rêve...son idéal...sa quintessence...Isenduil. C'était en hiver 1458...
Fanatique complète, elle aurait elle-même allumé les bûchers de cette engeance et son crédo était "s'il n'y en à qu'une, je serai la dernière !" Sous-entendu la dernière à la combattre. Elle était de même sang que le Lion de Juda, leur lutte était égale, mais dans un camp opposé. Elle les estimait pour ce qu'ils étaient devenus parmis les plus grands guerriers de leur trempe, des adversaires à sa hauteur. Mais ils se rêvaient chacun percé au bout d'un glaive, ou d'une sica.
Pourtant cet hiver là, les paniques dans l'Etat-Major des Saintes Armées, muées par des entités largement incompétentes et négligentes, ont commencé à immiscer dans sa poitrine, le doute.

Et puis, il y à eut un coup sur la tête, une longue route dans une cage, et Jérusalem, Alexandrie, Chypre....il y à eut Salim, Shani, Khân et la Taverne du Chat Noir. Les Averroïstes sont devenus ses compagnons, et Gémini et ses théories fumeuses polythéistes grecques, marqua pour elle le début de la vision d'un monde en technicolor. Brassage culturel, croisement des commerces, routes des caravanes, cargaisons de pélerins et de grippe-sous à la petite semaine...L'Occident alors devint froid, glacial, frileux, vicié de ses manigances et de sa grossièreté.
A son retour, elle reprit le service pour Rome. Elle aimait Rome. C'est ce qu'on en a fait qui ne lui plaît pas. Mais elle savait que la grosse machine occidentale la broierait, portant encore sur elle les arabesques au henné rouge, le parfum du lotus, et dans ses yeux, le sable du désert et sa lumière.

Encore aujourd'hui, cette chaleur lui manque, ses os lui semblent souvent glacés . Elle a froid de l'Occident, elle est en manque d'Orient.

Mais ici c'est son peuple. Et en attendant de retrouver les murs blancs de sa maison, là-bas...elle restera ici...et y mourra, sûrement aussi.

Se levant elle adresse un salut à Maleus, pour le remercier de l'enseignement, et sort.
La pudeur et la timidité l'empêchent de le questionner sur l'état de son épouse.
Maleus l'intimide, et elle, elle ne veut pas gêner.

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Maleus
[Vendredi 22 novembre 1461]

Non il ne pouvait pas délaisser le culte même quand la mort et le deuil le touchaient au plus près. Ce vendredi, livide et fatigué il s’était donc trainé jusqu’au temple, balayant chaque pensées trop négatives avec sa volonté de croyant.

Maleus avait donc pris place derrière son lutrin comme de coutume et avait attendu que le silence s’installa avant de commencer. L’air y était glacial et l’aspect du cyclope n’arrangeait hélas pas la situation.

" Frères et sœurs aristotéliciens, je vous salue. En cet énième jour des humbles je ne citerais que peu les textes et consacrerait ce culte à une réflexion sur la vie du fidèle… Mais pour commencer, alors que le temps se rafraichit et que l’année 1461 touche à sa fin, le conseil d’importance est que nous autres fassions déjà nos réserves pour l’hiver sans oublier d’aider les indigents et pauvres de toute sortes à se chauffer et se nourrir car ne l’oubliez pas, il est du devoir d’un bon croyant d’aider un peu ceux qui vivent dans la misère. "

Un soupir, avec le décès de sa femme, même la chaleur diffusée pas les cheminées du domaine ne raviveraient pas totalement les corps endeuillés. Le pasteur prit une inspiration puis dit :

" Verset 4 : l'Unique a doté l'Homme de nombreuses facultés. Il lui a accordé la Volonté. Et, Il a choisi de lui donner la liberté d'agir car tel est son bon plaisir. "

Hochement de caboche.

" L’autodiscipline est ce qui doit caractériser le vrai croyant aristotélicien. Le fidèle se doit de connaitre les grands principes de la réforme sur le bout des doigts et n’avoir que les saintes écritures comme référent et autorité aussi ne prenez jamais celui qui prêche comme un dirigeant ou une autorité, voyez le comme un conseiller et faites vous votre propre opinion. La réforme fait passer avant tout le reste le lien personnel entre le Créateur et chaque croyant et chaque relation Créateur/créature est distincte et privée. "

Une pause, la mirette grise se perdit dans le vague comme si durant quelques secondes, ses pensées l’avaient pris en otage.

" Un bon aristotélicien se doit de connaitre au mieux les écritures, le principe est que tout fidèle est « lecteur » et n’a pas à attendre qu’on lui dicte ou lise les textes pour qu’il se fasse un avis. Selon sa conscience et sa volonté, il suivra au mieux le contenu dans sa vie terrestre ou non. Comme nous disons souvent, Deos est seul juge et Il jugera selon Ses critères qui sachez-le, dépassent la simple conscience humaine. L’Homme étant pécheur de nature, il sortira toujours de temps à autre du droit chemin et notre Père aimant, notre Créateur nous aime et nous pardonnera j’en suis persuadé, nos petites errances… Bien entendu, ceux qui se complaisent dans le péché et insultent le nom de Dieu, ceux là n’auront surement pas aussi facilement droit au pardon de notre Seigneur mais rappelez vous mes amis qu’Il est miséricordieux et qu’il importe surtout de ne jamais perdre foi en lui quelle que puissent être les épreuves que nous traversons. Garder notre amour et notre foi pour Lui c’est conservé Son amour pour nous. "

Le lutrin, contrairement aux autres fois était vide de livres et documents. Ce jure ne se prêtait pas aux lectures et aux prêches traditionnel selon le borgne… Ce jour-ci était réservé à une réflexion, à un débat d’idée.

" Louables et bons croyants sont les gens qui suivent le plus possible les règles dictées par notre Créateur via ses messagers. Pourtant notez que ceux qui suivent avec moins de zèle la conduite n’en sont pas pour autant totalement blâmables… A chacun sa conscience et sa discipline à ce niveau là, tant que demeurent dans le cœur et dans l’esprit les principales règles de l’aristotélisme réformé, tant que reste bien présente la foi en notre Seigneur. A seul Dieu la gloire.
Quel que puisse être le degré de discipline lié à la foi que vous vous imposez ou imposerez dans votre vie l’important est de garder foi en Deos seul. "


Le borgne descendit de son estrade et continua.

" L’on dit les huguenots trop proches de leurs sous, avares, pingres, radins… Sachez que c’est à demi faux et ne vous blâmez pas d’un tel comportement. Le Très Haut nous a donné la vie, il importe que nous en fassions quelque chose. Prospérer, faire du profit c’est mes chers frères et sœurs, faire fructifier le cadeau de notre Créateur… Bâtir, développer, agrandir, c’est faire fructifier le cadeau de Deos, c’est laisser aux futures générations le soin de continuer les travaux et ne pas avoir à partir de rien. Aider les pauvres est une chose, ne pas faire de dépenses frivoles et investir dans le présent et l’avenir, dans des choses solides ainsi qu’utiles en est une autre. Ce n’est point incompatible.

Fausse est l’idée que de tendre vers la pauvreté est une bonne chose, Dieu ne nous a point donné la vie pour que nous n’en fassions rien, Dieu ne nous a pas donné la vie pour que nous la fassions stagner comme l’eau croupie d’un marécage puant. N’oubliez pas pour autant qu’un bon aristotélicien se doit de rester dans la sobriété, afficher sa richesse par de somptueux et colorés vêtement ou autres objets clinquants est malséant. C’est preuve d’orgueil mal placé et comme je l’ai dit avant, investissement mal placé… C’est donc pécher. "


Un nouveau soupir, il y avait tant à dire mais il ne se sentait pas de continuer plus en avant tant les sujets étaient nombreux et vastes.

" Je pourrais mes amis, vous citer d’autres points, mais cela serait bien trop long. Aussi ceux qui voudraient ou voudront en savoir plus ou discuter plus avant de ces choses n’auront qu’à venir me voir ou s’adresser à d’autres coreligionnaires qui se feront, je le pense, un plaisir d’en discuter. "

Il croisa les bras et récita une prière.

" J’aime l’Eternel, car il entend
Ma voix, mes supplications;
Car il a penché son oreille vers moi;
Et je l’invoquerai toute ma vie.
Les liens de la mort m’avaient environné,
Et les angoisses du séjour des morts m’avaient saisi;
J’étais en proie à la détresse et à la douleur.
Mais j’invoquai le nom de l’Eternel :
O Eternel, sauve mon âme!
L’Eternel est miséricordieux et juste,
Notre Dieu est plein de tendresse;
L’Eternel garde les petits;
J’étais malheureux, et il m’a sauvé.
Mon âme, retourne à ton repos,
Car l’Eternel t’a fait du bien.
Oui, tu as délivré mon âme de la mort,
Mes yeux des larmes,
Mes pieds de la chute.*

Amen. "


Puis il attendit de voir si des questions allaient tomber ou non.


*Psaume 116, verset 1-8
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Adieu Fab'
Alix_ann
Alix est là, on lui avait dit de passer. Maleus lui avait dit de passer. Elle se fait discrète, elle a l'air impressionnée. Disons plutôt que ça se voyait très clairement qu'elle était impressionnée. Un temple réformé ! Ça lui suffisait, surtout au vue du temps qu'elle avait passé à le trouver.
Bref, Alix est là. Elle se tient droite, elle est bien en place. Elle a les esgourdes grande ouvertes, toutes offertes au prêche du d'Assay.

Elle écoute donc. Elle songe aux réserves de l'hiver de Buzay, elle songe qu'elle devrait s'enquérir du bon fonctionnement de ses terres durant cette absence. Sa main se porte à un pan de sa robe qu'elle époussette. Alix y songera plus tard.

Elle est novice ici. Ses yeux se porte à Maleus. C'est qu'il l'inspire c'te gosse avec toutes ses idées, toutes ses histoires. Elle ne se lasse pas d'en écouter, elle les écoute avec autant de passion qu'elle écoutait celle de Yolanda autour de l'âtre de Château Gontier ou celle que lui écrivait sa marraine. Des histoires de fée, de princesse. Mais les histoires de Maleus changeait. Elle se souviendrait toujours de la première qu'il lui avait raconté sur le massacre des réformés. Alors toute petite ça l'avait révoltée. Ces histoires, celles de Maleus, elles étaient sérieuses, il avait ce ton grave quand il les racontait. Elles ne prêtaient pas à rire, elles étaient réelles.

Écoutant avec attention, pesant ce qu'elle entendait elle était intimidée. Alix n'était jamais venue dans de pareil endroit. Si sa diaconesse de tante savait ! Elle ne savait quoi faire, elle n'osait pas bouger un seul orteil et se contentait d'écouter avec une extrême attention. Comme la gosse qu'elle s'évertuait à rester. Elle écoute, sur la radinerie, sur la toute puissante du créateur, sur la sobriété. Elle est bien contente de pas porter une de ses belles robes et d'avoir écouter la Rouge, les troquant contre une vieille grippe qui lui irritait la peau.

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Miramaz
Installée suffisamment prêt du lutrin et du côté du "bon oeil" du borgne, elle affichait un air de concentration extrême, comme toujours quand on parlait religion. Depuis le temps qu'il était pasteur elle n'avait guère eu l'occasion d'écouter Mal' prêcher, mais ce jour, étant dans la ville depuis déjà une bonne semaine, elle n'avait trouvé aucune excuse valable pour ne pas assister au culte.

Repoussant loin de sa conscience son refrain habituel à base de "mais je comprends rien aux textes moi..je suis trop bête" qui ne trompait personne et surtout pas le borgne, elle écoutait attentivement chaque mot, essayant d'en saisir toute la portée.

Donner aux plus pauvres.. c'était sans doute envisageable, après tout ils n'étaient pas à plaindre même si la bouche inutile qu'ils devaient nourrir depuis quelques temps entamaient sérieusement leurs économies.
Connaître les grands principes de la réforme sur le bout des doigts.. en voilà une autre paire de manche. ça nécessitait des heures de lecture et relecture assorties sans doute de nombreux questionnement à l'encontre du pasteur mais elle pouvait toujours essayer.
Les petites errances seraient pardonnées.. ça c'était quelque chose d'agréable à entendre, surtout qu'il ne fallait rien payer pour obtenir l'indulgence du Créateur, un bon point pour la Réforme aux yeux d'une Mira ayant trop chèrement payé aux curés romains pour ses péchés.
Ne pas suivre aux pieds de la lettre toutes les règles n'étaient pas graves tant qu'on les gardaient en tête et qu'on gardait la foi.. Hum, encore un précepte qui arrangeait bien sa conscience, elle ferait au mieux et tâcherait de laisser sa conscience la rappeler à l'ordre quand elle enfreindrait une règle.
Le droit à l'enrichissement..ça lui allait bien aussi mais la suite sur les vêtements la laissa perplexe. N'avait-elle plus le droit de porter de la couleur? Hésitante, elle se mordit d'abord la langue pour ne rien dire, après tout le borgne elle le savait, traversait une période difficile, l'embêter avec ces futilités ne ferait que le rendre plus distant, elle écouta en silence la prière qui s'ensuivit jusqu'au moment où le silence se fit. Le borgne avait proposé de le questionner et il avait l'air d'attendre..c'était le moment ou jamais, en plus ce jour elle arborait des couleurs sombres de rigueur en ce lieu, rien à craindre de ce côté-ci. Se redressant pour être identifié rapidement, elle prit la parole:


Hum..Ma..Pasteur?

Tête secouée pour se morigéner, on n'appelait sans doute pas par son nom un pasteur en train d'officier, quelques fussent les liens entretenus avec lui. Un regard d'excuses fut adressé au borgne avant qu'elle ne continua.

J'comprends pas bien une chose dans c'que vous avez dit.. .. j'ai b'soin d'un éclaircissement.. un point de détail m'enfin ça m'inquiète d'mal comprendre.. donc.. c'malséant d'porter des vêtements colorés ou c'qui indispose Deos c'est d'gaspiller de l'argent pour en acheter, vu qu'ils coûtent plus qu'les autres?

Demi-sourire adressé au borgne, elle n'était pas sûre que toute l'assemblée saisirait la nuance dans ses propos mais lui si, elle l'espérait.
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