Eulaly_de_baylaucq
Tout était allé trop vite pour qu'elle n'ait le temps de protester.
L'aurait-elle fait ? Peut-être bien si le ciel ne leur était pas tombé sur la tête.
Mais il n'aurait pas pris les brides alors et elle aurait continué à harceler les équidés pour se débarrasser au plus vite de son gonflant compagnon de route. Et lui ? Ben il aurait sûrement quitté les Flandres pour aller trouver du sel à Poitiers, ouvert une fromagerie à Fouillis-les-oies, maugréant contre le fait d'avoir perdu autant de temps pour suivre une jeune femme aussi caractérielle dans un comté aussi merdique.
Son seyant sac de jute sur ses cheveux dégoulinants de pluie, grelottante, Eulaly n'avait pourtant désormais plus une once de colère.
Epuisée par ce qu'elle avait vécu en Artois, par le déménagement, par tous ces jours de voyage ininterrompus, par ces prises de becs avec le moine, agacée de l'absence de Vints, stupéfiée par la soudaine initiative charismatique de Toque, elle se laissa entraîner et accepta le sac de jute et l'invitation dans ses bras sans broncher. Curieusement, elle y trouva un réconfort physique et moral bienfaisants qu'elle apprécia sans se poser de questions.
Sous la pluie battante, pelotonnée contre lui pour trouver la chaleur dont elle avait besoin, ses yeux s'étaient fermés un instant et elle n'avait ni vu ni entendu passé le cavalier, ni même remarqué quoique ce soit au blêmissement du prêtre.
Elle trouvait désormais le moine moins gras que confortable, moins ennuyeux qu'apaisant et si les hallebardes glacées de ce déluge ne les transperçaient pas ainsi, elle se serait sans doute laisser ainsi glisser dans un inéluctable et calme sommeil. Mais elle repensa à ce put'ain de hollandais qu'avait osé la voir comme une vulgaire monnaie d'échange. Avait-elle l'air d'une de ces catins des ports dunkerquois ?!
On ne touchait pas à son égo impunément et elle avait déjà son idée quant à comment çà se passerait : d'abord elle s'approcherait, lui ne se méfierait pas toute mignonne qu'elle était, et puis elle lui dirait un truc du genre "J'suis la blonde. T'en veux ? J'vais t'en donner.", et alors elle lui écraserait le pied, lui mettrait un pain, sortirait sa dague pour la mettre sous sa gorge, lui demanderait de descendre ses braies, de se foutre tout à poil, se moquerait copieusement de la taille de son engin, l'humilierait jusqu'à ce qu'il reparte nu la queue entre les jambes. Et s'il lui tenait tête, s'il tentait quoique ce soit contre elle, alors elle le piquerait plusieurs fois et trancherait son zob.
Elle se rendit quand même compte que la scène pourrait grandement choquer et, retrouvant son rôle de guerrière protectrice de la veuve, de l'orphelin et des moines sans défense, dit :
Frère Toque... Quand on rencontrera le hollandais, j'aimerais autant que vous fermiez les yeux. Ce sera pas beau à voir, j'vous le dit, quand j'lui ferai bouffer ses couilles.
Puis, accueillant avec eux Cyrellix qui les rejoignait prestement, elle frictionna avec affection son beau poil bleu ruisselant et lui sourit en disant :
Et toi, tu me donneras un coup de main hein ! Tu m'en diras des nouvelles de la barbac batave !
Le tonnerre claqua encore plus fort, suivi d'un éclair si lumineux qu'elle en fût éblouie, la pluie redoubla. L'orage était juste au-dessus d'eux. Elle tressaillit. Mais jamais elle ne pensa que c'était le Très-Haut qui puisse la mettre en garde contre son orgueil démesuré.
Eulaly, elle, n'avait pas fait le cauchemar de Frère Toque.
Ceci dit, ils semblaient réconciliés... pour un temps du moins.
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L'aurait-elle fait ? Peut-être bien si le ciel ne leur était pas tombé sur la tête.
Mais il n'aurait pas pris les brides alors et elle aurait continué à harceler les équidés pour se débarrasser au plus vite de son gonflant compagnon de route. Et lui ? Ben il aurait sûrement quitté les Flandres pour aller trouver du sel à Poitiers, ouvert une fromagerie à Fouillis-les-oies, maugréant contre le fait d'avoir perdu autant de temps pour suivre une jeune femme aussi caractérielle dans un comté aussi merdique.
Son seyant sac de jute sur ses cheveux dégoulinants de pluie, grelottante, Eulaly n'avait pourtant désormais plus une once de colère.
Epuisée par ce qu'elle avait vécu en Artois, par le déménagement, par tous ces jours de voyage ininterrompus, par ces prises de becs avec le moine, agacée de l'absence de Vints, stupéfiée par la soudaine initiative charismatique de Toque, elle se laissa entraîner et accepta le sac de jute et l'invitation dans ses bras sans broncher. Curieusement, elle y trouva un réconfort physique et moral bienfaisants qu'elle apprécia sans se poser de questions.
Sous la pluie battante, pelotonnée contre lui pour trouver la chaleur dont elle avait besoin, ses yeux s'étaient fermés un instant et elle n'avait ni vu ni entendu passé le cavalier, ni même remarqué quoique ce soit au blêmissement du prêtre.
Elle trouvait désormais le moine moins gras que confortable, moins ennuyeux qu'apaisant et si les hallebardes glacées de ce déluge ne les transperçaient pas ainsi, elle se serait sans doute laisser ainsi glisser dans un inéluctable et calme sommeil. Mais elle repensa à ce put'ain de hollandais qu'avait osé la voir comme une vulgaire monnaie d'échange. Avait-elle l'air d'une de ces catins des ports dunkerquois ?!
On ne touchait pas à son égo impunément et elle avait déjà son idée quant à comment çà se passerait : d'abord elle s'approcherait, lui ne se méfierait pas toute mignonne qu'elle était, et puis elle lui dirait un truc du genre "J'suis la blonde. T'en veux ? J'vais t'en donner.", et alors elle lui écraserait le pied, lui mettrait un pain, sortirait sa dague pour la mettre sous sa gorge, lui demanderait de descendre ses braies, de se foutre tout à poil, se moquerait copieusement de la taille de son engin, l'humilierait jusqu'à ce qu'il reparte nu la queue entre les jambes. Et s'il lui tenait tête, s'il tentait quoique ce soit contre elle, alors elle le piquerait plusieurs fois et trancherait son zob.
Elle se rendit quand même compte que la scène pourrait grandement choquer et, retrouvant son rôle de guerrière protectrice de la veuve, de l'orphelin et des moines sans défense, dit :
Frère Toque... Quand on rencontrera le hollandais, j'aimerais autant que vous fermiez les yeux. Ce sera pas beau à voir, j'vous le dit, quand j'lui ferai bouffer ses couilles.
Puis, accueillant avec eux Cyrellix qui les rejoignait prestement, elle frictionna avec affection son beau poil bleu ruisselant et lui sourit en disant :
Et toi, tu me donneras un coup de main hein ! Tu m'en diras des nouvelles de la barbac batave !
Le tonnerre claqua encore plus fort, suivi d'un éclair si lumineux qu'elle en fût éblouie, la pluie redoubla. L'orage était juste au-dessus d'eux. Elle tressaillit. Mais jamais elle ne pensa que c'était le Très-Haut qui puisse la mettre en garde contre son orgueil démesuré.
Eulaly, elle, n'avait pas fait le cauchemar de Frère Toque.
Ceci dit, ils semblaient réconciliés... pour un temps du moins.
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