Anne
Rennes, à l'approche de l 'automne.
Ses yeux d'un brun banal n'attiraient pas particulièrement l'attention, si ce n'était qu'une petite pointe de tristesse et de lassitude filtraient parfois par delà cette façade inexpressive. Il y avait l'enveloppe et ce qu'on pouvait y lire. Mais peu de personne savait lire le langage de l'âme. Cette âme se serait alors révéler double : celle d'une reine de pacotille, celle d'une paysanne élever contre sa volonté au rang de sosie de celle-ci.
Elle jouait la reine, elle singeait ses expressions comme on lui avait si bien enseigné, tout cela pour protéger un honteux secret : la véritable souveraine avait fuit ses obligations, craintive devant une guerre en devenir dans son île. De cette peureuse, plus aucune nouvelle. Cependant, la jeune sosie ne l'en blâmait, elle-même aurait tout donner pour échapper à cette vie de solitude et de résignation.
La sosie préservait les apparences, et l'honneur de toute une lignée. Obligée de couper tout contact avec son ancienne vie, le cur de la gardeuse de cochons restait cependant dans la cour de ferme bretonne où sa famille devait sûrement se lamenter sur sa disparition. Depuis des mois déjà. Peut-être même ses parents se seraient résignés à sa mort et auraient fait prononcer une messe mortuaire. Elle chassa d'un battement de cils la nostalgie qui lui bouleversait les tripes et agrippa son regard sur un noisetier dressé devant elle.
La sosie se sentait constamment observée, même dans ce jardin encerclé de murs où ses protecteurs la laissaient passer quelques heures par jour. Pour eux, limiter ses contacts avec l'extérieur revenait à limiter les bourdes malheureuses qui pourraient les trahir tous. Tous jouaient leurs têtes dans cette mascarade : Dame Quiou, Sieur Richard Watelse et Dame Annaelle, et bien sûr cette fausse reine.
Sieur Richard. Voilà un être aussi double qu'elle. Tantôt noir et excessif, tantôt délicat et empathique. Elle ne savait sur quel pied danser : le craindre? Lui faire confiance? Sur ses gardes, elle le vit s'approcher dans l'allée, la cherchant probablement.
Ici, Sieur Watelse, la héla t'elle d'une voix sourde au Connétable.
Ne souhaitant pas plus anticiper les raisons de sa présence dans ce jardin où il ne mettait guère les pieds, elle le laissa venir à elle et prit une attitude rigide et défensive, prête à recevoir toute agressivité de sa part, toute remarque désobligeante.
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Ses yeux d'un brun banal n'attiraient pas particulièrement l'attention, si ce n'était qu'une petite pointe de tristesse et de lassitude filtraient parfois par delà cette façade inexpressive. Il y avait l'enveloppe et ce qu'on pouvait y lire. Mais peu de personne savait lire le langage de l'âme. Cette âme se serait alors révéler double : celle d'une reine de pacotille, celle d'une paysanne élever contre sa volonté au rang de sosie de celle-ci.
Elle jouait la reine, elle singeait ses expressions comme on lui avait si bien enseigné, tout cela pour protéger un honteux secret : la véritable souveraine avait fuit ses obligations, craintive devant une guerre en devenir dans son île. De cette peureuse, plus aucune nouvelle. Cependant, la jeune sosie ne l'en blâmait, elle-même aurait tout donner pour échapper à cette vie de solitude et de résignation.
La sosie préservait les apparences, et l'honneur de toute une lignée. Obligée de couper tout contact avec son ancienne vie, le cur de la gardeuse de cochons restait cependant dans la cour de ferme bretonne où sa famille devait sûrement se lamenter sur sa disparition. Depuis des mois déjà. Peut-être même ses parents se seraient résignés à sa mort et auraient fait prononcer une messe mortuaire. Elle chassa d'un battement de cils la nostalgie qui lui bouleversait les tripes et agrippa son regard sur un noisetier dressé devant elle.
La sosie se sentait constamment observée, même dans ce jardin encerclé de murs où ses protecteurs la laissaient passer quelques heures par jour. Pour eux, limiter ses contacts avec l'extérieur revenait à limiter les bourdes malheureuses qui pourraient les trahir tous. Tous jouaient leurs têtes dans cette mascarade : Dame Quiou, Sieur Richard Watelse et Dame Annaelle, et bien sûr cette fausse reine.
Sieur Richard. Voilà un être aussi double qu'elle. Tantôt noir et excessif, tantôt délicat et empathique. Elle ne savait sur quel pied danser : le craindre? Lui faire confiance? Sur ses gardes, elle le vit s'approcher dans l'allée, la cherchant probablement.
Ici, Sieur Watelse, la héla t'elle d'une voix sourde au Connétable.
Ne souhaitant pas plus anticiper les raisons de sa présence dans ce jardin où il ne mettait guère les pieds, elle le laissa venir à elle et prit une attitude rigide et défensive, prête à recevoir toute agressivité de sa part, toute remarque désobligeante.
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