Axelle
[La peinture à l'huile
C'est bien difficile
mais c'est bien plus beau
Que la peinture à l'eau!]*
La pèche aux bigorneaux et la chasse au bernard lermite, rien à redire, la Bestiole adorait Un temps. Un temps dautant plus bref quelle ne mangeait pas de fruits de mer et que la pèche aux coquillages suivi de leur ré-enfouissage était, elle devait bien lavouer, la pire perte de temps que ses neurones avaient réussi à dénicher. Et bien rapidement, lenvie dutiliser ses doigts pour griffonner, peinturlurer et esquisser lui avait chatouillée les pattes.
La Ruche, nichée dans la lavande et les garrigues provençales étaient bien trop lointaine pour quelle puisse faire le déplacement régulièrement, aussi, lidée avait germée, jour après jour, dans sa tête en manque de sanguines et de lodeur de pigments. Elle ouvrirait un petit atelier, ici même, non pas baigné par les embruns de la grande bleue, mais par ceux vifs de la Bretagne, terre daccueil dune pause méritée et nécessaire.
Et quand elle avait découvert la petite bicoque adossée contre la muraille de Vannes, le doute navait plus été permis. Amoureuse de ces pierres grises, de cette porte qui souvrait en grand vers le nord, laissant une lumière parfaitement constante baigner les lieux, de cette courette où lherbe poussait entre les pavés irréguliers, elle lavait voulu. Le propriétaire des lieux, amoureux des belles lettres et des belles plantes, à en juger par le regard en biais quil avait glissé sur la gorge de la gitane, sétait montré des plus faciles à convaincre de baisser le montant du loyer en échange dune ou deux toiles. Laffaire était dans le sac, la bestiole ravie, et ce fut toute fière et excitée quelle avait entrainée Alphonse dans la petite maison de plain-pied, expliquant avec son emphase toute particulière quà la chaleur de limmense cheminée qui trouait un pan de mur entier, il naurait pas même froid en posant. Mais une idée, glissée au coin de son oreille par le flamand avait retenu toute son attention. Faire de cet atelier, un point de rencontre pour les peintres de la région. Toute sauvageonne quelle était, lidée lavait charmée. Histoire de nouer des liens ou plus pragmatiquement davoir lopportunité de diviser le loyer, cet attrait là resterait lapanage des tempes brunes. Mais pour cela il fallait rendre les lieux plus chaleureux, et cela était une toute autre paire de manches, la bestiole étant complètement dénuée de tout sens de la coquetterie.
Ce fut au hasard dune taverne quelle trouva en la diaconesse une aide précieuse. Les deux femmes dénichèrent, dans une échoppe rabougrie dune ruelle tordue à lest de Vannes, au milieu damas de vieilleries, une tapisserie dune taille suffisante pour couvrir le mur opposé à la cheminée. Louvrage, bien quélimé par endroits, était magnifique de nuances doutremer, de cobalt de cérulé jusquà la pervenche dans une narine agitée. Et dans une chariote branlante, quelques jours plus tard, la tapisserie, deux tables à dessin maculées de taches, trois chevalets branlants et un fatras détagères avaient été livrés sous le regard doucement amusé dAlphonse embauché sans discussion possible à linstallation des lieux. Laissant le brun aux prises avec ce fatras, la Bestiole séclipsa à la recherche dun fauteuil digne de ce nom. Du moins le crut elle, et ce fut après de la matinée entière à chiner, quelle revint, sourire ravi sur la figure, avec un siège certes épargné par les poules et en bon état, mais laid à faire peur, rayé dun violet et dun rouge si mal assortis quils blessaient le regard, le tout agrémenté de ridicules pompons dorés. Revanche sil en était dun petit coussin mais ayant le même but, cajoler les rondeurs postérieures du futur travailleur lors de ses séances de pose. Tout était prêt, les invitations à la blondinette Wolback et aux cousines Dénéré lancées, la porte grande ouverte, Alphonse peaufinant linstallation de la tenture, la bestiole navait plus quà déposer ses couleurs sur les étagères, pigments qui, sils étaient bien moins nombreux quà la Ruche, lui permettraient néanmoins de ne pas laisser rouiller sa main.
*La Peinture à l'huile - Boby Lapointe
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C'est bien difficile
mais c'est bien plus beau
Que la peinture à l'eau!]*
La pèche aux bigorneaux et la chasse au bernard lermite, rien à redire, la Bestiole adorait Un temps. Un temps dautant plus bref quelle ne mangeait pas de fruits de mer et que la pèche aux coquillages suivi de leur ré-enfouissage était, elle devait bien lavouer, la pire perte de temps que ses neurones avaient réussi à dénicher. Et bien rapidement, lenvie dutiliser ses doigts pour griffonner, peinturlurer et esquisser lui avait chatouillée les pattes.
La Ruche, nichée dans la lavande et les garrigues provençales étaient bien trop lointaine pour quelle puisse faire le déplacement régulièrement, aussi, lidée avait germée, jour après jour, dans sa tête en manque de sanguines et de lodeur de pigments. Elle ouvrirait un petit atelier, ici même, non pas baigné par les embruns de la grande bleue, mais par ceux vifs de la Bretagne, terre daccueil dune pause méritée et nécessaire.
Et quand elle avait découvert la petite bicoque adossée contre la muraille de Vannes, le doute navait plus été permis. Amoureuse de ces pierres grises, de cette porte qui souvrait en grand vers le nord, laissant une lumière parfaitement constante baigner les lieux, de cette courette où lherbe poussait entre les pavés irréguliers, elle lavait voulu. Le propriétaire des lieux, amoureux des belles lettres et des belles plantes, à en juger par le regard en biais quil avait glissé sur la gorge de la gitane, sétait montré des plus faciles à convaincre de baisser le montant du loyer en échange dune ou deux toiles. Laffaire était dans le sac, la bestiole ravie, et ce fut toute fière et excitée quelle avait entrainée Alphonse dans la petite maison de plain-pied, expliquant avec son emphase toute particulière quà la chaleur de limmense cheminée qui trouait un pan de mur entier, il naurait pas même froid en posant. Mais une idée, glissée au coin de son oreille par le flamand avait retenu toute son attention. Faire de cet atelier, un point de rencontre pour les peintres de la région. Toute sauvageonne quelle était, lidée lavait charmée. Histoire de nouer des liens ou plus pragmatiquement davoir lopportunité de diviser le loyer, cet attrait là resterait lapanage des tempes brunes. Mais pour cela il fallait rendre les lieux plus chaleureux, et cela était une toute autre paire de manches, la bestiole étant complètement dénuée de tout sens de la coquetterie.
Ce fut au hasard dune taverne quelle trouva en la diaconesse une aide précieuse. Les deux femmes dénichèrent, dans une échoppe rabougrie dune ruelle tordue à lest de Vannes, au milieu damas de vieilleries, une tapisserie dune taille suffisante pour couvrir le mur opposé à la cheminée. Louvrage, bien quélimé par endroits, était magnifique de nuances doutremer, de cobalt de cérulé jusquà la pervenche dans une narine agitée. Et dans une chariote branlante, quelques jours plus tard, la tapisserie, deux tables à dessin maculées de taches, trois chevalets branlants et un fatras détagères avaient été livrés sous le regard doucement amusé dAlphonse embauché sans discussion possible à linstallation des lieux. Laissant le brun aux prises avec ce fatras, la Bestiole séclipsa à la recherche dun fauteuil digne de ce nom. Du moins le crut elle, et ce fut après de la matinée entière à chiner, quelle revint, sourire ravi sur la figure, avec un siège certes épargné par les poules et en bon état, mais laid à faire peur, rayé dun violet et dun rouge si mal assortis quils blessaient le regard, le tout agrémenté de ridicules pompons dorés. Revanche sil en était dun petit coussin mais ayant le même but, cajoler les rondeurs postérieures du futur travailleur lors de ses séances de pose. Tout était prêt, les invitations à la blondinette Wolback et aux cousines Dénéré lancées, la porte grande ouverte, Alphonse peaufinant linstallation de la tenture, la bestiole navait plus quà déposer ses couleurs sur les étagères, pigments qui, sils étaient bien moins nombreux quà la Ruche, lui permettraient néanmoins de ne pas laisser rouiller sa main.
*La Peinture à l'huile - Boby Lapointe
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