Matouminou
Elle avait vu alors le visage de Stromb afficher un air grave, et elle sut combien il avait tout suivi avec attention, sans en perdre une miette. Elle se retint pour ne pas lui sauter au cou comme elle aimait le faire mais ce n'était ni le moment, ni l'endroit.
De plus, il semblait que Monseigneur Irella avait un peu de mal à se concentrer. Matou la sentait ailleurs, un poil contrariée. Elle la vit prendre bonne note, c'est à dire hocher la tête, en entendant la réponse de Stromb qui avait marmonné à la suite de son acquiescement un grognement de mots indistincts.
Elle décida de mettre cela sur le compte de l'émotion, parfois quand il était ému, il grognait comme ça.
Elle lui sourit, mais très vite son attention se porta sur un son étrange, un espèce de vrombissement, elle pâlit car la première pensée qui lui vint à l'esprit fut un essaim d'abeilles qui étaient en train de fondre sur eux. Elle hoqueta, poussa un petit gémissement:
-gniiiiiiiiiiiiiiiiiiii
Elle saisit la main de son presque mari et la serra...fort, comme elle avait l'habitude de faire quand quelque chose provoquait en elle une montée de panique. Matou craignait les abeilles au moins autant que de manquer de calva, et lorsque l'été arrivait, elle évitait de se promener à proximité des ruches, des arbres fruitiers et autres choses susceptibles d'accueillir ces bestioles. Ceci remontait à un jour où, jeune minette, elle se promenait avec son petit panier, à la recherche de fruits des bois. Elle avait alors découvert un essaim d'abeilles, et saisissant une fine baguette, elle avait entrepris d'aller taquiner les insectes dorés. La riposte ne s'était pas faite attendre, les abeilles n'aiment point être dérangées, et c'est en nuée, c'est à dire, en famille, avec les copines, les collègues et toute la ville apidesque, que Matou s'était retrouvée attaquée. Elle avait couru, mais n'avait pu éviter une bonne dizaine de piqures. Outre le fait que ça faisait mal, elle s'était mise à enfler, pour se retrouver tel un ballon de soule pour géant, plus facile à rouler qu'à porter.
Donc, Matou était en panique et broyait la main de Stromb.
Fort heureusement, le bruit fut identifié. C'était moins une, il en avait fallu de peu que Stromb se retrouve avec une main réduite en miettes et que Matou quitte l'église en courant. Cela aurait pu être fort mal interprêté au demeurant.
Elle décida d'inspirer et d'expirer lentement, c'était sûr, elle ne survivrait pas à cette cérémonie.
L'incident clos, Matou, une fois son calme retrouvé, lança un regard incendiaire à la coupable et se promit qu'elle lui ferait bouffer sa cornette, bonne soeur ou pas!!
La cérémonie reprit son cours et Irella,, confuse, joignit les mains, puis pria la personne qui avait les alliances de s'avancer. Matou pâlit, elle ne savait plus qui les avait en sa possession, Stromb avait du le lui dire, mais elle avait oublié.
Elle attendit, et vit Éremon s'approcher. Ce brave Eremon, témoin et ami fidèle, futur monarque, pince sans rire, d'un calme olympien en toute circonstance sauf, peut être ce jour, où elle leur avait annoncé, à lui et à Stromb, qu'elle peindrait les canons de leur future nave de guerre, en rose. Il avait perdu un peu de son flegme en laissant tomber un "non". Elle l'avait regardé, et il avait répété "non". Tandis que Stromb se tapait la tête sur la table, Matou avait risqué un "juste les boulets alors?" Peine perdue, un troisième "non" avait retenti. Il y a des moments comme ça où il vaut mieux ne pas insister. Elle avait pensé en elle- même qu'elle graverait alors des papillons et des coccinelles, cela atténuerait l'esprit guerrier de ces canons, mais elle n'avait rien dit de cette idée.
Donc, Eremon, avec une aisance qui n'enlevait rien à sa prestance naturelle, s'avança. Tout se passa bien jusqu'aux quelques marches qui montaient vers l'autel, qui, les traitresses, le firent trébucher. Matou qui n'avait d'yeux que pour les alliances, les vit faire une jolie courbe et retomber, comme si de rien n'était, dans la main d'Eremon. Eut-il voulu le faire exprès qu'il ne s'y serait pas mieux pris.
Et toujours avec un calme imperturbable, il tendit les alliances sur un:
Citation:
Voilà voilà!
Décidément, il était très fort!