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[RP] Cerastoderma edule*

Arsene
    « L'amitié se nourrit de communication » Montaigne


    La joue gauche écrasée contre le mur de pierre suintant l'humidité et le dos appuyé contre les barreaux de fer, la mioche fredonne en raclant un cailloux anguleux contre la cloison. Sinistre et agaçante mélodie.

    Le séant dans la paille, elle s'ennuie ferme la rousse. Les joies de la prison ! Sa main gauche retombe mollement par terre, tandis que l'autre farfouille dans les replis de ses braies pour en sortir un vélin froissé et un petit bout de fusain. La feuille est lissée pendant un long moment, tandis que ses yeux se font songeurs.

    Le destinataire de sa lettre avait été rapidement choisi. Elle écrirait à Tynop. Tynop le blond, Tynop le narquois, Tynop l'agaçant, Tynop l'emmerdeur et surtout Tynop, l'ami. Il faisait partie de ces rares personnes à avoir de l'importance pour la gamine. Il était donc tout à fait logique qu'elle lui écrive.

    Se servant de ces genoux comme support, elle commence à tracer les lignes courbes et anguleuses d'un coquillage. C'est avec un sourire sur le coin de la bouche qu'elle observe son œuvre. Satisfaite de son dessin, elle entreprend de gribouiller d'une fine écriture quelques mots sur son vélin.


    Citation:
    A Tynop, le blondinet qui laisse les petites rouquines seules,

    Nous avons quitté le Poitou avant que j'ai eu l'occasion de brûler ne serait-ce qu'une botte de foin. Dommage, je me serai fait un plaisir de faire un immense feu de joie. Pour les nuits fraîches bien sûr. Après si quelqu'un aurait été malencontreusement poussé dans les flammes, ça n'aurait été qu'un affreux accident évidemment. Nous faisons de nouveau route vers le Limousin.

    Étant donné que depuis quelques jours, on est perdues en pleine campagne, j'en profite pour tirer de nouveau à l'arc. Les oiseaux sont mes cibles. Ceux qui sont trop dodus pour voler vite ! Je manque encore un peu de pratique mais bientôt, un jour, je serai la meilleure archère du royaume.

    Figure toi qu'en chemin j'ai croisé une poignée d'hommes qui ont insisté pour me conduire dans un endroit avenant. Il y a une sacré ambiance, l'odeur est absolument charmante, la nourriture est exquise et mes compagnons de cellule sont d'une agréable compagnie.

    Oui, je suis en prison. Entourée de rats, d'ivrognes, de fous, et de soldats. J'ai froid, j'ai faim et j'ai .. peur. Un peu. C'est bête hein ? Tu as déjà été en prison toi ?

    Dès que je serai sortie – bientôt j'espère – nous rejoindrons la famiglia**. Pour de nouvelles aventures ! J'aimerai voyager vers le nord ou bien le sud. Oui ce sont deux destinations complètement opposées mais je suis indécise ! Il y a des avantages des deux cotés.

    Comment vas-tu ? Comment se passe votre voyage ? Vous êtes tombés sur des brigands ? Vous ont-ils jeté dans un fossé en compagnie des limaces ? Avez-vous rencontré une armée hostile ? Les soldats vous ont-ils lapidé à coups de pierres ? Si oui, ramène moi une pierre et quelques dents !

    N'oublie pas mon coquillage !

    Fais attention à ta tronche,
    Ti bacio***,

    Arsène



*Nom scientifique des Coques.
** Famille
*** Je t'embrasse.

_________________
Tynop
Les jours se suivent et se ressemblent plus ou moins, en Bretagne. Comme ailleurs, la vie est rythmée par des tournées générales, des débats au degré d'intérêt décroissant, et par des rencontres plus ou moins mémorables. Peu de choses diffèrent: l'accent, le patois, le chouchen et la joie de revoir quelques visages plus ou moins amicaux.

Le départ approche, et le coquillage n'a toujours pas été récupéré. Tynop est atteint d'un mal terrible et incurable: La flemme. Mais promis, il ira faire un tour à la plage.

En attendant, il est temps de prendre des nouvelles de l'insupportable rouquine:

Citation:
À Arsène, pauvre petite fille, innocence et naïveté incarnées,

Quel dommage que tu n'aies pu satisfaire tes penchants pyromanes. j'imagine toute ta frustration, et surtout le calvaire que tu dois faire subir à tes compagnons de route en les harcelant pour pouvoir mettre le feu à une taverne. Tu n'as qu'à brûler toutes les tavernes de Ventadour, excepté la mienne. C'est comme ça qu'on dégage des bénéfices, Arsène. En éliminant la concurrence.

Je ne t'ai toujours pas vu à l’œuvre, au tir à l'arc. Toujours est-il que je ne serais pas rassuré de te savoir un arc à la main. Surtout si tu es dans mon camp.

En prison ? Toi ? Cela doit être une terrible injustice. As-tu songé à faire appel ?
Je plaisante. Il y a tellement de raisons de te mettre au cachot que je ne sais même pas pour laquelle tu as été condamnée. Parce que oui, je conçois que brûler des tavernes puisse être jouissif, mais je te rappelle que c'est hélas interdit.

N'aies pas peur. Fais en sorte que ça soit eux qui aient peur de toi. Et puis fais toi passer pour un homme. Non seulement ça ne risque pas d'être compliqué pour toi, et puis ça t'évitera des expériences désagréables.

Pour ma part, je n'ai jamais été en prison. Et pourquoi voudrais-tu que j'y mette les pieds ? Je suis pur et chaste. Ou bien trop malin pour me faire attraper. C'est à toi de voir.

As-tu fait la jonction avec le reste de ta famille ? Comment vont les autres ? Et j'en viens à me rendre compte que je ne t'ai pas demandé comment tu allais, toi. Tu ne t'ennuies pas trop ?

Notre voyage se passe bien. On est arrivé sans encombre en Bretagne. Malgré le fait qui ni Miya ni moi n'ayons commis le moindre forfait là-bas, nous avons eu la surprise d'apprendre que nos déplacements étaient surveillés. Je dois avouer que c'est flatteur, et quelque peu jouissif d'attirer crainte, méfiance et peur dans un duché où je n'ai jamais mis les pieds.

Pas d'armées hostiles, donc. Pour l'instant, en tout cas. Mais elles sont sur les dents, vu qu'une de leurs villes a été pillée. Par une ancienne connaissance de Chinon. Konrad: Celui qui voulait piller Murat. Il semble d'ailleurs conserver une certaine rancœur à mon égard, puisqu'il a cherché à me nuire en dévoilant aux autorités bretonnes ce qu'il pensait être la révélation du siècle, à savoir mon lien avec ta famille. Information quelque peu périmée, puisque comme je te l'ai expliqué plus haut, les Bretons me surveillaient déjà.
Bref, je suis célèbre, tout le monde connait mon nom.
Youpi.

J'oublie pas ton coquillage.

Prends soin de toi, pauvre idiote.

T.

PS : J'ai failli oublier. Je vais me marier. T'es invitée.


_________________
Arsene
    « J'ai une grande collection de coquillage que je disperse sur les plages du monde. Peut-être l'avez vous vue. » Steven Wright


    Ventadour. Synonyme d'ennui mortel. Morosité dont la rousse cherche vainement à se sortir à grand renfort d'alcools et de feux. Allongée sur un comptoir, elle cuve en alignant des cadavres de mouches. Les souvenirs et la soirée sont flous. Ne reste qu'un vague relent de vinasse et de feu de bois.

    L'esprit cotonneux, les membres engourdis et la tête lourde, la mioche était prête à s'endormir. Elle aurait pu d'ailleurs si les lettres ne s'entassaient pas dans sa besace. Comme un tilt agaçant qui sonne en discontinu. Comme le tintement aiguë d'une clochette qui résonne en continu dans sa tête.

    Un soupir, quelques grognements et le frottement des vélins plus tard, la mioche, allongée sur le ventre, commence à écrire, chatouillant sa joue avec sa plume. Plume à la couleur passée et à la barbe froissée. L'écriture est malhabile et irrégulière. La faute à sa main gauche qui a développé un urticaire virulent. Dextre qu'elle s'est empressé de gratter avec acharnement, laissant la peau à vif et douloureuse.

    Elle aura au moins une excuse pour ne pas avoir répondu tout de suite au blond. S'il râle, elle exagérera même la blessure. Une main qui pourrie c'est handicapant.

    La lettre est signée, pliée et cachetée. L'oiseau sera attrapé plus tard et chargé de la missive. Et du haut d'une colline, la gamine lui fera prendre son élan et son envol.


    Citation:
    A Tynop, blondin machiavélique et maléfique,

    Mes penchants pyromanes sont presque comblés à Ventadour. Il y a beaucoup de choses à brûler. Et ta taverne risque même d'y passer. Ah, et je tiens à te signaler qu'il n'y a aucun bénéfice à faire dans ce taudis, étant donné qu'il n'y a plus rien à boire ! Et non, je ne vendrai pas mon corps.

    Effectivement, si tu continues à dénigrer ma façon de tirer à l'arc, tu as des raisons de ne pas être rassuré. Tu risquerai de te retrouver avec une flèche plantée dans le fondement. Ça serait tellement … Dommage.

    C'est une terrible injustice ! On m'a prise pour une blonde qui brigande ! Est-ce que j'ai vraiment l'air d'avoir une longue, soyeuse et brillante chevelure blonde?! Pas du tout ! Donc c'est une injustice.

    J'ai réussi à leur faire peur finalement. Les menaces y'a qu'ça de vrai. Par contre, je ferai volontairement abstraction de ton deuxième conseil. Ne t'étonne cependant pas si tu te retrouves pas avec une paire de seins sous le nez la prochaine fois qu'on se voit.

    Tu n'es pas pur et chaste et pas réellement très malin. C'est d'ailleurs ça, qui doit te sauver de la prison. En voyant ton air hagard et profondément .. idiot, ils cherchent forcément ailleurs.

    J'ai rejoins ma famille ouais. Rodrielle est morte et tout les autres roupillent. Et moi, je vais bien, malgré l'ennui qui commence à me bouffer de l'intérieur. Ventadour c'est une ville morte ! Remplie de péquenauds tous très cons. Enfin .. Je m'occupe comme je peux.

    Et toi comment vas-tu ? Le voyage se passe toujours aussi bien ? Où êtes-vous ? Toujours pas de dents à m'offrir ?
    Konrad s'est finalement trouvé de quoi se consoler apparemment. Et ne fais pas le blasé, je suis sure que tu es ravi d'être connu et reconnu. Que ton nom soit sur toutes les bouches. Tu jubiles non ? Au moins un peu.

    N'oublie pas, un beau coquillage !

    Ti bacio stupido de mes deux.

    Arsène.

    PS : Qui, quand, où, comment ?

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