Seth.
Il court dans un champs de blé, la tignasse qui s'y mêle, presque invisible, ne dépassant pas les pousses d'une tête.
Sa mère rit derrière lui, simulant une feinte, de celle qui n'arrive pas à le rattraper. Elle est belle... Brune.. Le teint mat des Espagnols, et sa jupe vole au vent de sa course.
Ses yeux noirs d'enfant, l'admire. Il est heureux, et pense qu'il le sera pour toujours.
Des odeurs de Languedoc, la lavande et le romarin, les effluves d'un parfum qui l'imbibe de douceur..
Au loin, son père se tient droit comme un chef, il lui tend les bras, et vocifère en lui lissant la coupe au bol. Le secoue, lui ordonne de bien se tenir, un homme ne courbe jamais le dos, et son père est le plus grand de tous cela.
Une épaisse fumée blanchâtre se diffuse au loin, on entend un clan rire et chanter des chansons grossières, qui se moquent des nobles..
Le Gouape se refroidit, il n'a plus mal, ne sent qu'une caresse répétitive sur son flan meurtrie..
Sur les genoux de son oncle, l'orphelin, écoute les légendes de chevaliers.
Levant un sourcil perplexe, dubitatif, sur les histoires de dragons et de princesses. L'oncle lui veut une autre vie, il aimerait le voir loin de la vermine, et des brigands. Ne veut pas le voir suivre la lignée du patriarche.
A huit ans, il sait déjà lire et écrire, petit génie non reconnu, une vitalité émotive qui l'aide à apprendre. Les odeurs de bois charbonné le rassure..
L'inconnue le panse, et, pour continuer sur la même lancée qu'en au rendez vous de Lesta. Il se laisse faire.. Gardant la seul étincelle dénergie qui lui reste pour survivre et s'éloigner de tous ces morts..
Bruchard lui sourit, ce père adoptif, qu'il a assassiné lui même. Quelle puissance avait cet homme sur le jeune adolescent.. Il connaissait si bien son paternel et lui ressemblait tellement. Un né brigand reste brigand. Il le sera toujours, il quitte l'oncle protecteur, et retourne à sa vie d'artiste.
Il pousse les portes en bois, ça sent le parfum et les femmes sont belles et aguicheuses. Tellement de choix, que le gamin d'onze ans semble légèrement perdu. L'argent aide à se gaver.. L'argent, le luxe, le confort, chimères d'enfant qui signent la trajectoire de sa vie.
Il pointera de la pulpe une rousse, femme mûre, qui lui montrera comment être le plus beau des hommes..
Sa respiration est fuguasse, les paupières se crispent, et bougent au fil des rêves qui s'entrechoquent pour le faire vivre, ou le laisser mourir. Les mains délicates et tremblantes de Sève, sont réparatrice.
Catherine passe en coup de vent, elle le regarde avec le même amour dans les yeux que la première fois qu'ils se sont croisés. Elle est enceinte puis disparait dans un jet de sang, qui crispe le corps gisant du Gouape.
Ses doigts gigotent à peine, ils grattent la terre souillée, s'agrippent à ce semblant de vie. Il siffle, la gorge est strangulation rieuse.
Tant de choses défilent, qu'il ne peut pourra pas les dénombrer, sa vie de maitre Ecorcheur lui donne des relans amers qui le pousse à cracher, comme si il fallait que le poison sorte.
Le visage de Louis.. Rit... Il rit s'y fort que Seth retrouve assez de force pour lui arracher les amygdales en enfonçant son bras dans sa bouche, un pieux dans le fion. Douces chimères qui le font vibrer un instant sur le sol gelé.
Lesta pleure... Il pleure.. pleure... pleure.. Et le blond brigand ne bouge pas un cil. Ses onyxs sont braquées sur lui, et attendent que cela passe.. Le visage froid. Impénétrable.
L'odeur du feu improvisé, lui rappelle les arômes d'en temps.. Des prières passent.. Entre conscience et inconscience. Entre rêve et réalité.
Khalan est là.. Elle est venu. Avec leur fille, bébé pâle de trois mois.
Elle lui parle, le sermonne, le redresse, le bouscule et crie d'une voix douce. Sa tendre femme, l'unique, tous ses jaloux qui dansent autour, les menteurs, les faiseurs de ragots, les destructeurs..
Elle ne veut pas de lui, elle ne lui tend pas de main.
Elle le pousse de l'autre côté de la lumière.
Et il pleure en silence.. Effleure à peine un doigt et le visage figé de sa fille.
Le corps mutilé bouge enfin, se posant lentement sur le côté gauche, en chien de fusil. Ses yeux s'ouvrent en une lueur d'espoir.
Et fixe l'inconnue qui attise le feu, persistant, inaltérable, un noir métallique ténébreux.
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