Anna_clara
[Rouen, dans l'enceinte de la ville, 6 octobre 1461 : Sunday bloody Sunday ? Même pas !]
Les rues, les tavernes étaient pleines de ceux qui semblaient être nos assaillants. Armes déposées, ils trinquaient à la bonne fortune qui leur avait jusqu'à présent souri, et je pestais intérieurement, boule au ventre et mâchoires serrées. Il étaient simplement entrés, profitant de leur indiscutable supériorité numérique pour déborder la garde qui se fit bousculer par la masse. Avouons- le, il y a quelques jours encore, j'aurais donné n'importe quoi pour voir déferler des touristes dans la capitale. Pas faute d'avoir fait la pomme-pomme girl sur toutes les places de Normandie, réclamant la suppression des LP, la création d'une route, l'ouverture des portes...Pas faute non plus d'avoir invité personnellement toute personne susceptible d'amener du sang neuf, ou d'avoir ramassé de pauvres hères étourdis qui avaient cru pouvoir entrer sans autorisation. A pratiquement faire du racolage en rêvant que se retrouvent une cohésion et un esprit de corps qui avaient laissé place à des luttes intestines sans grand intérêt. Vrai, j'avais retroussé mes manches à défaut de mes jupes, ne reculant jamais devant le ridicule et conservant le sourire et le calme sans lesquels je ne serais pas restée moi.
Là, c'était différent. Ces hommes et ces femmes avaient du sang sur les mains. Ils s'en délectaient comme de notre malheur. Cela m'était insupportable.
Empruntant ruelles sombres et passages discrets, je me faufilai jusqu'à l'Orgerie où s'étaient regroupés amis, connaissances, famille. Sur les visages fermés se traduisait toute la peine de ceux qui voyaient leur quiétude bouleversée, tandis que les faciès narquois de provocateurs brigands venaient nous narguer de leur présence. Crispée, désagréable au possible, je saluai l'assemblée, ne décrochant de mots que le strict nécessaire.
Jobart. Ainsi se présenta l'homme qui était assis à côté de moi. La tisane que je buvais pour conserver toute ma lucidité eut du mal à passer. La nausée me prit comme si j'étais grosse de quintuplés. Son nom entendu à Fécamp où je me trouvais quelques deux jours avant me renvoyait l'image de la traitrise dans toute sa laideur. Combien étaient ils comme lui, à avoir poignardé dans le dos leurs frères et soeurs pour instaurer... oui, tiens, pour instaurer quoi d'abord...?! Les sous entendus sur l'accueil Normand d'un dénommé Montecchio me seyaient d'avantage que le visage sans remords d'un Normand qu'il me faudrait supporter comme tel, jusqu'à ce qu'Aristote me donne l'occasion de l'embrocher comme un jambon sur le fil de mon épée.
Je le fixai avec tout le dégoût du monde, le coeur en enclume débordé d'une tristesse sans nom.
Je vous laisse. L'air est irrespirable, ici.
Je claquai la porte de la taverne, priant pour que le combat que j'imaginais devoir venir pour le soir me donne au moins l'occasion de foutre un bon coup de pied dans les burnes de ces faquins, histoire de me faire plaisir avant qu'ils ne m'égorgent à dix contre un. Pardon, à dix contre une. Faut pas déconner...
Les rues, les tavernes étaient pleines de ceux qui semblaient être nos assaillants. Armes déposées, ils trinquaient à la bonne fortune qui leur avait jusqu'à présent souri, et je pestais intérieurement, boule au ventre et mâchoires serrées. Il étaient simplement entrés, profitant de leur indiscutable supériorité numérique pour déborder la garde qui se fit bousculer par la masse. Avouons- le, il y a quelques jours encore, j'aurais donné n'importe quoi pour voir déferler des touristes dans la capitale. Pas faute d'avoir fait la pomme-pomme girl sur toutes les places de Normandie, réclamant la suppression des LP, la création d'une route, l'ouverture des portes...Pas faute non plus d'avoir invité personnellement toute personne susceptible d'amener du sang neuf, ou d'avoir ramassé de pauvres hères étourdis qui avaient cru pouvoir entrer sans autorisation. A pratiquement faire du racolage en rêvant que se retrouvent une cohésion et un esprit de corps qui avaient laissé place à des luttes intestines sans grand intérêt. Vrai, j'avais retroussé mes manches à défaut de mes jupes, ne reculant jamais devant le ridicule et conservant le sourire et le calme sans lesquels je ne serais pas restée moi.
Là, c'était différent. Ces hommes et ces femmes avaient du sang sur les mains. Ils s'en délectaient comme de notre malheur. Cela m'était insupportable.
Empruntant ruelles sombres et passages discrets, je me faufilai jusqu'à l'Orgerie où s'étaient regroupés amis, connaissances, famille. Sur les visages fermés se traduisait toute la peine de ceux qui voyaient leur quiétude bouleversée, tandis que les faciès narquois de provocateurs brigands venaient nous narguer de leur présence. Crispée, désagréable au possible, je saluai l'assemblée, ne décrochant de mots que le strict nécessaire.
Jobart. Ainsi se présenta l'homme qui était assis à côté de moi. La tisane que je buvais pour conserver toute ma lucidité eut du mal à passer. La nausée me prit comme si j'étais grosse de quintuplés. Son nom entendu à Fécamp où je me trouvais quelques deux jours avant me renvoyait l'image de la traitrise dans toute sa laideur. Combien étaient ils comme lui, à avoir poignardé dans le dos leurs frères et soeurs pour instaurer... oui, tiens, pour instaurer quoi d'abord...?! Les sous entendus sur l'accueil Normand d'un dénommé Montecchio me seyaient d'avantage que le visage sans remords d'un Normand qu'il me faudrait supporter comme tel, jusqu'à ce qu'Aristote me donne l'occasion de l'embrocher comme un jambon sur le fil de mon épée.
Je le fixai avec tout le dégoût du monde, le coeur en enclume débordé d'une tristesse sans nom.
Je vous laisse. L'air est irrespirable, ici.
Je claquai la porte de la taverne, priant pour que le combat que j'imaginais devoir venir pour le soir me donne au moins l'occasion de foutre un bon coup de pied dans les burnes de ces faquins, histoire de me faire plaisir avant qu'ils ne m'égorgent à dix contre un. Pardon, à dix contre une. Faut pas déconner...