Finn
Sur la route, au beau milieu des pâturages gelés et plongés dans l'inertie hivernale, le coursier napolitain piaffe d'impatience face à l'allure tranquille imposée par son cavalier dans le cadre de recommandations d'usages :
- « Vous avez bien compris ?... »
S'enquiert le Gaélique auprès de l'Altesse voisine et suzeraine, conscient qu'elle dût prendre sur elle pour accepter de l'accompagner sur les terres de ce Marquis-là.
- « Je vous demande d'être gentille aujourd'hui, on ne crie pas sur Nemours. Je sais que ça ne vous plaît pas, mais dites-vous.. dites-vous qu'on est en mission diplomatique : souriez. Et si jamais l'envie vous prend de lancer un truc, souriez un peu plus fort. Bref, pas d'esclandre. »
Impulsive est la Bretonne, chatouilleuse aussi, et il semblerait que le Marquis se soit par le passé illustré en éprouvant un peu trop vaillamment cette nature sensible. Quant à l'Irlandais, son appréciation du jeune homme varie. La franche aversion née du premier conflit angevin laissa place à une toute aussi sincère camaraderie à compter du second. Il était alors question de se mettre au service du Josselinière mais, entre temps, le vieux grison eut l'idée saugrenue de calancher. Ou, tout du moins, de faire comme si. Muet comme une tombe durant les préparatifs liés à sa mascarade, il finit néanmoins par concéder un peu d'encre à l'explication de son silence :
A-t-il écrit.
Signé :
- « Rodrigo de Villandrando... Et son épouse. »
Le garde à l'entrée du château consulte son compère, aussi peu troublé que lui par la nouvelle. Devant l'absence de réaction, le Chevalier précise :
- « C'est en Castille... »
Non, ça veut pas. Essaye encore.
- « Finn ? Pommières ? Cinquante écus ?... »
Impossible de savoir lequel fut le mot de passe, mais il n'en reste pas moins qu'une lueur éclaire soudain la paire d'yeux sous le camail et que les portes s'ouvrent sans avoir à débourser un sou. Une première victoire dont le frisé se félicite en frottant ses pognes l'une contre l'autre, une fois les rênes de sa monture abandonnées à un quelconque garçon d'écurie. Il fait faim et le voyage depuis la Bretagne a sérieusement manqué de confort. Il lui tarde de prendre ses quartiers. Son regard escalade la façade en pierre jaunâtre pour atteindre les fenêtres les plus élevées du château, s'imaginant déjà pouvoir se décrasser dans une énorme cuve d'eau chaude et se prélasser dans des draps propres, comme annoncé à la Montfort pour la convaincre. Et lui donnant son bras, il se laisse volontiers guider à l'intérieur. Mais l'Irlandais déchante rapidement. La chambrée allouée à son séjour, d'allure modeste, tient davantage du placard et ne comporte pour seul mobilier qu'un vulgaire lit de paille. Interdit, Finn se retourne sur le page affrontant stoïquement les courants d'air du couloir, lequel soutient son regard sans sembler feindre la moindre farce. Non, c'est pas une blague. En témoigne la grimace qui déforme le faciès de l'invité, les doigts posés sur son avant-bras s'étant mués en griffes lui lacérant la manche. Aïe...
Plus tard, aux cuisines, devant la triste bouillie servie :
- « Mmh... Au moins, le repas est chaud. J'vous avais dit que ce serait marrant de jouer les pégus ! »
Faut avouer que ça dépayse.
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- « Vous avez bien compris ?... »
S'enquiert le Gaélique auprès de l'Altesse voisine et suzeraine, conscient qu'elle dût prendre sur elle pour accepter de l'accompagner sur les terres de ce Marquis-là.
- « Je vous demande d'être gentille aujourd'hui, on ne crie pas sur Nemours. Je sais que ça ne vous plaît pas, mais dites-vous.. dites-vous qu'on est en mission diplomatique : souriez. Et si jamais l'envie vous prend de lancer un truc, souriez un peu plus fort. Bref, pas d'esclandre. »
Impulsive est la Bretonne, chatouilleuse aussi, et il semblerait que le Marquis se soit par le passé illustré en éprouvant un peu trop vaillamment cette nature sensible. Quant à l'Irlandais, son appréciation du jeune homme varie. La franche aversion née du premier conflit angevin laissa place à une toute aussi sincère camaraderie à compter du second. Il était alors question de se mettre au service du Josselinière mais, entre temps, le vieux grison eut l'idée saugrenue de calancher. Ou, tout du moins, de faire comme si. Muet comme une tombe durant les préparatifs liés à sa mascarade, il finit néanmoins par concéder un peu d'encre à l'explication de son silence :
- « 'Mes plus plates excuses pour ce retard, mais j'avais affaire avec la Mort.' C'est sans doute que ce que Finn d'Pommières vous répondrait. »
A-t-il écrit.
Signé :
- « Rodrigo de Villandrando... Et son épouse. »
Le garde à l'entrée du château consulte son compère, aussi peu troublé que lui par la nouvelle. Devant l'absence de réaction, le Chevalier précise :
- « C'est en Castille... »
Non, ça veut pas. Essaye encore.
- « Finn ? Pommières ? Cinquante écus ?... »
Impossible de savoir lequel fut le mot de passe, mais il n'en reste pas moins qu'une lueur éclaire soudain la paire d'yeux sous le camail et que les portes s'ouvrent sans avoir à débourser un sou. Une première victoire dont le frisé se félicite en frottant ses pognes l'une contre l'autre, une fois les rênes de sa monture abandonnées à un quelconque garçon d'écurie. Il fait faim et le voyage depuis la Bretagne a sérieusement manqué de confort. Il lui tarde de prendre ses quartiers. Son regard escalade la façade en pierre jaunâtre pour atteindre les fenêtres les plus élevées du château, s'imaginant déjà pouvoir se décrasser dans une énorme cuve d'eau chaude et se prélasser dans des draps propres, comme annoncé à la Montfort pour la convaincre. Et lui donnant son bras, il se laisse volontiers guider à l'intérieur. Mais l'Irlandais déchante rapidement. La chambrée allouée à son séjour, d'allure modeste, tient davantage du placard et ne comporte pour seul mobilier qu'un vulgaire lit de paille. Interdit, Finn se retourne sur le page affrontant stoïquement les courants d'air du couloir, lequel soutient son regard sans sembler feindre la moindre farce. Non, c'est pas une blague. En témoigne la grimace qui déforme le faciès de l'invité, les doigts posés sur son avant-bras s'étant mués en griffes lui lacérant la manche. Aïe...
Plus tard, aux cuisines, devant la triste bouillie servie :
- « Mmh... Au moins, le repas est chaud. J'vous avais dit que ce serait marrant de jouer les pégus ! »
Faut avouer que ça dépayse.
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