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[RP Corbigny] Sonnez cors et binious.

Finn
Quelle brillante jeune dame... C'est donc elle, la fameuse épouse. Pas une vulgaire chimère. Se félicitant pour sa ren-ver-sante perspicacité, l'homme d'arme porte à ses babines le morceau de pain ayant servi à récurer son écuelle, et le mâche avec satisfaction. Mais... Vient-elle tout juste de le traiter de menteur ? Le doute est permis. C'est fait si subtilement que la mastication ne s'en voit même pas perturbée. Régulière est-elle, jusqu'à ce que la mention d'Isaure n'arrache un bref ricanement à l'Insulaire. Sa cousine, ça par exemple. Cette fois-ci, il en est convaincu : si elle avait voulu l'insulter, elle aurait trouvé bien pire que le mensonge comme péché. Entre cousines, tout se sait.

- « Miramont... Oui, nous fûmes voisins en Béarn. Charmante jeune fille, qui n'a malheureusement pas reçu un mari de sa trempe. »

Écourtant les effusions nostalgiques, et surtout peu enclin à s'en prendre aux absents, l'Irlandais appuie l'avant-bras sur son coin de table en se penchant légèrement pour s'assurer l'attention de la nouvelle arrivée.

- « Vous savez, et c'est peut-être un truisme, mais les gens croient ce qui les arrange. Car pour tout vous dire, Marquise, il n'a jamais été question de conteur dans ma correspondance... Tout juste d'une histoire. Une seule histoire ne fait pas un conteur, comme un cantique haut perché ne fait pas un enfant d'chœur. Maiiis comme vous le dites si bien, c'est une affaire complexe. Et il est vrai que je n'ai par ailleurs pas dit toute la vérité. Puisque me voici, en chair et en os ! Hinhin. »

Et quelle bonne chère, ce soir. Le vieux Gaélique masse l'inhabituel renflement de son ventre, si souvent privé. Avant de mettre le doigt sur un détail qui ne cesse décidément de le chiffonner.

- « Cependant, 'réclamer' n'est pas le bon terme. 'Discuter', j'ai dit. Discuter, c'est bien. », ergote-t-il en levant un doigt docte. « Quand on nous fait une offre, c'est d'ailleurs la moindre des politesses de venir l'étudier en personne. Même si en lieu et place du conteur tant espéré, vous devez vous contenter d'un humble chevalier à l'humour douteux... »

Humble alors l'homme se fait, le sourire courtois. Revenant s'avachir contre son dossier, ses deux billes noires voilées par le vin se tournent vers le Josselinière qu'il dévisage patiemment tout en remuant son godet.

- « Enfin... Grâce à Son Altesse, le Marquis a eu son histoire. Et il faut reconnaître qu'elle est infiniment moins déprimante qu'une épitaphe, non ? Qu'en pensez-vous, Votre Honneur ? »

On cause, on cause, mais et le verdict ?
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Aimbaud
Ne vous égarez pas...

Commença Aimbaud, mais le sifflet lui fut coupé par son épouse qui se chargea pour lui de remettre Finn à sa place, c'est-à-dire celle de pas grand chose. Tandis que Clémence parlait, il oscillait entre un air vexé et admiratif, heureux qu'elle l'appuie, froissé qu'elle parle à sa place, et menace par-là de révéler combien elle portait la culotte au sein de leur ménage...

Si fol amour il y eut de ma part, c'était — comme l'a dit si justement mon épouse — avant que j'apprenne vos incointances avec un autre parti, un parti adverse dirai-je même (qui a bien plus d'atouts que moi en matière de séduction, là nous sommes d'accord). Je suis un homme fidèle, et vous, vous m'apparaissez manger à tous les rateliers. Cela refroidit mes ardeurs. Clairement.

Tout en parlant, il avait repoussé son écuelle qui lui fut enlevée, et s'attela à dévorer des fruits secs et d'épaisses parts de fromage aux herbes. Au passage, il éclaira la lanterne de Clémence :

Oui, ma dame, c'est bien l'ancien vassal d'Agnès de Saint-Just qui s'illustra pendant la Fronde, et que je songeais jadis à prendre pour vassal. Non, il n'est pas mort finalement.

À ce propos il allait commencer le récit de ses aventures d'outre-tombe. Ça va être mortel. Je m'en fais déjà tout une bande-annonce...


Brusque, il lâcha son couteau où était piqué un morceau de chèvre au marc, pour ouvrir soudainement les mains, avec une mine spectaculaire :

Qui l'a poussé à se refroidir ? Quels abominables crimes a-t'il commis pour mériter la mort ? Qui a-t'il offensé ? Tué ? Détroussé ? Trépané ? Comment espère-t'il que sa supercherie le protègera encore, alors qu'il revient sous le même nom ? Dans quel état de détresse se trouve-t'il présentement pour qu'il retourne dans le giron de celui qui lui proposa son aide par le passé ? Espère-t'-il une place au chaud, afin qu'un bon suzerain bourguignon le protège quand reviendront à la charge ses ennemis redoutables ? Veut-il tout simplement une seigneurie pour épouser la noble dame de ses pensées ? Ses mascarades ont-elles réduit ce valeureux chevalier à la pauvreté ? Voilà ce que nous révèlera le fabuleux récit de Finn de Pommières, en exclusivité ce soir à Corbigny.

Nous vous attendions pour commencer, voyez.


Il posa la main sur celle de sa femme avec un sourire tranquillisant, machinal. Qu'elle se rassure... Il n'allait pas faire entrer n'importe quel plouc-assassin dans la famille, sans l'interroger préalablement. Non, il n'avait obtenu aucune histoire, seulement des enrobades et des pirouettes, qui ne l'avaient pas repu, seulement agacé. La patience n'était pas le point fort d'Aimbaud, car depuis l'âge tendre, il obtenait à peu près toujours tout dans la minute, dès lors qu'il en exprimait le souhait. Il se dit donc, puisqu'il n'avait qu'une parole et que ces gens-là n'honoraient pas la leur, qu'il allait bel et bien devoir les jeter dehors, une fois le repas terminé... Il se tourna vers ses convives, toujours optimiste :

À vous la parole, quand vous aurez fini de tourner autour du pot. Car il commence à se faire tard et s'il vous faut encore trouver une auberge...
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Marzina
L’Altesse contint soupirs, roulement d’yeux et départ en fanfare. Elle avait promis à Finn, certes, mais la situation tenait lieu d’épreuve pour elle. S’il ne lui avait pas demandé, elle ne serait pas venue. Et s’il ne l’avait pas fait promettre, il y aurait sûrement longtemps déjà qu’elle aurait quitté les lieux en coup de vent, comme la tornade qu’elle était. Mais elle était relativement sage puisqu’ils avaient passé semblant d’accord. Il n’empêche qu’intérieurement elle bouillait. Elle n’avait jamais rien demandé ou quémandé de sa vie, et jusqu’à maintenant tout lieu où elle avait été, elle y avait été invitée. Si elle voulait quelque chose, elle ne demandait pas elle prenait, par la force s’il fallait, et avec aplomb. Si ça n’avait tenu qu’à elle, elle aurait préféré crever de faim ou de froid que de venir. Ou balancer des nains sur le Berry avec Katina. Ou faire les boutiques à Paris avec Alix Ann.
L’arrivée d’une noble femme cependant lui sembla réconfortante…jusqu’à ce qu’elle se souvienne en entendant Finn qu’il ne savait pas parler aux femmes. Surtout celles qui étaient nobles. Elle ne sût retenir le soupir cette fois. Le faire entrer en diplomatie ne lui ferait sans doute pas de mal sur ce plan. Comme il fait les présentations, elle incline poliment la tête à défaut du corps, la faute à la table. Si elle avait des griefs contre le Marquis, la Marquise partait sur une feuille d’une blancheur immaculée, ne la connaissant pas.

« Noz vat Votre Magnificence. »

Contrairement à Finn, un coup d’œil sur l’habillement de l’arrivante lui avait fait dire sans doute aucun qu’elle était sinon maitresse des lieux, de haute extraction. Elle ne prenait que peu de risque sur ce postulat, la suite lui donnera raison.

« Plijet braz comme on dit chez nous, ou enchantée comme vous le dites. »

Quand Clémence eût fini de régler ses comptes avec l’Irlandais, l’Altesse en profita pour se tourner vers la nouvelle arrivante, espérant pouvoir faire connaissance pendant que les hommes faisaient leur affaire. C’est donc d’une voix un ton plus bas qu’elle s’adressa à la jeune femme, quittant la conversation de ces messieurs :

« Vous devez être la Maîtresse des lieux Votre Magnificence. Permettez-moi de vous remercier de nous accueillir chez vous, moi et mon vassal, malgré notre arrivée quelque peu inattendue, et les manières un peu rudes du chevalier. »

La bretonne poursuivit donc sur sa lancée :

« Il va de soi que nous ne saurions abuser de votre hospitalité en restant plus que nécessaire, et que nous repartirons sitôt la discussion entre ces messieurs terminée. Et ayant partagé votre table ce soir, sachez que c’est avec grand plaisir que je ferai de même avec la mienne si vous veniez à passer près de mes terres en Bretagne. »

Voyant là l’occasion de poursuivre la conversation, elle annonça :

« Elles sont de taille beaucoup plus modeste que les vôtres, mais je ne pense pas me tromper en vous annonçant que vous sauriez néanmoins leur trouver un grand charme. C’est une ancienne île qu’un fin chemin de sable a relié au continent au fil du temps, et vous y trouverez un climat fort doux lors des mauvaises saisons, mais très chaud lors des beaux jours. »

Avec un sourire elle ajouta :

« Et je suis sûre que ma charmante filleule et nièce que j’élève, elle aussi noble bretonne, aurait grand plaisir à faire votre connaissance. Elle a partagé plusieurs années durant le toit de la jeune sœur de votre époux, paix à son âme, l’appréciait beaucoup, et avait une certaine admiration pour elle et sa prestance. Je ne pense pas me tromper en disant qu’elle apprécierait grandement votre compagnie.»
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Finn
Sirotant son vin, le Gaélique se fait la réflexion qu'il est peut-être temps de traiter l'affaire avec davantage de sérieux. Sans plus de fioritures ni d'effets de manche, il reprend la parole pour éclairer le Marquis point par point. C'est du détail qu'il veut, après tout.

- « Ne vous en faites pas pour l'auberge, j'ai mon propre logis en capitale et nous ne refusons jamais une nuit à la belle étoile. De plus, votre hospitalité dépasse déjà toutes nos espérances. »

Prêt à lui donner ce qu'il réclame, une bonne fois pour toutes, Finn abandonne placidement son godet afin de croiser les doigts sur la table.

- « Se jouerait-il actuellement une guerre franco-bretonne, mon bon Marquis ? Pas que je sache. Les relations diplomatiques entre le Royaume et le Grand Duché sont d'ailleurs plutôt chaleureuses. Des traités se signent un peu partout. À moins que le parti que vous qualifiez d'adverse ne soit la famille Montfort ? Ou Penthièvre ? », demande-t-il, circonspect. « N'êtes-vous pas Penthièvre, vous même ? N'est-ce pas votre cousin qui a rallié les Montfort à votre cause ? La famille de Son Altesse a servi vos projets en Touraine et, puisque j'étais sur le terrain, permettez-moi de vous assurer que ces gens furent nos alliés les plus compétents. Que je leur prête ensuite allégeance ne fut que le résultat de vos propres alliances. Votre épouse l'a dit, vous êtes un homme raisonnable, alors la cohérence de mes 'accointances' ne vous échappe certainement pas. Mieux, cela dénote une certaine loyauté envers vous-même. »

Les deux femmes étant en pleine palabre loin du sujet qui l'intéresse, le Chevalier poursuit en direction de son hôte.

- « En ce qui concerne les raisons de ma supercherie, je crois que Son Altesse vous a longuement répondu. En bon vassal, j'ai accepté de tirer un trait sur mon passé pour les intérêts de ma suzeraine : quelle meilleure preuve voulez-vous du dévouement dont je suis capable envers un suzerain ? Son Altesse venant de m'accorder sa permission, je peux néanmoins apporter quelques précisions à ce récit, si tel est votre souhait. Mais je crains là encore de décevoir vos impressions. »

L'Irlandais rassemble un instant ses souvenirs avant de reprendre, le plus clairement possible.

- « On pourrait qualifier ce passé de 'mercenaire', mais il manquerait quelque chose. Vous l'avez rappelé, j'ai servi Agnès de Saint Just. Je l'ai même servie au-delà de mon serment, puisqu'une fois destituée pour ses propres actions contre la Couronne, je continuai à lui apporter mon soutien. À ce moment-là, j'aurais pu accepter de prêter allégeance au Béarn pour cette même seigneurie, comme le comté me l'avait proposé, mais vous avouerez que se soumettre à l'autorité qui venait de déchoir ma suzeraine de son titre aurait réclamé un certain opportunisme de ma part. Or, je n'en dispose pas. Pas même lorsqu'il s'agit de remplacer un fief issu de mérite par un fief de mérite. Alors donc, j'ai prolongé ma fidélité en m'engageant aux côtés de leurs Majestés dans ce conflit angevin de l'hiver dernier, sans plus de terres pour motiver mon effort. Mais vous le savez, vous y étiez également. Puis tout ceci nous a mené en Bourgogne et, pour certains, dans le Sud du Royaume. Vous le savez également mieux que quiconque, puisque vous avez justement été guerroyer dans ce fameux Sud, pendant que je chapeautais vos opérations en Touraine. »

Marquant un temps de repos pour se désaltérer d'une large rasade, le Gaélique en vient au point précis censé répondre au Marquis.

- « Sur ces deux fronts, il fallait affronter notre très Sainte Église. Je fus informé cet été qu'elle punissait d'excommunication les fidèles serviteurs de la Couronne qui avaient eu l'audace de s'y trouver pour lever le fer sur les Croisés et leurs alliés du Sud. C'est ainsi qu'après avoir rempli mon devoir envers vous, libéré de tout engagement, Son Altesse me proposa de m'élever Chevalier afin de mieux la servir. Elle et son frère furent des nôtres en Touraine, alors je n'avais pas de raison de ne pas leur accorder ma confiance quand ils s'étaient montré dignes de la vôtre. Mais l'idée de lui offrir un vassal déchu de son statut de fervent Aristotélicien ne m'apparut pas être à la hauteur de son offre. Quel genre de mauvais vassal s'accommoderait d'engager le pronostic salutaire de sa Suzeraine ? Son Altesse est vertueuse et je m'efforce d'atteindre cet idéal, du mieux que je le peux. Alors comme ma suzeraine vous l'a dit, je me suis résigné à disparaître un temps. Pour sa réputation, notamment auprès des cercles diplomatiques, comme pour le salut de nos âmes. Et là, il ne s'agissait pas de renier complètement mes actions au service de la France ou de feu notre bon Roy. J'en suis fier et je ne regrette pas ce qui a été fait. Mais c'est la solution qui s'imposa comme la plus honorable. Et qu'on ne m'attribue désormais plus le mérite que tout acteur de ces événements peut tirer, cela ne me dérange pas. Je ne cherche ni la gloire ni les honneurs. La fidélité est une denrée bien plus rare que je préfère de loin cultiver. Bien sûr, on pourrait parler de ruse, mais il faut malheureusement reconnaître qu'elle a parfois sa place, lorsque son but est louable. L'expérience m'apprit qu'à la guerre, bien peu de châteaux tombent sans une dose de ruse. Et la guerre, c'est ce que l'on me demande de connaître sur le bout des doigts. »

Un soupir désabusé se noie dans le godet qu'il porte à ses lèvres. Plutôt à l'aise puisque nul mensonge ne ternit son récit, Finn torche le rouge de sa barbe avant de conclure.

- « Alors voyez, vos ardeurs n'ont aucune raison de se montrer aussi frileuses. Ce sont là les seuls crimes que l'on peut imputer à ma disparition. »
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Aimbaud
Cronch... crnch... krnnch... crnnnk... cromch...

Faisait le jeune marquis, les joues pleines d'amandes et de graines de lin, en écoutant Finn avec attention. Il l'écoutait, malgré le croustillement des céréales dans ses bajoues qui lui procurait un bruit de fond parasite... Mais il ne quittait pas son invité du regard, ce qui lui donnait l'air d'une statue de gros écureuil hébété.

Quand il eut fini cette bouchée, et que Finn en était au récit pompeux de la plus-ou-moins héroïque campagne angevine qu'il avait mené dans l'hiver, il goba des pâtes de fruits pour faire passer le souvenir amer de cette débâcle... Puis il attaqua un petit pain au miel, de ceux que sa mère lui faisait confectionner lorsqu'il chevauchait seulement des destriers de bois... Cela le réconforta lorsqu'il entendit le récit triste de la dernière guerre sainte menée contre la Bourgogne. Et il soupira, penaud, en faisant voler des miettes de pain brioché sur son plastron.

Une moustache de vin lui redonna des couleurs, et mouilla sa langue desséchée. Il l'essuya. Il adressa un coup d'oeil à sa femme pour observer sa réaction au discours du potentiel vassal, puis répondit.


Si ce sont là vos seuls crimes, je ne chercherai pas plus longtemps le mal où il n'est.. Parce que c'est éreintant de vous tirer les vers du nez, ils y sont fermement attachés, sans blague.

D'après vos dires, vous êtes rusé, loyal et bon combattant. N'ayant vu preuve que de votre ruse, je dois vous croire sur parole pour le reste. Et c'est ce que je fais. Car chez moi, le serment, quel qu'il soit, est pareil à ceux que l'on prononçait au temps des tous premiers rois. Inviolable, sacré. Les menteurs, je les voudrais renvoyer tous à Dieu.

Resservez-vous.
Fit-il en levant sa coupe.

C'est vrai, la paix règne entre France et Bretagne. J'ai mes raisons de croire que les paix ont un fort taux de mortalité dans nos contrées. Mais soyons joueurs, je prends le risque de miser sur l'utopie. J'ai quelques carrés de terre qui peuvent convenir à un seigneur, et quelques carrés de confiance à accorder à un allié. Alors...

Il se gratta le menton un instant pour réfléchir à sa formulation...

Alors, si t'en est que vous me juriez "humilité" en plus d'aide, conseil et loyauté ; que vous passiez par le confessionnal ; que vous vous mettiez en règle avec la justice et l'église pour regagner vos noms, ou choisissiez d'en changer définitivement afin de ne pas me causer de problème avec les registres héraldiques (je vous jure qu'ils sont chiants sur les détails) ; et que vous me fassiez un petit cadeau de bienvenue ; je veux bien de vous pour vassal. À la bonne votre, Finn !

Et il exécuta un grand geste en l'air avec son verre de vin, éclaboussant la table de son enthousiasme...
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Clemence.de.lepine
Il lui faut un léger temps de réaction pour comprendre que l’Altesse bretonne s’adresse à elle. Elle lui jette un regard vif qui trahit sa surprise et le geste qui vise à porter à sa bouche un morceau de pain imbibé de sauce s'interrompt en plein vol. Une femme lui parle. Une bretonne qui plus est. Les amitiés ne sont pas son fort, les amitiés bretonnes encore moins, les amitiés bretonnes féminines avaient tourné au désastre. Devait-elle se montrer aimable, ou lui répondre tout de go qu’elle se fichait complètement de sa filleule, ou nièce, ou qu’importe, afin de couper court à toute éventualité de relation future ?

Elle se laisse le temps de la réflexion alors qu’elle se met finalement à mâchouiller le bout de pain visqueux, hochant du chef poliment et s’éclaircissant la gorge afin d’annoncer sa prise de parole prochaine.


Si Yolanda appréciait votre nièce, alors sans aucun doute ce doit être une jeune fille de valeur.


Ou une de ces mioches, parmi tant d’autres, dont la jeune Josselinière avait adoré s’amouracher.

J’ai déjà eu l’occasion de me rendre quelques fois en Bretagne et jamais ressenti tout à fait l’envie d’y retourner depuis ma dernière visite…


Elle roule des yeux et, baissant la voix, continue sur le ton de la confidence afin d’atténuer les révélations maladroites qui suivent :


Ça n’est absolument pas contre vous, mais disons j’ai quelques réticences au sujet de la Bretagne. Je ne parle pas seulement de cette… –allons, appelons cela coutume – française, qui vise à plus ou moins ressentir une certaine… aversion pour les bretons… C’est qu’ils n’ont pas une réputation facile, facile. Enfin, vous me direz qu’il s’agit là de vulgaires stéréotypes, vous n’êtes pas tous rustres ou grossiers.

Elle finit sa coupe de vin et se laisse resservir, se rapprochant dans un même temps de la Montfort afin de continuer dans sa lancée.

Vous me direz aussi qu’on a peur de ce qu’on ne connait pas, et je vous répondrai que oui, tout à fait ! Moi par exemple je n’aime pas du tout ce que je ne connais pas, c’est ainsi, alors vous pensez bien que les Bretons, j’ai un peu de mal. Je n’aime pas non plus les Anglais d’ailleurs. Entre autres. Mas je vous disais que, vieilles coutumes françaises mises à part, j’aurais un peu de mal à remettre les pieds en Bretagne pour… des raisons un peu plus personnelles.

Le vin pouvait bien commencer à lui embrouiller le cerveau, elle gardait cependant une oreille ouverte au dialogue masculin. La jeune marquise tourne son regard vers eux et écoute un peu plus attentivement la fin du discours du prétendant vassal, sirotant distraitement le précieux nectar pourpre.


Enfin, tout cela pour vous dire que j’accepterais avec plaisir une invitation de votre part. Mais dites-moi d’abord, alors ce monsieur c’est votre vassal si je comprends bien ? Permettez…

Elle se racle à nouveau la gorge et lève diligemment le doigt, annonçant par là qu’elle s’apprête à en placer une, s’il vous plait…

Je suis arrivée un peu au milieu de la conversation, et vous l’avez certainement déjà évoqué avant – vous venez d’ailleurs de l’évoquer rapidement, Aimbaud – et je ne voudrais pas non plus donner l’impression d’être l’empêcheur de tourner en rond ni rien, mais enfin moi il me parait difficile d’envisager de prendre pour vassal le vassal d’une Bretonne. Je disais justement à Son Altesse que je n’ai absolument rien contre les Bretons, et comme vous le dites Aimbaud la France est actuellement en paix avec la Bretagne. Mais vous dites aussi que vous ne croyez pas à une paix durable – si, c’est absolument ce que vous avez dit. J’adore jouer, vraiment, j’aime les défis et les situations complexes, mais enfin, cher Chevalier, dans l’éventualité où vous deviendriez notre vassal, que se passera-t-il si un jour l’on invoque l’auxilium et que nous levions notre ban afin de venir nous porter secours auprès du Roi pour une opération contre la Bretagne ?

Elle écarte les bras, légèrement désemparée par l’utopie avouée de son époux.

Son Altesse lèverait elle-même son ban et vous demanderait la même chose que nous vous demanderions. A qui reviendrait, alors, votre hommage lige, si tant est qu’il y en aurait un ? De cela, il faudrait parler maintenant je crois, avant d’accepter n’importe quel vassal qui aurait fait preuve par le passé d’un peu de bravoure.

Et elle croise les bras sur sa mince poitrine en attendant une réponse qui viendrait de Finn, ou de Marzina, ou bien des deux puisque les deux sont après tout concernés.

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Finn
- « À la bonne mienne, oui... », lâche-t-il en répondant au toast du Marquis sans vraiment s'en rendre compte, absorbé qu'il est par ses réflexions. Pas qu'il y ait tant que ça à méditer, mais le vin n'aidant pas à la concentration, le Gaélique doit redoubler d'effort. Alors front plissé, les doigts affûtant sa barbe, et l'oreille attentive, il s'enfonce dans son siège pour laisser s'exprimer l'épouse. Elle a levé la main, alors on peut supposer qu'elle en a le droit. Pourquoi pas, après tout. Ça doit se faire. Puis le grisonnant se sent d'humeur conciliante, là tout de suite. D'autant qu'on semble enfin s'intéresser aux points délicats soulevés en début de repas.

- « Mmh... Oui, ce sont là des conditions tout à fait raisonnables, j'en attendais pas moins. », répond-il en hochant lentement la tête vers Aimbaud. « Je cherche justement un confesseur alors si vous connaissez de bonnes adresses, n'hésitez surtout pas à partager. »

L'archidiaconesse de Nantes aurait pu être l'homme de la situation, si seulement elle ne s'était pas montrée si obstinée dans son refus de l'adouber qu'il fallut la séquestrer à Kiberen comme une enfant capricieuse. Comment lui faire accepter d'entendre ses confessions, à présent ? Finalement, il en vient à penser qu'il aurait mieux valu ne pas la relâcher dans la nature. On ne l'y reprendra plus. Les clercs compétents sont si rares.

- « Et oui, c'est un souci, Marquise. Un sérieux souci, aussi hypothétique soit-il. Vous faites bien d'en parler. Enfin, pas si vous prenez n'importe quel vassal, mais si vous souhaitez me prendre moi, alors oui il nous faut aborder le sujet. »

Le Gaélique se réserve quelques secondes pour réduire à néant le contenu de son verre avant de relever les yeux sur les deux époux, passant de l'un à l'autre, sans savoir lequel détient sa réponse.

- « Je vous en prie, dites-moi : exigeriez-vous mon hommage lige en prévision d'un tel cas de figure ? »
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Aimbaud
Aimbaud eut une moue de réflexion, les lèvres pincées en dedans, avec un petit air babouinesque, et le front plissé sous les résidus de sa coupe-au-bol désormais mutée en boucles brunes tombant sur ses oreilles. Et il regarda ainsi sa femme, pour convenir avec elle en silence, mais non sans expressivité, de qui prendrait la parole pour répondre aux angoisses de leur futur vassal. Puis, décidé, il fit claquer ses lèvres en bruit de bouteille qui se débouche et regarda Finn.

Ben oui, l'on a qu'à faire ça.

Quand il voulait, il était arrangeant cet irlandiche.
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Finn
L'Irlandais opine un moment en silence pour montrer qu'il prend la mesure de leurs nouvelles exigences.

- « C'est tout ?... »

Il semblerait. Après avoir consulté sa suzeraine du regard, le vieux briscard pose son verre vide et retrouve un semblant de sourire en s'adressant à ses hôtes :

- « Bien bien. Je crois que nous avons tout ce qu'il nous faut pour réfléchir à votre proposition en notre âme et conscience. »

D'un geste de la main, il fait voler quelques miettes de son pourpoint et s'appuie ensuite sur les bords de la table afin de conclure l'entrevue.

- « Nous n'allons pas abuser plus longtemps de votre généreuse hospitalité, d'autres affaires me pressent à Dijon. Marquise, Marquis, trugarez pour le repas. Ce fut très instructif. »
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