Myrdinn
[Saint Brieuc - une semaine plus tôt]
Cette grande maison près de la place de la mairie ?
Trop dans le centre, ça ne marchera pas.
La bâtisse près du port ?
Trop chère.
La maison près de la porte sud ?
Trop petite.
Celle à l'ouest, sur la route de Tréguier?
Trop excentrée.
La ferme du père Gaëtan, elle est en vente
Trop grande.
La... euh... la grange dans les faubourgs...
...
Bha je fais ce que je peux, mais la liste est épuisée là mon bon seigneur. Je ne...
Mon bras se tend et bloque le passage à l'homme qui m'accompagne, pour le forcer à stopper. Cet homme, Gaël Le Coedic, la trentaine bien tassée, usurier de métier et vendeur de biens à mi-temps, je l'ai embauché voilà une semaine. "Sans problème, je vous trouve ça en moins de deux" m'a-t-il dit. Sans doute était-il trop intéressé par ma bourse pour bien intégrer le fait que je suis un client compliqué. Compliqué dans le sens où je sais très exactement ce que je veux. Trop exactement en vérité et c'est bien là le problème.
Il commence à s'en apercevoir maintenant qu'il m'a mené d'un bout à l'autre de la cité briochine sans réussir à me contenter. Rien ne me va. Non pas que cela ne convient pas réellement. C'est juste qu'ayant une idée trop arrêtée de la façon dont je rêve ce bâtiment, aucune des proposition ne me convient.
Et j'étais en train de commencer à envisager de faire le deuil de mon idée quand, au détour de la rue que nous empruntons, me voilà nez à nez avec l'exacte réplique de ce dont j'ai rêvé.
Le bâtiment idéal. Pas trop excentré mais suffisamment en retrait dans une ruelle pour ne pas être trop exposé, le tout dans un quartier ni trop miséreux, ni trop bourgeois. De taille adéquate, de volume parfait, de style idéal.
C'est lui.
Euh...
Il est parfait.
On parle bien du même là ?
C'est très exactement ce que je cherche.
Ca ?
Je l'achète. Occupez vous de tout.
Acheter ? Et si ce n'est pas à vendre ?
Vous trouverez une solution.
Jeune seigneur... je...
Quoi donc ?
Je le regarde. De ce regard dur que je travaille depuis quelques mois. Le type de regard étudié typiquement noble qui signifie qu'il ne fait pas bon me contredire.
C'est votre argent après tout...
Voilà qui est mieux. Je hoche la tête, satisfait. En fait c'est un peu - beaucoup - l'argent de mon père. Une sorte d'avance sur l'héritage... qui n'est pas à moi. Mais vu les absences de l'héritier légitime, de ce fameux ainé, ça ne se remarquera même pas. Tout l'avantage de tenir les comptes et de savoir faire des petitss aux écus paternels.
Et puis je doute de payer bien cher.
Occupez vous de tout.
[Aujourd'hui]
De tout il s'est occupé. Comme prévu. Je le paye assez grassement pour cela vous me direz. Et vous avez raison. Mais pour un usurier des quartiers pauvres, il sait y faire quand il s'agit de négocier. Je songe du coup à le conserver à mon service. Il me faudra un prête nom de toute façon.
Alors que je signe l'acte de vente, ou d'achat me concernant, je ressens l'excitation monter en moi. Je viens de franchir un cap important. Le premier pas vers la réalisation de mon projet professionnel, le début de l'oeuvre de ma vie.
Aussitôt les formalités terminées, j'expédie un courrier à celle avec qui je tiens à partager ce moment particulier. Celle qui m'accompagne depuis tant d'années qu'elle semble une partie de moi. Le temps fait son oeuvre et les évènements récents ont poussés à ce que ce lien si particulier qui nous unit se distende. Mais je n'ai aucun doute me concernant: c'est avec elle que je veux fêter ce jour.
Ma soeur.
Cette grande maison près de la place de la mairie ?
Trop dans le centre, ça ne marchera pas.
La bâtisse près du port ?
Trop chère.
La maison près de la porte sud ?
Trop petite.
Celle à l'ouest, sur la route de Tréguier?
Trop excentrée.
La ferme du père Gaëtan, elle est en vente
Trop grande.
La... euh... la grange dans les faubourgs...
...
Bha je fais ce que je peux, mais la liste est épuisée là mon bon seigneur. Je ne...
Mon bras se tend et bloque le passage à l'homme qui m'accompagne, pour le forcer à stopper. Cet homme, Gaël Le Coedic, la trentaine bien tassée, usurier de métier et vendeur de biens à mi-temps, je l'ai embauché voilà une semaine. "Sans problème, je vous trouve ça en moins de deux" m'a-t-il dit. Sans doute était-il trop intéressé par ma bourse pour bien intégrer le fait que je suis un client compliqué. Compliqué dans le sens où je sais très exactement ce que je veux. Trop exactement en vérité et c'est bien là le problème.
Il commence à s'en apercevoir maintenant qu'il m'a mené d'un bout à l'autre de la cité briochine sans réussir à me contenter. Rien ne me va. Non pas que cela ne convient pas réellement. C'est juste qu'ayant une idée trop arrêtée de la façon dont je rêve ce bâtiment, aucune des proposition ne me convient.
Et j'étais en train de commencer à envisager de faire le deuil de mon idée quand, au détour de la rue que nous empruntons, me voilà nez à nez avec l'exacte réplique de ce dont j'ai rêvé.
Le bâtiment idéal. Pas trop excentré mais suffisamment en retrait dans une ruelle pour ne pas être trop exposé, le tout dans un quartier ni trop miséreux, ni trop bourgeois. De taille adéquate, de volume parfait, de style idéal.
C'est lui.
Euh...
Il est parfait.
On parle bien du même là ?
C'est très exactement ce que je cherche.
Ca ?
Je l'achète. Occupez vous de tout.
Acheter ? Et si ce n'est pas à vendre ?
Vous trouverez une solution.
Jeune seigneur... je...
Quoi donc ?
Je le regarde. De ce regard dur que je travaille depuis quelques mois. Le type de regard étudié typiquement noble qui signifie qu'il ne fait pas bon me contredire.
C'est votre argent après tout...
Voilà qui est mieux. Je hoche la tête, satisfait. En fait c'est un peu - beaucoup - l'argent de mon père. Une sorte d'avance sur l'héritage... qui n'est pas à moi. Mais vu les absences de l'héritier légitime, de ce fameux ainé, ça ne se remarquera même pas. Tout l'avantage de tenir les comptes et de savoir faire des petitss aux écus paternels.
Et puis je doute de payer bien cher.
Occupez vous de tout.
[Aujourd'hui]
De tout il s'est occupé. Comme prévu. Je le paye assez grassement pour cela vous me direz. Et vous avez raison. Mais pour un usurier des quartiers pauvres, il sait y faire quand il s'agit de négocier. Je songe du coup à le conserver à mon service. Il me faudra un prête nom de toute façon.
Alors que je signe l'acte de vente, ou d'achat me concernant, je ressens l'excitation monter en moi. Je viens de franchir un cap important. Le premier pas vers la réalisation de mon projet professionnel, le début de l'oeuvre de ma vie.
Aussitôt les formalités terminées, j'expédie un courrier à celle avec qui je tiens à partager ce moment particulier. Celle qui m'accompagne depuis tant d'années qu'elle semble une partie de moi. Le temps fait son oeuvre et les évènements récents ont poussés à ce que ce lien si particulier qui nous unit se distende. Mais je n'ai aucun doute me concernant: c'est avec elle que je veux fêter ce jour.
Ma soeur.
Citation:
Dana,
Retrouve moi dès que possible dans la ruelle qui jouxte la rue Nominoë. J'ai quelque chose d'important à te montrer.
Didinn
Retrouve moi dès que possible dans la ruelle qui jouxte la rue Nominoë. J'ai quelque chose d'important à te montrer.
Didinn
Alors que le page s'éloigne délivrer son message, je range les différents parchemins officiels et le coeur léger, je me rend sur place. Je me rend chez moi.
Mon premier futur bordel.
_________________