Enzo
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« Il ne peut y avoir quun seul maitre. »
Une nuit, Enzo à Gabrielle.
[ - Sur les routes ]
Il y avait un rival sur son terrain de jeu. Un rival quil appréciait, pourtant, mais quil haïssait de savoir quil la troublait elle. Un rival à qui il aurait cassé le nez, déjà, sil avait pu. Sil avait vu. Un vagabond, une bête roturière aux allures charmeuses mais qui ne l'était en rien, ou simplement pour attirer la victime dans ses filets. Oui, un autre, un peu comme lui. Et maintenant quil savait, quil le sentait quil nétait pas comme les autres, quil pourrait la troubler encore plus, et quil navait, vraisemblablement, pas assez dhonneur pour ne pas toucher à la femme dun « compagnon », Enzo sen voulait. Il sen voulait de lavoir entrainé si près de sa femme. Il sen voulait de ne pas avoir remarqué avant. Il sen voulait presque de lavoir apprécié, de lapprécier encore. De ne pas avoir écouté les conseils dElisabeth. Et alors que les autres pissaient et que lui se dégourdissaient un peu les jambes, les poings du jeune Comte se crispèrent, et sur son visage un léger rictus se forma. La jalousie reprenait ses droits, alors quil essuyait toujours facilement toute rivalité, restant lunique maitre, le dieu de sa nina, ça nétait plus entièrement le cas à l'heure actuelle. Elle ne lavait pourtant pas encore trahi, mais il sentait un quelque chose, il ne savait pas bien quoi, qui lagaçait plus que tout. Oui, il y avait un rival sur son terrain de jeu et il était aveugle. Il était faible. Un soupir puis laveugle secoue la tête avant de quitter le carrosse dans lequel il se trouvait. Cétait la pause et autour de lui, il pouvait entendre les bruits des hommes riant en pissant, des femmes qui se dégourdissaient un peu les jambes en parlant, et des soldats faisant claquer leurs épées contre leur hanche en faisant le tour du convoi à pied, vérifiant quil ny avait pas de malotrus prêt à abuser dun si grand convoi. Sentant bien que personne ne viendrait lui prendre le coude pour lamener où il voudrait, le jeune homme soupira de nouveau et se guida comme il pouvait, à laide de son makhila, plus loin. Il navait pourtant aucune raison dêtre aussi jaloux, Gabrielle lui avait toujours été fidèle, et cest une chose quil appréciait, malgré son inconstance à lui. Pourquoi Tibère réussirait là où tous les autres avaient échoué ? Mais saurait-elle dire non à un homme qui pourrait la serrer violemment contre un mur et lui murmurer des insanités ? Saurait-elle dire non à une voix autoritaire qui lui dirait de se laisser faire ? Résisterait-elle à cette envie dêtre troublé par un autre ? Serait-elle capable de se venger des inconstances de son époux ? Agressivement, le makhila fendit lair et tomba au sol, faisant rager le jeune comte encore plus.
Il ne devrait pas pourtant. Il navait rien à dire, après tout, lui qui faisait des enfants ailleurs, lui qui retournait un certain nombre de blondes, qui avait une favorite, et une autre maitresse, marquise, quil reverrait sans doute. Sil était incapable de lui être fidèle, pouvait-il honnêtement lui demander la même chose ? Sans doute que non, mais la simple pensée que ce blond lui ait touché la joue, lest troublée, quelle lui ai avoué quil semblait particulier, cet homme là, faisait bouillir en lui une envie de frapper. Mordric avait reçu des coups pour moins que ça, mais il ne pouvait rien faire. Parce quil ne voyait rien, parce que ça ne changerait rien, parce quelle lui en voudrait. Et comme un con, la veille, il lui avait parlé de ses inquiétudes, alors quil refusait bien souvent dentendre les siennes à elle. Et alors que la nuit avait relativement bien commencé, malgré le besoin de prouver sa valeur dans le foutre et la violence, elle sétait terminée sur une note sombre, il avait serré sa femme contre lui sans savoir réellement quoi dire et quoi faire. Il navait finalement que très peu dormi cette nuit là et il sen était voulu, laissant la culpabilité le gagner de nouveau comme lêtre faible quil se considérait être en ce moment. Pourtant, il sétait promis dêtre un homme pour elle, le maitre parfait, faute ne pouvoir être un mari adéquat. Daller la chercher, dans les tréfonds, sil le fallait, de ne jamais la laisser tomber, dêtre toujours là pour la rattraper dans les moments où elle se laissait un peu trop aller, tristement. Il sétait même promis de la faire rire et sourire, en sa présence, autant quil le pouvait, tenter de la rendre un minimum heureuse, ne supportant pas toujours tout le malheur quil abattait sur elle. Et cest lui qui retombait, à cause de la main dun autre qui sétait égaré sur la joue de son épouse, à cause de ce que cela représentait, parce quil y avait un rival sur son terrain de jeu. Un coup de poing rageur sabattit sur un arbre qui était là, serrant les dents en sentant la peau de ses jointures fendre. Le salaud !
- « Salaud ! »
Et le poing de sabattre encore et encore. Ça nétait finalement plus à elle quil en voulait, elle navait rien fait, mais à Tibère, de simmiscer entre eux, comme sils navaient pas assez de soucis. Lui à qui Enzo avait parlé de ses problèmes maritaux, à qui il avait dit quil avait des maitresses, à cet homme en qui avait eu relativement confiance et qui de surcroit, était avec une autre. Il aurait presque envie denvoyer Night dans le lit de langlois, juste pour se venger de ce geste intime quil avait eu avec son épouse. Oui, il était mal placé pour parler, mais il ne pouvait sempêcher de sentir la colère en lui, ça devenait obsessessionel, il devenait possessif, ça le prenait dans son corps, ses tripes et sa tête. Et laveugle de cogner encore et encore larbre, à répétition, jusquà ne plus vraiment sentir la douleur de sa peau qui sexplose sur lécorce et y laisse des traces ensanglantées.
- « Sale fils de »
Et le front de venir se fracasser contre le tronc, continuant à taper à laveugle, se libérant de toute cette frustration accumulée depuis des semaines, pas seulement à cause de limpudent roturier. Non, laccident, les genevois, la réaction de sa femme face à sa condition, le fait quil était aveugle, le reste. Tout ce quil avait très peu exprimé, sauf en quelques coups de pieds rageurs et en larmes nocturnes, trop fier pour montrer quil était désemparé. Il frappait avec force, se foutant bien du risque quil se casse le poignet. Il était faible, il était aveugle, il ne pouvait rien contre cet autre qui tournait autour de sa femme, de sa nina. Et il le savait, le blond, il en était sûr. Il en profitait, ce sale petit con. Et le visage crispé, les poings et le front en sang, il continuait, bien incapable darrêter la folie qui venait de senclencher. Pas sur Gabrielle, pas de nouveau, elle ne pouvait pas être de nouveau le réceptacle de sa folie, pas encore. Pas pour ça. Alors il frappait, frappait, laissant des larmes rageuses lui brouillér les yeux, même sil ny voyait de toute façon rien. Cest une petite voix qui le fit sursauter et tout de suite arrêter les coups, se tournant même vers lenfant qui devait probablement le fixer de ses yeux bleu sombre, les yeux de sa mère.
- « Papà ? »
- « Eyq Eyquem ? Ven mon filh. Ven »
Et le père de saccroupir en tendant les bras vers son fils aîné, témoin dune scène à laquelle il naurait pas du assister. Quel mauvais père il faisait de montrer ainsi une rage à son rejeton de trois ans. Même si ce dernier devra bien faire face à la dureté de la vie et aux impardonnables champs de bataille, il était bien trop jeune encore pour ce genre de choses. Le garçon se glissa dans les bras paternels et Enzo les referma avec précaution sur le petit corps de son fils.
- « Aquò va, papà ? »
- « Òc, papà es un pauquet triste. »
- « Mamà ? »
- « Non, mon filh. Non. Endintrem. »
Et lenfant de hocher la tête alors que son père lui embrasse doucement le front, oubliant soudainement sa colère, serrant tendrement son garçon avant de se relever et lui prendre la main quil lui tendait déjà. Il se laissa guider par son fils, ramassant en cours de route son makhila quil avait laissé tombé, dans sa rage.
Ça ne valait pas le coup de se mettre dans cet état. Sans doute.
Il doutait. Il ne pouvait y avoir qu'un seul maitre.
Traduc.occitan
Papa ?
Viens mon fils. Viens...
Ça va papa ?
Oui. Papa est un peu triste.
Maman ?
Non, mon fils. Non. Rentrons.
Pour le titre : Bah, Highlander
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