Johannes
Tout est affaire de décor
Changer de lit changer de corps
À quoi bon puisque c'est encore
Moi qui moi-même me trahis
Aragon, et ouais.
[Rp suite à ça.]
Depuis deux jours, il ne fait que regarder sa main. Parfois sans la voir, il la fixe par réflexe. Que c'est moche. Le rempart des grosses phalanges a foutu le camp. Sans le petit doigt, on ne peut plus se gratter l'oreille. Sans celui d'à côté, sûr qu'on lui passera jamais la bague au doigt. Comme quoi les vieilles blagues de vieux garçon peuvent prendre un tour ironique. Mais Johannes ne rit pas beaucoup. Ni ne parle, pas même ne jure.
Plusieurs fois, il s'est éloigné de sa baraque pour traîner ses cernes jusqu'au lac. Ramener des seaux pour un bain tiède. Pas le gros lac des pêcheurs non, la flaque d'eau bordée de vert. Personne n'y va, et le chemin est plus court. Son avant-bas a frôlé la terre de la berge, trempée, bourbeuse, un peu argileuse et froide. Tellement froide qu'il a glissé sa main bandée dedans, par petites graduations. Et même que, putain, c'était bon.
On en retirait plus de soulagement encore que de la bouche d'une vendue. D'ailleurs, ça vous donnait la même tête, et presque le même soupir. Je n'enlèverai jamais ma main de cette boue. Je ne bougerai plus jusque l'été prochain. Je resterai à genoux, au bord du lac, car cette boue est la nouvelle lumière de ma vie, je l'aime, je la vénère, et j'affirme à cet instant que jamais on ne fit rencontre plus gentille qu'elle.
Avant de se barricader à nouveau, il ramena un seau de boue chez lui. Nu dans son baquet, il songea à un nouveau reproche à faire au huguenot cloueur de doigts tout de même, vous auriez pu clouer la droite, je ne m'en sers pas, tandis que la gauche, vraiment, c'est emmerdant. Maintenant, lorsque je prends un objet, c'est tout bancal, pas naturel, et ça ne va pas. Fort de cette considération, Johannes se laissa couler dans la flotte, une patte en l'air.
_________________
[...]
Changer de lit changer de corps
À quoi bon puisque c'est encore
Moi qui moi-même me trahis
Aragon, et ouais.
[Rp suite à ça.]
Depuis deux jours, il ne fait que regarder sa main. Parfois sans la voir, il la fixe par réflexe. Que c'est moche. Le rempart des grosses phalanges a foutu le camp. Sans le petit doigt, on ne peut plus se gratter l'oreille. Sans celui d'à côté, sûr qu'on lui passera jamais la bague au doigt. Comme quoi les vieilles blagues de vieux garçon peuvent prendre un tour ironique. Mais Johannes ne rit pas beaucoup. Ni ne parle, pas même ne jure.
Plusieurs fois, il s'est éloigné de sa baraque pour traîner ses cernes jusqu'au lac. Ramener des seaux pour un bain tiède. Pas le gros lac des pêcheurs non, la flaque d'eau bordée de vert. Personne n'y va, et le chemin est plus court. Son avant-bas a frôlé la terre de la berge, trempée, bourbeuse, un peu argileuse et froide. Tellement froide qu'il a glissé sa main bandée dedans, par petites graduations. Et même que, putain, c'était bon.
On en retirait plus de soulagement encore que de la bouche d'une vendue. D'ailleurs, ça vous donnait la même tête, et presque le même soupir. Je n'enlèverai jamais ma main de cette boue. Je ne bougerai plus jusque l'été prochain. Je resterai à genoux, au bord du lac, car cette boue est la nouvelle lumière de ma vie, je l'aime, je la vénère, et j'affirme à cet instant que jamais on ne fit rencontre plus gentille qu'elle.
Avant de se barricader à nouveau, il ramena un seau de boue chez lui. Nu dans son baquet, il songea à un nouveau reproche à faire au huguenot cloueur de doigts tout de même, vous auriez pu clouer la droite, je ne m'en sers pas, tandis que la gauche, vraiment, c'est emmerdant. Maintenant, lorsque je prends un objet, c'est tout bancal, pas naturel, et ça ne va pas. Fort de cette considération, Johannes se laissa couler dans la flotte, une patte en l'air.
_________________
[...]