Heloise_marie
Hôtel de Clermont, le 22 novembre 1461.
Héloise n'avait pas envie.
Vraiment.
A la base, elle était excitée, amusée, se sentait importante et intelligente. Là, elle était dépitée de devoir prendre du temps pour ce petit avorton de merde qui ne pensait qu'à son petit bonheur personnel. Aaah, qu'il était malheureux de voir que feu son oncle avait mis au monde un tel... une telle déception. Même si elle était sur Clermont pour le plaisir en premier lieu, un bal avec son vieil ami moustachu Luckse, la Comtesse devait désormais passer par cet instant. Donc, affalée dans le fauteuil rouge du salon qu'elle avait loué, Héloise broie du noir... et aussi des noix, machinalement en s'abimant les mains et en s'en collant plein les dents.
Tant pis.
Elle n'avait pas envie.
Malgré cela, elle avait revêtu une jolie robe bleu pâle, d'abord pour faire impression sur Asalaïs et, peut-être, avoir un sujet de conversation féminin à 100% histoire de saouler un peu le fils de Goclad -dont elle ne prononcera plus le nom désormais- et ensuite, parée de ses bijoux et de ses marques de noblesses héritées ET méritées, elle voulait en foutre plein les dents de celui dont on ne prononcera plus le nom tant il est sans intérêt depuis ses écrits. Ses cheveux sont coiffés en un chignon serré, quelques petites boucles s'en échappant et d'un serre-tête en tissu assorti à sa robe cousu de petites perles blanches et sa bouche pousse un long soupir.
Depuis le matin, Héloise tentait de s'imaginer la journée. Et il y avait bien mille options dont certaines qui étaient relativement intéressantes :
1/ la gitane : Celle de cracher sur le fils de Goclad et puis de l'enfermer dans une cave noire avec des rats. Mais bon, elle passerait encore une fois pour un monstre et puis, une Comtesse ne crache pas.
2/ l'hypocrite : faire genre de sintéresser et de s'excuser misérablement, pour pouvoir ensuite lui enfoncer par l'arrière. Mais elle n'était pas du genre à s'abaisser devant un mioche qui faisait son malin. Et en plus, elle ne maitrisait pas tellement l'expression, lui faire par derrière.
3/ la garce : le descendre devant les invités pour qu'il se tape la honte et rentre le dos courbé et dégoûté par la vie pour, peut-être, sauter d'un donjon en feu. Mais bon, elle serait elle aussi en mauvaise position vu qu'elle avait arrangé le rendez-vous, vendu le fils "prrrroooodige" et qu'elle devait sortir victorieuse de là. Histoire de ne pas perdre la face.
4/ l'improviste : laisser libre cours à ses envies, en sachant qu'elle a la rancune aisée et est un peu trop impulsive. Donc risque au final de cumuler les trois premiers points.
Hum, trop de réflexion, tout ça. Trop pour sa petite tête blonde pâlichonne. Enfournant les derniers bouts de noix dans sa bouche, la jeune fille fini par se lasser, remet le paquet sur la petite table, jetant les coquilles vides dans le feu et se lave les mains dans une petite bassine en nacre remplie d'eau parfumée à la violette. Juste à temps. On frappe à la porte et Héloise quitte son visage blasé pour afficher celui de double blasée.
Votre Grandeur? Votre premier invité est arrivé. Je peux le faire entrer?
Faites, oui, faites.
Alors qu'elle se pince légèrement les joues pour se donner un peu de contenance, la porte s'ouvre sur la première personne. Et en fait, vu qu'elle n'avait jamais vu aucun des invités, elle n'était pas dans la merde. Sauf si c'était une femme...
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