Elisaabeth.
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... Il paraît que cest à la mode ! »
De la narratrice.
- Quelque part, dans le Sud, à Montpellier, plus précisément.
Non, non, non ! Jaurai dû refuser.
Mais, mais mais pourquoi ?
Parce que je ne le connais pas ! Même pas de réputation ! Alors, cest bien joli décrire de belles paroles mais qui me dit que cest un homme fiable, hein ?
En panique la blonde ? Point du tout.
Mais, mais, mais vous avez dit que vous irez le voir ?
Ouai bah cétait une connerie. Encore une ! Je vais lui écrire.
Cest un peu tard pour reculer maintenant, non ?
Sssshhht ! Cest moi qui décide !
La jeune femme se rapprocha de son bureau en tirant la chaise entreposée devant le meuble afin que sy asseoir. Droite comme un I, comme à son habitude quand elle était assise, et ses mains posées sur le bureau, elle tapota le meuble du bout des doigts, essayant den créer un rythme musical. Puis, tapant du poing sur la table, elle sécria : Adrianna ! Ramène-moi une autre plume ! La précédente a rendue lâme et sest déplumée toute seule ! Il faut que jécrive au vicomte comme quoi, je ne me rendrais finalement pas à Lan do Landorre ! pour notre dite rencontre !
Dame Élisabeth ? Tout est prêêêt !!
Hubert, ce cher page et valet fidèle à la jeune femme, venait de faire irruption dans la pièce sans frapper, comme dhabitude ! pour annoncer the « bonne nouvelle » de la journée. Menfin, comment ça, tout est prêt ? Il ny avait rien de prévu, que lon sache, non ?
Je te demande pardon, Hubert ?
Bah oui ! Tout est prêt ! Il ny a plus quà mettre vos malles et on est parti !
Gné ? Ttends, attends ! Quest-ce que tu racontes ?!
Alors quÉlisabeth sétait tournée vers la porte de la pièce pour regarder Hubert, un gros blanc plana dans la pièce jusquà ce que le page se mette à rire aux grands éclats avant de répondre, essuyant une petite larme qui venait de couler : Hahahahaaa ! Encore une fois, ma dame ! Vous mavez bien eu, hein ! Vous avez presque failli me faire croire que vous aviez oublié quon partait dès ce jour pour le Rouergue ! Hahahaa ! Jen pleure de rire, moi. Bouh.
Si le page rit au point de pleurer, la Belette, elle, nest pas du tout en état de se mettre à rire. Ouhlala que non. Le visage neutre, sans expression, elle donna limpression quelle regardait dans le vide, comme dans ses petits moments de réflexion très intense. Elle fusilla du regard le rouquin avant de lui rétorquer : Ai-je réellement une tête à faire des blagues, Hubert ?
Bah euhm
Ensuite, jai deux questions. Quand ai-je donné lordre de « tout préparer » pour partir vers euhm chez Monseigneur de Marsac ?
Il y a trois jours, exactement. Et vous étiez fortement détermi
Je me passerais volontiers de tes commentaires. Deuxième question : étais-je saoule ?... dans mon état normal, quand je tai donné cet ordre ?
Bah oui. Pas une goutte dalco
Troisième question !
Vous avez dit deux !
Jai dit trois, pauvre sot !
Élisabeth savait pertinemment quelle avait dit deux, mais quest-ce que ça fait du bien de pouvoir contredire les domestiques, surtout quand on se sent maître de la situation. Elle reprit, impérieuse : Troisième question : quand as-tu lu mes lettres ?
Oh ! Mais ma dame ! Jamais joserai
Shhhtt ! Cest moi qui parle. Sois chou, Hubert, et réponds-moi bien gentiment, quand as-tu lu toutes mes lettres ?
Mais jai pas lu vos let
Hubert !
Mais euh ! Jai rien fait, cpas moi ! Si y a un problème, adressez-vous à Adrianna !
Naccuse pas une innocente, malheureux ! Et tu vas te calmer sinon tu finiras pendu par les oreilles ! Je viens de me souvenir de ce que jai fait et dit il y a trois jours. Tu me laisses quelques instants, ou du moins, quelques heures de plus. Nous partirons quand tout sera prêt.
- Rouergue, ou les deux derniers pas avant de sauter.
Entre le Languedoc et le Rouergue, en temps normal, le trajet ne doit pas sembler « atrocement » long pour qui que ce soit. Or, pour la Courden, ce trajet fut lun des plus odieux voyages quelle put effectuer. Pourquoi odieux ? Pour tout vous expliquer, Marianne, la fille de la jeune femme, était habituellement dune nature fort calme. Ce jour-ci, la petite rouquine décida quil était temps de faire mentir sa mère, en étant fort énervée. Pendant que la petite fille faisait des siennes, les chevaux eux aussi ! décidèrent de faire quelques caprices perte dun fer et jen passe des vertes et des pas mûres , une suivante qui décida, à son tour, de troquer son intelligence contre lidiotie, un valet qui beugla à tort et à travers, enfin bref, tout partait de travers. Alors oui
Ce voyage est une véritable sinécure ! Une catastrophe ! Je le savais quil fallait rester à la maison, je le savais ! Marianne, pour lamour de Dieu, cesse de gigoter et dors un peu !
Mâmaaaannn !
Adrianna ! Prends Marianne ! Elle va finir par me rendre chèvre !
Mais ma dame !
Et de lextérieur retentissait un : Dame Élisabêêêth !!
Mâmaaaaann !
Miladyyyyyy !*
Ma daaaaaaaaame ?
Non, vous ne rêvez pas, cette scène, digne dune comédie** se révélait être un véritable calvaire pour Élisabeth. Elle, qui haïssait les voyages en carrosse, était fortement bien servie pour ce voyage. Passant ses mains gantées sur son visage, la jeune femme était à deux doigts de sarracher les cheveux quand sa fille, Marianne, eut la bonne idée de mettre la cerise sur le gâteau en commettant
MÂMAAAAAAAAAAAAAAAAAAN !!!
« Lirréparable ». Cest ainsi quune idée des plus lumineuses de la journée bouscula toutes les pensées aussi sordides les unes que les autres dÉlisabeth, qui se décida à mettre fin à cette comédie qui menaçait de ne point cesser. Pas même pour un sous.
Stop stop, ça suffit arrêtez la voiture COCHER ! ARRÊTEZ-VOUS OU JE ME CHARGE MOI-MÊME DE VOUS FAIRE TRANCHER VOTRE GORGE DE DINDON !!
Si le cortège de la blonde sarrêta net, il nen est pas moins quil était enfin arrivé. Après être entrée dans la capitale du comté, la jeune femme ouvrit la porte du carrosse pour y sortir sans laisser à quiconque le temps de laider à descendre de la boîte à roulettes ainsi couramment nommée par Élisabeth , referma violemment la portière et fit quelques pas dans lair frais de lhiver. Resserrant le col fourré autour de son cou, la Belette sortit de ses pensées quelques instants et releva la tête vers un établissement qui lui semblait tout-à-fait convenable. Elle lobserva dans les moindres recoins avant de tourner la tête vers son cortège et de lâcher, telle une bombe, suffisamment fort afin que les personnes, qui laccompagnaient, puissent entendre : Nous logerons ici, en attendant. Que cela plaise ou non, je men contrefiche !
Après veine négociation avec laubergiste, qui fut à son plus grand malheur, menaçait par la Courden si jamais il refusait de donner deux ou trois chambres à la jeune femme, cette dernière le mettrait au pilori et le ferait pendre par les pieds après avoir laissé une chèvre lui léchait les pieds comme supplice ; la Belette obtint finalement ce quelle souhaitait, et une fois bien installée dans lune des chambres louées, la jeune femme sinstalla à une table, encre, plume et parchemins sous la main, et sattela à écrire à la personne qui fut la cause de tous les soucis de ces derniers jours.
Citation:
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Lettre destinée au vicomte de Landorre
Citation:
Monseigneur,
Je me permets de vous écrire afin de vous annoncer que jai fait le voyage jusquà Rodez, ne sachant absolument pas où se trouverait votre vicomté. Ne sachant non plus où vous souhaitez me rencontrer, jai donc fait le choix de minstaller dans une auberge non loin de la Cathédrale.
Jespère recevoir de vos nouvelles très rapidement car comme je vous lavais annoncé dans lune de mes lettres, je ne pourrais, malheureusement point, me permettre de rester aussi longtemps que je ne laurai souhaité.
Respectueusement.