Alessandro.di.roja
Il fallait du monde. Du monde, donc, il y avait.
Conduits par Alessandro, et une poignée de gardes, les prisonniers de la ville faisaient marche forcée, sous le poids de leurs chaînes, en guise de procession.
En tête, le petit Seigneur de Saumur avançait avec solennité, portant à bout de main le petit écrin où reposaient les restes de la Cistude.
Enfin, les restes des restes.
Les restes d'une touffe de cheveux.
Ceux qu'il n'avait pas encore fumé.
Tout ce qui lui restait d'elle, en fait.
La populace pouvait s'esbaudir, tandis que débutaient les festivités, dans le vacarme des paillardes entonnées par le cortège de prisonniers.
C'étaient ses préférées. Ou peut-être pas, mais Cistude n'irait pas s'en plaindre.
La bute où s'enfouissait la Crypte avait vue sur la Loire. En son sommet avait été bâtie La Crypte de la Tortue, un établissement à but essentiellement lucratif où l'on vendait une bière infecte à prix d'or.
Si la taverne n'avait rien d'original, la Crypte, elle, était démonstration du sens aigu de l'Art Angevin.
En marbre plaqué, du couloir étroit jusqu'au caveau, étaient représentés les scènes, épiques ou non, de la vie de notre héroïne locale.
Les quatre murs, de fait, portaient le nom de l'oeuvre qui y fût gravée.
Il y avait d'abord Pénitence.
En face, la fresque Naufrage.
Achevaient ensuite l'ensemble, Guet-apens
et enfin Commodités.
En somme, l'histoire d'une vie dépeinte sur ces murs.
Demeurait encore une plaque commémorative, mais encore vierge de toute inscription.
Somptueuse à sa manière, la Crypte de Cistude se voulait à son image.
Sauf qu'elle était propre.
Mais les plus anciens disent que Cistude aussi, fût un temps, était neuve.
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