Johanara pense que je fais tout par intérêt, c'est faux, il m'arrive de faire tout simplement chier pour mon bon plaisir.
Euzen et Nathan... Un frisson glacial remonta le long de son échine, il sentait quelque chose de louche. Il n'en doutait pas, ce refus cachait quelque chose et Johanara ne ressentait pas qu'un affront, il y'avait là tout un panel démotions et de sentiments à exploiter.
Laisser sexprimer ses vices en ourdissant sa vengeance tout en récoltant un Castel... Johanara savait parfaitement lui parler.
Il tenta déveiller également son intérêt, en vain, ce nétait pas faute dessayer. N'étant pas de nature à être lourd, il ne resta pas outre mesure, il ne baissait pas les bras et trouverait bien comment arriver à la prendre. Il était convaincu que ses actes parleraient d'eux même et qu'en prouvant sa valeur, elle tomberait toute seul dans ses rets.
Scellons donc notre pacte dans une accolade. Vous aurez bientôt de mes nouvelles.
[ Limoges, en taverne... ]
Le premier théâtre des opérations se déroula quelques temps plus tard. Un Nathan en taverne égal à lui-même dont la simplicité avec laquelle Jehan le dupa, déconcerta ce dernier.
Il lui fallut simplement simuler une chute pour laisser tomber volontairement un papier aux pieds de son rival. Il continua son simulacre en faisant croire que les railleries de ce dernier lavaient atteint.
Nathan ne tarderait pas à ramasser le mot pour le lire, son vilain défaut lui jouerait un très vilain tour. Il y découvrirait une fausse lettre de Johanara que Jehan avait écrite pour loccasion. Les mots feraient à coup sur leurs effets sur l'esprit mélodramatique du blond. La lettre laissait transparaître que leur soit disant voyage nétait quune couverture, que le réel but du voyage était tout autre... Johanara était enceinte, de lui - bha oui ça ne serait pas marrant sinon -, et elle avait hâte darriver dans leur futur sanctuaire pour mettre au monde le fruit de leur passion dévorante.
La supercherie allait jusquà avoir copié de façon assez réaliste son sceau.
Le premier pion était placé, Jehan avait hâte d'en voir le résultat. Il avait mélangé la passion, le désir et la frustration dans un seul cocktail destructeur, il savourait déjà son éclatante victoire.
Il n'avait pas anticipé le retour de flamme, cruel erreur. Pourtant il n'était pas à son premier coup d'essai et savait parfaitement que lorsquon joue avec le feu, on se brule. De façon profonde en plus.
[ Limoges toujours, dans une autre taverne car il faut bien changer un peu. ]
Elle était là, froide et distance. La conversation n'était une nouvelle fois pas à l'avantage du conspirant. L'arrivée de Nathan changea la donne, il n'avait pas marché mais couru dans sa conspiration. Johanara et Jehan ne purent s'empêcher de rire, le pot au rose fut découvert et la victoire fut totale quand ce dernier parti, dépité, humilié et vaincu. Johanara était contente, plus détendu tout aller pouvoir aller enfin dans le sens que Jehan avait planifié.
Mais il revint. Incapable de perdre dignement, la pleureuse blonde comme l'appelait Jehan revenait jouer une scène d'émouvante.
Tout dérapa, ses mots mielleux empreint d'un désespoir à deux sous mangèrent littéralement le pauvre cerveau torturé de la rousse. Dans un premier Jehan cru que cette dernière allait dans le sens du blondinet, pour mieux l'amadouer, le mettre en confiance pour au final l'écraser comme un vulgaire moucheron. Jehan commença à douter de cette hypothèse quand les choses devinrent vraiment bizarres entre les deux. Suffisamment pour que le Duc entreprenant embrasse la Belladona, qui se laissa faire. Tout lui échappait, ce n'était plus un jeu, le temps de comprendre ce qu'il se passait qu'il avait déjà mis le Duc à terre, pour lui assener un coup. Perturbé par l'impulsivité de son geste et une Johanara qui n'avait cure de lui, Nathan prit le dessus, il termina sur une chaise, la main sur son flanc dont la blessure venait de s'ouvrir, encore.
Son comportement lui avait complétement échappé, il s'était laissé aller sans savoir pourquoi. Il s'était mêlé d'une chose qui ne le regardait pas, ses émotions avaient pris le contrôle. Les raisons lui étaient encore inconnues. Le temps passa, il était là sur cette chaise comme une vulgaire chandelle qu'ils ne calculaient pas alors qu'ils partaient dans des délires qui leurs étaient propres.
Leur folie les amena même au bord du suicide quand les deux Ambroise sombrèrent en souvrant les veines. Jehan se précipita par instinct vers la plaie du poignet de la rousse. Le sang rouge coulait le long de sa peau blanche. Elle lui dit de la laisser rejoindre lautre monde et quil hériterait de tout ; cétait parfait, il ne demandait pas mieux, mais il sera plus fort. Quelques instants plus tard il fut balayé par Nathan.
Il ne cherchait pas à savoir de quoi ils parlaient, il avait envie de les étriper tous les deux. Les laisser se vider comme de misérables porcs pour oser le traiter ainsi. Une douleur lui labourait le ventre de façon cruel et sournoise, rien ne pouvait y faire. Il était en train de goûter au prix de la défaite.
Le sentiment dune profonde humiliation se fit sentir en lui. Le désespoir le saisit et le paralysa, il ne serait dire combien de temps cette inertie avait durée. Son corps se leva simplement avec la grâce dun pantin de bois, ses yeux complétement agars ils cherchaient son manteau de cuir pour fuir cette séance dautoflagellation.
Jehan ne sétait même pas aperçut que Nathan venait de partir. Une tignasse rousse qui couvrait un visage perlé de larmes séchées saupoudré de quelques traces de sang venait de se dresser devant lui, lempêchant de rejoindre la porte. Sa voix brisa le silence qui sétait imposée après un tel déclenchement démotions. Elle changea, sexcusa sincèrement, la fragilité de sa voix ne le laissa pas de marbre, elle se dévoilait peu à peu lui laissant apparaître les prémices de ses tourments, mais.
Il ne la croyait pas.
Deux êtres dans une taverne, deux corps reliés par leurs fronts apposés lun contre lautre. Deux âmes totalement dissolues qui cherchaient le moindre support sur lequel prendre appuie avant de le consumer. Un homme et une femme empreint dun mal profond cherchant à sapaiser dans la douce étreinte dun baiser.
Depuis le début de la soirée, quelque chose avait changé, il ne savait quoi mais cette femme lui était toujours apparut comme un colosse et sa réelle fragilité lavait touché, réellement et profondément.
Multipliant les incohérences daltruismes dans la soirée, il continua en lui promettant quelle pouvait compter sur lui et quil serait là pour elle. Lhomme était on ne peut plus sincère.
Elle ne le croyait pas.
La muraille quils avaient contentieusement dressée pour se protéger lun de lautre seffrita au fur et à mesure de leur étreinte et des baisers échangés. La limite était fixée à ce chaste contact, mais le vers était dans le fruit.
Lespace de ces quelques instincts, ils sétaient montrés lun à lautre.
Ils se croyaient.
Demain, une promenade
tous les deux... ?
Oui
[Dans la résidence de Jehan ]
Son retour avait été tardif, très tardif. Johanara lavait ramené chez lui pour le recoudre, rien nétait sorti de ce cadre. Les scènes étaient cependant gravées dans son esprit, les douces mains saffairant à recoudre cette affreuse plaie, une inquiétude pour lui, sur ce visage qui ne lui réservait quauparavant que des brimades
Il ne savait pas sil avait réussi à dormir, il était dans un état second. Les domestiques narrivèrent pas à le tirer du lit. Une certaine employée dune autre maison, se glissa sous les draps comme à son habitude et commença à motiver notre homme.
Sort, je nai pas la tête à ça
Mais seigneur, pourtant elle lest, elle
.
Sooooooort !
Les mains massèrent son visage, il ne comprenait pas, pourquoi, pourquoi voulait-il être cet après-midi, en train de faire une promenade.
Elle avait raison quand elle avait dit que cétait une sorcière.
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