--Adryan
« Les chaînes du mariage sont si lourdes qu'il faut être deux pour les porter. Quelquefois trois. »
Alexandre Dumas, fils.
Un homme doit-il assister au mariage de sa maitresse ?
La question était pour le moins judicieuse, et le Castillon se létait posée plus dune fois. Forgée par des convictions héritées dune éducation où la morale et la droiture étaient souveraines, la réponse restait invariablement la même : non. Et certainement, malgré laudace implacable et outrageuse dont il avait fait preuve en mettant la petite Fée au pied du mur en lui dérobant sa nuit de noces, Adryan, naurait jamais posé le cuir de ses bottes sur le pavé de Notre Dame si Fleur ne lui avait pas fait la demande, incapable quil était de résister à ses petits sourires espiègles. Sans mal, il aurait fait taire la curiosité de découvrir le visage dun homme prêt à tout pour une poignée dopium. A moins finalement que le promis ne soit tombé sous le charme du Lutin, et qui alors pourrait lui en tenir rigueur ? Adryan se prenait même à souhaiter que ce soit le cas. Fleur népouserait alors pas un profiteur. Et sil avait réfléchi plus avant encore, aurait-il espérer pour les mêmes raisons que Fleur lui ait menti, même involontairement, quand indubitablement, la seule question pertinente à poser était : qui dans lhistoire serait le dindon de la farce ? Un mari trompé avant même dêtre épousé ou un amant bien pratique pour servir un dessein ?
Si le spectre du questionnement ondulait doucement entre les tempes brunes du Castillon en égrainant ses dernières directives à son remplaçant dun soir à lAphrodite, il refusait pourtant de sy appesantir inutilement quand dici quelques heures, la réponse lui serait offerte sur un plateau dargent.
Les complies avaient sonnées quand la silhouette sombre du Castillon sengouffra dans la cathédrale, battant le sol de pierre dun pas assuré. Nulle hésitation dans le port noble de sa tête, rehaussé du col haut de son gilet noir au plastron brodé danthracite. Dune élégance sobre mais étudiée dans ses moindres détails quand, malgré la ruine familiale il ne se vêtait quotidiennement que des étoffes les plus précieuses, son allure haute ne dérogeait en rien à lhabitude, si ce nétait le pommeau gravé de motifs orientaux de son épée que dévoilait la lourde cape au gré de sa marche. Ce soir, exceptionnellement depuis tant de mois, il ne serait pas Adryan lEnivreur de lAphrodite, mais bel et bien Adryan de saint Flavien, Duc de Castillon. Et ça lui allait bien. Identité assumée jusquà la fibule dargent entrelaçant ses initiales quand la chevalière familiale restait honteusement accrochée au doigt du comptable du lupanar.
Indifférent aux invités déjà arrivés, son regard gris planait sur les ombres de lédifice, la cherchant du regard. Elle, la future mariée, jusquà ce quun sourire rapace narque doucement sa bouche. Elle était là, à quelques pas de lui, magistrale dans cet art subtil que les femmes avaient de se parer, aussi belle que quand elle lui était revenue, si vulnérable, des aiguilles plein les cheveux. Il brulait de se glisser dans son dos pour la surprendre, demprisonner cette taille si fine de ses mains gantées pour lattirer contre lui, laissant les courbes de leurs corps sembraser pour mieux dévorer, jusquà lessoufflement, ces épaules de pèche impudiques.
Pourtant, il nen fit rien, surpris par Alphonse, parasite à son tour, sinvitant dans sa douce vision, et se contenta de sadosser à un pilier gothique, curieux de savoir si son regard les piquerait assez pour quils se retournent.
Alexandre Dumas, fils.
Un homme doit-il assister au mariage de sa maitresse ?
La question était pour le moins judicieuse, et le Castillon se létait posée plus dune fois. Forgée par des convictions héritées dune éducation où la morale et la droiture étaient souveraines, la réponse restait invariablement la même : non. Et certainement, malgré laudace implacable et outrageuse dont il avait fait preuve en mettant la petite Fée au pied du mur en lui dérobant sa nuit de noces, Adryan, naurait jamais posé le cuir de ses bottes sur le pavé de Notre Dame si Fleur ne lui avait pas fait la demande, incapable quil était de résister à ses petits sourires espiègles. Sans mal, il aurait fait taire la curiosité de découvrir le visage dun homme prêt à tout pour une poignée dopium. A moins finalement que le promis ne soit tombé sous le charme du Lutin, et qui alors pourrait lui en tenir rigueur ? Adryan se prenait même à souhaiter que ce soit le cas. Fleur népouserait alors pas un profiteur. Et sil avait réfléchi plus avant encore, aurait-il espérer pour les mêmes raisons que Fleur lui ait menti, même involontairement, quand indubitablement, la seule question pertinente à poser était : qui dans lhistoire serait le dindon de la farce ? Un mari trompé avant même dêtre épousé ou un amant bien pratique pour servir un dessein ?
Si le spectre du questionnement ondulait doucement entre les tempes brunes du Castillon en égrainant ses dernières directives à son remplaçant dun soir à lAphrodite, il refusait pourtant de sy appesantir inutilement quand dici quelques heures, la réponse lui serait offerte sur un plateau dargent.
Les complies avaient sonnées quand la silhouette sombre du Castillon sengouffra dans la cathédrale, battant le sol de pierre dun pas assuré. Nulle hésitation dans le port noble de sa tête, rehaussé du col haut de son gilet noir au plastron brodé danthracite. Dune élégance sobre mais étudiée dans ses moindres détails quand, malgré la ruine familiale il ne se vêtait quotidiennement que des étoffes les plus précieuses, son allure haute ne dérogeait en rien à lhabitude, si ce nétait le pommeau gravé de motifs orientaux de son épée que dévoilait la lourde cape au gré de sa marche. Ce soir, exceptionnellement depuis tant de mois, il ne serait pas Adryan lEnivreur de lAphrodite, mais bel et bien Adryan de saint Flavien, Duc de Castillon. Et ça lui allait bien. Identité assumée jusquà la fibule dargent entrelaçant ses initiales quand la chevalière familiale restait honteusement accrochée au doigt du comptable du lupanar.
Indifférent aux invités déjà arrivés, son regard gris planait sur les ombres de lédifice, la cherchant du regard. Elle, la future mariée, jusquà ce quun sourire rapace narque doucement sa bouche. Elle était là, à quelques pas de lui, magistrale dans cet art subtil que les femmes avaient de se parer, aussi belle que quand elle lui était revenue, si vulnérable, des aiguilles plein les cheveux. Il brulait de se glisser dans son dos pour la surprendre, demprisonner cette taille si fine de ses mains gantées pour lattirer contre lui, laissant les courbes de leurs corps sembraser pour mieux dévorer, jusquà lessoufflement, ces épaules de pèche impudiques.
Pourtant, il nen fit rien, surpris par Alphonse, parasite à son tour, sinvitant dans sa douce vision, et se contenta de sadosser à un pilier gothique, curieux de savoir si son regard les piquerait assez pour quils se retournent.