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[RP] Qui veut la peau de Poligny?*

Fleur_des_pois
    Quand ma peine est immense
    Je change l'or en toc
    Trois p'tits tours de passe passe
    Moi j'en ai des stocks...
    Si ma baguette casse
    Que le grand crick me croque


Le soleil baignait les alentours, réchauffant la Fée somnolente. Le trésor que la mairie pouvait abriter ne l'intéressait pas. Elle était assez riche. Seule comptait la vengeance. L'argent, Gaia n'en avait cure. Ses coffres en débordaient déjà.
Le Lutin battit des paupières, tirée de sa torpeur par les rayons de l'astre du jour. Les siens vidaient déjà la mairie, ou semblaient tous occupés à diverses tâches. Et où était son bâtard de mari, au fait ?
Quittant le banc où elle s'était installée, Fleur s'étira, ramassa son panier à crapauds, et commença ses recherches. Sans doute devait-il être en train de visiter la couche d'une donzelle.
Fort peu inquiète, assurée de le trouver en bonne compagnie, Gaia déambulait dans le village. Une oie solitaire attira son regard. Une oie blanche ? Seule ? Ni une, ni deux, la Fée lui passa la corde au cou, l'embrassant sur le sommet du crâne.


J'vais t'appeler Terrine. On va être copines, toi et moi. Allez, viens, faut qu'on trouve mon idiot de mari, ça f'ra une dette de plus pour lui.

A pas lents, calant sa vitesse sur celle de l'oie, Fleur visitait Poligny, cherchant sans grande attention celui qu'elle avait fait l'honneur d'épouser.
Et enfin, au détour d'une ruelle, la Fée l'aperçut. Allongé par terre, et couvert de sang. Le sien ou celui d'un autre ? Fronçant les sourcils, Terrine à sa suite, Gaia s'approcha lentement. Donnant un petit coup de pied dans l'épaule de Niallan, force lui fut de constater qu'il était évanoui.


Et merde. P'tain. L'andouillette de Vire.

S'agenouillant à ses côtés, Fleur effleura du bout des doigts le visage de son mari. Cela serait si facile d'en finir... Un coup de poignard en plein cœur... On ne la soupçonnerait jamais. L'idée était si tentante que la main de l'Ortie s'égara du côté de sa ceinture. Rapide, efficace, discret.
Elle posa son regard brun sur les paupières closes du blond. Etrange comme il semblait apaisé, alors qu'il était en train de mourir. Délicatement, le Lutin ôta de sur son front une mèche dorée. Il paraissait presque beau comme ça.


Fais chier. Tu fais vraiment chier, tu sais, ça, espèce d'idiot ? Furieuse, l'Ortie le gifla à toute volée. Réveille-toi, j'suis toute seule et j'peux pas t'porter.

Hissant malgré tout le corps de son presque-défunt époux, Gaia plia sous le poids, grimaça et pesta tout haut, mais commença malgré tout à marcher, Terrine toujours au bout de sa corde. Elle ne pourrait pas le porter bien loin, aussi une maison abandonnée serait parfaite pour les accueillir. La porte fut ouverte d'un coup de pied rageur, et Niallan trainé jusqu'à une paillasse encore en bon état.

Alors, voyons voir...

La chemise fut arrachée sans cérémonie. Le torse était couvert de sang, et le dos n'était pas en meilleur état. De plus, une estafilade lui barrait l'épaule. Sur quel monstre avait-il bien pu tomber, s'étonna l'Empoisonneuse. Mais déjà, le peu d'intérêt qu'elle portait d'ordinaire à son époux disparaissait. Il était mourant, et elle pouvait le sauver.
Les produits de base furent sortis sans attendre. Teinture d'ail, huile au laurier, pommade réunissant le géranium, la bergamote et le romarin, aiguilles, fils, et bandes de tissu propre.
Tout d'abord, la Fée désinfecta à l'aide de la teinture, nettoyant l'intérieure et les pourtours des plaies, essuyant le sang. Ensuite, quelque gouttes d'huile au laurier furent répandues sur la blessure, puis ses doigts agiles étalèrent la pommade. L'aiguille vola, refermant sans serrer. Enfin, la bande fut enroulée autour du torse comme elle le put. S'essuyant le front d'un revers de main, Gaia contemplait en silence celui qui jouait le rôle de son mari. Les blessures étaient profondes, et il faudrait surveiller l'évolution attentivement. Pour l'heure, le sommeil la rattrapait. Se lovant aux côtés de Niallan, sans prendre la peine de laver ses mains rougies par le sang, elle ferma les yeux, sombrant rapidement dans les bras de Morphée, pendant que Terrine l'Oie Blanche cancanait dans la maison.




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Vasco.
A en croire l'état des ruelles, la bataille avait été sanglante. On aurait même pu penser qu'il y avait eu une célébration de la célèbre Walpurgis Nacht. Mais non! C'était le simple reflet d'une débauche de violence. Pour le sicilien, les raisons étaient restées obscures. D'ailleurs, il n'avait plus posé de questions, se contentant d'obéir. L'assaut avait été brutal, les défenses faibles. Et pour cause. Le lendemain, la ville ressemblait à un tombeau. Personne...Il n'avait croisé personne dans les rues. Pas un villageois n'avait osé se montrer ... ou presque.

Au détour d'une de ses rondes de surveillance, Vasco entendit des pleurs émanant d'une toute petite ruelle. Le baton prêt à frapper, il s'était aperçu qu'une forme geignait dans un amas de sacs de farine éventrés. Non loin de là, un corps... ou plutôt un cadavre, baignait encore dans une mare de sang qui commençait à virer au noir. Du bout de son bourdon, l'italien écarta les sacs, prêt à frapper en cas de danger. Danger? Vraiment? S'il y en avait un, il se matérialisait sous la forme d'une fillette en guenilles, le visage sale sur lequel des trainées de crasse avaient été charriées par un flot de larme. La créature se recroquevilla sur elle-même lorsque les rayons du soleil vinrent la frapper. L'italien relâcha son bras armé, un instant déstabilisé par le spectacle qu'il s'offrait à lui. Il ne savait comment se comporter. La fillette n'avait rien de menaçante. La frapper eut été un geste inutile et dénué de tout sens humain. Le marin s'agenouilla, déposa son bâton sur le sol et tendit la main vers sa trouvaille. Dans un geste presque instinctif, la fille se protégea immédiatement le visage.


- Je ne te veux pas de mal. Laisse-moi... t'aider!

Elle était crispée. Depuis combien de temps était-elle ainsi prostrée ici? Ce spectacle n'était pas une première pour Vasco. Certains abordages en mer avaient été encore plus violent. L'espace restreint d'un navire ne laissait que peu de solutions de replis pour ceux qui sentaient la défaite leur mordiller les fesses. Détournant le regard vers le cadavre, il distingua les traits d'un homme mur. Il avait entre trente et quarante ans, le crâne dégarni à la mode monacale, des cheveux poivre et sel sur les côtés. Une lame lui avait transpercé le corps, sans doute de part en part. Ses entrailles gisaient de manière indécente sur le sol gelé.

La fille s'était mise à grelotter, comme prise de spasmes. La peur? Le froid? Le stress des évènements passés? Sans doute un peu de tout ça. Depuis combien de temps était-elle ici? Cette question taraudait l'esprit du brun. Vasco fouilla rapidement dans sa besace. Il en sortit une pomme et un morceau de pain qu'il lui tendit.


- Prends! C'est pour toi.... Mange. Tu en as besoin pour lutter contre le froid.

Un instant craintive, hésitante, la fille fini par s'approprier le don, refermant aussitôt les mains sur son visage, reprenant une position catatonique. Elle s'attendait sans doute à un piège. Nourriture contre garde relâchée. Pain contre frappes. Mais rien de tout ça n'eut lieu.

- C'était ton père? Ton grand-père?

Elle hocha timidement la tête. Le sicilien émis un rictus de dépit. Les petites filles, ça n'était pas ses spécialités...même si le destin lui faisait un clin d'oeil morbide : la petite fille avait les cheveux roux.

- Tu vois cette maison? Tu vas t'y barricader. Tu n'ouvres à personne. A Personne, tu m'entends? Sauf à moi. Mon nom c'est Velasco Visconti. Je vais revenir ce soir. Je t'apporterais de quoi manger et boire. Si des villageois te demandent de les suivre, tu refuses.

Trop dangereux. Des révoltes, il va y en avoir pour reprendre le village. Mais la force Corleone était maintenant bien trop puissante pour un si petit village. Vasco le savait. Il avait remarqué que de nombreuses maisons étaient vides même avant l'attaque.

- Tu ne t'opposes pas aux Corleone... les brigands qui ont pris la ville. Si l'un d'entr'eux veut te faire du mal, tu leur donne mon nom. Tu dis que tu es ma protégée. Tu vas t'en rappeler? Velasco Visconti.
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Jeliza.rose
La prise ? Facile ! La cape qui vole au vent, les "hinhin" qui sont de rigueur, les poignards qui brillent, tout ça. Il y a même des morts ! La classe.

On est plutôt nombreux, et surtout, organisés, ce qui aide pas mal pour entrer sans souci dans la mairie.
Enfin...


Egaaaar ! Arrête de picorer ce bras ! Arrê.. ! Reviens par là ! Je te tiens ! Stop ! Non ! Humpf !

Oui, non mais c'est compliqué d'attraper un grand corbeau à mains nues, je voudrais bien vous y voir ! Puis lui, quand il a une idée en tête, il l'a pas ailleurs !
Avoir un corbeau qui esquive toutes nos prises pour pouvoir continuer à picorer, c'est comme.. comme prendre un chat qu'on tenterait de faire entrer de force dans un panier. Ou, comme je l'entends depuis quelques temps, aussi dur que d'obliger un gamin à prendre un bain.
Ceci dit, je comprends pas trop pourquoi on oblige les gens à se laver. Le tout, pour être présentable, c'est pas d'être propre. C'est d'être maquillée.

A ce stade de mes réflexions, Egar m'échappe pour de bon et s'enfuit dans la nuit...

Egar ? Houhou ?

Ah d'accord, il la joue comme ça ! Je m'en fiche, je lui donnerai pas à manger ! Puis comme il y a pas grand-monde qui m'ait vue parmi la Spiritu Sanguis, y a pas grand-monde non plus qui va le reconnaître ! Ben ça lui apprendra.
La mine sombre, je donne un coup de poignard à un corps étendu -hey, je me distingue peut-être pas sur cette prise, mais au moins, on peut pas m'accuser de pas faire le minimum requis-, puis je vais rejoindre les autres.

C'est qu'il y a encore du pain sur la planche avant de repartir.

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Vasco.
"Vasco, tu parles trop". La première femme qui lui a dit ça voulait qu'il la déshabille. La seconde souhaitait qu'il l'embrasse. Quand à la troisième, ça restait un mystère pour l'italieni. Elle a prétendu que c'était pour des raisons de sécurité, mais il avait encore du mal à croire ça. D'ailleurs, il lui aurais bien dit deux mots ce soir à cette donzelle, mais elle préfèrait visiblement m'éviter.

- Buenasera Maman poule! Alors comme ça on défend la mairie ce soir encore? Il y a des rumeurs qui disent que l'ennemi se trouve en dehors des remparts, d'autres qui prétendent qu'ils sont présents en ville. Enfin, dites-moi ce que je dois faire. Moi, j'obéis sans poser trop question. Enfin si! Une quand même : vous n'auriez pas vu Arsène? J'ai l'impression qu'elle m'évite en ce moment.

Si Vasco parlait trop, il y en a qui parlent peut-être moins, mais qui agissaient de manière bien plus dangereuse que la volubilité de Vasco. Ce soir en taverne, un homme a failli perdre la vie. Il avait des cheveux bruns, une carrure et une gesture de paysan. C'était le genre de personne qui cherche à se faire remarquer. Que ce soit en bien ou en mal lui importait peu. Il a pris une femme en otage pour on ne sait quelle raison. Malheureusement pour lui, il y avait trois personnes pour s'opposer à lui. Le pauvre! Il a eu du mal à comprendre que non seulement son geste ne servait à rien, mais qu'en plus il n'avait aucune chance de s'en sortir. Finalement, il aurait mieux faire de parler trop plutôt que d'agir un peu celui-là!

Lors de la prise d'otage, l'italien lui avait proposé de régler entre hommes. Un contre un. Un combat en lice. L'homme avait refusé. Une fois la prise d'otage de la taverne résolue, le marin avait arpenté les rues de la ville afin de s'assurer qu'il ne causerait de tort à personne. Il était passé devant la lice et cela lui donna l'idée de lancer le défi malgré tout. Il savait insulter? Il savait prendre des femmes en otage et les menacer avec son couteau? On verrait s'il savait se comporter en homme et s'il relèverait le défi. Vasco avait ensuite arpenter les rues de la ville, tel un crieur, pour faire connaître sa décision. Si l'homme se planquait quelque part, il saurait maintenant que l'italien l'attend en lice!

Le sort, il retourna dans la ruelle où il avait trouvé la petite fille effrayé. La porte de la maison était fermée. La fille s'était barricadée comme il le lui avait suggéré. Il l'appela. Plusieurs fois. Il indiqua son nom pour qu'elle lui ouvre. En vain. Si du bruit se fit entendre dans la maison, rien ne bougea. Une flamme de chandelle vacilla à l'intérieur. L'italien se doutait qu'elle était présente. Il n'insista pas. Il déposa le panier de victuaille au pied de la porte.


- Je t'ai laissé de quoi manger. Prends le panier et referme derrière toi. Les Corleone seront encore maitres de la ville pour quelques jours et toi, tu dois te nourrir. J'ai aussi déposé le corps de ton grand-père dans l'église. Tu pourras lui rendre un dernier hommage quand tout ceci sera terminé. Mais pas avant. Il en va de ta sécurité, tu comprends?
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Lexiane
Je suis assise au milieu d'une flaque de sang, celle de ma victime maintenant froide...

Autour de moi, une agitation toute" corleonsesque"... les Polignois se sont maintenant réfugiés chez eux... Ca braille les Corleone!


Moi, je bouge pas... J'attends ma lame à la main parce qu'on ne sait jamais.

On me tape sur l'épaule.
Alors Lexi, on fait plus de bisous à Tonton Vec ?

Je me retourne la bouille et les mains pleines de sang...mon oncle! Il est tout aussi barbouillé que moi

D'un bond je me relève et me jette entre ses bras.


Tonton Vec! Tu vas bien? T'as mal nulle part? Il est où papa?

Je jette un oeil derrière lui, mon père n'est pas là... Je les croyais ensemble.

On se barre de là? Il est froid, j'ai plus envie d' le voir... J'veux un bain, j'veux manger, j'veux dormir... J'veux papa! Ils ont plus besoin de nous là, j'crois...Emmène moi loin de là, emmène moi voir papa
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Niallan
Mort.

Beaucoup disent qu’en mourant on revoit toute notre vie en accéléré. Le visage des aimés, leurs sourires. Qu’on se souvient de la tendresse de leurs baisers et de la chaleur de leurs étreintes. Je dois avoir emprunté la mauvaise porte moi, parce que ce que je vois est loin de se rapporter à un album souvenir. Ce que je vois est délirant, absurde. Et foutrement con.
Je dois regarder tout ça d’en haut parce que j’arrive à voir beaucoup de choses, des choses que je n’aurais jamais pensé voir de mon vivant. Ah mais j’y pense, je suis mort.
C’est une église, Nostre-Dame je crois. La cathédrale où a eu lieu mon mariage. Sauf qu’à ma place, dans le rôle du marié, je vois mon meilleur pote et, à la place de Fleur, il y a Erilys. Vector et Erilys, rien que ça, ça vaut le coup d’œil. Le ventre de la rousse est arrondi, la main de mon ami y est posée. Ils ont l’air heureux, amoureux. Mon regard se pose à côté de ce joli petit couple pour remarquer dans le rôle du témoin la blonde Aphrodite et, accrochée à sa taille, Fleur. La femme que j’ai épousé et mon amante partagent apparemment plus que le deuil, il est même certain qu’elles sont devenues adeptes des plaisirs saphiques. Dans le genre revirement de situation, ma gamine est bien placée puisqu’elle se déplace au bras de Malecrado en moins crado. Le gosse Corleone, non content d’avoir ma fille, a aussi ma demie-fille, la rousse Lena. Et pour parfaire ce joli tableau, quoi d’autre que Phelya en train de galocher Léan sur un banc de l’église ?

Je vois bien que je n’ai pas ma place là-dedans mais étrangement, ça me fait sourire parce qu’ils ont réussi à se reconstruire sans moi. Du haut de mon observatoire, je m’apprête à réorienter la lunette de mon télescope imaginaire afin d’aller voir ce qu’est devenue ma sœur. Je n’en ai pas le temps. Le mec qui m’a mené de l’autre côté à coup d’épée vient de pénétrer dans l’église. Je me mets à brailler, à gueuler mais aucun d’eux ne m’entend. Et tous, ils tombent. Les uns après les autres pour qu’au final cette espèce d’enflure de pachyderme sanguinaire se retrouve à rire et à les bouffer. Les oreilles, les pieds… Bordel, exactement ce dont Arsène et les autres femmes Corleone m’avaient menacé. Sauf que je ne fais pas le parallèle, là, tout de suite je continue à m’égosiller pour attirer l’attention de l’autre taré. Après tout, je suis mort, qu’est-ce que je risque de plus ? Lui, il m’entend. Il me sourit. Et c’est là que je me mets à avoir mal.

Retour à la dure réalité, exempte de sourires radieux et de mariages heureux. Je ne sens pas ma femme sur le lit, je ne sens que cette insupportable odeur de sang qui me fout les tripes en vrac. J’ai à peine le temps de me tourner de l’autre côté du plumard que je rends tout ce que j’ai mangé avant l’attaque. La tête me tourne, j’ai des sueurs froides.
Et surtout, j’ai mal. Le moindre mouvement que je fais m’arrache un cri de douleur que je ne perçois même pas parce qu’il y a autre chose. La fièvre, cette putain de chaleur qui noie la moindre de mes réflexions. J’essaye de me lever dans l’espoir que « ça passe », je m’effondre. Et puis je gueule, parce que ma blessure se rouvre et que je le sens. Les points qui sautent, le sang qui se remet à couler.

Je préférais être mort, tiens, j’avais moins mal.
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Fleur_des_pois
I'm having trouble sleeping
You're jumping in my bed
Twisting in my head
Leave me


Si Fleur rêvait, en ouvrant les yeux, elle en avait tout oublié. Tirée du sommeil par l'agitation à côté d'elle, la Fée ouvrit un œil vitreux. Que se passait-il ? Qui était avec elle ? La vue du torse nu et du bandage imprégné de sang lui raviva la mémoire. Niallan, blessé, et elle endormie à son côté. Ses hurlements l'avaient éveillés. Soudain paniquée, elle se pencha vers lui, se moquant totalement qu'il venait de vomir. Il allait mal, et aussi étrange que cela puisse lui sembler, elle ne le supportait pas.

Chhhut, fit-elle doucement en posant une main fine sur le front de son époux. Je suis là, tout va bien. Ne t'en fais pas, je suis avec toi.

Bondissant hors du lit, la Fée attrapa un linge propre, qu'elle trempa dans l'eau froide d'un seau abandonné là, rependant sur les fibres de l'huile à la lavande. Déposant le tissu mouillé sur le front de Niallan, Fleur lui ôta rapidement le bandage. Les plaies étaient de nouveau ouvertes.

Je suis là, Niallan, je vais te soigner.

Avant de recoudre, Gaia se saisit d'une fiole et le força à boire. Le sédatif conservé dans un vin de Bordeaux l'apaiserait dans quelques minutes. Lui donnant ensuite un calmant à base de cassis, elle put enfin s'occuper des blessures. Une nouvelle fois, elle désinfecta, étala l'onguent cicatrisant, et fit danser son aiguille dans les chairs meurtries. Cette fois, un cataplasme à l'argile fut appliqué avant qu'elle ne le bande.
Le souffle court, les joues rosies, Gaia s'agenouilla à côté de lui, sur le lit. Se penchant vers lui, le regard empli d'inquiétude, le voile de ses épais cheveux bruns retomba autour de leurs visages, les excluant du reste du monde.


Reste avec moi, Niallan. Je te pardonnerai jamais si tu meurs. Pense à Lexi... A... A Léan...

Une larme s'écrasa sur la joue du blond, au grand étonnement de l'Ortie. Réalisant à grand peine que cette goutte d'eau salée venait de ses yeux, le Lutin s'essuya aussitôt les paupières. Une Corleone ne pleurait pas. Se penchant vers lui de nouveau, elle déposa sur ses lèvres un baiser léger.

Reste avec moi, souffla-t-elle. Reste avec moi.




Trouble sleeping - The Perishers
J'ai des troubles du sommeil
Tu sautes sur mon lit
Tu te déhanches dans ma tête
Quitte moi

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Vasco.
Le feu crépita dans la cheminée. Ses flammes étaient l'unique source de lumière de la maison. Dehors, le ciel était aussi sombre qu'un encrier. La lune avait, ce soir, voulu préserver son intimité et elle, elle avait daigné lui ouvrir sa porte. Elle, c'était la petite qu'il avait trouvé tremblante dans la rue. Les paroles seraient sans doute pour une autre fois. Qu'importe! C'était son droit. Ici, c'était lui l'étranger. C'était à elle d'accepter ou de refuser de donner l'hospitalité. Les seuls bruits qui brisaient le silence étaient ceux des bouchées de nourriture qu'il avalait ainsi que le craquement du bois sec, trop sec, dans le feu. A ce rythme-là, il ne durerait pas longtemps.

- Je vais te remettre du bois dans la cheminée avant de partir. Sans ça, le froid va te mordre les chairs ce soir.

Elle ne l'avait pas regardé, ou si peu. Elle fuyait son regard, elle négligeait ses paroles. Elle tolérait à peine sa présence. C'était sa marque de politesse et peut-être de remerciement pour la nourriture qu'il lui apportait. Recroquevillée loin de lui, elle mangeait en silence et par petites bouchées. Lui, c'est tout juste s'il pouvait la discerner dans l'ombre. Depuis leur première rencontre, elle s'était calmée. Elle ne tremblait plus, ne pleurait plus. Elle restait indifférente. Elle respirait, elle bougeait mais vivait-elle? Son âme semblait ailleurs. A moins qu'elle ne s'était étiolée dans le maelström de violence qui s'était déchaîné après la prise de la ville.

- Puisque tu me le demandes...

Non. Elle n'avait rien demandé. Rien du tout.

- ... Je ne sais pas combien de temps la ville restera sous le contrôle des Corleone.

De la cheminée, un craquement plus fort que les autres se fit entendre. Des éclisses de braises furent projetées à trois pieds au delà de l'âtre de la cheminée. Sans doute, un noeud dans le bois qui venait d'éclater sous l'effet de la chaleur.

- Pourtant, tout ça pourrait se résoudre bien simplement. Les Corleone ont demandé à ce qu'un général franc-comtois vienne se présenter à eux. Un ou une certaine Sarana il me semble. Je t'avoue que je me fous un peu du nom ceci dit. Tu sais, je trouve cela dommage. Tant de personnes qui souffrent alors que cela pourrait se résoudre simplement. Le champion des Corleone contre le champion de ce général. Ou mieux encore : ceux-là même qui sont à l'origine du conflit. Basta les champions!

L'italien se demandait si elle comprenait au moins le sens de ses paroles. Il hésita avant de continuer. Après tout, peut-être l'ennuyait-il? Mais le silence lui pesait. Il le culpabilisait. Il était l'assaillant et elle la victime. Cela ne changerait pas. Rien ne pouvait changer cela. Le passé récent lui avait fait perdre son père ou son grand-père. Et cela, il ne pouvait pas l'effacer. Seul le temps permettait à ce genre de blessure de cicatriser. Les marques qu'on en gardait variaient d'une personne à l'autre. Les circonstance de la vie les atténuaient ou les amplifiaient. Il n'était pas la personne qui pouvait l'aider. Et pourtant, même un bourreau aurait pu tenir ce rôle envers la famille d'une de ses victimes. Un bourreau, ça oeuvre à visage masqué. Lui, il portait le poids de son crime dans son accent. Visconti ou Corleone, elle ne fera pas la différence. D'ailleurs, quelle différence cela faisait-il? Ne faisait-il pas partie de ceux qui ont pris la ville? Non, quand bien même il n'a pas versé le sang, cela ne changeait rien. Rien du tout. Le plus drôle dans cette histoire, c'est que le seul à qui il aurait bien ouvert le ventre se défilait. Il refusait le duel qu'il lui avait proposé. Encore un pleutre! Le genre de personnes qui parlait trop...et qui n'agissait pas! Une grande gueule! Rien d'autres. Un pleutre.

- Tu veux que je te dise? Ne fais jamais confiance aux nobles! Ce sont tous des pourris! Tous! Sans aucune exception! Il y a ceux qui sont des lâches, ceux qui sont des fourbes...et ceux qui sont les deux à la fois. Et tu sais pourquoi? Parce qu'à l'inverse de nous, ils ont tout à perdre! Ils se cachent derrière leur sens de l'honneur mais les catins de Syracuse ont bien plus d'honneur qu'eux! Elles, elle doivent travailler pour manger! Elles, elles méritent le respect! Tu vois? Quand peut-on compter sur les nobles? hein? Tu peux me le dire? Ils sont prompt à demander écuyer, serviteurs, dame de compagnie. Ils veulent s'entourer d'un tas de monde et tu sais pourquoi? Parce que personne ne les aime! Tous les êtres humains ont besoin d'amour! Tous! Ceux qui disent le contraire ne sont que des menteurs! Des personnes qui font le pire des crimes : se mentir à eux-même! Ou alors, ce sont réellement des bêtes sauvages! Tous ceux qui portent le titre de roy, de duc, de comte ou de chevalier ne méritent qu'une chose! Qu'on les roule dans la farine! Qu'on se gausse d'eux et de leur manière de bouffons! Jamais, je ne me battrai pour eux, tu m'entends? Jamais! Car eux ne se battent jamais pour des personnes comme nous. Ce sont leurs privilèges qu'ils défendent! Toujours! Ils n'ont aucune piété! aucune compassion! Ils veulent nous acheter avec leur or pourri! Et moi je dis : prenons-le leur or! Sans travailler pour eux! La roublardise est la meilleure des armes contre leur suffisance.

Il s'était laissé emporté. Il s'en rendait compte. Elle se foutait de son discours. Totalement! N'eut été la pénombre, elle aurait sans doute vu la gêne envahir l'ensemble de son visage. Il était temps pour lui de s'esquiver. De toute façon, sa présence devait l'ennuyer, d'autant plus lorsqu'il partait dans de telles digressions.

- Excuse-moi... Je n'aurais pas du te raconter tout ça. Ça n'a pas grand intérêt. Ni maintenant, ni jamais. Je... Je reviendrais demain. Je te ramènerai quelques pommes, du pain, du lait, et un peu de poitrine de lard. J'ai trouvé où je pouvais m'en procurer.

Vasco se leva, hésita un instant à s'approcher d'elle pour lui donner une tape amicale sur l'épaule en guise d'amitié. Puis il se ravisa. Mieux valait ne pas la brusquer plus ce soir.

- Il faut que je parte. J'ai donné rendez-vous à une dame sur les remparts et il ne faudrait pas que je sois en retard.

Elle ne réagit pas un instant. Elle se recroquevilla un peu plus dans l'ombre, mastiquant un morceau de pain rassis. Vasco se retourna, rajouta quelques buches dans la cheminée. Il remplit la hotte avec du bois qu'il alla chercher dans la maison voisine, s'assura que le feu durerait ainsi une bonne partie de la nuit. Il la salua. La porte grinça, le vent s'engouffra dans la maison. Il sortit dans la nuit. Elle n'avait pas prononcé le moindre mot de toute sa visite.
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Lexiane
PAPAAAAAAAAAAAAAAA! PAPAAAAAAAAAAAAAAAAA!

Des heures que je le cherche que je fais le tour des rues, que je fouille coins et recoins de cette maudite ville...

Quelques Corleone savent qui je suis mais je suis loin de les connaitre tous...

Pour beaucoup, j'suis une gosse, sûrement une gamine du village qui cherche son père trucidé par la main d'un des leurs... Les Corleone c'est avant tout un clan qui a l'esprit de famille et un code de l'honneur. On ne touche pas aux enfants!

Les rares passants détournent le regard sur mon passage, et moi je continue à gueuler


PAPAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAA! PAPAAAAAAAAAAAAAAAA!


Une des Corleone que j'avais croisée à un feu de camp avec mon père me reconnait et m'arrête:

Arrête donc de brailler comme ça! Va voir Fleur, il est avec elle... Les risques du métier...

Elle me désigne les fenêtres à l'étage d'une échoppe close.

Je sais pas si j'ai tout compris , mais j'ai le sang qui bat dans mes tempes... Je remercie pas , je salue pas, je la bouscule et je file...

Jamais dix mètres en courant n'auront été aussi difficiles a atteindre... Je défonce une porte de l'épaule qui n'en avait surement pas besoin puisqu'elle cède facilement, mais j'ai aucunement l'envie de réfléchir...
Je grimpe deux par deux les marches qui mènent au dit étage et je tambourine à la porte


Fleur , Fleur ouuuuuuuuuuuuuuuuuuuvre! C'est Lexi...

En fait mes rapports avec ma belle-mère s'étant plus que dégradés ces derniers temps, pour cause de paroles malheureuses, je ne m'étais en aucun soucié de prendre de ses nouvelles, et encore moins de savoir où elle logeait...
Je pense que de son côté il en allait de même... Allait elle m'ouvrir?

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Niallan
Tout va bien ? Tout va bien ?! Non mais c’est qu’elle a de l’humour aujourd’hui ma femme ! Serrant les dents pour étouffer un énième cri de douleur, je la regarde. Enfin j’essaye. Parce qu’à peine a-t-elle fini de parler qu’elle s’arrache. Non, il faut qu’elle reste, ne serait-ce que pour que j’ai une chance de ne pas aller valser avec la Faucheuse. Me relevant sur un coude, je la rappelle, faiblement : « Gaia… » mais déjà elle est de retour. Esquissant un léger sourire (ce qui est déjà un effort monstre vu le contexte !), je m’abandonne à ses mains expertes. Eh ouais, j’ai beau la traiter de garce et passer mon temps à la maudire pour avoir fait de moi un homme marié, j’ai confiance en elle. Une confiance aveugle qui entraîne un assentiment immédiat lorsqu’elle me tend la fiole.
C’est peut-être du poison, ça va peut-être me tuer mais tant pis. Je bois. Le sédatif et le calmant. Je ne sens ni le goût du vin ni celui du cassis et c’est tout juste si je me retiens de tout régurgiter. Mâchoire crispée, je m’agrippe au matelas du lit, lit qui a eu l’immense bonté de me réceptionner dans ma chute. Et j’attends, je laisse les mains italiennes danser avec du fil et mes chairs. Je sais qu’elle réserve les autres danses aux autres hommes mais quand je la vois si confiante, si sereine dans cet art que peu maîtrisent je ne peux m’empêcher de jalouser ces autres et de la trouver désirable. Terriblement désirable. Ouais, je suis un peu spécial comme mourant.

Alors c’est aussi moche que ce je crois ?...

Je ne pense pas avoir parlé assez fort pour qu’elle m’entende c’est d’ailleurs pour ça que je suis surpris de voir son visage au-dessus du mien. Nul besoin que ses cheveux viennent nous cacher d’éventuels regards extérieurs pour que je ne vois plus qu’elle. Le temps s’arrête. Une larme mouille ma joue…la sienne, la mienne ? La sienne puisqu’elle s’essuie les yeux. Elle me demandait de penser à ma fille et à mon amante mais en cet instant je ne veux penser à rien d’autre qu’à ce que je viens de voir. D’accord c’était une seule larme et oui elle est fatiguée, sans doute secouée par le pillage… Je m’en tape. C’était pour moi cette larme. Et le baiser aussi.
Mes mains viennent encadrer son visage alors que je souris, limite le sourire de benêt qui me donnerait envie de me gifler si je me voyais.

Je reste. J’ai aucune envie de te faire le plaisir de battre le record de la plus jeune veuve du monde.

J’allais l’embrasser à mon tour mais il y a eu ce cri. Ma gamine. Je me redresse en sursaut, grimaçant en constatant que je ne peux pas me lever, ne serait-ce qu’à cause de cette putain de pièce qui n’arrête pas de tourner. C’est dans un murmure que je l’appelle. J’imagine les pires scénarios dont l’un d'eux met en scène ma petite blonde poursuivie par le pachyderme sanguinaire. En sueur, je pose les yeux sur ma femme.

Ouvre-lui. s’il te plaît.
Fleur_des_pois
Les promesses n'engageaient que ceux qui y croyaient. Ces mots étaient sortis de sa bouche, de nombreuses fois. Si d'ordinaire elle se fichait comme d'une guigne de tenir ses engagements auprès des autres, Fleur faisait le nécessaire pour ne pas se trahir elle-même. Elle avait juré de la haïr pour l'éternité. Mais ses mains, sur ses joues. Son regard, dans le sien. Ce sourire. L'estomac de la Fée se contracta brusquement, lui coupant le souffle. Le haïr pour l'éternité était beaucoup plus difficile quand il la regardait de cette façon.
Le cri, derrière la porte, la fit sursauter. Niallan se redressa. Elle s'écarta d'un bond, tout en le forçant sans mal à s'allonger de nouveau.


Bouge pas, ordonna-t-elle d'une voix d'où toute trace de trouble avait disparu.

D'une main vive, le Lutin rangea son matériel, fourrant pots et fioles dans sa besace surchargée. Soulevant sa sacoche, puis Terrine, l'Ortie rejeta sa chevelure en arrière. Sortir devenait nécessaire. Le fuir était vital.
D'un geste sec, Gaia ouvrit la porte, posant son regard brun sur la fillette paniquée.


Je vous laisse tous les deux. Ne t'assois pas sur le lit, ça fera bouger le matelas, et ça lui fera mal. Ne touche pas au bandage. Il est très faible, reste calme. Je vais... vous laisser. Je crois que ma présence n'est plus désirée.

Fuyant rapidement les lieux d'un crime dont elle refusait d'être la victime, Fleur dévala les marches à toute vitesse, et regagna les rues. Boire pour oublier. Il était peut-être temps de vérifier l'adage.
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Enjoy
    ~ Cosa Nostra ~

    Après un assaut violent sur la ribaude Polinoise, une collection désordonnée de corps inanimés forma le décor d'un lendemain cinglant. Il est aisé d'imaginer la stupeur qui tambourine aux portes closes, comme les paupières des badauds. Ceux-là n'avaient rien vus venir alors que l'épée de Damoclès trônait au dessus de leurs têtes. Depuis cette fameuse nuit où la loi du Talion s'appliqua en la personne d'un môme. De la violence pure et extrême pour une simple tentative de révolte. Ce dernier, aussi intenable qu'un étalon sauvage, avait dû trouver divertissant le fait de cogner à la porte de la mairie. En retour, l'injustice se mit en marche. Plus d'un an après, ce qui aurait dû dépasser la prescription, traîna encore ses fers sur les routes enneigées de la Franche-Comté. A l'image des flocons se déposant sur la plaine immaculée, une lance dont le seul fautif ne méritait pas une sanction aussi brutale, se retrouva fauché comme les blés. Entraînant avec, son lot de dommages collatéraux. L'histoire aurait pu en rester là, après tout ceci ne représente qu'une infime partie des risques du métier. Sauf que l'effronterie devait affronter la Vendetta de la Spiritu Sanguis. Œil pour œil, dent pour dent, un principe basique, qu'ils allaient enseigner et le faire payer au centuple. D'une vulgaire tentative à une infamie sur un enfant, ils récoltèrent le vent d'une tempête, comme rarement ils en eurent connu.

    ~ Jour 1 ~

    Le ciel obscur a des airs de toile. Un tableau immense sur lequel les pinceaux chuintent d'une manière harmonieuse ou parfois via son antinomie. Ceux qui détiennent ce pouvoir d'esquisser l'avenir d'une populace pour les jours durant, ne sont rien d'autres que les artistes de la dépravation. Adorateurs des belles couleurs, notamment celles qui transpirent la passion, l'irascibilité, le goût acre de la forfaiture pour les autres. Même si les saveurs ne s'ordonnent, pour ainsi dire jamais, sur une peinture. Les leurs en portent les traces. Tout comme ceux qui les défient arborent les stigmates. A l'aube d'une nuit écarlate, les méats des pavés tentent la comparaison avec les racines noueuses de la garance. Le liquide carmin a coulé bien plus qu'il ne le devrait, les lames endormies dans leurs fourreaux depuis bien trop longtemps rugirent leur furie.

    Le réveil de la Corleone fut des plus magnifiques. Bien que l'astre solaire a omis de se réjouir ce jour-ci. Quelle mirifique vision concédait à ses prunelles assombries. Passant d'un visage à un autre, ils ne possédaient point tous des faciès agréables mais même les trognes informes mendiaient leur obole de charme. Une vengeance aux allures de présent pour les siens. Certes, le butin maigrelet ne rassasia point l'ensemble de la troupe. La lionne et les anciens durent passer leur tour. Mais leurs venues se justifiaient par autre chose que les deniers. Ce sentiment particulier qui anime les membres d'une famille ou d'un équipage. Que ce soit lors des phases parfaites jusqu'aux intempéries, ils vivaient et se déplaçaient comme un seul homme. Ce qui, quelque part, relevait de l'exploit vu le navire gorgé d'ego et d'individualités à contenter. Et avec eux, un homme de la mer voguait en ce moment précis. La comparaison prenait alors tout son sens. Puis la nuit, la première d'une longue série, la populace composée de gueux, de bourgeois et de nobles se souleva près du Présidial. Pour ne récolter qu'une cuisante défaite.

    ~ Jour 2 ~

    ...un marin, à la langue bien pendue. Un défaut dont le miroir retrouve quelquefois ses qualités. Parler ou embobiner, la Zia connait la force des mots. Pour sa part, elle s'en sert selon la forme du jour pour agonir autrui ou entretenir une conversation acidulée avec ses contemporains. Seulement, comme tout un chacun, il arrive que la répartie s'éclipse un instant. Afin de se repoudrer le nez et s'enfiler une bonne rasade de fiel, la verve en guise de poison. Et donc cet homme, aux traits fins, à la chevelure épaisse flirtant avec la brise et les iris azuréennes gonflait les effectifs depuis peu. Dès le premier soir d'une entrevue divertissante, elle sut que le poste à pourvoir de « casse-pieds » venait de trouver son hôte. Si l'italienne appréciait le verbe et l'esprit, s'entourer d'un empêcheur de tourner en rond lui était vital. Tant que ce dernier n'épouse en aucun cas la lourdeur infinie. Loin d'être le cas, l'homme ne posait pas vraiment de souci, une chose profitable pour tous. En retour, son statut l'y obligeant, Corleone s'assurait qu'il ne manquait de rien. Bien que, trop affairée, elle passait peu.

    Puis lorsque nocturne se pointa pour envelopper les cieux. La foule en colère se pressa vers les portes de la ville pour accepter une nouvelle fois l'échec.

    ~ Jour 3 ~

    Chaque aurores ressemblaient aux précédents. La protection ne trembla pas contre les assauts. Les assaillants s'écrasèrent sur les remparts de la mairie à l'instar des vagues contre les rochers. Rien ne pouvait ébranler l'organisation quasi sans faille du groupe. Surtout que parmi les habitants, une gronde latente envers les autorités, reprenait un certain entrain. Les soutiens affluèrent, animés tantôt par une âme oisive ou par vengeance. Il y avait sans aucun doute une once de naïveté dans ceci. Bien que les événements se rallièrent à eux. En effet, le Conseil Comtal préféra sacrifier leurs brebis plutôt que d'accepter une requête. Le peuple ne tarda pas à crever de faim tandis que les masses accumulaient les déroutes. En face, dans le camp des mercenaires, on s'adonnait à quelques jeux. Pour mieux passer le temps. Piquer un peu le quidam, défier untel en lice pour lui montrer que non, la réputation du Clan n'est nullement galvaudée.

    Et encore une fois, les désespérés se rassemblent pour mieux recevoir leur forfaiture quotidienne. On pouvait leur reconnaître une chose, l'insensibilité à la lassitude. La Spiritu Sanguis gagnait tous les paris, et sur la table, on continuait de voir défiler les perdants. A tel point qu'ils contractèrent une dette envers toute la cité. Puisque la famine s'installa dans les environs. Ce qui, n'inquiéta pas outre mesure la Corleone.

    ~ Jour 4 ~

    Lorsque le plan A rate, on emploie son successeur. En cours d'acheminement les vivres rassasieraient les siens pendant que les panses adverses iraient se plaindre. Néanmoins, il fallait attendre que les fameuses denrées reviennent en temps et en heure. Un léger imprévu occupant le quotidien de la Corleone. Fallait au moins cela pour la faire bouger puisque les amorphes d'en face n'assuraient qu'une piètre résistance. Malgré tout, les dirigeants trouvèrent une solution de substitution. Ils ne pouvaient gagner à la loyale alors ils arpentèrent les sentiers étroits de la justice violée et sa nuée de procès iniques. Une loi martiale, même pas rétroactive, pondue dans la précipitation et n'eut que pour réaction un large sourire de l'italienne. Elle les imaginait entrain de se réjouir de cette idée. Peu importe la menace, peu importe la fourberie. Ce soir-là, le couple décida de se tourner vers d'autres horizons. La politique de la terre brûlée avait assez durée. Et de toute façon, leur demande n'aboutirait jamais. Depuis le début, ils le savaient pertinemment. Tout comme ils savent que le lendemain de la reprise, les mêmes qui n'ont pas su enfoncer les lourdes, iront festoyer et mieux se vanter.

    Puis la nuit, une sempiternelle ritournelle s'entonne aux murailles, le vacarme assourdissant d'une énième défaite.

    ~ Jour 5 ~

    Celui-là trouve son originalité par rapport à ses homologues. Puisque s'entame une courte correspondance avec un capitaine puis sa défenderesse. Il s'agissait d'aborder la loi martiale sous toutes ses coutures.


Citation:
Bonjour,

Ce courrier a pour objet de vous annoncer que la Franche Comté est sous le coup de la loi martiale depuis le 3 février 1462 (voir annonce faite en gargote).

Cela implique donc (au choix) :

- de faire une demande de Laissez-Passer soit auprès du Prévôt Gwenaël, soit auprès du Connétable Elias, soit auprès du Capitaine Sauveur, ce qui implique de rester dans la même ville en attente de la réponse.
- de quitter le sol franc-comtois dans les 24 heures

Vous avez 24 heures afin de régulariser votre situation ou de quitter le sol Franc-Comtois, faute de quoi, un procès sera lancé immédiatement.

Si vous avez un Laissez-Passer déjà accordé par les instances déjà nommées, nous vous demandons de bien vouloir nous en faire la preuve en nous réécrivant, nous le rajouterons au dossier après vérification.

Toute personne voulant emménager devra faire l'objet d'autorisation préalable du connétable.
Toute personne non comtoise qui ne respectera pas cette ordonnance sera mise en procès et/ou fauchée sans sommation par nos armées.
Afin de vous éviter de quelconques poursuites en justice, merci de bien vouloir faire demi-tour en direction de la frontière d'ici 24h après réception de ce courrier.
Lorsque vous faite une demande de laisser-passer, il vous est interdit de quitter la ville où vous êtes, à moins que ce ne soit pour quitter la FC donc chemin le plus court...

Clovis Sauveur de Chéroy
Capitaine de Franche Comté


    D'habitude, ce genre de missives ne reçoivent jamais de réponses. L'exception naquit, puisque ceci l'amuse.


Citation:
A Clovis Sauve-qui-peu de Chéroy,
Capitaine de rien du tout,

Saluti le larbin,

Sauf que je suis devenue Polinoise bien avant la parution de la loi martiale. Comme elle n'est pas rétroactive, je ne suis nullement inquiétée par ceci. D'ailleurs je t'invite à venir récurer mes latrines avec la langue.

'Ce n'est qu'en essayant continuellement que l'on finit par réussir. En d'autres termes... Plus ça rate et plus on a de chances que ça marche...'*

Enjoy Corleone,
Polinoise.


    Avec pour invitée surprise de cet échange épistolaire.

    Laell, y a notre plus grande admiratrice qui m'adresse un message. Je ne puis la laisser dans l'attente, orpheline de la courbe de mes lettres...


Citation:
Bonjour ma grande,

Je voulais t'expliquer que quand on signe un petit papier en "famille" pour dire qu'on a pris une ville, tous les petits membres de cette "famille" sont coupables.
Mais le coup de la pseudo naturalisation antérieure était bien tenté.
Domaaaaaaaage !

Et puis c'est vraiment très mal d'insulter les gens, on t'a jamais appris ça ?

Donc petit billet rédigé avec amour pour te signaler que je te liste.

Avec ma plus profonde affection.

Votre bien aimée que vous réclamez à corps et à cris, Sarani.


    La rémige gratte un petit moment le vélin dont les armoiries Polinoises apparaissent en filigranes.


Citation:
Saluti la Petite,
Point de lettrines pour la lèche-latrines,

Quand on fait point la différence entre une loi martiale et une révolte par exemple, ni même un nom de famille et le reste, on n'est pas trop en mesure d'expliquer quoique ce soit. Je suis un modèle unique de perfection, tu n'as même pas la prestance requise pour être mon brouillon.

Larbin n'a jamais été une injure. Il s'agit d'une condition, tu devrais la connaître puisque tu l'endosses chaque jour. Tiens la drôle, la bafouille du terrible mouflet que tu as terrassé. C'est de ton niveau, quoiqu'il risque de te perdre, son vocabulaire semble bien plus étoffé que le tien :

« Faut t'y dises que ci bin leur mairie pour jouer didans, mais que j'y ai perdu un rat faut y m'envoie par l'pigeon. Pis ci que tous celles qui veulent être mes amoureuses, faut y viende tout suite parce qu'on revient pas tout suite mais après. »

Ton idole, à tout jamais.
Enjoy Corleone


    Personne ne doute qu'il y aurait eu un jour six et un jour sans pour les Francomtois. Avant d'entamer un jour sept mais le cerbère a d'autres chats à fouetter. Alors dans l'obscurité, leur principal élément, leur seul allié, ils reprirent la route.


[*Les Shadocks.
Cosa Nostra = Notre chose.]

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Praseodyme

Ils se sont remis en marche. Rien ne les retient icelieu. Rien ne les retient nulle part. Ce sont des errants, des vagabonds, leur domaine, c'est le Monde, leur coursier, c'est le vent. Ils sont partis, laissant les Comtois à leur misère. D'autres projets les appellent, ailleurs, plus loin. Praséodyme a reformé sa lance, elle en a pris la tête et ils l'ont suivie. Ils ont monté le chemin par les collines. Arrivés en haut, en surplomb de la ville, ils ont fait halte un moment pour manger un peu. Les nobliauds de la Comté, les lâches, ont bien tenté de les affamer, ces derniers jours, mais en vain, ils avaient des réserves. Plus que les paysans du lieu, certainement, qui ont sûrement souffert grandement de la faim. Mais c'est le destin des paysans que d'être affamés par les Puissants.

Praséodyme s'est retournée. Elle contemple le village. Etrangement, en bas, tout paraît calme. Rien ne bouge, rien ne laisse penser que les quelques reîtres qui tournaient autour du bourg, tentant vainement de reprendre la mairie depuis plusieurs soirs déjà, se soient rendus compte de leur départ. Praséodyme hume le vent. Il souffle dans le bon sens, ce soir, vers la ville. Elle sourit. Elle sait bien que le son de sa voix ne portera pas jusqu'en bas, qu'il se perdra en chemin. Mais n'empêche, à perdre haleine, elle lance tout de même un message d'adieu :


Beren, chien de comtois, burne molle ! Va reprendre ta ville ! Nous sommes partis, tu ne crains plus rien, le danger est désormais écarté ! Cela fera au moins un exploit dont tu pourras te vanter auprès de ta maîtresse !

En guise de signature, elle racle un gros glaviot du fond de sa gorge, qu'elle lâche puissamment dans le vent. Puis, satisfaite, elle reprend la tête du groupe.

Allez, suivez ! Suivez ! Ne traînez poinct, mes gaillards ! Nous avons encore de la route avant l'aube. Suivez, suivez le meneur !

Praséodyme a une ultime pensée pour un homme qui croupit désormais dans les geôles comtoises. Il appartient à une bande rivale, mais n'a poinct hésité à aider le Clan, sans demander de contrepartie. Il a été arrêté par les argousins de la Francomtesse au moment où il s'apprêtait à fournir force pains à la Famiglia. Praséodyme regrette de n'avoir pu goûter à ses miches. Elle se les imagine chaudes, rondes et dorées. Elle soupire, ce qui aura pour effet de déclencher, par réactions en chaîne, un raz-de-marée dans un pays qu'on appellera plus tard Californie.
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Enjoy
    *

    Adossée à une souche, sa lame sculpte un bout de bois. Les conditions climatiques relativement agréables pour la saison changeaient inexorablement durant la nuit. Le vent soufflait sa colère dans les plaines, sifflant à travers les rocs. L'humidité ronge les corps harassés jusqu'à venir titiller les os. Le métier réclame d'accepter de vivre à la rude, d'essuyer le crachin, de combattre le frimas, et d'accepter la malchance. Ou peut être est-ce la rouille qui s'installait. Toujours est-il que quelque part dans les basses terres de Franche-Comté, se trouvait un blond affichant une annonce. Et ceci à la suite de la sienne. En cet instant, Corleone n'aurait pu rétorquer. Peu importe le contenu. Il fallut que les heures s'égrainent et que la pénombre envahisse la campagne pour que ses oreilles s'abreuvent de la rumeur. Un soutien à l'arrière lui fit un rapport. Mot pour mot, le contenu fut recraché. A cela, elle n'adressa qu'un sourire satisfait à ses affidés. L'Etienne se comportait exactement comme elle eut escompté, à se gausser d'une rapine de l'an dernier. Faut dire que tâter les miches de la mercenaire marque les esprits. A cette évocation ses lippes s'étirèrent. Les hommes sont prompts à se vanter d'un hier mais c'est plus de reproduire l'exploit qui importe. L'italienne le laissait donc s'amuser de ce trophée si prestigieux qu'à sa simple pensée, l'homme s'en trouvait encore torturé. Une presque victime de cet étrange syndrome post-rencontre.

    Bien que ses mouvements se restreignent à cause de l'épaisseur des frusques, elle se met en quête de quoi écrire au sein de son fatras. La barbe de sa penne lui chatouille son épiderme ébène, la divertissant avec les moyens du bord. Un morceau de vélin déchiré se noircit légèrement, s’agrémentant d'une salutation, puis d'un remerciement pour la récréation. Et pourquoi pas y ajouter une fantaisie poussant l'hypocrisie à son paroxysme, à moins qu'il ne s'agisse de moqueries. Avant de délaisser ce texte n'apportant rien de plus à l'histoire. Sa silhouette happée par les exhalations de ses semblables s'évapore en silence. Quelques lieues sont parcourues et à l'adresse de son épouse.

    Nous sommes Ténèbres, nous avons tellement d'avance qu'ils finissent tous par contempler nos lunes.

    Une œillade vers la Belette non loin, une interrogation naissante la trahit. La ville n'avait toujours pas été reprise. Les suppositions à ce sujet ne tarderaient pas à alimenter les conversations. Tandis que d'autres continueraient de crever la faim. Mais ceci est vraiment le cadet de ses soucis. Corleone en a rien à secouer du peuple, si les moutons apprécient de se faire tondre, soit. Personne n'ira les contrarier. Le respect s'acquiert dès lors qu'on démontre des facultés à survivre.
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