Le jour des allégeances, enfin. Le rapide allée retour que je devais faire était devenu une véritable odyssée.
Javais fait le voyage de Marseille seul et cest encore seul que jaurai du le faire pour revenir vous trouver.
Cétait sans compter sur cette autre femme à la chevelure de jais mais elle aux yeux bridés. Elle était aussi convaincante quelle était aimable, un caractère fougueux qui ne mavait pas laissé indifférent.
Pourtant, vous, je ne vous oubliez pas, tant et si bien que javais ordonné quon me fasse porter ce que javais ramené dAlexandrie.
Ce qui devait être offert à la catin blonde qui signore, serait finalement offert à la courtisane brune qui sassume.
Pas de mensonge quand à la provenance du présent, ni même de secret quand à la personne à qui il devait être offert. Son corps de poupée de porcelaine nétait de toute façon rien à côté de celui que je ne pouvais quimaginer étant le votre.
Elle mavait changé à tout jamais, me faisant me moquer des blondes et de leur candeur. Pour moi elles étaient toute les mêmes, rêvant au prince charmant mais pas fichu de garder les cuisses fermés plus de deux mois.
Javais pris la décision de travailler pour vous, au milieu des plus belles fleurs dun pourtant modeste jardin dolois.
Ma décision était arrêtée, je ne voulais plus aimer puisque aimer voulait dire souffrir. Avec vous, javais lassurance davoir ce quhomme désire si jy mettais le prix mais aussi le plaisir de devenir votre gardien, votre protecteur et peut être parfois votre confident.
Aux Délys dOpale je commençais une nouvelle vie. Il parait que les Dumb sont friands de jolies filles et parfois de catins, jaurai donc tout loisir de perpétuer la tradition familiale en devenant plus quun client, en devenant le gardien de ce temple sacré.
Avec moi près de vous, aucune fille ne serait maltraitée par quelques clients indélicats. Des soûlards violents, aux amoureux transits, je naurai de cesse que de rappeler à ses hommes que vous êtes, belle fleur et resteriez toutes, des beautés opalines que lon ne peut quaimer mais que lon ne peut quaimer un temps.
«
Heureux qui, comme Ulysse, a fait un beau voyage. »*
Une main qui pousse la porte et mes émeraudes qui balaye le lieu à la recherche de votre regard de perle. Il ny aurait pas de mot puisque vous saviez déjà. Moi le taciturne venait chercher le bijou qui allait se pendre à mon bras.
*Joachim Du bellay