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[RP]Heureux comme un poisson en avril ...

Enjoy
    L'agglomérat rocailleux endure la ligne harmonieuse d'une Corleone vieillissante. Le poids du monde écrase la terre de ses pas foulés. Entre marécages et vallées embrumées, la Reyne sans couronne s'avance avec une traîne purpurine dans son sillage. Âmes esclaves de son fléau irascible arborant des piques ensanglantées. L'espoir fane à l'évocation de la nuée assourdissante, du fracas de leurs triomphes. Là, où les autres ravalent leur salive hâbleuse. Eux, transfigurent le fantasme en réalité. Remparts aux pieds d'argile s'écroulent tels de vulgaire châteaux de cartes. Quant à l'évocation de ces derniers, les lèvres atones se décomplexent pour mieux s'étirer, affichant les crocs affamés de l'italienne. Ils prendront tout, ils s'abreuveront de tout. Jusqu'à la dernière goutte de sang.

    Cette fois-ci a une saveur originale, presque irrésistible. Puisque sur la balance de la dépravation, un poids égal. Une entité mythique faisait miroiter le quidam de sa chevelure reptilienne, l'Hydre. Monstre fabuleux, aux multiples têtes, grondait avec la férocité propre à sa légende. De l'autre un Cerbère, à la crinière enflammée, grognait sa détermination et sa puissance. Les chimères s'entrechoquent, se jaugent et s'allient pour engrosser la nuit d'une myriade de cauchemars.

    Issue de sa mémoire, la vision blafarde d'une lune juchée sur les nuages lui revient encore aujourd'hui. De cette époque bénie, les propos survivants résonnent avec une implacable vérité. Les plans sont conçus pour être défaits. Et entre les parois de son crane, les cogitations s'amoncellent pour former un amphigouris inextricable. Si le commun des mortels n'envisage qu'une seule possibilité, son esprit craque de ne plus pouvoir les contenir. Toutefois, la facilité a les qualités de ses défauts. Elle peut manquer d'ordre ou de fluidité mais ses résultats ne déçoivent jamais. Si bien que nichée parmi les siens, Corleone toise l'horizon de sa noirceur. Au loin, à l'abri de la violence, grouillent badauds et autres ouailles de la société. Inconscients du danger qui les survole, les surveille et s'apprête à les saigner à l'enseigne des sacrifiés.

    Grande habituée des partitions sans fausse note, elle eut le déplaisir d'en collectionner quelques unes. Un départ mitigé, une escapade campagnarde ayant oblitéré toutes formes de discrétion et enfin devoir se faire la victime des réminiscences de leurs racines latines. Les uns commençaient à engueuler les autres. Des crises d'autorité, des crises tout court. Et elle, broyée entre le marteau et l'enclume. Entre l'envie de claquer des gueules et l'intelligence de se taire. Entre l'animale enragée prête à bondir et la matriarche empathique. Y a des fois, elle les égorgerait tous. De chagrin. Va donc savoir ce qui ne tournait pas rond chez eux. Une bande de sociopathes avec des principes proprement souillés de vomissures, de foutres et d'hémoglobine. Ils étaient les reflets d'un miroir se mirant sans cesse jusqu'à s'hypnotiser. La vanité connait un écueil particulier, elle s'adore autant qu'elle se déteste. Et quelque part, la Lionne s'en délectait. Ils allaient lui manquer tous sans exception. Aussi en guise de présent d'adieux, plus un pot de chambre que de départ, ils lui firent absolument tout. A tel point que le pernicieux doute s'installa dans ses pensées.

    Faut dire qu'en face, ils étaient pas aussi maladroits que la tendance générale. Du moins, la rumeur le prétendait. Hélas, depuis un moment les manœuvres comtoises la laissèrent pantoise. Le joyau de la couronne a découvert, les gardiens censés le protéger assis sur des gravas genevois. Quelque chose cloche, et ceci ne provenait aucunement des églises. La tactique faisait défaut à ses adversaires. Par ego, les loups ont croqué quelques poules. Tandis que le reste de la meute allait se faire tondre tels de vulgaires moutons. Gagner une cité pour mieux en perdre une. Oeil pour oeil, dent pour dent. Sauf que l'ennemi ne sort pas de temps à autre de sa tour d'ivoire pour rosser le voisin. Non. Se battre, c'est sa seule raison d'exister, l'unique son le faisant vibrer. Rapines, pillages, meurtres portent le pavois de leur métier. Et la guerre emporte au vent l'obscur blason qui les caractérise.

    Il était bien trop tard pour les sous-estimer.

    S'infiltrant dans les murs du patelin, les lames vont s'abattre. Seulement naquit un nouveau couac. Plusieurs ont décidé qu'il n'y aurait pas séance de troussage aujourd'hui mais plutôt école buissonnière. La ride croisant ses sourcils se contracte, sa mine s'assombrit et l'aspect général de la féline laisse craindre qu'elle va mordre. Toutefois avec détachement, le contre ordre vogue de condottieres en affidés. Ils se mueront en ombres, peu importe le taudis et l'odeur, peu importe les réactions en face. Le silence ne se brisera pas. Patients. A l'aube, les retardataires rallièrent la horde. Nouvelle consigne de l'italienne, au crépuscule tout se jouera. Personne émit la moindre hésitation, leur devoir refuse de reculer. Hier, les chances étaient bien meilleures. En cet instant précis, elles avaient eu le loisir de s'amenuiser au fil des heures.

    Un peu de défi.

    Puis en fait, non. Saint Claude tombe. Avec, ce triste constat. Des coffres vides. Logique. Encore une fois, peu loquace, sa langue se délie à peine.


    Foutez le bordel...

    Que pouvaient-ils bien faire d'autres ? S'enorgueillir avec le masque des blasés, c'était la combientième celle-ci ? La lassitude l'étreint, ses réflexes s'amenuisent, un besoin vital l'harcèle sans cesse. Reprendre le cours de son existence, la sienne. Plus celles de ses congénères. Un truisme inesquivable, la mercenaire se ramollit, change et devient presque humaine. A la manière de la syphilis ou de la lèpre, la bienveillance est une pathologie fatale. Valait-il mieux s'en soigner. Plutôt crever que ce genre de flétrissures. Les fêlures, très peu pour elle.

    Le lendemain. En lieu et place, les remparts fraîchement violés se vêtissent de tissus rapiécés. Une caisse en bois, un dîner pour un cadre détonant. Il voulait un tête-à-tête, et voici. Quelle ne fut pas sa déception de constater que la brune ne desserra qu'épisodiquement les mâchoires. Sa conscience chavire entre exaspération et curiosité. L'unique pallier envisageable pour le moment. En guise de dessert, la fastidieuse tentative de reprise.

    Y avait toujours un ou deux gueux pour fanfaronner, le cul vissé sur un tonneau ou du purin. Tandis que le Visconti gaspillait de l'encre pour égrainer les longues minutes. Untel s'affairait dans son coin, une autre raillait la populace. La routine.


    Hydre & Spiritu Sanguis étaient là.


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Aristokoles
Citation:


Mon fils,

Une fois encore j'ai lu attentivement votre lettre ainsi que les questions qu'elle soulève.

Vous avez parlé de nous immiscer dans le pouvoir temporel. mais mon Fils, nous n'y intervenons que lorsque la Parole de Dieu que nous sommes sensés porter y est menacé! et elle l'est tous les jours!

Le Roi Eusaias était un hérétique, qui menaçait d'envoyer des centaines voire des milliers d'âmes en enfer avec lui. Croyez vous que les Croisades se déclarent à la légère? Il y a peut être eu des opportunistes, des profiteurs qui se servent de Rome. Mais Mon fils, la question qu'il faut se poser n'est pas celle là. La question c'est: où sont les bons principes? Ou sont les principes justes? étaient-ils dans un homme qui a bafoué Dieu? et qui n'a crée sa propre église que pour soumettre les hommes de Dieu?

Qui a promis mariage et titres à ceux qui le rejoignait? Rome? ou Eusaias? Rome n'a promis que des coups à prendre à ceux qui la soutenaient. Des coups à prendre voilà tout ce qu'on gagné ceux qui l'ont soutenus. Car le côté de Dieu n'est jamais le plus simple.

Vous dites que Rome a oublié sa mission spirituelle? mais mon fils, parlez un peu avec les hommes d'Eglise, avec les curés, avec les évêques. Que vous disent-ils? "Lorsque nous sommes doux ils profitent de notre bonté, lorsque nous sommes durs ils disent que nous sommes fanatiques". Rome a bien des dysfonctionnements et je travaille tous les jours pour essayer de les régler.

Vous dites qu'il serait blasphématoire à l'homme de chercher la perfection divine. Je pense que vous n'avez pas bien compris mes mots, oui l'homme doit chercher à y participer, c'est à dire en se conformant parfaitement au plan que Dieu lui a proposé, car l'homme n'est parfait qu'en ce qu'il participe de la perfection divine, qu'en se cadrant sur icelle.

Vous m'avez parlé de la pastorale. Las, c'est un sujet qui me tient à coeur, car j'ai longtemps proposé une réforme de la pastorale, la rendre plus intéressante, plus réflexive. J'ai toujours été de ceux qui pensent que la théologie n'est pas réservé qu'aux prêtres et aux évêques. Que la Doctrine de l'Eglise est un trésor et je me suis évertué à le faire partager chaque jours de ma vie, c'est le motif de mon engagement au sein de l'Eglise. Pureté de la Doctrine, Cohérence des principes. Cruelle désillusion de voir que si peu de fidèles en veulent. "Trop compliqué" disent-ils "On s'en fiche" clament les autres. Combien de fois ais-je lutté pour faire sortir les gens de leurs coquilles? mal, peut être, j'en accepte l'augure. Mais ne pensez vous pas qu'il y a en ce monde une propension à ne pas penser selon la raison mais comme cela nous arrange? Tous les gens que j'ai rencontré qui critiquaient la Sainte-Doctrine, ne la critiquaient pas parce qu'ils n'étaient pas d'accord, mais parce que cette Doctrine ne les arrangeait pas dans leur mode de vie.

Combien m'ont dit "peu importe, je fais comme je veux"?

Vous nous accusez de prendre les fidèles pour des idiots, et bien en dépit de tant deb êtises que j'ai pu entendre, je ne l'ai jamais fait. Car, comme Saint-Thomas d'Aquin, je pense que la raison est quelque chose d'universel.

Cependant, ne faut-il pas une église aussi pour ceux qui ne veulent pas s'intéresser plus que cela à la théologie? Certains se contentent très bien de la pastorale comme elle est. Certains ne s'intéressent pas aux longs textes que j'ai l'honneur et le privilège d'examiner avec mon équipe au Saint-Office. Eux aussi ont le droit à une Eglise.

Vous parlez de la messe, mais c'est de la répétition que vient tout apprentissage. Le message doit être répété pour être assimilé et compris, c'est une base. Pour que le fidèle ne soit pas perdu. Lisez les écrits des Saints, voyez la vie dans les monastères (qui est la plus sainte vie qui soit): la Sainteté s’acquiert par la science, la régularité et la prière.

La messe est construite autour de ce tryptique:

Répétition des prières essentielles qui sont normalement expliquée dans la pastorale: répétition, science, régularité.

Il y a toujours un texte différent, mais présent: répétition, science, régularité.

Il y a toujours un sermont: répétition, science, régularité.

Vous dites qu'il n'y a plus de Doctrine à Rome? Mais ouvrez les yeux, c'est bien la seule chose qui existera TOUJOURS à Rome! Combin de fois ais-je été vilipendé par des nobles corrompus comme vous dites pour répandre et expliquer cette Doctrine? Combien de fois m'a t-on dit que la Doctrine, dans certaines affaires diplomatiques ou elle se trouvait en jeux, n'arrangeait pas?

La Doctrine, construite par 1500 ans de réflexion, de Théologiens, de Saints immenses qui ont soufferts des martyrs pour cette Doctrine à laquelle j'ai dédié toute ma vie! Toute mon âme!

Vous me parlez du voeu de chasteté, je vous réponds avec Christos: nous devons appartenir à l'humanité, corps et âmes, et non à un être en particulier.

Vous me dites de quel droit l'Eglise exige-t-elle? mais l'Eglise n'exige rien moins que ce que Dieu a demandé, l'Eglise n'exige rien moins que ce que Dieu lui a commandé d'enseigner de par la filiation Christosienne! Vous me répondez que Dieu a mis tous les hommes à égalité devant lui, vous avez raison! Ils sont égaux en ce qu'ils seront tous jugés. Et les hommes d'Eglise seront jugés plus durement encore que les autres s'ils n'exigent pas de leur fidèle ce que Dieu exige de ces fidèles, car tel est leur devoir de prévenir lorsqu'un homme prend le chemin de l'enfer. Ah certes, cela ne plait pas. Les prêtres n'ayant à donner que la Vérité, ils sont parfois haï. Je l'ai été, j'en accepte l'augure. Et je l'accepterais toujours, car l'exigence de l'obéissance à Dieu n'est pas discutable et je préfère mourir que de ne plus la porter.

Vous parlez de prendre les armes contre la Réforme... Mais où ais-je fait une telle chose? Cette guerre contre genève n'est pas une guerre contre la Réforme. C'est une guerre contre le crime, contre le brigandage de la Savoie, et l'emprisonnement avec tentative de meurtre par dépérissement d'un évêque. La Savoie s'est faite piller 12 000 écus et c'est l'Ancien Consistoire qui a profité du recel!

L'évêque Honorine a été emprisonnée par la juge corrompue Leamance, don la cathèdrale a été volée.

Quelle a été ma première décision religieuse en tant que chef de l'Etat genevois? Elle a été de rendre la cathèdre à ses légitimes propriétaires et de confirmer le principe de la liberté religieuse. Que je n'approuve pas, mais qui est essentiel à la paix civile de Genève.

Vous parlez de bras armé? mais j'ai toujours eu la conviction que c'est par la confrontation théologique que la Vérité jaillirait! et c'est pour cela que j'ai enfin pu rendre public mon envie de discuter avec un théologien Réformé sur la légitimité de l'Eglise.

Vous cherchez ceux qui agissent uniquement par le Fer? Cherchez donc du coté du Lion de Juda. Cherchez donc du coté de la Réforme qui dit "paix, paix, il n'y a pas de Paix"

Qui véhicule des idées de violence? l'Eglise a toujours détesté recourir à la force. Peut être avons nous eu parfois tort d'y recourir. Mais plus qu'à la stratégie, je suis un homme de principe. Nous avons peut être parfois mal fait passer notre message, soit, mais ce message était le bon. ce message est la Vérité.

Je serais toujours du côté du Vrai.

En espérant que ma réponse pourra répondre à vos interrogations, je me tiens à votre disposition pour toute rencontre.

Cordialement, SE Aristokoles de Valyria.
Praseodyme

Praséodyme avait passé une nuit tranquille, à peine troublée par une bande de noctambules avinés qui avait mollement tenté de prendre la mairie. Une fois les importuns repoussés d'une pichenette négligente, Praséodyme s'estoit replongée dans le sommeil du Juste, son Ame étant pure et sa Conscience sans tâche. Le lendemain, après une grande toilette, qui avait consisté à cracher dans un coin de torchon et à se frotter le bout du nez avec, elle estoit sortie se promener dans Sa Ville, histoire de goûter un peu aux hourras et aux vivas de la foule sainct-glaudienne en grand liesse.

Alors qu'elle déambulait quiètement dans la cité, son attention fut attirée par des grognements qui émanaient d'une sorte de soue. Elle pensa tout d'abord que s'estoit un goret qui fouissait à la recherche de sa pitance, mais à y regarder d'un peu plus près, elle s'aperçut qu'il s'agissait d'un spécimen exemplaire de consanguinité paysanne - quand tu ne sors jamais le bout du dard au-delà de la palissade de ton patelin, il faut s'attendre qu'un jour où l'autre tu sautes une cousine, fatal. L'homme (si l'on peut dire) récriminait contre ci-et-ça, les curés, les brigands, les caisses vides, et gnagnagni, et gnagnagna.

Praséodyme s'arrêta :


Etbenetbenetben, mon p'tit bonhomme ! En voilà une façon de se tenir en ce beau jour de fête ! Après qui qu't'en a donc, comme ça ? Qui qui t'a fait des misères ? Raconte à Mamie Praséo. T'es grognon comme quinquin qui vient de se rendre compte qu'il a été pris pour un con, à qui ça fait mal au fion, et qui a du mal à l'assumer. Mais dis-moi : tu dis que tu t'appelle Exo. J'espère que c'est pas le diminutif d'Exonéré, j'espère que tu paie bien ton impôt, mon gros rat. Paske l'usurpateur dont on vient de te débarrasser a vidé les caisses avant de se faire virer à coups de pompe dans l'hémisphère sud, la canaille. Alors va falloir qu'ça rentre, et ficelle ! Qu'on soye pas venus pour rien, tout de même ! Qu'ça paie au moins l'avoine des ch'waux ! Sinon on pourra plus s'en aller, ça s'rait ballot.

Allez, fais-moi un petit sourire, lààà, c'est mieux. Et dis avec moi : Vive Praséodyme, Vive Grosbill, Vive l'Hydre, Vive Corleone et Spiritu Sanguis !

C'est pas plus gentil comme ça ?


Et, satisfaite de sa bonne action, elle alla s'enquérir d'autres admirateurs.
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Arsene
    « Tu sais, je suis un homme aux goûts très simples : j'aime la dynamite, la poudre à canon et... L'essence ! Et tu sais ce qu'elles ont en commun ? Elles ne sont pas chères. » Le Joker – The Dark Knight Rises.


    La rousse est vautrée avec nonchalance à même le sol. Trois brins d'herbes sont maintenus entre les doigts délicats d'une main aux ongles bouffés par une nervosité difficilement contenue. Ils tournent et se tortillent entre ses pouces tandis que les maigres jambes s'étirent vers les faibles braises. Tentative dérisoire de réchauffer la carne fatiguée. La danse des flammes est sur le point de s'éteindre, n'en subsistera bientôt plus que des résidus de charbons et quelques étincelles rebelles. Tout comme les assaillis de la nuit à venir, les bois a rendu les armes et le feu s'est sournoisement repu des craquements contrariés des branches.

    Alors que les doigts s'agitent, têtus, à faire revivre les maigres flammèches, les pupilles cernées de vert se dilatent et vacillent au rythme irrégulier du feu. Le brasier, revigoré, envahit de nouveau quelques bûchettes pour l'instant épargnées. Soufflant et détruisant tout sur son passage, il prend possession des lieux et grimpe royalement sur le trône qu'est l'âtre. La Frêle suit attentivement la révolte qui a lieu sous ses mirettes fascinées et obnubilées. Elle inspire et la Bestiole s'étire, ouvrant un œil en douceur. Le réveil, favorisé, par l'adrénaline qui parcourt les veines de la petite carcasse et par la trop proche proximité des flammes, est violent.
    La menotte s'approche, irrémédiablement attirée par la danse envoûtante des étincelles. Les prunelles papillonnent difficilement alors que l'esprit s'embrase, enhardit par la chaleur environnante. Il se délecte et se complaît à imaginer un paysage ravagé par une fournaise fougueuse, femmes et enfants pleurant sur les cadavres carbonisés d'hommes courageux mais bien trop téméraires pour survivre.

    Les lamentations supposées et fantasmées étirent un rictus machiavélique sur le minois bordé d'éphélides tandis que la Bestiole ouvre un deuxième œil. Reine du cerveau juvénile, elle reprend volontiers son trône, bousculant et chahutant brutalement la raison qui peine à se trouver une place et à camper sur ses positions. Le Chaos règne en maître dans un esprit qui pourtant s'acharne à aligner méthodiquement et compulsivement chaque objets à portée de main. Dernier sursaut et assaut de la part de la conscience qui tente de reprendre la première place.
    Le crâne à la chevelure fauve dodeline alors que les trois brins précédemment choyés sont jetés au feu sans plus de cérémonie. Horreur et trahison ! L'herbe se tord et se tourne, maigre protestation face à l'attaque du brasier impitoyable.

    Aujourd'hui et dans les jours à venir, la Belette s'appliquerait à brûler et répandre l'anarchie dans les paysages Francs-Comtois. Oh oui, elle est bien décidée à mettre la ville à feu et à sang et c'est emplie de sa nouvelle résolution que le corps de la roussette se met en branle, rejoignant à vive allure les siens. Prête au combat, une contorsion carnassière au coin des lèvres et la dague affûtée au bout des doigts. Ce soir, cette nuit, elle n'a pas peur. Elle sait que ce n'est pas son heure et quand bien même, elle emmerde la mort, affichant avec un sourire narquois, son majeur solitaire et relevé.


    « Andiamo » Le mot tombe, comme un couperet et l'accent italien pourtant si charmant, n'a plus rien de chantant dans cette situation. Il se fait froid et dénué d'émotions.

    Spiritu Sanguis et Hydre s'élancent. Les monstres mythologiques s'avancent et détruisent tout sur leurs sillons. S'alliant momentanément pour former une alliance surprenante mais complémentaire. Ses pas résonnent sur le pavé et la lame s'élève, brillant au reflet de la lune, pour s'abattre sous les plis des armures comme une sentence mortelle et claquante. La recette est maigre mais qu'importe, l'effroyable bête s'est repu du sang et des cris des assaillis.

    Le Cerbère est dans la place et ses trois gueules béantes se chargeront de laisser l'empreinte durable des crocs aiguisés et ardents dans la mémoire et la chair des villageois.
    La Roussâtre promènent ses mirettes vertes sur les trognes aux alentours cherchant à y repérer une tignasse blonde et à se rassurer.

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Leamance
Nom de Déos !

Par les trois Prophètes ! Christos, Aristote et Averroes.

Il pleut des hommes !


La Sicaire a tout connu, sauf cela.

Heureusement, Esclandres est à ses côtés, comme toujours.

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Vasco.
    « Comme tous les soir j'irais dormir
    Dans ce grand lit où tu n'es pas
    Comme tous les soirs j'irais mourir
    Pour ressusciter dans tes bras »


La porte de la taverne vibrait encore d'avoir été si violemment refermée par le Visconti alors que ce dernier se trouvait déjà à une centaine de pieds plus en avant. La rencontre avait Ina avait pris une tournure des plus agréables...avant que la température qui semblait pourtant à la hausse ne retombe violemment dans des moyennes arctiques. Prenez un sicilien et faites-le rôtir à feu doux comme la Corleone savait si bien le faire et vous obtenez le plus heureux des hommes. Plongez-le ensuite dans la chute d'eau la plus glaciale et vous le transformez immédiatement en le plus agressif de serpent prêt à cracher son venin. Les siciliens ont tous une faiblesse congénitale: vous devinez laquelle?

Ses traits étaient figés dans la cire de la jalousie. Sa démarche raide, vive et ses mâchoires serrées témoignaient de la soupe aux sentiments qui bouillait dans son esprit. Qu'importe ce qu'il y avait sur son passage : chat ou chient errant, cochon ou passant, il ne dévia jamais sa trajectoire d'un seul pouce. Les avait-il seulement vu? On pouvait raisonnablement en douter, son regard fixant obstinément le pavé qui se déroulait devant lui. Le vent s'était levé. Des bourrasques venaient de temps à autre se prendre et se perdre dans sa cape ou dans ses cheveux. La fraicheur de la nuit contrastait avec la chaleur de ses humeurs sanguines et sa peau se couvrit d'une chair identique à celle des poules.

Au détour de la porte que Vasco avait, depuis la prise de ville, prénommé la porte aux égorgés, les remparts se profilaient à la vue du sicilien. Passant près du faisceau d'armes, il s'empara de la plus longue des épées, une arme que l'on maniait à deux mains, une arme que le Visconti n'avait pourtant pas l'habitude d'utiliser. L'équilibre du reste des lames fut ainsi rompu et celles-ci allèrent s'étaler sur le pavé des remparts dans un grand fracas métallique. Le marin souleva l'arme au dessus de sa tête et alla l'abattre lourdement sur les créneaux des fortifications. Une fois, deux fois, trois fois. Encore...Et Encore...Et encore! Quelques gouttes de sueurs vinrent sourdre sur son front à la hauteur de ses tempes. Chaque coup violent qu'il donnait était ponctué par un bruit sourd qui venait du plus profond de ses entrailles. La douleur vrilla ses poignets alors que les vibrations des lames contre la pierre se propageaient jusque dans ses épaules. Le contact du métal sur la surface dure des fortifications produisait à chaque fois une trainée d'étincelles, entamant à peine la matière sur lequel le Visconti passait sa rage. La lame se brisa alors en deux. La pointe de celle-ci alla s'écraser une soixantaine de pieds plus bas après avoir heurté plusieurs fois le mur d'enceinte de la ville. Incrédule, Vasco regarda ce qui restait de son épée, puis l'envoya aussi loin qu'il le put par dessus le rempart, accompagnant son geste d'un cri mélangeant colère, haine, frustration et déception. S'appuyant contre le mur, il se laissa glisser lentement au sol, les yeux fermés, la tête orientée vers le ciel et la lune qu'il chérissait. Sorti tout droit de la manche de sa chemise, un vélin vint choir au sol avant de se faire emporter et balloter par le vent au delà des limites de la ville.


- Tu parlais de morale Ton Éminence?

Le ton de sa voix était sec, désabusé. Une pointe d’écœurement pouvait même s'entendre sur chaque syllabe de fin de phrases.

- ...Est-ce cela la morale que tu enseignes aux franc-comtois? A ces nobles que tu protèges et dont tu te sers pour assouvir ta soif de puissance et nourrir ton orgueil sans fond? Désirer, courtiser et coucher avec les femmes d'autrui? Ah, elle est belle la morale d'Aristokolès! En défendant ces porcs consanguins et débauchés tu te fais complice de leurs vices!

Au déchainement de violence avait succédé une profonde léthargie. Vasco s'enfonçait dans ses chimères, les ressassait encore et encore, s'infligeant par là même la plus pervers des tortures.

- Beren...Le pire coureur de jupons que la terre ait connu! Tu la veux n'est-ce pas Beren? Tu as envie d'elle? Tu te fous complètement de ce que peut ressentir celle que tu dois épouser, n'est-ce pas? Quand une femme te fait de l'effet, il faut que tu la mettes dans ton lit, sale porc! J'aurais du te tuer à Péronne! Et toi le Phénix? Tu es priapique? Tu n'as pas vu Sarani depuis longtemps ou elle ne sait pas comment satisfaire un homme? C'est pour ça qu'Ina t'intéresse aussi? A moins que ça ne soit encore une histoire de tare familiale. Toi, Beren, Sarani... Ça reste dans la famille et ça se termine en orgie n'est-ce pas? Sans doute même avec la bénédiction d'Aristokolès qui doit y voir là-dedans le message de Déos!

Il crachait son venin pour lui-même. Il fallait que ça sorte. Il devait exorciser les démons de la jalousie qui dictaient désormais le moindre de ses gestes, la plus infime de ses pensées.

- Eh bien les Ébréchés, vous allez être heureux! J'ai relevé Ina du serment de fidélité qu'elle m'a fait. Elle a envie de vous? Elle est désormais libre. Libre d'agir à sa guise, libre de se laisser aller à vos libations! Courtisez-là! Mettez-là dans votre couche si c'est ce qu'elle désire vraiment. Bande de sot! Vous ne saurez sans doute jamais ce qu'aimer veut dire! Vous vous laissez guider par vos ardeurs masculines! Allez-y après tout! De toute façon, quand on est capable de martyriser une sanclaudienne sous prétexte qu'elle est réformée alors que celle-ci s'est investie corps et âme pour sa ville et son comté, on n'en n'est plus à une "moralité" près, n'est-ce pas? Troussez donc qui vous voulez, sans aucune gêne. Ensuite, vous n'aurez qu'à vous confesser auprès d'Aristokolès. Je suis sur que vous obtiendrez une absolution aisée moyennant quelques écus ou une campagne militaire contre quelques bastions de réformés! Non, vous ne saurez jamais ce que aimer veut dire..

A la logorrhée verbale, succéda un grand silence. Le vent était désormais maître des remparts. Les images s'entrechoquaient dans l'esprit du Visconti. Des images d'une indécence et d'une violence inouïe, si forte, semblant si réelle qu'il dut fermer les yeux pour pouvoir les supporter...même si ce geste était futile et sans grande efficacité. Quand il reprit la parole, le ton de sa voix avait changé. Il était plus calme, plus posé, nappé d'un couche de complicité et de tendresse.

- Ina, je sais que tu ne pourras me comprendre. Je ne veux pas vivre aux côtés de celle qui éprouverait de la frustration de n'avoir pu donner libre cours à ses envies, de n'avoir pu partager la couche d'un homme qu'elle désirait. Tu ne me laisses pas d'autre choix Agnesina que de te relever de ta promesse. Il me faut prendre ce risque. Pour toi...comme pour moi. Va! Laisse parler tes désirs si tu le souhaites. Tu ne peux imaginer le mal que j'ai à prononcer ces mots, à imaginer ce que tout cela implique, et pourtant...Nous n'avons pas le choix. Ni toi, ni moi...ni nous. Une fois que tu auras vécu tes envies, que tu auras compris ou pas leurs limites, alors peut-être que tu me reviendras... ou tu auras cédé à leurs extraordinaires talents charnels et à leurs beaux mots d'amour. Mais si tu me reviens Ina, alors il faudra que tu oublies définitivement Beren et Lancelot. Je ne vois pas d'autres issues à notre situation actuelle Agnesina.

Depuis le début de son monologue, il le taquinait. Il l'agaçait. Vasco s'empara du caillou qui trainait par là. Certaines rumeurs paysannes prétendaient que d'avoir dix cailloux en poche éloignaient les brigands pour toujours. Un sourire amer passa sur les lèvres du Visconti.

- J'aurais dû en mettre des tas dans les bourses des Fioles Ébréchées! Maintenant il est trop tard.

Maintenant, il était temps de passer à l'action. Un pigeon roucoulait au dessus de sa tête, porteur d'un message. Le sicilien l'ignora. Il sortit un vélin, une plume, de l'encre. Ce soir, il était morose. Mais s'ils croyaient que cela l'empêcherait de se battre, c'est que les Ebréchés ne connaissaient rien à la psychologie sicilienne.

Citation:

    Salut Joy!

    Ce soir, donne-moi la mission la plus difficile, mets-moi à l'endroit où ça tape le plus dur. J'ai besoin de faire passer ma haine et ma frustration sur quelque chose. Alors, autant que ce soir sur l'ennemi.

    Vasco


Le vent se déchaina là-haut, sur les remparts. Le sicilien se leva pour s'emparer d'un nouvelle arme, puis vint reprendre sa place, s’emmitouflant dans sa cape. Qu'ils gardent ou qu'ils perdent la ville n'avait pas vraiment d'importance. Il fallait juste que le sang coule ce soir.

Citation:

    Vasco,

    Alors reste dans mon sillage, on tapera ensemble.

    Joy


Le sang avait coulé et Saint-Claude avait résisté. L'hydre, la Spiritu Sanguis et ses alliés étaient toujours maîtres des lieux.
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Amalio
Il est là, toujours. Moins grande gueule qu'avant mais toujours aussi ferme, aussi sûr de lui, aussi certain de son autorité - à tort ou à raison, d'ailleurs, selon l'humeur de ses filles, les moins obéissantes de tous. Il est le patriarche Corleone. Le vieux mâle alpha, dit-on aussi, ce grand loup gris dont les crocs ne sont pas encore assez usés pour qu'il soit las du goût du sang. Il a bientôt quarante ans et sa grande carcasse maigre et musculeuse se meut sans bruit et sans heurts parmi les corps et les armes. Il laisse à la jeunesse la rapidité et l'impétuosité, les coups de gueule et les cris de triomphe. Il se garde l'efficacité tranquille, la fermeté d'une lame tranchante, le regard haut par-dessus les têtes qu'il dépasse presque toutes de sa haute taille. Sur son visage, point d'exaltation théâtrale comme sur celui des enfants, point de cette rage sanguine qui prenait jadis au ventre le jeune loup qu'il était, mais plutôt la concentration et l'attention, des yeux verts vifs sous un front aux perles de sueur. Sa lame tranche. Il tue, perce, égorge, arrache.

Amalio est un homme dur. Il s'agace des forfanteries de ses mômes, de leurs disputes, de leurs grandes gueules, de leurs éclats si enfantins. Et pourtant il les aime, à sa façon. Tandis qu'il avance dans la ville au coeur de la mêlée, il cherche des yeux ceux qu'il protègera au péril de sa vie. Arsène, Agnesina, Gabriele... ils sont là, ses mioches, ses emmerdeurs, ses fiertés et ses colères, ses bâtards à qui il a offert le sang des italiens. La prunelle de ses yeux. Il les déteste parfois autant qu'il les aime - de temps en temps. Son sang. Son épée tranche à demi une gorge cerclée de ferraille : le corps s'affaisse aux pieds de sa rousse fille qui n'a pas vu l'attaquant. De sa main libre, il lui met une pichenette derrière la tête, et passe. Rien d'autre à dire, après tout : "Fais attention. Démerde-toi sans moi. Mais je suis là pour te protéger". Comme à eux tous.

À quelques mètres, la rousseur d'Elwenn. Son écureuil chéri est perché à son épaule, arrachant au vieux loup un sourire à la fois exaspéré et blasé. Elle et son grain de folie, sa jeunesse, son sang bouillonnant. Sa cousine. Une Corleone comme lui. Son seul amour. Sa vérité, sa rédemption aussi. Pour elle, il s'est fait unique. Et soudain la flamme glacée de la mort vient à son esprit, cette attente indicible de celui qui sait que tout a une fin, que même les Corleone sont mortels, et que le sang qu'ils ont pris leur est un jour réclamé.

Son bras libre se passe soudain autour de la taille de la rousse : possessif, il l'embrasse, profitant de l'éloignement providentiel de défenseurs trop occupés à éviter les manières polies de la vieille Praséo. Le murmure brûlant se faufile au creux de l'oreille de l'Italienne :


Epouse-moi.

Epouse-moi. Je t'aime.
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Vasco.
    « Quel est le prix
    Qu'on va nous payer pour sa vie
    Quel est le sort
    Qu'on donne à ceux qui donnent la mort »
      William Shakespeare - Roméo et Juliette


Avec le petit matin qui se levait, une brume délétère s'était mise à ramper au ras du sol, s'infiltrant jusque dans la moindre des ruelles de Saint-Claude. Les combats de la nuit avaient été âpres. Une fois de plus, son visage et ses vêtements étaient maculés de sueur, de sang et de chair: la sienne pour la sueur, celui de l'ennemi pour le reste. Jamais il n'avait combattu avec autant de hargne et de cœur...même lors de la prise de Saint-Claude. Il avait laissé son instinct et sa rage prendre le contrôle de ses gestes. Les humeurs guerrières coulaient encore dans son sang et un rien pouvait le faire réagir avec violence. Vasco n'avait pas dormi de la nuit. Il devait sans doute avoir les yeux rougis par la fatigue, celle provoqué par l'absence de sommeil et par la bataille. Il grelottait. Le froid était en partie responsable, le reste revenant à la situation qu'il devait gérer. La raison fait l'homme mais c'est le sentiment qui le conduit*. Il n'y avait pas d'autres phrases pour mieux résumer l'état d'esprit de Velasco Visconti alors qu'il se trouvait assis sur les créneaux des remparts de la ville.

Après None, il avait reçu un message d'Agnesina. Le sicilien avait hésité à l'ouvrir. Il en avait malgré tout pris connaissance. Il tergiversa un instant : devait-il envoyer le vélin valser aux quatre vents? Il avait rangé plutôt décidé de le ranger dans sa manche puis Il avait fini par lui répondre.


Citation:

    Agnesina,

    Je sais que tu doutes. Je l'ai compris hier soir alors que mes mains prenaient possession de ton corps. Mais ces doutes, tu dois les affronter seule. Il y a des ennemis contre lesquels je puis te soutenir. Si Beren ou Lancelot s'en prenait physiquement à toi, ils me trouveraient sur leur route. Mais lorsque l'ennemi que tu dois abattre est toi-même, alors je ne puis rien. Moi encore moins que ta sœur, ton frère, tes cousines ou même ton père. Dans cette bataille, je suis sans arme ni armure, bien plus vulnérable que n'importe qui. Mais surtout, tu ne peux te fier à moi. Depuis Mâcon, ma raison sonne aussi faux qu'une cloche fêlée lorsqu'il s'agit de toi. Fêlée... mais non ébréchée.

    On ne contrôle pas ses pulsions. On peut maîtriser ses envies. Je ne serais pas ton geôlier Agnesina. Je n'en n'ai pas le désir. Fais ce que tu as à faire mais surtout ne me le dis pas. Nous verrons ensuite à tirer toi et moi les conclusions qui s'imposent. Un combat contre toi est inégal. Tu connais mes failles. Je risquerai d'y laisser ma peau, mais plus que ça : ce duel n'est pas le mien. Ma place était avec toi avant. Elle pourrait aussi l'être après mais ça, Déos seul le sait.

    Alors désormais tu vas te relever parce que tu es une Corleone, parce que tu portes le nom d'Agnesina Temperance Corleone. Il se dit qu'un Corleone ne recule jamais devant le danger. Plutôt mourir que fuir? Ou quelque chose comme ça n'est-ce pas? L'ennemi est là Ina. Il t'attend. Il est seul tout comme toi. Le vois-tu dans ce miroir? Bien! Tu sais donc ce qu'il te reste à faire.

    Je t'aime Ina et je te le répète: c'est pour cela que j'agis ainsi.




Dans les rues, les rumeurs couraient sur ce qui s'était passé pendant la nuit à Pontarlier. Certains prétendaient que la ville avait dû repousser une révolte menée par des insurgés genevois. D'autres affirmaient que la ville avait été prise. La confusion régnait, aucune information n'avait encore pu être confirmée. Les paroles glanées çà et là tirèrent un rictus de satisfaction au Visconti. Aux dires de certains, des complicités à l'intérieur de la ville auraient permis la réussite de l'opération. La prise de Saint-Claude, qui à l’ origine n'était que la réalisation d'un simple contrat, tournait à l'affaire personnelle pour le sicilien. Enjoy n'aimerait pas ça si elle savait désormais ce qui l'animait. Désormais, toutes les mauvaises nouvelles pour une Fiole Ébréchée avaient le goût du sucre pour le Visconti. Les idées les plus délirantes prirent racine dans son esprit, toutes plus jubilatoires les unes que les autres. Certains appelaient cela la folie des grandeurs, d'autres de l'obnubilation malsaine. Qu'importe! Ce qui était certain, c'est que cela avait le gout suave de la vengeance déraisonnée.

Ses vêtements étaient déchirés. Il devrait en changer quand il en aurait le temps. Sur son bras, la blessure s'était remise à saigner. Qu'importe! Elle était bénigne. Bientôt il n'y paraitrait plus. Le sicilien farfouilla dans son sac. Il avait faim. Les combats avaient rendus les marchands frileux. Il ne se trouvait que peu de nourriture au marché.


- Et après, ils vont dire qu'ils prennent soin de leur population. Ils tentent de nous affamer et ce sont les leurs qui manquent des denrées essentielles! Pfeuh! Je déteste ces nobliaux arrogants! Bande de fat! Que croyez-vous? Que l'on soit venu sans nourriture? Voyez mon sac! J'ai de quoi tenir un siège pendant des mois!

Le pain n'avait aucune saveur. Il était presque aussi dur que la pierre des fortifications et Velasco dut le tremper dans un peu d'eau pour pouvoir l'avaler. Qu'importe! Là n'était pas le plus important! De toute façon, il n'avait pas vraiment la tête à banqueter. Non, il avait plus besoin de faire sortir sa haine pour ne pas sortir d'ici en ayant perdu toute trace d'humanité. Au pain succéda alors une plume, un vélin et un peu d'encre...

Citation:

    A toi mon amie au-delà de cette frontière intangible mais néanmoins infranchissable,
    De Velasco Visconti, capitaine d'un bateau à la dérive après une tempête

    Saint-Claude, le 3 Avril de l'an MCDLXII

    Oui, tu as bien vu. C'est bien de Saint-Claude que je prends la plume pour coucher sur ce vélin tout le fiel qui m’anime et qui prend sa source dans une fiole ébréchée. Les nouvelles de la perte de Saint-Claude sont sans doute parvenues à tes esgourdes. La Spiritu Sanguis, l'hydre et d'autres clans alliés ont participé à cet assaut risqué. La providence ou Déos ont voulu que nous triomphions malgré les conditions catastrophiques dans laquelle cette opération a été lancée. Lancelot de Bénoic a eu beau renaître de ses cendres, il peut se targuer de nous avoir repérer, les faits sont là : Saint-Claude n'est plus entre les mains ni des Fioles Ébréchées, ni du conseil comtal de Franche-Comté, totalement absent de la situation d’ailleurs. Les nuits passent, les assauts se multiplient, les morts et les blessés s'empilent dans les rues et au pied des remparts. Ils n'ont pas encore compris qu’une révolte organisée ne nous matera pas. Seule notre décision de quitter la ville ou une solide armée pourra nous déloger de là.

    A la lecture de ces quelques mots, tu peux penser que je jubile. Et pourtant, ça n'est pas le cas. Ce que je vois ici m'attriste. Il parait que la liberté de culte est garantie en Franche-Comté. Garantie peut-être, mais en lisant entre les lignes, on s'aperçoit vite que toute personne embrassant un autre mouvement religieux que l'Aristotélisme à la romaine se voit la cible de quolibets, de salissures, d'outrages, de harcèlement. On a beau avoir donné une partie de sa vie pour la Franche-Comté, il n'y a aucune dérogation à cette règle implicite. Cela me dégoute. Ajoute à cela qu'il y a quelques semaines, un évêque champenois qui n'a de nom que le titre s'est permis de me refuser le baptême et tu comprendras sans doute aisément le pourquoi de ce que je vais t'annoncer. L'église a mis ma foi en doute, l'église m'a bafoué. Elle s'est permis de juger sur des apparences plutôt que sur mes convictions. Alors j'ai décidé qu'elle ne représentait plus à mes yeux celle qui est autorisée à porter le message divin. Oui, tu dois commencer à le comprendre, j'ai entrepris une démarche pour me rapprocher de la Réforme Aristotélicienne.

    Et puis il y a Ina. Ina et ses doutes, Ina et ses désirs sur lesquels les Fioles Ébrechées et affiliés soufflent pour mieux les exacerber. Tu as raison: Beren est la pire des ordures qu'il m'a été donné de croiser et juste derrière vient Lancelot de Bénoic. Vois-tu, ces deux-là clament sans doute haut et fort leur attachement à l'Aristotélisme, mais leur façon d'appliquer les vertus dépend sans doute de leurs intérêts et leurs envies. Je les hais. Tu ne peux savoir combien je les hais. Ils manipulent les gens à leur guise. Ils se servent d'eux et les jettent après en avoir sucé la substantifique moelle. J'imagine que tu as appris qu'une deuxième ville de Franche-Comté est tombée cette nuit. Il parait même que la révolte de Pontarlier a été cautionnée par une frange de la population de la ville. Tu sais à quoi je rêve désormais? A une immense révolte qui se propagerait dans tout le comté telle la lèpre, une révolte du peuple pour chasser les impudents et les corrompus du pouvoir qu'ils usurpent et de la politique infâme qu'ils mènent au nom de leur folie. Cette nuit j'ai rêvé que je rentrais dans le château franc-comtois ravagé par les combats. Les morts gisaient sur le sol de la salle du trône, dans les rues de la capitale. Une à une les villes s'étaient révoltées d'elle-même. Le peuple avait crié son envie de changement. Dans mon rêve, j’ai franchi la porte de la cour intérieure du château. Beren et Lancelot s'y trouvaient, prisonniers, le visage tuméfié et en sang. Ils n'avaient plus rien de cette arrogance qui les caractérisait. Ils n'étaient plus que des hommes qui savaient leur dernière heure proche. Je me suis approché d'eux, le regard froid. J'ai empoigné une hache et je leur ai coupé la tête. Sans aucune hésitation. Celle-ci a roulé sur la terre battue de la cour. Les gerbes de sang maculaient les lieux de toute leur indécence passée, une aura macabre planant au-dessus de nous dans un silence pesant. Je n'ai ressenti aucune pitié, aucune compassion, rien d'autre qu'un soulagement. Quant à Aristokolès, il s'était enfui vers Rome. Il avait perdu ses complices, ses alliés séculiers. Il n'avait désormais plus aucun intérêt.

    Tu sais, jamais je n'aurai cru que la Franche-Comté puisse être aussi froide. Un sicilien a besoin de chaleur et aujourd'hui, je grelotte comme au plus fort de l'hiver. Fichu temps!

    Prends soin de toi. Mes blessures à moi sont superficielles et les bleus au corps se résorberont vite. Ceux de l'âme prendront sans doute bien plus de temps. Il y a toujours un tribut à payer quand on est mercenaire n'est-ce pas?




* Jean-Jacques Rousseau
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Vasco.
- Hé la racaille! Amène tes fesses! On a besoin d'un coup de main du côté du quartier des tanneurs!

D'un geste machinal, le sicilien sauta de ses remparts, happant une épée au passage et suivit celui qui était venu quérir du renfort. Le quartier des tanneurs, encore lui! La veille déjà les combats les plus âpres s'étaient déroulés dans ce coin. Là-bas, les révoltés étaient en nombre, bien organisés et solidement armés. Dans la tête du Visconti, il ne faisait aucun doute que l'ennemi s'était regroupé de ce côté. Le jour, des fouilles y avaient été menées pour débusquer les insurgés. En vain. Pourtant, ils devaient bien s'y terrer. Alors que ses pas alertes le menaient vers le coeur des combats, le Visconti regrettait de ne pas avoir inspecter les fosses à ordures. L'idée lui fit esquisser un sourire. Révoltés, insurgés, fosses à ordures. Pour une fois, ce n'était pas de lui qu'il était question mais de ceux qui avaient perdu le pouvoir il y a de cela quelques jours.

- Les combats commencent tôt on dirait! La nuit est à peine tombée! Et moi qui avait rendez-vous avec une jolie gourgandine...La pauvre! Je crois qu'elle risque d'attendre un peu ce soir!

Cynisme. Un goût amer déferla dans la bouche du Visconti alors même qu'il prononçait ces paroles. C'était pour lui une sorte de traitement-choc, un moyen de se ressaisir, d'exorciser les démons qui le tiraillaient depuis la veille. La gourgandine, elle n'était juste que dans sa tête et ces paroles n'étaient en réalité destinées à personne d'autre qu'à sa propre conscience.

- Et l'armée? Elle est entrée dans la ville?

- Nenni sieur! L'armée, elle campe tranquillement devant les remparts préférant faire couler le sang des sanclaudiens! Mais si vous voulez mon avis, elle n'est pas encore prête à agir. Elle manque d'organisation, de structure.

- Ouais! Comme tout le monde je vous ferais remarquer! C'est pas pour autant que les autres restent inactifs devant une telle situation!

Il était de mauvaise foi et il le savait. L'ennemi se regroupait et affinait sa stratégie. La perte de Pontarlier avait accentué le sentiment d'urgence en Franche-Comté. Le conseil comtal avait procédé à des réajustements. Les remarques acerbes fusaient à droite et à gauche. Les autorités et Aristokolès avaient beau vanté l'unité du comté, celle-ci n'existait pas. Elle n'était qu'un fétu de paille voguant au gré des bourrasques. Il n'avait pas fallu plus d'un jour au Visconti pour comprendre que la France-Comté était soumise à des tensions internes depuis longtemps et qu'en prenant Saint-Claude, les mercenaires avaient embrasé un feu qui couvait depuis longtemps. Une onde de plaisir déferla le long de son échine à l'évocation de ces idées. Ses ennemis intimes à lui le Visconti avaient beau faire preuve d'orgueil, de fierté et d'arrogance, ils devaient faire dans leurs braies comme n'importe quel homme censé en pareille situation.

Les rues de Saint-Claude commençaient à dégager une odeur des plus nauséabondes. Les détritus s'entassaient dans les rues. Les cadavres n'avaient pas été tous jetés dans la fosse commune et l'odeur du sang séché qui coulait dans les rigoles attirait toute la vermine des alentours. Et si cela ne suffisait pas, Saint-Claude était l'objet d'une épidémie inconnue qui affaiblissait ceux qui en était touchés. Partout dans la ville, une odeur de vomi flottait dans l'air, donnant au sicilien des hauts-le-coeur. Le quartier des tanneurs était sans doute le pire endroit. Les fragrances de la peau que l'on y traitait venait se superposer au reste pour composer un parfum des plus repoussant et des plus écoeurant.

Ce soir-là une nouvelle fois les combats furent âpres. L'ennemi se battait avec hargne et le Visconti ne ménagea pas ses coups. Submergés sous le nombre, les mercenaires durent un instant battre en retraite.


- Un Corleone préfère peut-être mourir plutôt que de reculer...mais moi je suis un Visconti! Souffrez donc que je me batte à ma façon chers insurgés!

L'assaut fut pourtant une nouvelle fois repoussé. Les renforts furent dépéchés à temps et le quartier des tanneurs resta ce soir-là encore sous le contrôle des forces fidèles au pouvoir en place à Saint-Claude. Harassé, le sicilien se laissa aller contre le mur d'une vieille bicoque délabrée, se prenant la tête entre les mains. Combien de temps passa t-il ainsi là? S'était-il même assoupi? Toujours est-il qu'un raclement de gorge lui fit relever la tête. Il aperçut un gamin presque aussi sale que lui attendant visiblement quelque chose de sa part.

- Vous d'vriez prend' un bain! Vous sentez point bon m'sire!

- Un bain?!?! Un bain... Tu crois que j'ai le temps pour ça? Qu'est-ce que tu veux? J'ai rien à manger pour toi! File...

- C'te point ça! J'ai pas b'soin d'vous pour grailler. J'sais m'débrouiller ben mieux qu'les grands pour ça. Z'êtes le Visconti? Celui qu'on nomme le sicilien?

- Ouais! Mais j'ai pas besoin de moussaillon en ce moment et...

- J'ai un message pour vous!

Le gamin lui tendit un morceau de vélin crasseux, déchiré, tout taché de sang. Il s'agissait d'Ina. Elle venait d'être mis en procès pour une deuxième fois. Non-respect de la loy martiale... Ben voyons! On l'accusait déjà de complicité dans la prise de Saint-Claude. De facto ce crime impliquait un non-respect de la loy martiale. Cela voulait-il dire qu'on la jugeait deux fois pour le même crime? Oui! C'est ça que cela voulait dire! Et après ils vont prétendent que la liberté de culte est garantie en Franche-Comté, que ces terres sont un endroit où règne le bon droit et la justice. Ben voyons! La justice ici n'est qu'au service de ceux qui ont du pouvoir. Ils en abusent pour pallier à leurs faiblesses évidentes! Une rage intérieure déferla telle une vague dans l'esprit du marin. Les petits morceaux éparses du message finirent leur vie dans le flot de sang qui s'accumulait entre les pavés de la rue. Vasco se releva péniblement, un rictus de douleur déformant temporairement sa figure. Il passa son bras autour de l'épaule de gamin, dépité. Faudrait-il qu'il en arrive à renverser ce gouvernement de mécréants?

- Allez viens! Je vais te trouver de quoi manger. Si tu n'es pas trop difficile sur la dureté du pain, on devrait pouvoir trouver un terrain d'entente toi et moi. En attendant, dis-moi, c'est comment Dôle? Ah! Et encore une chose... Évite de m'appeler M'sire à l'avenir. M'sire c'est pour les nobliaux! Ceux qui asservissent le peuple et qui ne sont pas foutu de le protéger! C'est une insulte! Et je n'aime pas trop me faire insulter même par un mioche, tu comprends?
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Elwenn
"Ne fais pas de promesse que tu ne pourras tenir"


Elle se souvenait encore de ces mots qu'elle avait adressé à Amalio lors d'un épisode critique ...
Elle s'en souvenait, elle s'en souviendrai encore longtemps, peut être même qu'elle n'oublierai jamais.
L'anneau qu'elle portait, était là pour lui rappeler cette ombre qui était venue transpercée sa bulle pour s'y loger et ne plus la quitter.
Elwenn s'était habituée à sa présence malgré tout, l'ombre du doute profondément insinué faisait partie intégrante de sa vie depuis.
Couver un petit écureuil comme elle le nommait à l'époque et qui depuis qu'il a pointé le bout de son nez se prénomme Leandro-Luciano lui permit de vivre quelques mois de quiétude.
Elle se foutait de tout, ne voyait personne, ne sortait presque pas du trou dans lequel elle s'était terrée, dehors ça aurait pu être l’hécatombe qu'elle n'en aurait rien eu à cirer.
Il n'y avait plus que lui qui comptait, lui et de nouveau cette bulle réconfortante qu'elle avait perdu et dans laquelle elle flottait à nouveau.

Le groupe s'était mis en marche, laissant derrière lui Amalio, qui à ce qu'on lui avait dit, était resté en arrière pour régler certaines affaires.
La rousse n'avait pas sourcillé, bien trop heureuse dans son petit monde sachant pertinemment qu'il reviendrait ou pas ...
Le dernier mois de grossesse avait été un véritable enfer pour la Corleone.
Il n'était toujours pas là et l'écureuil n'allait pas tarder à toquer à la porte.
Chaque jour, l'ombre regagnait du terrain, réveillant de vieilles peurs.
Où était il vraiment? Que faisait il et avec qui?
Et bordel pourquoi n'était il pas là alors qu'elle allait pondre son rejeton?!

C'est sans lui qu'elle passa cette étape cruciale voyant son monde s’effondrer. Arsene remplaça son père pour sortir l'écureuil de son nid douillet, après discussion avec les enfants, un prénom composé fut choisit pour satisfaire le plus grand nombre.
Quelque temps plus tard, il vint aux nouvelles. Il était en vie. Elle en était arrivé à croire qu'il était passé de l'autre côté.
Mais il était en vie et malgré l'ombre pesante, elle n'hésita pas à aller le rejoindre ...

Devant un spectacle à la hauteur de ses espérances, Saint Claude à leurs pieds, les noisettes d'Elwenn détaillaient la mairie pendant que d'autres défonçaient la porte et d'autres encore achevaient de se débarrasser de la défense.
Obnubilée par l'édifice soit-disant sous surveillance d'une bande de Loups, elle fut surprise de sentir la chaleur de sa moitié se glisser autour d'elle.
Elle en avait presque perdu l'habitude.Ses lèvres happèrent celles du brun et l'oreille se tendit pour capter son murmure au milieu du fracas ambiant.
D'abord le silence en guise de réponse, elle repensait inévitablement à son absence et ce qu'il avait bien pu se passer, quelque chose en lui avait changé et même si elle avait en sa possession de quoi lui délier la langue elle ne sentait pas prête à savoir.
Suivit un doux sourire tandis que ses mains se faufilaient autour de son cou faisant valser le rongeur qui fila se planquer dans sa nuque sous la masse épaisse de cheveux roux.
Ce dont elle était sûre c'est qu'elle l'aimait, même si il avait manqué à sa promesse ...



Si on sort indemne de ce coup ci, ce sera avec plaisir amore.



Ils avaient encore quelques combats à mener et des jours devant eux à défendre cette mairie afin de faire rager la Saranie et l'Aristotrucmuche.
La mort guettait chacun d'entre eux à chaque instant ...

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.ludry.
Saint-Loup. Petite seigneurie attenante au vicomté de Chemin. Idéalement située au sud de Dole, à l'ouest de Poligny, et séparée de cette dernière par Chaussin. Plus précisément pour les adeptes des cartes en tous genres, stratégiquement positionnée au nord du communément nommé nœud 238.

Saint-Loup et sa Garde. Saint-Loup et ses Loups. Les Loups connus pour être les soldats de l'Armée de Saint-Claude. Les Loups Gardiens. Certains les pensent sortis de la terre comme s'ils étaient apparus par miracle, magie ou sortilège. Personne ne s'est jamais réellement posé la question et l'ombre fut préservée jusqu'au mois d'avril 1462.

29 mars. Un rapport des Loups éclaireurs J et L.T, du mouvement au sud de Saint-Loup, des hommes qui se regroupent. Des descriptions sont envoyées.

30 mars. Nouveau rapport des éclaireurs envoyés en soutien à Poligny.

1er avril. L'information arrive. La terre d'accueil de la Louve est blessée.

2 avril. Les visages sont fermés. Les mâchoires sont serrées. Fin de journée, l'autorisation est donnée. Les soldats de la Garde Lupéenne se regroupent pour répondre à l'appel de leurs Frères.

3 avril. C'est au tour de Pontarlier. Nouvel ordre envoyé aux éclaireurs et au Loup G. L'étau se resserre.

4 avril. Le rapport est arrivé depuis Saint-Claude. Les Loups sont lâchés.

Sarani. La naïveté incarnée restée trop longtemps loin de ses terres pour connaître la façon dont agissent ses soldats Lupéens sur le terrain. Sarani. La confiance absolue en ceux qu'elle considère comme ses enfants.
- Vous avez carte blanche - a-t-elle donné pour seule instruction au Putride.

Le rictus malsain du Responsable de la Garde Lupéenne accompagne les rires gras de ses camarades qui lancent les pronostics du nombre d'hommes qui seront éventrés, d'enfants égorgés et de femmes souillées. Cela les changera des tripots qu'elle avait donné pour ordre de fermer. Le garde avait répondu que c'était fait. Le Putride est au mensonge ce que le mensonge est au péché, et ce que le péché est aux Loups de la Garde.

L'opération écureuils 2 est en marche.

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Nizam
    [Saint-Claude, dans la nuit du 4 au 5 avril 1462]

    L'animal cernait depuis peu la place éteinte du bourg franc-comtois, le choc du fer troublait le mouvant des ombres et la brumaille d'une nuit trop fraîche, de celles, fâcheuses, qui tardent à céder leur manteau de froidure pour celui de la belle saison. Le bruit métallique lézardait les vielles pierres de la cité jusqu'à la venue d'un second, puis d'un autre, et ce sans fin. Point de lames pourtant, mais une bête heurtant les pavés de ses sabots sales, ses naseaux noirs crachaient nerveusement une fumée humide. Son cavalier avait mis ses bottes à l'étrier si tôt que l'astre blanc perçât le ciel, la monture entamait une ronde dans les venelles bordant la mairie, rênes tenus par les pognes engourdies d'un Balafré. Le cliquetis régulier de la ferraille à ses épaules et sa ceinture allait de paire avec le trot du Noiraud, le mercenaire ne cherchait pas la discrétion, mais bien à signifier une présence lourde et alerte. L'errance nocturne, outre à écarter le pégus aviné de la porte de mairie récemment sortie de ses gonds, trouvait ses raisons dans l'apaisement procurée à l'esprit du tailladé.

    Deux créatures dotées chacune de plus d'un encéphale mordirent un Loup dont l'unique cervelle ne répliqua guère avec brillance, du moins jusqu'à aujourd'hui. C'était là ce qu'avait retenu l'affilié à la Spiritu Sanguis des événements récents. En dehors de cela, il n'avait d'attirance ni pour la parole des réformés, ni pour celle du Livre des Vertus qui contrariait sa liberté acquise par la chair et l'argent. S'il était sorti du ventre de son angevine de mère ainsi fait, n'était-ce pas la volonté du Très Haut ? Qu'importait. Le mercenaire ne priait qu'une idole, et c'était l'or. Il ne prenait part au débat, sachant au besoin acquiescer à l'éloquence d'un réformé et montrer sa croix de baptême à l'aristotélicien. La Spiritu Sanguis venait arracher sa vengeance, il en était, simplement. Le reste de ses intérêts allait dans sa bourse et le pourpre graissant sa lame, pour cela Cerbère le satisfaisait. Ça, et une rousse. Il y avait une rousse qui bousculait de son gabarit de moineau ce grand cupide-là, et c'était suffisant pour le tirailler tant qu'il se trouva idiot d'y songer maintenant.

    Le Noiraud força sur le mors, le cavalier l'arrêta et fit face à la mairie souillée. Il se souvint qu'un loup blessé et acculé était parfois plus à craindre qu'une bête sauve, l'animal peut se résigner comme mordre de ses dernières forces la carne qui se présente à elle. Ils sauront quelle gueule mord le plus fort. Rictus et coup de talons aux flancs de la monture, nul Balafré ne sera pris cette nuit, il retournait auprès du Cerbère et de cette tignasse de feu.
Agnesina_temperance
[ Nuit du 5 au 6 avril 1462 ]


« -Bordel, où sont Enjoy et Arsène ?

Ce n'était pas une question. Ina savait au plus profond d'elle, ce qu'il s'était passé et une haine sourde coulait dans ses veines. Son esprit criait vengeance, car on ne touchait pas les siens impunément et pourtant, elle ne pouvait pas réagir à chaud. Elle regardait les siens, Spiritu et les Hydres. Réagir à chaud n'était pas la bonne solution car il fallait qu'ils se sortent tous de ce bourbier et ne dit-on pas que la vengeance est un plat qui se mange froid ? Ce soir-là, ne sera pas assaisonné par la vengeance. Du moins, le croyait-elle. Elle avait oublié que rien ne se passait comme prévu. La journée avait été rude. Avec les Hydres, ils avaient discutés d'où aller, s'ils devaient se déplacer ou pas et c'est en début de la soirée que la décision avait été prise. Les ordres avaient été donnés, mais pour la Corleone, ce n'était pas suffisant. Cette décision était dangereux et la brune le savait mais tout le monde était prêt à prendre ce risque. Seulement, pour la Corleone, il manquait quelque chose de crucial pour que personne ne soit blessé et elle avait pris la décision de prendre la route de son côté, parce qu'elle savait que sa tête avait été mise à prix. Deux procès et un listage, la passion de la Franche-Comté envers elle, n'était plus à prouver.

Elle sentait que l'armée de Sarani était proche. Elle les entendait parler et si l'envie de se jeter sur eux, l'épée à la main, lui avait traversé l'esprit, elle avait opté pour la discrétion. Elle essayait de les observer pour savoir combien ils étaient mais ce n'était pas facile, car sa survie et celle de son Clan passait avant les informations. Colère et dépit avaient été ses compagnons en cette journée. Elle avait la sensation d'être prise au piège car elle ne savait pas les plans des ennemis. Tout était risqué. Arsène et Enjoy, n'étant pas là, c'était à elle que revenait les rênes du clan temporairement et comme l'avait si bien dit, un Hydreux, elle réagissait en mère. Près du feu, elle parlait avec les uns et les autres, avec son compagnon, les Hydres, son frère, son père et sa marâtre.

C'est le soir que la situation se gâta. Alors, qu'elle discutait avec son frère et la marâtre, un homme blond répondant au nom de Serguei s'approcha d'eux, les provoquant. Si la Corleone restait prudente, sa belle-mère commença par répondre aux provocations. Si la brune réussi à canaliser une première fois la rousse qui s'était mis en tête d'étrangler le blond. La situation lui échappa totalement après. Sarani entra. Gabriele sorti. Le blond et la rousse commencèrent à s'attaquer. Ina remarqua que sa marâtre avait une passion particulière pour la strangulation et à mesure qu'elle appuyait sur la gorge, le blond lui enfonçait un poignard dans le flanc. Ina tenta de tirer Elwenn vers elle et cette dernière s'effondra. L'Hydreux était là. La Sarani voulait soigner la rousse mais pour la jeune Corleone, c'était hors de question. Ce qu'il se passe après ? Tout s'enchaîna. Les provocations du blond pour abattre Elwenn comme un cheval. Ina qui demanda à l'hydreux d'emmener la rousse loin mais cette dernière ne l'entendait pas de cette oreille et Ina fonça tête baissée vers le blond, en espérant couvrir la blessée et l'Hydreux.

Elle l'attaqua frontalement tentant de lui asséner un coup de poignard dans l'épaule. La bagarre s'enchaina et la jeune femme qui, d'habitude, attaque toujours par derrière pour palier à son inexpérience au niveau du combat, se laissa entrainer par la violence de la bagarre. Il la plaqua contre un arbre. Crachats, insultes et coups fusent. Elle lui donna un coup de genou entre les jambes. Il cria et elle lui sauta dessus pour le faire tomber au sol. C'est là qu'il en profita pour lui planter le poignard dans le flanc. Elle encaissa le coup dans un hurlement de douleur et plaça sa main sur le pommeau pour éviter que l'homme lui enfonce encore plus et lui asséna un coup de poing dans la figure. Ensuite, tout alla trop vite mais elle lui donna un coup de tête et le nez de Serguei en prit un sacré coup. Elle lui péta et l'homme, au comble de la rage, l'insulta et c'est là, que tout se gâta. Il attrapa une pierre et frappa la tempe de la Corleone avec. Le corps assommé s'écroula sur l'homme qui la poussa sans ménagement. Durant, son inconscience, tout n'était que brouhaha, tout le monde se méfiait de tout le monde et se demandait mutuellement de se reculer, se lâcher son arme et le Serguei, au comble de la rage, donna des coups de pied dans le corps de la Corleone évanouie jusqu'à ce qu'elle gémisse et tente de se dégager en rampant mais l'homme, sadique, l'en empêcha en écrasant sa cheville de son pied. Et ça parlait, ça se donnait des ordre et ça tentait de négocier. Ina était dans les vapes et son corps n'était plus que douleur mais se laissa le temps de récupérer pendant qu'ils parlaient tous pour puiser dans ses dernières forces et balancer un coup de pied vers Serguei qui tomba de tout son poids sur elle. Elvy entra. Sarani et Sergui s'en allèrent. L'hydreux la soigna en lui cautérisant sa blessure et l'entraina vers le campement où il l'a soigna.

Affaiblie, elle prit un peu de repos en se mettant à l'écart des autres. Sa carcasse dans son intégralité lui faisait mal et la Corleone gémit de douleur. Elle était aussi inquiète pour sa Marâtre qui avait été, comme elle, poignardé, mais Ina ne pouvait plus bouger. Caressant d'une main tremblante le chaton qu'elle avait appelée Déos, elle le plaça dans un endroit de sa charrette qu'elle sait qu'il sera en sécurité. Elle grimpa tant bien que mal sur son cheval en serrant les dents pour éviter de douleur, mais elle laissa les gens de l'Hydre et de la Spiritu prendre au moins vingt minute d'avance avant qu'elle ne se décide à prendre le chemin. Seule. Parce qu'elle savait que sa tête était mise à prix et qu'elle voulait éviter qu'un groupe soit pris en embuscade à cause de sa seule présence.

Se tenant le flanc avec une grimace de douleur, elle avait fait beaucoup de chemin quand soudain, elle entendit des bruits de pas de chevaux derrière elle. Elle ferma les yeux un instant, car elle n'avait pas besoin de se retourner pour savoir ce qui l'attendait. Fataliste. Elle réfléchit aux possibilités d'en échapper. Soit, elle met son cheval au galop et avec un peu de chance, elle rattrape les autres et crée une bagarre. Soit...


« -C'est donc ça...

Elle expira en écarquillant les yeux. Soit, elle se sacrifiait, attaquant l'armée de front où elle s'en réchapperait pas, mais elle aura sauvé les autres. Oui. Pour que le plan marche et que les autres en réchappent, elle était la Clé. Quand les loups attaquent un troupeau de chevreuil et ou autre bête de ce genre, ils attaquent toujours le plus faible. Ainsi est la nature.

La Corleone hyper ventila car elle sentit que la Faucheuse s'approchait. La Mort et aujourd'hui, elle avait l'allure d'une rousse balafrée avec ses hommes. Ina était dans un état second. Tout ne paraissait être qu'un rêve, elle se sentait comme ivre. Elle tira les rênes du cheval pour le faire retourner et sortit son épée, attendant qu'ils se rapprochent plus.


    Stand up
    You've got to manage
    I won't sympathize
    Anymore

    And if you complain once more
    You'll meet an army of me *


Accepter la Mort pour mieux La défier. Ainsi soit-il. Telle est la décision d'Ina Corleone. Elle était prête à mourir pour les siens. L'épée se lève, le cheval est mis au galop et la Corleone alla vers sa destinée.

« - Fottiti, bastardo ! Sono Ina Corleone. **

Ignorant ses douleurs, rassembla ses dernières forces, Ina Corleone fonça vers eux qui eurent la réaction qu'elle attendait. Ils s'acharnèrent sur elle et elle encaissa les coups d'épées dans des hurlements terribles qui perçaient le silence de la nuit. Est-ce qu'elle allait mourir ? Est-ce qu'elle allait survivre ? Elle n'en savait rien mais laissait son corps être lacérer sa chaire par les lames, semblable à des crocs de loup ou de... chien. Elle pensait à tout ceux de son clan, en espérant qu'ils allaient tous bien et le Visconti. Son compagnon... Comment allait-il réagir quand il apprendrait son sacrifice ? Comment allait-il réagir à son absence ? Même si elle avait été terrible avec lui, il n'en restait pas moins qu'il était son complice, son amant, son compagnon de tous les jours et de toutes les nuits. Son cœur se serra quand elle pensa à lui. Pourvu qu'il lui pardonne. Pourvu que son sacrifice serve aux autres. Quant à elle, elle souffrait sous les assauts des lames contre son corps et la dernière image qu'elle vit, c'est celle de l'homme qui l'avait blessé un peu plus tôt, Serguei. Après, elle perdit connaissance...

La mort planait et semblait dire ses paroles.




[ Le lendemain matin - Saint Claude. ]

Un cri de douleur retentit dans une charrette qui avait été abandonné aux portes du village de Saint-Claude. Un petit miaulement vient adoucir la mélodie qui se perdit dans le vent. Corleone était vivante... pour l'instant et elle agonisait. Plus tard, une personne bonne ou trop conne lui trouva une petite maison abandonnée et l'amènerait voir Arsène pour soigner ses blessures... Après avoir fait soigner ses blessure, Ina retourna dans sa petite maison abandonnée, se tenant à tout ce qu'elle pouvait et la jeune brune s'écroulera sur la paille, épuisée. Pigeon se déposa à côté de la Corleone mais elle était dans les songes agités.


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* paroles : Army Of Me de Bjork
Lève toi
Tu dois te débrouiller Je ne veux plus compatir De toute façon Et si tu te plains encore une fois Tu rencontreras une armée de moi.
Tu es a ton compte maintenant Nous ne te sauverons pas Ton équipe de secours Est trop épuisée Et si tu te plains encore une fois Tu rencontreras une armée de moi

** C'est très grossier ce qu'elle dit mais elle leur dit d'aller se faire... les traite de bâtard et dit qu'elle est Ina Corleone.

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