Axelle
En robe de deuil et sous ton chapeau sombre
Où lui la tache de lune de tes cheveux,
Demeure avec moi sans lumières, si tu veux
Enchanter mon amour saturnien de l'ombre.
Je ne te vois que lorsque s'en vont tes contours
Absorbés par le clair-obscur propice
Où, seul, un coin de bouche accuse un maléfice
Railleur, sous ton profil comme au temps des Cours,
Où tes yeux bleus troublés qui toujours fuient la gêne
Du morose grand jour me fixent enfin,
Pleins de la vérité de leur vice sans fin
Triste et grand comme un rêve et sans honte ni haine...
Ainsi, tu seras le premier spectre du soir,
Et je posséderai cette imprécise dame,
Noire parmi des lys respirés sans les voir, -
En un baiser muet plus profond qu'une lame.
Lucie Delarue-Mardrus Ombre
Rosa Tout nétait que chaleur et délices au creux de ce ventre dont lincongruité sévaporait au rythme des soupirs de la Rousse, envoutant le sang gitan sans que la brune ne puisse, ou ne veuille, lutter. Le velours de la peau blanche nétait que refuge lénifiant quand dehors, la tempête faisait rage. Trêve, escale, tocade égoïste ou chavirement irrémédiable ? Axelle ne se posait plus même la question à lombre de leur étreinte scandaleuse où tout semblait si limpide. Et pourtant
Quimportait.
Subjuguées par ce gout tenace à ses lèvres chavirées, les tempes brunes nadmettaient aucun questionnement, aucune hésitation, aucune réflexion malgré léquilibre vacillant invitant au vertige. Quelle se perde. Quelle tombe. Ses yeux resteront fermés sur les risques, la cataracte trop toxique pour songer à y échapper. Qui était fautif ? Le corps additif de son amante ? Lembrasement dévastateur de sa vie depuis quelques jours auquel elle ne savait faire face ? Recroquevillée dans un soulagement inopiné, la Gitane fermait des yeux pourtant déjà aveugles. Quimportait si elle devait sen mordre les doigts. Elle le ferrait, à coup sûr, elle le savait. Les élans du cur nétaient que douleurs et déchirements. Pourtant, malgré le regard posé sur cette porte qui la protègeait de tourments pour mieux la livrer à dautres, le noir de ses prunelles se raccrocha à la langueur des courbes de nacre, et la bouche fautive sourit, dun de ces sourires rares, dénué de prudence, dépouillé de sarcasmes. LAmbre sallongea aux cotés de lIvoire, lenlaçant de ses bras, enfouissant son nez au parfum de ses boucles rousses, les caresses fusèrent, empreintes dune tendresse déjà trop ambiguë pour ne pas être coupable. La Rose à griffer, le Coquelicot sépanouit sous les paupières lourdes d'un sommeil volé à larraché.
Tu as ma peau, jsuis écorchée vive.
La Gitane sendormit, enfin, rescapée dun jour pour mieux se noyer le lendemain.
Ainsi soit-il.
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* Traduction du romani: Je te dis voici la route, voilà les épines ; toi, marche comme tu sais.
Où lui la tache de lune de tes cheveux,
Demeure avec moi sans lumières, si tu veux
Enchanter mon amour saturnien de l'ombre.
Je ne te vois que lorsque s'en vont tes contours
Absorbés par le clair-obscur propice
Où, seul, un coin de bouche accuse un maléfice
Railleur, sous ton profil comme au temps des Cours,
Où tes yeux bleus troublés qui toujours fuient la gêne
Du morose grand jour me fixent enfin,
Pleins de la vérité de leur vice sans fin
Triste et grand comme un rêve et sans honte ni haine...
Ainsi, tu seras le premier spectre du soir,
Et je posséderai cette imprécise dame,
Noire parmi des lys respirés sans les voir, -
En un baiser muet plus profond qu'une lame.
Lucie Delarue-Mardrus Ombre
Rosa Tout nétait que chaleur et délices au creux de ce ventre dont lincongruité sévaporait au rythme des soupirs de la Rousse, envoutant le sang gitan sans que la brune ne puisse, ou ne veuille, lutter. Le velours de la peau blanche nétait que refuge lénifiant quand dehors, la tempête faisait rage. Trêve, escale, tocade égoïste ou chavirement irrémédiable ? Axelle ne se posait plus même la question à lombre de leur étreinte scandaleuse où tout semblait si limpide. Et pourtant
Quimportait.
Subjuguées par ce gout tenace à ses lèvres chavirées, les tempes brunes nadmettaient aucun questionnement, aucune hésitation, aucune réflexion malgré léquilibre vacillant invitant au vertige. Quelle se perde. Quelle tombe. Ses yeux resteront fermés sur les risques, la cataracte trop toxique pour songer à y échapper. Qui était fautif ? Le corps additif de son amante ? Lembrasement dévastateur de sa vie depuis quelques jours auquel elle ne savait faire face ? Recroquevillée dans un soulagement inopiné, la Gitane fermait des yeux pourtant déjà aveugles. Quimportait si elle devait sen mordre les doigts. Elle le ferrait, à coup sûr, elle le savait. Les élans du cur nétaient que douleurs et déchirements. Pourtant, malgré le regard posé sur cette porte qui la protègeait de tourments pour mieux la livrer à dautres, le noir de ses prunelles se raccrocha à la langueur des courbes de nacre, et la bouche fautive sourit, dun de ces sourires rares, dénué de prudence, dépouillé de sarcasmes. LAmbre sallongea aux cotés de lIvoire, lenlaçant de ses bras, enfouissant son nez au parfum de ses boucles rousses, les caresses fusèrent, empreintes dune tendresse déjà trop ambiguë pour ne pas être coupable. La Rose à griffer, le Coquelicot sépanouit sous les paupières lourdes d'un sommeil volé à larraché.
Tu as ma peau, jsuis écorchée vive.
La Gitane sendormit, enfin, rescapée dun jour pour mieux se noyer le lendemain.
Ainsi soit-il.
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* Traduction du romani: Je te dis voici la route, voilà les épines ; toi, marche comme tu sais.