Afficher le menu
Information and comments (0)

Info:
Unfortunately no additional information has been added for this RP.

[RP] Miel et fiel, qu'on sonne les consonnes.

Agnesina_temperance
Les doigts tapotent les draps du lit et le regard d'Ina ne lâche pas la fenêtre, dans l'espoir de voir un quelconque divertissement qui n'arrivera jamais. Elle s'était jurée de ne plus se laisser prendre par des soldats mais elle avait manqué à sa parole. Elle était une nouvelle fois en convalescence mais cette fois-ci, elle avait accepté son sort car après tout, elle avait choisi de se sacrifier pour que les autres fassent ce qu'ils avaient à faire.

Au plus profond de son âme, elle maudissait Saint-Claude. Ville maudite désertée par ses habitants. Ville maudite qui avait causé sa perte il y'a quelques mois quand les armées de Sarani ont désignées un enfant comme victime. Ville maudite qui a failli être la cause d'une rupture avec un homme qu'elle aimait pourtant. Et ses habitants. Plus ses douleurs la lançaient, plus elle maudissait leurs générations à venir. Surtout deux hommes comme Beren de Courchaton. Cet après-midi là, elle avait envie de le tuer et parce qu'elle n'avait visiblement rien d'autre à faire, elle décida de lui écrire.


Citation:
A vous, Beren de Courchaton,
De moi, Ina Corleone.

    J'ai rêvé de vous.

    Je vous ai poignardé et vous étiez un homme mort.

    Courez mon chaton.


Ina Corleone.

_________________
Beren
Et le Boitillant, lui, pendant ce temps là, s'emmerdait royalement dans ce monde de niaiseries qu'était la représentation. Lors, assis sur son large fauteuil, à superviser quelque ou quelque autre aménagement à son château, il s'ennuyait ferme, jusqu'à recevoir le petit mot d'amour d'Agnesina.

Un sourire amusé aux lèvres, il fit venir son écritoire, et s'appliqua à la rédaction de sa réponse:



Citation:

De Nous, Beren Hartasn de la Fiole Ebréchée

A Vous, vilaine chasseresse,


Salut.


J'ai bien reçu votre petit mot sommaire. Sachez que, d'une part, je ne suis pas un lapereau, et qu'on ne poignarde pas les chatons comme on poignarderait un vulgaire lapinou tirés des fourrés.

En outre, demander à un boiteux de courir recèle d'une cruauté ou d'une bêtise sans bornes, je ne sais jamais que choisir avec vous, Dieu, vous me désespérez !

Continuez donc à jouer les Diane, je demanderai à mon cher Sergueï de vous garder à distance ; si j'en crois sa dernière missive, ma chère petite, vous ne pouviez vous-même plus tellement courir.

Aussi, je vous joins une canne ouvragée de la plus belle facture. Utilisez-la, ou revendez-la pour vous acheter quelques frusques décentes , ça vous changera, ma chère petite oisillonne.


Avec ma plus profonde affection,


Votre Chaton.


PS: Je note que vous avez rêvé de moi. Que ne feriez-vous pas pour attirer mon attention! Je vous conseille la nudité, ça a toujours mieux marché avec moi.

Votre obligé,

Chaton.

_________________
Agnesina_temperance
Colère et dépit, violents compagnons des pensées de la Corleone. Si elle aurait préféré la compagnie de la mélancolie, elle était absente. Si Ina n'était pas une personne qui frappait tout et n'importe qui, l'envie d'en découdre était présente. Ho non, pas dans cette guerre qui commençait à la fatiguer. L'Hermine n'était pas femme d'arme, n'usait que du combat s'il y'avait besoin. Brigande, voleuse, arnaqueuse mercenaire et pourtant, elle ne faisait couler le sang que quand le besoin se faisait sentir. Si la perspective de piller Saint-Claude l'avait enchanté et si elle ne regrettait pas son sacrifice, l'attente dans son lit était longue. Aussi préféra-t-elle coucher des mots sur le parchemin vierge pour répondre à Beren, homme qu'elle considérait comme responsable de ses maux alors qu'au fond, tout au fond, elle n'avait aucune intention belliqueuse envers lui.

Au contraire, elle avait l'impression qu'il réveillait son instinct maternel. A moins que ce soit tout simplement de l'attirance, pourtant elle ne se voyait pas être pendue à son bras ou en faire son goûter.


Citation:
A vous, Beren de Courchaton,
De moi, Ina Corleone.

    Mon Chaton,

    Je débute cette lettre en concèdant que vous avez tout à fait raison. Quelle erreur, ai-je écrite ! Bien évidemment qu'on ne poignarde pas un chaton comme on tuerait un vulgaire lapin. Comment ai-je pu oublié qu'on ébouillantait les chatons et qu'on les noyait ? J'ai bon espoir que, dans votre absolu bonté, vous allez me pardonner mon étourderie à ce sujet mais vous savez, les plus beaux rêves sont ceux qui sont sans queue ni tête et qui, pourtant, nous marquent. N'avez-vous jamais donc fait des rêves qui vous enchantent tellement que vous avez envie de le marquer sur un bout de parchemin et de créer plusieurs versions de ce rêve que vous auriez aimé qu'il évolue ? Je peux vous assurer que la préméditation d'un meurtre est la même chose.

    Demander à un boiteux de courir ne recèle point d'une bêtise sans bornes. Peut-être, considérez-vous cela cruel mais pas du tout. Vous connaissez sans doute ce proverbe : qui aime bien, châtie bien. Je pense que vous vous morfondez trop et qu'un peu de danger, vous ferez le plus grand bien. Ce danger, c'est moi. Parce que vous ne le savez sans doute pas mais vous m'avez causé du tord. Quand on me cause des tords, je rends la monnaie de la pièce. Vous avez cru bon de vous moquer de moi en me proposant de travailler pour vous. Corleone ne fait pas le larbin de n'importe quel noble et s'occupe encore moins du linge. Vous apprendrez à ranger vos taquineries dans vos tiroirs et surtout, ne vous avisez pas à me faire la bise comme n'importe quelle de vos conquêtes, parce que je suis bien la seule femme que vous n'aurez jamais.

    Quant à Serguei, commencez à le pleurer car depuis qu'il a meurtri mon corps de ses coups alors que j'étais inconsciente, il a signé son arrêt de mort. A-t-il dit dans sa dernière lettre comment je l'ai leurré lui et les autres toutous de Sarani ? Quand ils s'acharnaient sur moi, les miens s'en sortaient sans aucun bleu. On ne peut appeler ça une réussite pour le camps des Francouards. Ceci dit, j'espère qu'il ne m'en veut pas trop pour son nez et son épaule. Je regrette cependant de ne pas lui avoir mis un peu de bleu sur ses yeux pour voir si ça lui allait bien. La prochaine fois, peut-être.

    Seigneur de Courchaton, quand apprendrez-vous à ne pas donner le bâton pour vous faire battre ? Avez-vous conscience qu'avant de vendre cette canne pour investir les écus dans mon Clan, je vais m'en servir pour battre quelques uns de vos amis ? Il faut, décidemment tout vous apprendre. Tous les gens que vous croisez ne sont pas de doux chatons et vous devriez vous le mettre en tête, pauvre petit chose que vous êtes.

    Faîtes-moi plaisir, cessez de croire que j'essaye d'attirer votre attention. Il en est rien. J'ai juste un peu de pitié d'un homme dont il ne contrôle plus sa patte. J'ai eu le plaisir de croiser votre compagne, Lenaig et elle semble être en bonne forme. Quel dommage qu'elle soit de l'autre côté de la vie, vraiment dommage.

    Vous ne me verrez jamais nue; Je serais obligée de vous tuer après. Enfin, peut-être est-ce ce que vous désirez ? Voir, sans toucher, le plus beau corps de tout le Royaume de France et de l'Empire et, de mourir. Si tel est le cas, on peut toujours s'arranger et si vous pouviez me faire héritière de votre fortune, je ne pourrais que vous en être reconnaissante.

    J'ai fait creuser votre trou.


Ina Corleone.
Faict à Saint-Claude.
Le 16 avril 1462.

_________________
Beren
Une lettre, une de plus. Et une réponse, à la douce aura prodiguée par quelque candélabre, près de son écritoire:



Citation:
De nous, Courchaton
A vous… Vous, quoi.


Ma chère petite chatte,


La passion avec laquelle vous vous exprimez flatte mon orgueil masculin, et me réchauffe le cœur. Ainsi donc, comme toutes les femelles de notre temps, perdez-vous votre temps, loin des combats, à imaginer ce que l’homme de vos pensées peut bien faire, et dans quel état il se trouve. Rassurez-vous donc, ma pauvre petite, je vais pour le mieux, et j’entends bien que tel reste le cas.

Vous parlez de me faire courir, puis de m’ébouillanter, et de me noyer. Soit. Me faire courir, j’ai déjà dit ce que j’en pensais… Quant à m’ébouillanter, sachez que j’ai la peau très fragile, d’une part. De l’autre, il faudrait pour cela que j’ôte l’une de ces formidables chemises de soie vénitienne que j’affectionne tant, et, croyez m’en, il faudrait que je sois mort pour cela. Idem pour l’envie de me noyer. Or, convenez qu’ébouillanter ou noyer un cadavre perd absolument tout son charme, n’est-ce pas ? Soyez donc raisonnable, et trouvez donc autre chose pour pimenter notre relation intime, ma chère.

Si la nudité ne vous plaît pas, j’en conviens, pour ma part. J’ai d’ailleurs dit cela pour vous rendre la pareille, mais vous savez tout comme moi que vous pouvez certainement faire de votre simple habit de chair l’enveloppe la plus imperméable et impénétrable qui soit. Souvent, je songe à notre entrevue à la parfumerie, et je me dis que oui, j’ai aimé cette parenthèse dans nos deux vies, ce petit moment passé en votre compagnie ou, sous le voile, vous n’étiez que vous, et je n’étais que moi. Je jouis rarement d’instants de ce genre, et j’aurais aimé qu’il dure un peu plus longtemps, pour tout vous avouer.

Vous parlez de cette canne en m’annonçant que vous voulez frapper mes amis avec. Vous n’avez rien compris. Je vous ai offert cet objet en reconnaissance d’un peu de moi dans vous, d’un peu d’essence du Parfumeur, dans l’abîme de vos songes. Vous menacez mes amis ; vous ne savez pas qui ils sont, ou alors, vous n’écoutez pas. Je n’ai pas d’amis Comtois, je m’évertue à vous le dire depuis des lustres. J’y ai de la famille, certes, de celles que l’on choisit, pas de celles qui nous sont imposées par les lois du sang. Je vous ai dit mille fois que la Franche Comté ne comptait pas que des gens qui m’aiment ou bien me respectent, et je leur rends ce mépris qu’ils me crachent à la face depuis des lustres. Vous vous attaquez à un homme las, et pour lequel bien peu de gens ont de l’intérêt.

Parmi eux sont Sergueï, il est vrai. Cela dit, j’imagine qu’user d’une canne à son encontre sera encore moins productif que d’user d’une lame, à moins que vous ne vouliez que le bâton lui revienne également. J’ai ouïe dire que, par déjà, l’idée d’avoir perdu votre jouet ne vous sied guère, aussi, pourquoi songer à empirer votre pauvre sort ? Vous êtes convalescente, ma douce amie, restez donc un peu sage ; après tout, malgré votre petit sacrifice, vous êtes demeurée hors les combats jusque là. Poursuivez sur cette voie et restez en arrière, en sécurité, pendant que les grands se battent. Je ne m’en fais ni pour Sergueï ni pour Lyson, qui vous mettraient tous deux en pièces sans aucune difficulté, c’est évident. L’un l’a déjà fait, par ailleurs.

J’ai conscience que vous n’êtes pas un doux chaton, je ne suis pas assez idiot pour croire une chose pareille. Néanmoins, je suis assez clairvoyant pour savoir que vous n’êtes pas ce monstre de cruauté que vous affirmez être ; preuve en est le presque suicide que vous avez commis, pour en sauver quelques-uns. Cette guerre est encore moins la mienne que la vôtre, et si je réponds au ban, c’est uniquement par mémoire et par respect envers feu mon prime suzerain, et pour son fils, dorénavant. Quant à contrôler ma patte, comme vous le dites, j’ai envie de vous renvoyer vos propres mots d’il y a quelques temps. Vous vous méprenez sur mon compte.

Ma jambe boiteuse n’est que la faiblesse physique d’une âme détruite depuis bien longtemps ; toutes vos attaques ne m’atteignent ni ne me blessent. Je sais que je suis boiteux, j’en ai fait une marque identitaire, autant que mes parfums. Ne vous battez pas pour tenter de me tuer ; je suis mort il y a des lustres. Vous n’arriverez pas même à me mettre hors de moi, bien que vous parliez de ma compagne, avec qui j’ai certaines choses à régler, à l’heure actuelle. Que peut-il bien m’arriver de pire que je n’aie déjà connu ? La seule chose qui pourrait me fendre le cœur définitivement, ce serait de perdre l’un de mes enfants, dont j’ai la seule charge depuis que leur scélérate de mère nous a tous trahis.

Allons, soignez donc vos blessures, Agnesina, et ne perdez pas votre temps à réfléchir à celles que vous pourriez bien m’infliger. L’heure viendra où ma jambe me fera si mal que j’aurai besoin d’un bourreau.

Je paierai vos gages, si vous le souhaitez. Sergueï m’a écrit cela, en parlant de vous: « on n’achève bien les chevaux ». Vous achèverez votre Chaton. Un jour. Bientôt.

Dans l’intervalle, prenez soin de vous, et cessez donc de pérorer ; pensez-vous être très audible, à l’abri d’un lit de convalescence ?

Merci pour le trou, mais j’ai un espace réservé ; chacun sait d'ores-et-déjà que je serai enterré sous mon parterre de tulipes.


Bien affectueusement,


B.Hartasn.

_________________
Agnesina_temperance
Et une réponse ne tarda pas à venir.

Citation:
A vous, Beren de Courchaton,
De moi, Ina Corleone.

    Mon chaton,

    Quelle lettre, quel homme !

    Seigneur de Courchaton, comment faîtes-vous pour manier les mots avec une telle dextérité ? Certaines jouvencelles diraient que vous faîtes leur faîtes l'amour rien qu'en couchant vos mots sur un parchemin et je comprends mieux, dès à présent, votre réputation d'homme charmeur. Je me suis longuement interrogée sur le pourquoi des femmes qui voulaient se marier avec un boiteux et dès à présent, je le sais. L'homme est un animal qui sait s'adapter à toutes les situations. Ainsi un boiteux qui ne peut satisfaire une femme physiquement, lui fera l'amour avec ses mots. Vous êtes victime du succès de vos mots. Cessez vos puérils provocations envers moi, car je vous ai mis à jour, très cher.

    Sachez que votre mort m'est devenue secondaire, parce que j'en veux à d'autres têtes. Je peux tout accepter de mes ennemis, surtout s'ils sont aussi intéressants que vous, sauf s'ils touchent aux enfants, mais ce détail, vous le connaissez. Cependant, je déteste l'ingratitude de ceux que j'ai considéré comme mes alliés. Donc, pour l'instant, vous n'avez absolument rien à craindre de moi, mon chaton. Nous pouvons poursuivre cette relation épistolaire sans autres menaces de mort car au final, la Sicilienne que je suis, pense que si je poursuis dans cette voie, je vais réellement manquer de finesse. Et vous avez tout à fait raison, je ne suis pas le monstre de cruauté que je prétends être. Preuve étant que j'ai pris la plume pour converser avec vous, au lieu de vous mépriser. Ma bonté me perdra.

    Vous achever ? Vous pourrez toujours compter sur moi et je vais me permettre de refuser le paiement de mes gages, parce que je convoite quelque chose de plus intéressant. Nous en avons déjà parlé. Je veux votre parfumerie et si vous m'avez signifié votre refus, je me permets de remettre ce sujet sur le tapis car je pense que la dernière fois que nous en avons parlé, j'ai mal exposé mes idées. Votre boutique restera à vous officiellement. La Spiritu Sanguis ne mettra pas dans le nez dans vos affaires mais cependant, elle pourra, si vous le désirez, assurer la protection de votre établissement en échange d'une petite somme que nous pourrons négocier. Si vous avez besoin de service, comme de mettre un éventuel concurrent hors course, nous pouvons toujours arranger cela. Pensez à l'avenir de vos enfants, parce que je pense qu'ils seront les héritiers légitimes de cette boutique et même si la Spiritu seront les "Protecteurs" de cet établissement, la gestion de la Parfumerie leur reviendra. Nous nous chargerons de veiller sur eux. Voyez en la Spiritu des sortes de créanciers.

    Je n'ai pas non plus oublié cette soirée où je me suis faite passer pour catin pour vous duper. Oui, nous étions que nous. Un homme et une femme, qui ont franchi la brèche de la muraille de la vie qui nous séparait. J'avoue que ces moments d'insouciance se font rares ces temps-ci.

    Je vous remercie de vos conseils, mon boiteux mais je vais me permettre de ne pas les écouter, car même si vous dîtes que Lyson et Serguei n'auront aucun mal à me mettre en pièce, Corleone ne recule jamais devant le danger. Se faire mettre en pièce fait partie de mon travail et au-delà de mon travail, mon sang coulé réclame vengeance. Cerbère, ne l'oubliez pas, est le Gardien de l'Enfer et a condamné les portes du Paradis en Franche-Comté, ce ne sont pas des paroles en l'air. Serguei et Lyson ne me font pas peur, Seigneur de Courchaton, l'un d'eux m'a vaincu physiquement une fois mais tout le monde le sait, mes talents ne sont pas dans le domaine du combat. C'est même, pour l'instant, mon point faible mais chaque jour où je vis, je m'améliore à ce niveau-là. Dès que je serais remise, ils auront un avant-goût de mes talents et... Ho mais j'espère que vous m'en voudrez pas de vous faire des cachoteries car vous allez le découvrir par vous-même. Je note par ailleurs que vous semblez être inquiet de mon état de santé, est-ce que vous ne me cacheriez pas quelque chose ?

    Ce qui me frappe en lisant votre lettre, Seigneur de Courchaton, c'est que j'ai parfois l'impression que vous usez d'un ton paternaliste envers moi pour me rabaisser et d'autres fois, celui d'un homme mélancolique qui se remémore notre soirée passée dans la Parfumerie. J'en déduis que vous commencez à avoir une certaine affection envers moi, est-ce que je me trompe ? La question est de savoir, si vous m'aimez comme votre fille bien que nous n'avons pas un grand écart d'âge, si vous m'aimez comme vous aimeriez une amie ou si vous convoitez l'une des nobles du crime d'un amour platonique. Vos mots assemblés dégage un sentiment d'oxymore et j'avoue que c'est troublant. Commenceriez-vous à avoir un faible pour une brigande, réformée, pilleuse et tueuse ? Voyons, Seigneur de Courchaton, ce n'est poinct sérieux.

    Affectueusement,


Ina Corleone.
Faict à Saint-Claude.




_________________
Beren




De nous, c’est-à-dire moi,
A vous, c’est-à-dire toi,


Chatounette,

J’ai presque envie de te dire tu. C’est fou, je suis plutôt homme à vouvoyer, bien que je louvoie souvent aux frontières du jeu, mais, avec toi, jeune demoiselle, le « tu » s’impose. Ce « tu » intime qui fait les serments, qui dénoue les faux-semblants. Ce « tu » là que d’aucuns méprisent, moi, je le chéris ; le tutoiement, c’est l’Art de lier les êtres en ôtant deux lettres à leur pronom, comme des signes superflus d’extériorité imperméable. On ne tutoie pas n’importe quoi, n’importe qui ; et tu n’es pas une inconnue, non, tu n’en es plus. Cependant, comme il faut le faire avec toutes les Dames, je t’offre, cette fois-ci , le loisir de refuser que je le fasse, pour qu’évidemment je fasse fi de cette déclinaison, et puisse en profiter tout à loisir, dans mes prochains plis.

Ainsi donc, vous acceptez d’être mon bourreau, le jour venu. Fort bien. Il faudra que nous parlions des modalités de tout cela ; souvenez-vous que l’art d’un bourreau est d’ôter la vie sans ôter la dignité. Il va donc vous falloir trouver une autre façon de me tuer que de me noyer, me pendre ou m’éviscérer. Navré de vous causer cette peine. J’insiste, pour les gages. Je vous avais promis de vous employer, et si je commande une tâche, je la paie, rubis sur l’ongle l’eut-il fallu. Néanmoins, la parfumerie est hors de considération. Je vous ai déjà répondu à ce sujet, et je ne reviendrai pas sur mes mots passés. La parfumerie est à moi, et le restera, et si tel était le prix de ma mort, alors, je me dois de vous dire que ma vie vaut bien moins que mon Art. Je n’ai besoin ni de créanciers, ni de « protecteurs » pour ma boutique, et encore moins pour mes enfants. Et puis…Cessez donc de parler au nom de votre… groupuscule, et ayez l’audace, rien qu’une fois, de parler pour vous.

Vous parlez de liberté, depuis que je vous connais. Vous parlez d’être libre de ses choix, de ses désirs, et pourtant, quand vous songez à ce que vous voudriez, vous imaginez l’accomplissement de vos désirs pour votre groupe. Alors, pour vous, la liberté est effacement ? La liberté, c’est faire passer le désir des autres avant le sien ? J’ai des gens, qui font passer mes désirs avant les leurs. Et moi, je me satisfais de la situation, sous le prétexte que mon fief, Courchaton, vit bien si je vis bien, puisque je redistribue une partie de mes richesses. Quelle différence, alors ? Vous êtes le serf d’une engeance qui se flatte d’être libre. Foutaises que cela. Vous vivez votre vie par procuration, devant votre poste d’observation*. Je vous rappelle que vous êtes blessée, en convalescence, et que vous ne faites absolument rien pour vous engager dans cet espèce de combat pour la liberté qui n’en est pas un. Je vous vois d’ici, déjà… Levée sans réveil, avec le soleil ; sans bruit, sans angoisse, la journée se passe. Repas solitaires, en point de repère ; l’auberge si nette qu’elle en est suspecte, comme tous ces endroits où l’on ne vit pas. Agnesina… Les vôtres ont cédé, perdu la bagarre ; les nôtres ont gagné, c’est leur territoire. Tout va, tout fonctionne, sans but, sans pourquoi. Aux saisons politiques, rien n’est aussi court que l’espoir. Et les rêves et désirs sont si sages, possibles ; sans cri, sans délire, sans inadmissible. D’hiver en automne, il n’est ni fièvre ni froid ; aux immuables choses, rien n’est changement. Bilan sans mystère d’actions sans lumière : l’échec ; tout est vain. Croire qu’on peut défier les lois universelles pour défendre un idéal qui n’est que chimère, ce n’est qu’hypocrisie. Savez-vous que le terme est religieux ? Le mot vient du théâtre ; « hypokritês », en grec, signifie « acteur, comédien ». J’assiste, spectateur involontaire et blasé, au grand spectacle, au quiproquo majeur, depuis quelques semaines. Je ne paierai pas pour ma place, j’en suis désolé.

Ma chère enfant, je ne voudrais user d’un ton paternaliste à votre égard. Il est vrai que je nourris une certaine tendresse à votre endroit, je ne le cacherai pas, sans toutefois vous donner la satisfaction de la définir tout-à-fait. Si, selon vous, je vous rabaisse, vous devriez songer à ce que vous avez l’audace d’écrire à mon propos. Vous m’avez déjà par le passé désigné comme grabataire, malgré le fait que je sois encore loin de la fleur de l’âge. Vous vous plaisez à déblatérer sur ma jambe, et à me décrire comme impuissant. Je commence à m’interroger sur vos motivations envers moi, pour que la teneur de mes prouesses ou de mes non-exploits vous fascine à ce point. Je n’ai aucun souci physique, ce qui se passe sous mes braies est pour le moins normal, je vous remercie de vous en inquiéter, mais tout va bien de ce côté-là. Excepté ma blessure, cela va de soi. Je vous laisse vous amuser à l’imaginer purulente ou pestilentielle, si cela vous chante, ou vous enchante, même. Ce sera au moins quelque chose que vous n’aurez pas « vraiment » à inventer. Ah, Ina, je songe à vous, souvent.

J’ai même fait la liste de ce qu’on ne sera plus, quand vous partirez**. Car vous partirez, n’est-ce pas ; comme toutes celles qui ont un jour compté, et comptent depuis à un homme esseulé, et un peu perdu de solitude. Je cultive des tulipes, vous l’ai-je déjà dit ? Les fleurs sont mes plus fidèles compagnes ; elles s’épanouissent de ma main, puis s’éclipsent quelques mois et reviennent chaque année. Comme une mer de pétales, au rivage de mes doigts, caressant leur pulpe de leur chair veloutée ; c’est tout un art, cultiver. Oui, c’est tout un art. J’y ai davantage de talent qu’avec les femmes, je vous l’accorde ; mes plus beaux souvenirs féminins m’ont toujours échappé. Je suis un homme de passage, mais pas comme vous le croyez. Des passantes endormies dans mes bras, que je n’aimerai jamais***… C’est, à ce qu’on dit, ce qui habite mes nuits, et c’est erroné. Ca n’a jamais été moi le passant ; j’ai toujours été le passé.

Cette lettre peut vous surprendre, mais sait-on, peut-être pas****. Les précédentes ont convoyé, à ce que je comprends de la lecture de vos réponses successives, leur lot de surprises. Pourquoi ne pas continuer ? Je ressasse en effet, cette soirée passée, au feu de ma mémoire. Quelques braises échappées, des cendres d’un moment si loin déjà. Etait-ce mai, novembre, ici ou là ? Je ne me souviens que d’un mur immense, en forme de voile ; mais nous étions ensemble, ensemble, nous l’avons franchi*****. Pensiez-vous que géantes, ces murailles****** de mailles, nous garderaient de ce que nous sommes ? Bâties de pierres et de sang, plus hautes que les batailles, défiant le poids des ans, tous vos voiles d’apparence ne sauraient tromper le souvenir que j’ai de cette soirée à la parfumerie. Vous en souvenez-vous ? Nous étions fous, oui deux fous… Nous vivions du temps, de son air, arrogants comme sont les amants, et gardons l’orgueil ordinaire du « nous deux, c’est différent ». Tout nous semblait normal, une rencontre comme un bal… Les jolies danses sont rares, on l’apprend plus tard. Oh, nous devrions revivre cela, un de ces jours. Sûr, il y aurait des fantômes et des décors à réveiller. Vous me raconteriez qui sont vos rois, vos royaumes, mais je ne voudrais, moi, que savoir si nous aurions vécu la même histoire. Et vos gestes, y reboire… Mes parfums, ton regard ; ce doux miroir où j’aimerais nous revoir.

Agnesina, je voudrais vous revoir. Et pas par hasard.


Tendrement,










*La vie par procuration, JJG, remaniée tout au long du 3ème paragraphe.
**Quand tu danses, JJG.
*** Et si tu n’existais pas, Dassin.
****Je voudrais vous revoir, JJG, remaniée tout au long du paragraphe.
***** Ensemble, JJG, remaniée.
***** Les murailles, JJG, remaniée.

_________________
Agnesina_temperance
Citation:
A vous, Beren de Courchaton,
De moi, Ina Corleone.

    Mon chaton,

    Avant le temps des chants des oiseaux et des fleurs, l'orage gronde. Je suis en colère, Seigneur de Courchaton, le savez-vous ? Figurez-vous alors que je choyais ma nouvelle arme, des gardes sont venus me chercher dans ma forge et qu'ils m'ont amenés en prison aux frais de l'Artois ? Vous n'êtes qu'un piètre avocat, parce que comble de l'ironie. Ma famille et les membres de la Spiritu Sanguis ont tous été relaxés sauf moi et ma sœur. Je vous déteste, parce que vous êtes au final comme tous les hommes, vous faîtes des promesses, miroiter les belles et après, elles sont déçues.

    Pourtant, il semblerait que vous savez parler aux femmes. Si je ne suis pas une de ces jouvencelles qui rougissent à la lecture des mots couchés par un homme, je dois vous confesser que les vôtres ne m'ont pas laissés indifférentes. N'allez pas vous imaginer que j'ai rougi ou encore même, mâchouiller mes cheveux, mais il est plaisant de constater qu'un homme comme vous sache manier les mots et arrive, ne serait-ce qu'un instant à me faire rêver. Vous êtes comme le doux vent d'un air d'été qui vient flotter sur ma joue. La folie me guette car ma raison ne cesse de me dire qu'il est préférable que je ne continue pas cette conversation épistolaire avec vous, car l'homme à qui appartient mes pensées ne supporterait pas le contenu de nos échanges. De plus, nous devrions être des ennemis et cependant, ce jour, je n'ai plus aucune intention belliqueuse à votre égard. Parce que vous n'êtes pas l'ennemi que j'aimerais abattre car même si mon être réclame vengeance pour l'offense qui m'a été faite ainsi qu'à ceux de ma famille, vous n'êtes pas celui dont la mort apaisera l'envie de châtiment contre la Franche-Comté. Je vous autorise donc à me tutoyer mais ne me demandez pas de vous rendre la pareille, j'aime vous savoir inaccessible pour l'instant. Le « vous» a son charme, ne croyez-vous pas ?

    Vous avez raison, je ne me sens pas concernée par cette guerre. Je ne la comprends pas et par conséquent, comme puis-je prétendre me battre pour cette cause ? Que la Franche-Comté raconte à qui veut l'entendre qu'elle va éradiquer tous les brigands, me fait sourire car elle place la barre bien trop haute, même si le Roy de France leur viendra peut-être en soutien. Les couronnés peuvent déclarer ce qu'ils veulent, leur parole ne vaut rien, parce qu'entre ce qu'ils ont envie de faire et ce qu'ils peuvent faire, il y'a une grande marge. Ils oublient que leurs adversaires peuvent être des gens malins, qui connaissent chaque recoin des ruelles et surtout, qui ont appris à survivre. Ils nous offrent une belle mascarade, mon chaton. J'ai des rêves mais aujourd'hui, je sais que cela reste de l'utopie. Alors pourquoi, est-ce que je parle au nom de mon groupuscule et ait décidé de me sacrifier pour eux, m'effaçant par la même occasion ? Vous avez des enfants, Beren. Si vos serfs vous servent car vous les payez, qu'en est-il de vos enfants ? Ne seriez-vous pas prêt à parler pour eux ? Ne seriez-vous pas prêt à prendre une lame pour les préserver ? Ne seriez-vous, finalement, pas prêt à vous effacer pour faire passer leur désir pour les vôtres ? Si je vous ai écrit plus haut que je ne suis pas concernée par cette guerre, c'est pure mensonge, parce que la Franche-Comté a causé du tord aux miens et je désire plus que tout, la vengeance. Mon sang bouillonne quand je pense à ceux que j'ai envie de tuer pour les miens. Fallait pas toucher au petit Malédic. Il ne fallait pas toucher à ma famille. Il ne fallait pas me mettre en colère. Pensez-vous qu'il est grave que la femme que je suis disparaisse pour se transformer en Courroux ?

    Je suis libre, Beren. Je n'ai pas besoin de m'agenouiller devant un Duc pour avoir droit à la gamelle qu'il voudra bien me tendre. Si j'ai envie d'une chemise, je vais la voler et je n'ai pas besoin d'aller travailler à la mine ou aux champs pour l'avoir. Je vais vous faire une confidence. Des gens, des paysans se sont occupés de moi. Ils étaient de braves gens et plus honnêtes qu'eux, vous n'en trouverez pas. Ils n'ont jamais volés, ne serait-ce qu'un œuf, alors que nous étions très pauvres. Ils travaillaient dans leurs champs et parfois, ils allaient travaillés à la mine. Qu'est-ce qu'ils en ont tirés ? Rien. Aucune reconnaissance. Ils ont finis par mourir en crachant du sang des poumons. Ils sont morts comme s'ils étaient des chiens. Je ne veux plus vivre dans la pauvreté et encore moins, servir ces culs-gras de noble. Ne croyez pas que je sois devenue ce que je suis par rébellion. Des autres villageois et des paysans, je ne ressens qu'indifférence envers eux. Après tout, ils n'hésiteraient pas à me balancer aux maréchaux s'ils en avaient l'occasion. Donc je Prends et je conchie tout le monde. J'ai même conscience que je joue avec le feu en vous écrivant mais que serait la vie, si nous prenions pas de risque et j'aime vous écrire.

    Je sais que vous ne désirez pas finir votre vie en étant noyer ou encore, ébouillanté. Sommes-nous vraiment obligé de discuter des modalités de votre mort ? Ne pouvez-vous pas, tout simplement, faire confiance à la tueuse que je suis ? Parce que je vous vois déjà me demander une mort douce alors que vous avez mille façon de mourir et s'il y'a des difficultés, je prends toujours mes précautions pour que la tâche soit toujours exécutée d'une façon ou d'une autre. Pourquoi, Seigneur de Courchaton, m'avez-vous choisi ?

    J'assume mes propos sur votre jambe et sur votre supposé impuissance, mais je désirais avant tout vous blesser. Après tout, vos lettres à vous, n'étaient pas des mots d'amour à notre encontre et vous avez été fort grossier. Je me demande, encore aujourd'hui, comment un homme si charmant que vous puisse écrire de telles choses... Vous partez peut-être du principe qu'en prenant les devants pour blesser quelqu'un, vous vous protégez car vous voulez cacher qu'en réalité, vous êtes un homme doux mais c'est une erreur. Faîtes de votre personnalité, votre arme car elle peut être sans nulle doute, dangereuse. Vous comme moi, ne sommes pas fait pour attaquer les gens de front mais nous avons une bonne connaissance d'eux si nous arrivons à dépasser nos plaies de l'âme. Vous avez les bourrins qui sont la force brut et il y'a nous qui arrivons à passer dans les failles.

    Je partirai, oui. Si je restais, vous seriez malheureux car vous serez devenus l'ami, le protecteur d'une brigande et l'on vous détestera pour cela. De plus, vous avez votre fiancée. Je vous trahirai car ma vie est sur les chemins mais je reviendrai. Si vous me permettez, vous dîtes cultiver les fleurs et lorsque nous nous reverrons, me permettrez-vous de planter une plante qui me correspondrait ? Ainsi, je serais toujours un peu présente près de vous ? Je me souviens de notre soirée en la parfumerie et je suis souvent nostalgique. Je vous en veux, parce que vous me devenez indispensable et ça me fait peur. Des soirées, comme Cette Nuit-là où les masques n'étaient plus, nous en vivrons d'autres. Nous serons deux personnes insouciantes, oubliant les blessures de notre passé et seul le présent comptera. Nos deux âmes devaient se rencontrer, parce que vous vous sentez seul et mon âme est en peine en ce moment.

    C'est une promesse, Beren.
    Nous nous reverrons.

    Affectueusement,


Ina Corleone.

_________________
See the RP information
Copyright © JDWorks, Corbeaunoir & Elissa Ka | Update notes | Support us | 2008 - 2024
Special thanks to our amazing translators : Dunpeal (EN, PT), Eriti (IT), Azureus (FI)