Xalta
Dont par le doux rapport les âmes assorties
s'attachent l'une à l'autre et se laissent piquer.
Par ces "je ne sais quoi" qu'on ne peut expliquer.
(Corneille)
Sur le chemin qui la ramène à Montargis, elle fait une étape dans la ville de Conflans. Ceux qui l'accompagnent sont aussi présents que les fantômes qui hantent les villes champenoises. Si deux d'entre eux réagissent, elle ne devrait plus les compter ce soir dans les rangs d'un groupe qu'elle a formé. Groupe qui devait rejoindre l'armée des Lames, mais armée qui a fait demi-tour dépitée. Si l'on peut se réjouir de rentrer sains et saufs chez soi, de retrouver famille et amis, il y a quand même ce goût âcre et amer d'avoir été berné, d'avoir mobilisé des énergies pour une vaine promenade dans la campagne champenoise.
Néanmoins, elle aura eu une satisfaction, celle d'avoir pu partager le temps d'une escale la couche de son époux. Il faut dire qu'ils étaient séparés depuis plus d'un mois, ils ne s'étaient revus depuis leur mariage, un brin rocambolesque. Mariage qu'ils n'avaient pas célébré par une longue et éreintante nuit de noce puisqu'elle avait décidé de se venger à sa façon du tour qu'il lui avait joué. Mais avec le recul, si elle se montrait honnête: la plus punie de sa vengeance, fut certainement elle. Avant d'être une femme aimante, elle était surtout une amante. Tellement plus simple d'offrir son corps que son cur.
Elle contemplait donc par la vitre d'une fenêtre étroite d'une taverne de Conflans la rue qui s'offre à elle, peu de passage, peu d'animation. Jusqu'à ses narines lui parvient les arômes d'un vin chaud. Boisson qu'elle boit exclusivement en hiver, par goût et par souvenir. Un léger sourire ourle malgré tout ses lèvres. Elle n'est pas déprimée, ni triste malgré la morosité ambiante. Elle a des projets et pour la première fois depuis des années, elle va penser à elle, à sa famille. Elle va enfin concrétiser ses envies de voyages loin du Domaine Royal, loin d'Orléans.
Mais il lui faut prévenir quelques personnes de son prochain départ, et plus particulièrement une personne: Lui. Pourquoi ? Parce qu'elle s'est attachée au jeune homme, parce qu'elle est liée à lui d'une façon que les mots peinent à décrire. Elle lui a fait le serment d'être toujours là pour lui, quoiqu'il advienne, où qu'elle soit. Elle a bien des défauts mais elle tient toujours ses engagements. Bien souvent elle a repensé à cette journée, cette longue promenade qu'ils avaient fait dans les jardins d'Amboise, après qu'elle eu officié le mariage de Lexhor et d'Ellesya.
Elle ôte le gants de cuir , dévoilant un autre gant de tissu, elle attrape la plume qui repose près d'un vélin déplié. Elle prend de la main gauche le bol fumant, boit une gorgée ou deux, le replace sur la table, enfin elle entreprend la rédaction de sa lettre.
s'attachent l'une à l'autre et se laissent piquer.
Par ces "je ne sais quoi" qu'on ne peut expliquer.
(Corneille)
Sur le chemin qui la ramène à Montargis, elle fait une étape dans la ville de Conflans. Ceux qui l'accompagnent sont aussi présents que les fantômes qui hantent les villes champenoises. Si deux d'entre eux réagissent, elle ne devrait plus les compter ce soir dans les rangs d'un groupe qu'elle a formé. Groupe qui devait rejoindre l'armée des Lames, mais armée qui a fait demi-tour dépitée. Si l'on peut se réjouir de rentrer sains et saufs chez soi, de retrouver famille et amis, il y a quand même ce goût âcre et amer d'avoir été berné, d'avoir mobilisé des énergies pour une vaine promenade dans la campagne champenoise.
Néanmoins, elle aura eu une satisfaction, celle d'avoir pu partager le temps d'une escale la couche de son époux. Il faut dire qu'ils étaient séparés depuis plus d'un mois, ils ne s'étaient revus depuis leur mariage, un brin rocambolesque. Mariage qu'ils n'avaient pas célébré par une longue et éreintante nuit de noce puisqu'elle avait décidé de se venger à sa façon du tour qu'il lui avait joué. Mais avec le recul, si elle se montrait honnête: la plus punie de sa vengeance, fut certainement elle. Avant d'être une femme aimante, elle était surtout une amante. Tellement plus simple d'offrir son corps que son cur.
Elle contemplait donc par la vitre d'une fenêtre étroite d'une taverne de Conflans la rue qui s'offre à elle, peu de passage, peu d'animation. Jusqu'à ses narines lui parvient les arômes d'un vin chaud. Boisson qu'elle boit exclusivement en hiver, par goût et par souvenir. Un léger sourire ourle malgré tout ses lèvres. Elle n'est pas déprimée, ni triste malgré la morosité ambiante. Elle a des projets et pour la première fois depuis des années, elle va penser à elle, à sa famille. Elle va enfin concrétiser ses envies de voyages loin du Domaine Royal, loin d'Orléans.
Mais il lui faut prévenir quelques personnes de son prochain départ, et plus particulièrement une personne: Lui. Pourquoi ? Parce qu'elle s'est attachée au jeune homme, parce qu'elle est liée à lui d'une façon que les mots peinent à décrire. Elle lui a fait le serment d'être toujours là pour lui, quoiqu'il advienne, où qu'elle soit. Elle a bien des défauts mais elle tient toujours ses engagements. Bien souvent elle a repensé à cette journée, cette longue promenade qu'ils avaient fait dans les jardins d'Amboise, après qu'elle eu officié le mariage de Lexhor et d'Ellesya.
Elle ôte le gants de cuir , dévoilant un autre gant de tissu, elle attrape la plume qui repose près d'un vélin déplié. Elle prend de la main gauche le bol fumant, boit une gorgée ou deux, le replace sur la table, enfin elle entreprend la rédaction de sa lettre.
Citation:
Conflans Lès Sens, neuf novembre mil quatre cent soixante et un.
Cher Feodor,
Nous nous sommes croisés trop brièvement lors des joutes qui se déroulèrent à Reims. J'aurai aimé prendre plus amplement de vos nouvelles et c'est ce que cette missive, qui je l'espère vous trouvera en bonne santé, va me permettre de faire.
Mais ce n'est pas l'unique but de ce courrier. Je dois aussi vous annoncer mon départ prochain pour un long voyage qui, si tout se déroule comme convenu, devrait me mener jusqu'en Guyenne. Je vais enfin mettre en oeuvre des projets que je n'ai que trop repoussés. Me trouvant toujours des raisons pour demeurer en Orléans. Des raisons qui, aujourd'hui, s'amenuisent.
Dites moi: où en êtes-vous dans le cheminement de votre propre pardon ?
Êtes-vous toujours hanté ou bien cela s'estompe-t-il un peu ? Je sais que vous avez traversé des deuils, j'aurai aimé être plus présente mais la pudeur _ peut-être_ m'en a empêché.
Bien que très bientôt des centaines de lieues nous sépareront, je voulais vous affirmer encore que je serais toujours présente pour vous, et bien qu'éloignés vous occuperez toujours mes pensées et mes prières. Je vous écrirai plus longuement une prochaine fois.
Que le Très Haut vous garde!
Exaltation Lablanche d'A.
Cher Feodor,
Nous nous sommes croisés trop brièvement lors des joutes qui se déroulèrent à Reims. J'aurai aimé prendre plus amplement de vos nouvelles et c'est ce que cette missive, qui je l'espère vous trouvera en bonne santé, va me permettre de faire.
Mais ce n'est pas l'unique but de ce courrier. Je dois aussi vous annoncer mon départ prochain pour un long voyage qui, si tout se déroule comme convenu, devrait me mener jusqu'en Guyenne. Je vais enfin mettre en oeuvre des projets que je n'ai que trop repoussés. Me trouvant toujours des raisons pour demeurer en Orléans. Des raisons qui, aujourd'hui, s'amenuisent.
Dites moi: où en êtes-vous dans le cheminement de votre propre pardon ?
Êtes-vous toujours hanté ou bien cela s'estompe-t-il un peu ? Je sais que vous avez traversé des deuils, j'aurai aimé être plus présente mais la pudeur _ peut-être_ m'en a empêché.
Bien que très bientôt des centaines de lieues nous sépareront, je voulais vous affirmer encore que je serais toujours présente pour vous, et bien qu'éloignés vous occuperez toujours mes pensées et mes prières. Je vous écrirai plus longuement une prochaine fois.
Que le Très Haut vous garde!
Exaltation Lablanche d'A.
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