Lililith
Citation de Jules Renard - « Ou pas » rajouté par mes soins.
Il a fallu que le gamin envoyé par la Corleone visite toutes les caves disponibles à partir de la rue pour retrouver l’Étoile. Il a fallu qu’il la réveille et qu’il s’expose à sa colère d’être éveillée en plein rêve. Et qu’il lui délivre le message de la Zia, l’oreille tremblante, évitant de regarder les carcasses de rats jonchant le sol. Quand quelque chose vient lui frôler les jambes, il se retient de hurler de peur. Il se demande ce qu’elle fait là. Aux trois mots lâchés, l’enfant hoche la tête pour lui faire signe qu’elle a compris. De toutes manières, il sait où ils se trouvent en ce moment. Alors l’enfant se glisse par là où il était entré, et Lili attend quelques instants, avant de prendre le même chemin. Dans la rue, elle s’étire. La Corleone s’éveille au monde à nouveau. Certains passants la regardent d’un air effrayé, d’autres l’ignorent complètement.
Que s’est-il passé pendant qu’elle dormait, cachée dans une cave de Poligny ? Elle aimerait savoir, mais la Minusculissime hésite à demander aux Grands. Elle préfère se débrouiller seule. Où sont les siens ? Elle se souvient d’un ordre donné, qu’ils devaient se cacher. Mais le temps a passé, et elle suppose que maintenant ils peuvent se montrer au grand jour. Alors la Mini-Corleone fait quelques pas sur les pavés, sautille sur place, se dérouille les membres.
L’enfant s’est réveillée à Poligny, et attend le retour du gamin pour savoir ce qu’elle doit faire. Elle s’assied donc contre le mur qui l’a cachée pendant tout ce temps, sort un os de rat qu’elle a taillé, et commence à graver le pavé d’un dessin.
Un chien à trois têtes.
***
Le gamin est revenu, avec un papier. Elle n'a pas bougé, elle reste là, près du chien, son chat roux blotti contre elle. Lentement elle relève la tête vers lui, tout en caressant Pandou d'une main. Elle tend sa main libre en le regardant fixement. Elle attend qu'il soit parti pour lire ce qui est marqué. Elle reconnaît l'écriture, c'est celle de la Zia. Évidemment, c'est elle qui a envoyé le garçon.
La Minusculissime lit sans trop y croire. Deux noms ressortent. Elle se souvient de ce soir-là. Elle était en taverne avec les deux sœurs quand 'Joy était entrée. L'Étoile était restée silencieuse tandis que la Grande expliquait aux deux autres Corleone ce qu'elle leur voulait. Et la fillette avait eu l'impression de vivre un moment important. Une passation de pouvoir qu'elle avait gardé pour elle, comme touchée d'avoir eu le droit d'y assister.
Mais 'Joy leur signifie qu'elle part. Elle part après la mort de Laell. Et ce « tant pis » lui semble laisser plus transparaître que ces deux simples mots. L'enfant le vit comme un échec : elle n'a pas réussi, une fois de plus, à faire ce qu'elle s'était fixé comme objectif : garder le clan en un morceau. Mais c'est difficile, avec cette Faucheuse qui prend les vies comme on cueille des pâquerettes.
Relevant la tête, Lili hurle. Elle laisse sa voix rejaillir comme on donnerait un coup de poignard, pour se venger ou pour s'apaiser. Les passants sursautent, la regardent enfin, l'évitent. Elle fait peur, avec son corps noirci, ses yeux qui semblent à moitié aveugles de n'avoir plus vu la lumière, son visage fou d'être restée aussi longtemps dans cette cave. Il fallait se cacher, elle avait obéi. Et était restée dissimulée aux yeux de tous pendant un mois.
Se relevant, elle prend une décision.
Il faut qu'elle aille au Nord.
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Il a fallu que le gamin envoyé par la Corleone visite toutes les caves disponibles à partir de la rue pour retrouver l’Étoile. Il a fallu qu’il la réveille et qu’il s’expose à sa colère d’être éveillée en plein rêve. Et qu’il lui délivre le message de la Zia, l’oreille tremblante, évitant de regarder les carcasses de rats jonchant le sol. Quand quelque chose vient lui frôler les jambes, il se retient de hurler de peur. Il se demande ce qu’elle fait là. Aux trois mots lâchés, l’enfant hoche la tête pour lui faire signe qu’elle a compris. De toutes manières, il sait où ils se trouvent en ce moment. Alors l’enfant se glisse par là où il était entré, et Lili attend quelques instants, avant de prendre le même chemin. Dans la rue, elle s’étire. La Corleone s’éveille au monde à nouveau. Certains passants la regardent d’un air effrayé, d’autres l’ignorent complètement.
Que s’est-il passé pendant qu’elle dormait, cachée dans une cave de Poligny ? Elle aimerait savoir, mais la Minusculissime hésite à demander aux Grands. Elle préfère se débrouiller seule. Où sont les siens ? Elle se souvient d’un ordre donné, qu’ils devaient se cacher. Mais le temps a passé, et elle suppose que maintenant ils peuvent se montrer au grand jour. Alors la Mini-Corleone fait quelques pas sur les pavés, sautille sur place, se dérouille les membres.
L’enfant s’est réveillée à Poligny, et attend le retour du gamin pour savoir ce qu’elle doit faire. Elle s’assied donc contre le mur qui l’a cachée pendant tout ce temps, sort un os de rat qu’elle a taillé, et commence à graver le pavé d’un dessin.
Un chien à trois têtes.
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Le gamin est revenu, avec un papier. Elle n'a pas bougé, elle reste là, près du chien, son chat roux blotti contre elle. Lentement elle relève la tête vers lui, tout en caressant Pandou d'une main. Elle tend sa main libre en le regardant fixement. Elle attend qu'il soit parti pour lire ce qui est marqué. Elle reconnaît l'écriture, c'est celle de la Zia. Évidemment, c'est elle qui a envoyé le garçon.
La Minusculissime lit sans trop y croire. Deux noms ressortent. Elle se souvient de ce soir-là. Elle était en taverne avec les deux sœurs quand 'Joy était entrée. L'Étoile était restée silencieuse tandis que la Grande expliquait aux deux autres Corleone ce qu'elle leur voulait. Et la fillette avait eu l'impression de vivre un moment important. Une passation de pouvoir qu'elle avait gardé pour elle, comme touchée d'avoir eu le droit d'y assister.
Mais 'Joy leur signifie qu'elle part. Elle part après la mort de Laell. Et ce « tant pis » lui semble laisser plus transparaître que ces deux simples mots. L'enfant le vit comme un échec : elle n'a pas réussi, une fois de plus, à faire ce qu'elle s'était fixé comme objectif : garder le clan en un morceau. Mais c'est difficile, avec cette Faucheuse qui prend les vies comme on cueille des pâquerettes.
Relevant la tête, Lili hurle. Elle laisse sa voix rejaillir comme on donnerait un coup de poignard, pour se venger ou pour s'apaiser. Les passants sursautent, la regardent enfin, l'évitent. Elle fait peur, avec son corps noirci, ses yeux qui semblent à moitié aveugles de n'avoir plus vu la lumière, son visage fou d'être restée aussi longtemps dans cette cave. Il fallait se cacher, elle avait obéi. Et était restée dissimulée aux yeux de tous pendant un mois.
Se relevant, elle prend une décision.
Il faut qu'elle aille au Nord.
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