Isaure.beaumont
Citation:
Mon fils ira à la chasse avec moi. Il n'y a rien à voir en temps et en heure... Telle est ma décision. Gardez-vous de la discuter. Sachez que je n'ai plus guère de patience oui, je le prendrai sans doute avec moi en juillet, pour quelques jours. De vos bras, il est temps qu'il se sépare, il ne faudrait pas que ce petit garçon soit dans vos jupes jusqu'à son émancipation, je vous l"ai assez laissé, d'autant que votre voyage aura duré plus que de raison. Je suis sur le chemin du retour, avec un jeune orphelin que j'ai pris en charge durant votre absence. Je l'ai connu à l'office du dimanche, où il venait régulièrement. Ne vous étonnez donc pas de sa présence en les murs du Manoir, ni avec moi à la chasse. Trouvez-vous une occupation en juillet donc, loin de mes yeux. Je ne tiens plus à vous avoir dans mon giron, du moins tant qu'il le faudra. Je sais que vous êtes allée voir Finn. Votre mariage est compté avant que je ne trouve le moyen de mettre au jour tous vos petits mensonges...
Judas Gabryel Von Frayner.
Judas Gabryel Von Frayner.
Elle avait pourtant maîtrisé ses mots. Elle avait pourtant gommé du mieux qu'elle le pouvait son agacement et son aversion pour son époux. Elle avait assoupli ses mots, quand sa seule envie était pourtant de l'insulter. Elle avait voulu se montrer docile, lui rappelant simplement qu'Amadeus était bien trop jeune pour être éloigné trop longtemps d'elle. Elle aurait dû lui rappeler qu'on enlève un fils à sa mère seulement lorsqu'il a atteint l'âge de raison, et non pas dès ses premières années d'existence. Mais à quoi cela lui servirait, puisque dorénavant il savait...
Les quelques semaines loin de son époux lui avait permis de retrouver ses esprits, de consolider ses remparts que le seigneur de Courceriers avait ébranlé de ses poings rageurs quelques mois plus tôt. En reprenant la route pour Verneuil, elle s'était sentie confiante, prête à le supporter de nouveau, mais elle ignorait alors que la rumeur avérée de sa présence en Bretagne était arrivée jusqu'aux oreilles de Judas
Aussi, quand Verneuil se profila, le cur d'Isaure se serra. Elle fut un instant tentée d'ordonner qu'on fasse demi-tour, qu'elle puisse fuir avec son fils, autour duquel l'étreinte se resserra, loin de cet époux qui, dès leurs vux échangés, n'avait eu de cesse de la menacer d'une répudiation. Mais plus que l'annulation de leur mariage, c'était la menace proférée par Judas quelques mois plus tôt qui terrifiait la jeune femme: sa désobéissance lui vaudrait le retrait définitif de son fils. Pourtant, fuir ne serait que folie. Elle s'imaginait qu'en le faisant, Judas n'aurait de cesse de la poursuivre et qu'en agissant ainsi, elle s'attirait en plus de celles de son époux, les foudres du Très-Haut. Elle se devait donc d'affronter son terrible geôlier.
Pourtant, aussi aristotélicienne était-elle, alors qu'ils passaient les portes de Verneuil et qu'elle baisait le front de son fils, elle fit la silencieuse promesse au Très-Haut, qu'avant la nouvelle année, elle serait veuve.
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