Arrivée au campement de l'ordre royal de la dame blanche à l'écu vert
Escapade bucolique ou : le calme avant la tempête Aengus le Libertin arrivé un matin de printemps à Mimizan recherchait alors la compagnie des Dames... quel que fut leur position... sociale, j'entends... Pour le reste...
Mais cet Aengus là s'était retiré sans grand fracas pour laisser la place à Aengus O'Sullivan, on ne peut plus épris de sa Sirène.
La transformation s'était opérée sans douleur, avec une certaine jubilation même. Je redécouvrais l'amour.. celui qui fait déplacer les montagnes... celui qui rend l'homme bon et prêt à donner sa vie pour l'être aimé.
Nous arrivions donc au campement des Dames Blanches... en temps ordinaire, l'ex-libertin eût été aux anges au milieu de ces Amazones. Mais pour moi, elles étaient des femmes combattant pour une cause... des soldats. De leur féminité, je ne percevais que leurs rires et leur beauté farouche... Visages tendus, l'épée battant leur hanche..; cliquetis d'armes, hennissement de chevaux... odeur âcre des feux de camp et du métal.
On était bien loin des salons mondains et des réceptions de la Vicomtesse de Trucmuche. Et cela n'était pas pour me déplaire, moi qui avais toujours évité les mondanités et les ronds-de-jambes, leur préférant de loin l'ambiance des tavernes ou des champs de bataille.
Si bien que mon immersion dans ce monde étrange de guerrières divines ne me troubla guère outre mesure... de l'admiration plutôt et, je l'avoue, une certaine exaltation à l'idée de sortir ma bâtarde du fourreau.
J'avais remarqué les regards discrets mais scrutateurs que me lançait parfois ma compagne... je m'appliquai donc à lui montrer un visage serein, confiant et plein de tendresse et d'amour.
De fait, je n'avais pas peur.
Orléans.
Je n'y avais jamais mis les pieds. Je suivis donc Azzera, confiant. Après quelques détours nous sommes en vue des Quartiers des Dames Blanches.
Signe de la main de Azz qui nous guide. Court arrêt avant d'entrer, au pas, dans l'enceinte du camp.
- Oh hé! ... Nous voici !... Visages qui se tournent vers nous... souriants, accueillants malgré la gravite de l'heure. Peu d'hommes, mais tous en armes... Sans doute quelques Licorneux en transit avant de regagner leurs positions, car je distingue leurs manteaux de ci de là.
Notre groupe s'égaille après un petit signe de main. Ma Sirène et moi sommes guidés vers nos quartiers... Une apprentie prend nos montures en charge... elle me regarde étrangement... elle doit se dire : " Ce gueux n'a même pas les moyens de s'offrir une selle... "
L'idée me fait sourire... j'ai ces harnachements en sainte horreur... Azzera le sait... mes pensées croisent les siennes... Sourires complices tandis que nous entrons sous la tente pour nous y installer.
Elle me regarde.. un battement de cils, une moue gracieuse des lèvres pour m'envoyer un baiser et la voilà sortie me laissant le soin de nous installer au mieux.
Accord tacite, parfait. Elle sait que je m'en tirerai sans elle. De mon côté, je sais qu'elle doit prendre contact avec ses Soeurs et que, si ma présence est tolérée, je n'ai aucun pouvoir dans cet Ordre.
Une fois notre tente rangée, je m'installe sur le lit, les mains croisées derrière la nuque et me prends à rêver... Serein...
Je ne vois pas le temps passer que déjà ma Sirène est à mes côtés... Souriante, un petit air malicieux illumine son doux visage de femme-enfant.
Sans un mot, elle me prtend la main et m'invite à la suivre..; au passage, elle largue ses bottes avec désinvolture dans le fond de l'abri de toile.
Jambes et pieds nus, elle m'entraîne... se met soudain à courir, riant doucement sans me lâcher la main... Force m'est de la suivre en riant avec elle.
Nous laissons le Campement derrière nous pour pénétrer dans un magnifique sous-bois ombragé, frais, rieur... empli de chants d'oiseaux... Un endroit enchanteur.. magique... à deux pas des cliquetis des armes que nous ne percevons bientôt plus.
Au centre de cette clairière, sur un tapis de mousse ma pelisse forme une espèce de couche sauvage... La coquine, elle a dû s'en emparer car je l'avais laissée sur mon cheval... un oubli... mais qui n'avait pas échappé à ma douce compagne.
Elle s'arrête, le visage tendu vers le soleil qui perce la ramure, reins cambrés, offerte à la douce caresse de l'astre du jour... je vois ses petons s'incruster délicatement dans la mousse.
Puis, lentement elle se tourne vers moi... visage épanoui, lèvres entr'ouvertes... je vois sa poitrine palpiter sous les assauts de son coeur battant... est-ce la course. ? Est-ce l'émotion ?... sans doute les deux.
Son regard n'est pas une invitation. C'est une supplique... Ses narines frémissent, ses mains se tendent vers moi presque contre sa volonté consciente...
Comment résister ?...
L'instant d'après, nos corps enlacés, effeuillés par nos mains fébriles, se retrouvent sur la pelisse.
Longtemps nous rendrons un hommage vibrant à Eros qui nous laissera pantelants... Ivres de bonheur et comblés d'amour.
Elle se blottit sur ma poitrine encore parcourue de frissons et ferme ses paupières délicates, comme pour garder prisonnière l'image de nos étreintes et de nos regards enflammés.
Tendres caresse d'après l'amour... destinées cette fois à apaiser, rassurer l'autre de sa présence.. s'assurer que l'on a point rêvé... s'assurer de la réalité de l'autre... Et enfin, somnoler, lascifs et indolents...
- Aengus O'Sullivan... Je t'aime... Sans doute la première fois que ma Sirène me tutoie avec cette tendresse infinie dans le regard...
J'ai enfin ramené mon tartan sur nos corps frissonnants et la tiens enlacée sur moi... baignant dans la chaleur de notre passion pour un moment apaisée. Deux âmes et deux corps unis dans le même élan d'amour s'apaisent doucement baignant dans un océan de tendresse.
Le temps semble s'arrêter, mais... làs... Bientôt... trop tôt, la réalité... l'autre réalité est là. Et nous le savons tous deux.
En soupirant, nous nous séparons à contre coeur. Silencieusement nous nous rhabillons sans nous quitter du regard... avec la même tendresse qu'au début de nos ébats... Sans honte et sans pudeur... comme pour garder au fond de nos prunelles l'image de nos corps jusqu'à la dernière seconde.
Et c'est bras dessus - bras dessous que, la pelisse sur les épaules, nous rentrons au campement... des myriades d'étoiles dans les yeux.
Quelques unes de ses Soeurs nous regardent arriver, un sourire malicieux aux lèvres.. Mais laquelle d'entre elle a lancé :
- Alors les amoureux ?... Un p'tit tour en ville ?... On va écumer les tavernes d'Orléans... Regards complices ... petit nez mutin, retroussé... ma Sirène me regarde les yeux brillants, faisant oui de la tête en secouant ses boucles d'ébène avec une frimousse de petite fille qui ouvre ses cadeaux...
Encore une fois... Comment refuser ?...