[Ne perdons rien du passé. Ce n'est qu'avec le passé qu'on fait l'avenir ]*
La nuit était noire. L'une de ces nuits sans lune, où il ne faisait pas bon errer dans les rues.
Bahia stationnait à Vannes depuis un moment déjà. Les nouvelles vont vite apparemment.
C'est sur le port de la Rabine qu'on le trouva, marchant d'un pas lent, les bottes claquant sur le pavé, avec l'insouciance parfois enfantine qu'on lui connaissait. Seul avec soi-même, le naturel a vite fait de reprendre le dessus.
Un vieux barbu se mit en travers de sa route, solide sur ses jambes, le regard noir.
Les yeux du blond se firent méfiants et c'est la main sur le pommeau de l'épée, qu'il accueillit le vieillard.
Bahia de Ménéac ?
Lui-même. Que lui voulez-vous ?
J'ai un message pour vous.
De qui donc?
L'homme ne semblait pas pressé de lui fournir l'information, et lâcha un sourire, bien plus signifiant qu'il n'y paraissait.
Il ne fallut pas un dessin à Ménéac pour comprendre, et sa main chercha machinalement quelques écus afin de monnayer l'information.
Réduisant la distance, un pied devant l'autre, les écus à la main, peu apeuré par l'homme qui lui faisait face. Sa silhouette, les traits de son visage se faisaient désormais de plus en plus précis.
Imposant, certes, mais surtout bourru, d'un certain âge qui plus est, et par là même probablement peu agile au combat.
Il réitéra la question, impatient, peu enclin à ces messages si tardifs, souvent annonciateurs de mauvaises nouvelles, pour que l'on prenne le soin de lui délivrer au beau milieu de la nuit.
De qui donc ?
Alors que chaque mot est soigneusement appuyé, son regard ne quittant pas le sien, frôlant la menace, il glisse les piécettes, dans la main qui se tendait, à son approche.
Une certaine Leyah.
Le sourire s'étire sur le visage du vieux. L'enflure, laisser un tel suspens, c'est juste pas tolérable.
Bahia lui arrache alors le message des mains, et sans plus tarder, défait la cire du rouleau de parchemin avant d'entamer la lecture. Quelques lignes plus loin, il lève le nez et s'aperçoit que le type est toujours là. P'tain, casse toi, c'est compliqué à comprendre ?
La même main effleure encore sa poche, pour la vider de tout son contenu.
Voilà, pour vous ! Vous pouvez disposer ! Merci.
Le remercier. Rhaaaa, tu parles, voleur vas.
Et c'est dans les rues de Vannes qu'il poursuit sa lecture. Il sassoit sur une marche et s'empresse de lui répondre.
Citation:A Vous Leyah de Varenne Salmo Salar.
De Nous Bahia de Ménéac,
Chère Leyah,
Si vous saviez comme j'ai plaisir à lire vos lignes, même si j'avoue avoir craint une mauvaise, voire funeste nouvelle vous concernant.
Vos mots me touchent, et je dois bien admettre que vous manquez à plus de gens que vous ne le pensez.
Quant à mes causes, elles sont, comme bien d'autres, mal comprises, je crois. Mais qu'importe. Vous me connaissez bien, il est vrai, et je n'ai pas changé depuis tout ce temps, un peu vieilli peut-être.
Mais qui ne fait pas l'épreuve du temps ?
Il faut croire que les batailles de la vie nous endurcissent, bien que cette maxime ne soit pas toujours vraie.
Mais, parlons peu, parlons bien.
Je vous remercie de me transmettre cette lettre. Je connais effectivement Yris, et je ne manquerai pas de lui transmettre. Vous pouvez compter sur moi.
Promettez-moi juste, dans un lieu si peu accueillant que celui que vous fréquentez en ce moment, de faire attention à vous, afin que ces mots ne soient pas les derniers que nous échangions.
Bien à vous
Bahia
Il évitera les messagers peu consciencieux en ce milieu de nuit, c'est donc son plus fidèle pigeon qui sera chargé de la mission de lui remettre son message.
Sans plus attendre, il se dirigea vers la taverne, qui lui servait de refuge ces derniers temps.
La porte de l'établissement est poussée, avant de la chercher des yeux. Elle est là, un soulagement se fait sentir quand il s'aperçoit qu'elle n'est pas encore partie. Se postant devant elle, il lâcha simplement un...Noz' Yris. J'ai... Respiration.J'ai un message pour toi.Et de lui tendre la lettre de son père.*Anatole France_________________