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[RP] Pigeon Vole

Millerose


Vicomté de Gorbio, sise en Nice, Savoie, ...

"- Etes-vous certaine, Amélie, que ce soit cet homme ?"
"- Absolument Vicomtesse ! Il a une grande réputation. Ma cousine travaille pour une duchesse françoise et elle ne jure que par ses produits. De plus, il parait qu'il est bel homme et ... célibataire !"


Un silence se fit. Le visage de la Vicomtesse se ferma légèrement alors qu'elle trempait sa plume dans l'encrier et qu'elle se mit à écrire sur le papier.

"- Peu importe qu'il soit beau et célibataire, ce n'est pas pour cela que je lui écris et vous le savez bien. Et puis, qu'est-ce qu'un Vicomte du Royaume de France ferait d'une vicomtesse du Saint Empire Germanique ? Non, oubliez ça. On ne tombe pas amoureux ainsi. "
"- Pardon, Vicomtesse, je ne voulais pas ... "
"- Ce n'est rien Amélie. Merci de vos renseignements. Vous pouvez vous retirer. Et faites venir le coursier en partant. "


Parler d'amour lui faisait toujours mal. La jeune femme avait perdu l'homme qu'elle avait aimé si intensément, le père de sa petite Amédiane. Aujourd'hui, elle ne croyait plus du tout trouver un homme charmant et bon. Sa confiance avait perdu toute consistance en les hommes. Sa vie était bien mieux ainsi. Et avec le duc de Nice et ses manigances pour lui nuire, elle n'avait nulle envie de risquer leur sécurité pour quelques sentiments. Pourtant, cette solitude la pesait énormément.

Citation:
Au Vicomte d'Ambrières, Monseigneur Dimaro di Campiglio,
De la Vicomtesse de Gorbio, Millerose di Leostilla,

Monseigneur, nous prenons la plume ce jour suite aux conseils d'une couturière de notre connaissance. Il s'avère que votre réputation vous précède, faisant le tour du Royaume de France ainsi que du Saint-Empire. L'on nous a fait grand compliment de vos œuvres en matière de dentelles et de linges.

Nous avons le plaisir d'avoir nos terres non loin de la mer et nous cherchons une tenue appropriée pour profiter pleinement de cette opportunité. Si, par bonheur, vous étiez capable de nous fournir une parure à notre convenance pour cet été, quel que soit le prix, nous vous serions grés de prendre commande. D'autres commandes pourraient succéder à celle-ci si nous étions amené à faire affaire.

Notre coursier est à votre disposition pour toute communication. Il saura se monter digne et discret.

Mes hommages les plus sincères.
Que le Très-Haut veille sur votre personne et votre famille

Millerose di Leostilla

Fait à Gorbio, le 28 Avril 1462.





Le scel apposé, le coursier attendait déjà à la porte depuis quelques minutes. La jeune femme avait mis son temps pour écrire ces quelques phrases anodines et commerciales. C'était bien la première fois qu'elle se sentait presque gênée d'écrire une lettre de ce type. Elle avait pesé chaque mot, évitant tout doute possible, aucune familiarité, aucun doute sur ses intentions. Les mots de la gouvernante lui revenaient pourtant régulièrement en tête, ce qui avait perturbé son écrit.

La vicomtesse se leva et remit le pli au jeune homme.

"- Porte ceci dans le Maine, au Vicomte d'Ambrières, Monseigneur Dimaro. Tu devrais le trouver sans trop de difficulté. Réponds à ses questions mais sans en dire trop non plus. "
"- Bien ma Dame. "


Elle garda un regard inquiet sur le jeune homme qui venait de partir rapidement. Millerose rejoignit la fenêtre pour le voir quitter les écuries et partir au grand galop. Elle ne pouvait plus revenir en arrière.

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Dimaro


Vicomté d'Ambrières, Château des Campiglio, Maine.

Qu'elle est la raison d'un tel voyage ?
Ma maitresse souhaiterai commercer.
Converser de quoi?
Je ne sais guère, tout est dans le pli.
Un pli de Germanie dites -vous ?
Oui monsieur, du Saint-Empire. Pour Monseigneur.
Ha c'est votre seigneur aussi ?
Non monsieur.
Une Cousine Germaine?
Non monsieur.
Bah diantre pourquoi alors ... Bref suivez moi, je vais vous le chercher.

Et voilà un Simon, le valet filiforme, pressant le pas vers le salon d'accueil suivit du page à l'accent germain. Tandis qu'ils évoluaient à travers le dédalle du hall, les yeux du servant parcouraient les pièces attenantes dans l'espoir d'y voir surgir une tête blonde, mais en vain.

Après avoir questionné succinctement le messager, il le fit patienté dans la pièces où trônait en cohabitation les trophées de joutes, les blasons et les portraits familiaux. De longs divans en velours rouge brodés d'or formait un cercle refermant une table basse en marbre blanc du style Levan III. On pouvait admirer accroché au mur, Dimaro sur un bel étalon l'épée à la main face à une ordre de Breton. De l'autre coté le même blond dans de beaux habits d'apparat, une canne a tête d'aigle dans la main droite et l'autre posé sur sa poche de gilet, le menton haut et le sourire aux lèvres, entouré de deux enfants tout aussi joyeux. Et cætera.

Après quelque instant à courir à travers le château, Simon trouva enfin le Vicomte sur la terrasse arrière qui menait aux jardins, occupé à peindre avec ses fils, un verre d'un liquide ambré non loin de la toile.

Ralentissant le pas, essayant de reprendre son souffle, le valet moustachu interpella le Vicomte avec toute la distance qu'il pu prendre.


Maitre, Pardonnez-moi de vous déranger mais ...
Chuuuute !

Perplexe pendant quelques secondes, observant les trois Campiglio s'acharnant sur une grande toile blanche parsemer de tache, le valet retenta.

Monseigneur, permettez moi d'insister mais ...
Chuuut Simon, je te permet pas !

Quelque peu agacé, le valet sorti sa dernière carte, sachant certain mots plus audibles que d'autre dans l'oreille du Vicomte. Une sorte de code d'importance capillaire lui avait-on dit, quelque chose comme ça ...

Votre Blondissime Altesse, un page est arrivé de l'Est pour vous !
Maaa ché Ostia ... voilà ! J'ai raté mon bouquet de rose par votre faute. J'espère que cela en vaut la peine.

Le valet jeta un rapide coup d'œil sur ce qui ressemblait a une grosse framboise à tige et ne releva point sur la toile pour reprendre au sujet de l'instant.

Un page est arrivé et attend dans le salon d'honneur avec une lettre du Saint-Empire. Soit disant une germaine mais pas votre cousine qui souhaite converser avec vous !
Mais que diable raconte-tu ! Bon, garde les enfants, je reviens.

Dimaro retira sa tunique de peintre et fila à grand pas, tandis que Simon se retournait vers les deux petits monstres au sourire taquin, les mains pleines de peinture.

Il ne mit pas très longtemps à se positionner sous le porche du salon et surprendre le page d'une voix haute.


Bonjour et bienvenu à Ambrières. Je suis le Vicomte de ces lieux. Vous avez une lettre pour moi m'a t-on dit.

Le jeune homme lui tendit le billet en silence, cacheté d'un écusson qu'il ne connaissait pas encore. Le blond se posa sur le guéridon avoisinant et descella soigneusement la lettre avant de la lire.

Il fut d'abord curieux, puis honoré et enfin étonné de voir un tel intérêt. Sortant un vélin vierge et un encrier, il pris sa plume et composa la réponse.


Dimaro a écrit:

De nous, Louis-Josèphe Dimaro di Campiglio, Vicomte d'Ambrières,
A vous, Millerose di Leostilla, Vicomtesse de Gorbio,

Salutation.

Tout d'abord, permettez-moi de vous signifier le plaisir qui est mien quand à la lecture de vos mots et surtout, de constater votre bon goût pour les coutures d'excellence. Ce sera un réel plaisir de vous confectionner tel vêtement.

Je ne doute guère que mes tissus soient aussi raffinés qu'il se le dit, auprès des Princes et des Empereurs que vous puissiez côtoyer au sein de l'Empire Germanique. Nonobstant, toute perfection n'est absolu qu'avec l'hôte qui l'habille. A n'en pas douter que le Vicomte de Gorbio en sera ravi !

Cependant, je ne peux gager votre messager de constater les mesures qu'il vous conviendrait. C'est pourquoi je reste à votre disposition pour ce faire. Vous invitant volontiers à Ambrières si l'air de la Mayenne vous sied. Pouvant même déplacer mes voitures dès que faire ce pourra, à la Capitale ou si vous le souhaitez, dans les contrées de Savoie.

Vous remerciant pour votre sollicitude.
Veuillez recevoir, Vicomtesse di Leostilla, mes respectueuses salutations.

Blondissimement,


Fait à Ambrières, le 28 avril 1462.



Le blond apposa son scelle sur la cire tiède avant de tendre la lettre vers le page accompagné d'un sourire et d'une pièce pour le remerciement. Il l'observa partir au trot, toujours aussi intrigué...

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Millerose


Les jours se succèdent et se ressemblent, Gorbio, quelque part sur les Terres ...

Cela faisait plusieurs jours que le coursier était parti. Les premières heures, la Vicomtesse avait été envahie de regrets. A mesure que le temps passait, elle espérait presque ne pas avoir de réponse du Vicomte d'Ambrières ou un refus. Après tout, une telle commande, si vague, d'une cliente aussi lointaine, ça n'avait aucun sens. La certitude d'un refus était devenue une évidence dans l'esprit de la jeune femme. Et chaque jour qui passait rendait l'attente du retour du coursier plus intense.

La chaleur avait largement pris place dans la saison. On était loin du froid éternel de la Savoie montagnarde. Gorbio était aux abords de l'Italie et garantissait des vents tièdes et une température provençale. Rien d'étonnant à ce que Millerose ait choisi ce fief pour retraite après un mandat pénible. Ses origines provençales l'avaient poussée à se retirer non loin de son lieu de naissance. Sans doute espérait-elle quelque part retrouver ses origines tout en ne perdant pas de vue la Savoie où avait grandi feu son époux. Un beau compromis pour une éternelle déchirée.

Aujourd'hui, la Vicomtesse visitait ses terres accompagnées de quelques soldats pour sa sécurité. Amédiane l'accompagnait comme toujours. Jamais la jeune femme n'aurait voulu être séparé de sa fille pendant plusieurs heures. Il faisait chaud et radieux. Un jour agréable pour changer. La voiture s'arrêta près de la côte, non loin de la Baie merveilleuse comme l'avait nommé la vicomtesse. C'était un lieu magnifique bordé de mer et de roches. La végétation y était abondante et promettait un mur naturel laissant ainsi toute intimité à la vicomtesse.

La mère et la fille passèrent la matinée près de l'eau, à jouir de l'agréable et de l'essentiel. Mais rapidement, les affaires de gestion rattrapèrent la jeune femme qui reprit le chemin du château, construit dans les hauteurs. Il était d'ailleurs une place forte dominante sur la mer et ses canaux, répondant ainsi aux risques d'invasion par ses terres. Sur la route du retour, la rencontre avec un cavalier fit stopper la voiture et l'homme exténué fut invité à monter au côté de la vicomtesse. Le coursier était de retour. La main tremblante de la vicomtesse prit le pli scellé d'Ambrières et l'ouvrit sans attendre. Son regard parcourut les lignes écrites finement et avec beaucoup de raffinement. Ses joues rosirent légèrement, montrant une immense gêne chez la jeune femme.

"- Bien ! "

Ce fut la seule acclamation qui sortit de sa bouche. Le reste du voyage se fit dans le silence. Le coursier ne demanda rien et se contenta finalement de bien se reposer. Le voyage avait été long jusque dans la Maine. Il démangeait pourtant Millerose de l'interroger sur l'homme qu'était le Vicomte. Mais finalement, une idée saugrenue l'avait envahie en lisant le message. Se rendre dans le Maine ! Pourquoi pas ... Ainsi, le soir même, malles minimalistes et dispositions furent prises pour un voyage des plus inattendus.

Long est le chemin vers l'Eternel.

Elle n'avait écrit aucune réponse, envoyé aucun coursier, ni pigeon. Sur un coup de tête, la jeune femme avait pris la route avec quelques hommes, sa fille, la nourrice de sa fille. Elle avait laissé la gestion des terres à Amélie. Après plusieurs semaines de périples, le Vicomté d'Ambrières apparaissait à la jeune femme. Elle fut annoncé à la garde.

"- La Vicomtesse de Gorbio !"

Nerveuse, la jeune femme descendit de la voiture. Après tout, pour les mesures, il valait mieux être sur place, non ?

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Dimaro


Ambrières. Ou d'une entrée fracassante.


C'était un jour comme un autre. Même si aucun jour n'était monotone avec l'excentrique Roy des Blonds qui possédait ces terres d'Ambrières. Et aujourd'hui, il était question d'entrainement pour les Joutes à venir. Le Vicomte avait fait forger une nouvelle armure pour cet effet, plus légère, plus maniable, mais plus solide à l'impacte. Le forgeron lui avait même certifié que l'alliage utiliser renvoyait le coup à son adversaire ... Une histoire de vague ondulé et de carbone. Pour lui, le plus important fut l'écusson brodé sur le plastron. Celui des Campiglio, avec un aigle de sang imposant surmonté des trois ancolies bleutés, symbole de ses origines par delà les Alpes.

Il était en pleine concentration, la lance emmanché au bras, tapant des talons au même moment qu'un crie d'appel retentit au bord de la lice, couvrant difficilement les hennissements de l'étalon.


MAAiiiiitreeuuu !

Cette distraction de trop, même pour une fraction de seconde, suffit à faire tourner légèrement le tronc du blond et la lance rebondit sur la cible, déséquilibrant Dimaro de son destrier.

MAII... Simon, son valet, se stoppa net. Ca sentait pas bon. Déjà que son maitre pouvait être dur avec lui, si en plus il jugeait que son intervention l'avait fait chuter, s'en était finit de lui.

Votre blondissime grâce ... Dit-il sur un ton inquiet en s'approchant par petit pas à tâtons

Le squelette de fer se mit a gesticuler sur le dos, les membres partant dans tout les sens, sous un hurlement étouffé.


POCUMA TOU HAA HUM CHAK GRAA

Simon se risqua malgré sa peur à relever la visière du casque, libérant ainsi plus audiblement la colère du Vicomte.

Ostia! Tu vas vraiment finir avec les porcs du village toi ! Relève moi que je te corrige !

Maitre, je dois vous dire que...

RELEVE MOI ! Plus vite que ça !

Inspirant profondément, le Valet empoigna le bras du Campiglio pour le relever. Il ne fallut pas attendre deux secondes pour que le cliquetis du fer retentisse au coin des oreilles du servant filiforme, roué de coup, donné tant bien que mal avec une telle prison métallique. Et comme tout homme qui se respecte, assumant ses erreurs... Simon pris la fuite. Bientôt poursuivit par un blond au pas fracassant.

Maa ché, viens là ! j'en ai pas finit avec toi!

Après avoir parcouru une centaine de mettre ainsi, arrivant sur le chemin principal qui longe le château, le cœur central de la cour d'entrée se profila non loin. Là, un carrosse patientait. Dimaro ne reconnu pas de suite les armoiries, vu il y a quelques semaines sur une lettre venue d'ailleurs. Mais cela lui suffit à arrêter sa course folle.

Il héla son valet, qui se retourna, gardant tout de même une certaine distance avec le blond. Mesure de sécurité oblige.


Maitre, c'est la Vicomtesse de Gorbio.

Pourquoi ne l’as-tu pas dit de suite !

J'ai essayé de vous prévenir depuis la Lice !

On règlera cela plus tard soit en sûr ! Dit-il en se dirigeant vers la voiture aux couleurs de Gorbio.

Mais Maitre, vous êtes …

Suffit ! Va préparer de quoi nous désaltérer !

… Vous êtes encore en armure... Souffla le servant, assez bas pour que Dimaro ne puisse l’entendre … C’était une juste vengeance.

Il fit quelque pas, sans se rendre compte du fracas qu’il trainait, habitué au poids de la boite de fer depuis sa course.

Au détour du cortège, il vit le visage de celle qui, quelques jours plutôt, lui avait transmis cette lettre des plus surprenante. Ce fut d’autant plus étonnant qu’icelle fusse blonde et d‘une belle prestance. C’est toujours plus agréable de travailler sur un modèles qui nous plait se dit le Campiglio.

Arrivée à la hauteur des arrivants, il percuta : Le blond portait encore l’armure ! Et qui dit armure, dit complication pour la bienséance … Qu’à cela ne tienne, rien n’était impossible pour lui. Et après avoir retiré son casque, sous lequel il étouffait, il laissa croitre un sourire sur son visage.


La bienvenu à vous tous sur les terres d’Ambrières. Je suis le propriétaire de ce magnifique château, Louis-Josèphe Dimaro di Campiglio.

Il fit révérence avec la plus grande peine, moulinant le bras à l’excès comme à son habitude, mais cette fois-ci, dans un charivari assourdissant.

C’est un plaisir de vous voir Vicomtesse, même si je ne m’attendais pas à une si prompte arrivée. Le voyage ne fut pas trop long j’espère ?

Et il invita ses convives imprévu à monter les marches menant à la cour d'honneur intérieure, ses domestiques prenant le relai auprès des chevaux et des gardes.

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Millerose
Navrée pour le délais, j'ai été absente quelques jours.




Des bruits métalliques montèrent à la charge vers la vicomtesse, alors postée en contemplation des lieux superbes. La blonde jeune femme portait sa fille dans ses bras. Par réflexe, elle protégea Amédiane enveloppée dans un linge brodé de dentelles roses. Quelques pas à reculons face à l'homme en armure, la Leostilla s'attendait au pire. Était-ce donc l'influence étendue du duc de Nice qui avait été averti de son voyage et qui tentait encore une fois de la faire mourir ? Ou était-ce le fils ambitieux, baron de Châteauneuf-la-Vieille, qui avait organisé ce terrible affrontement ? D'obscures réalités vinrent assombrir cette si belle journée où la belle avait mis tant d'espérance.

Millerose n'était pas guerrière pour un sous. Si elle avait les réflexes de survie de toute personne née sur cette terre, jamais elle n'avait été douée pour les armes. Elle était capable d'élaborer des stratégies militaires et de découvrir les traitres à la Savoie mais jamais elle n'aurait pu vaincre au front. Pour cela, elle se sentait faible. Malgré son désir de protéger son enfant contre les malversations de sa famille d'alliance, la jeune femme se retrouvait sans aucun moyen face à la puissance d'un homme armé. La crainte que cette fois-ci, elle périrait de la lame d'un ennemi inconnu la foudroya sur place.

Puis soudain, l'accalmie. L'homme ôta son casque et s'inclina, non sans se présenter. Le visage légèrement en sueur sous le masque de métal, les cheveux blonds collés à sa peau, sa prestance et son accent si particulier ameuta un autre tumulte dans l'esprit de la jeune femme. Troublée, la vicomtesse observa un court silence, tentant désespérément de reprendre ses esprits.

Je ... oui ... Veuillez nous pardonner, Monseigneur. Nous sommes Millerose di Leostilla, Vicomtesse de Gorbio. Et nous ... euh ... enfin, nous vous présentons mille excuses d'ainsi venir sans nous être annoncé. Votre lettre nous invitait et ... oui ... Nous avons décidé subitement d'y répondre en nous présentant icelieu.

Rares furent les instants où la jeune veuve perdait ses moyens. Il lui semblait que cela faisait longtemps qu'un homme ne lui avait plus fait un tel effet. S'efforçant de reprendre ses esprits, Millerose confia l'enfant à sa nourrice restée en retrait et exécuta une gracieuse révérence.

Nous comprenons votre désarroi et nous en excusons. Le voyage fut agréable et surtout dépaysant, nous vous en remercions. C'est la première fois que nous quittons les terres impériales pour nous rendre si loin dans le Royaume de France. C'est très différent de ce que nous avons pu imaginer. Il est vrai que nos contacts se limitaient à nos plus proches voisins, la Bourgogne, le Lyonnais ou le Languedoc. Notre Provence natale montre un tout autre visage.

Parler. C'était le seul moyen pour faire passer son émoi d'être là. La jeune femme évita soigneusement de se retrouver en position de malaise face au Vicomte.

Acceptez-vous que nous restions ? Du moins pour la nuit ? Nos chevaux sont fatigués et nous vous promettons de ne pas vous retenir longtemps. Nous vous savons homme fort occupé par vos charges. Nous nous tiendrons à votre entière disposition ... pour cette commande, oui ... pour la commande.

Ses pommettes prirent une tête rosée. Venait-elle d'avouer s'être renseigné sur lui ? Subtilement. La jeune femme évita soigneusement de croiser le regard du vicomte afin qu'il ne puisse deviner l'émotion qui se dégageait de ses dernières paroles.



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Dimaro



Pour le coup, le blondinet avait fait impression avec son armure se dit-il. Bonne, pas sur avec tout ce fracas, mais une impression tout de même. Il ne pu retenir un petit sourire taquin en voyant la damoiselle provençale rosir au fur et à mesure de sa révérence. Malgré son affublement de circonstance, le Campiglio n’en perdait pas pour autant les manières de bienséances qu’on lui avait inculquées depuis son enfance.

Pour une personne qui de premier abord semblait fragile comme bon nombre de femme de ce monde, ou l’apparence est un mensonge, Dimaro fut persuadé du caractère d’icelle. Il en avait fallut de la volonté pour traversé toute la France uniquement pour quelques vêtements, de renommés soient-ils. Pis, encore plus d’audace à travers les dangers qui persistent sur la route. Mais surtout du courage pour venir faire face à l’énergumène extravaguant que fut le Roy des blonds, sans pour autant démérité d’aplomb.

Ca parole délicate lui donnait une contre partie agréable, il fallait se l’avouer. Curieux qu’il fut, le Vicomte sonda une certaine part de mystère le défiant dans sa routine. Avant de reprendre le file du sujet, cette fameuse commande. Il l'écouta de nouveau, avant de couper cour à un quelconque malaise, essayant l'humour pour détendre cette rencontre inattendu et quelque peu différente de ce que voudrais les us et la coutume.


Ma ché, bien sur, prenez le temps d’apprécier les lieux, vous êtes ici chez vous.
Mais attention, bon nombre de voyageur finissent par ne plus repartir !


Il se surprit lui-même à défaillir par cette boutade un peu maladroite. Se reprenant de suite, il retrouva l’assurance souriante qu’on lui accordait.

Du moins, si vous souhaitez prendre congé icelieu le temps qu’il vous faudra pour repartir sereinement.
Il faut également du repos à vos équidés, un tel voyage fatigue j’en conviendrai.
Et outre votre commande, profiter donc du paysage et des spécialités locales.


Il vit son valet revenir, prêt à servir.

Ha Simon enfin ! Si vous le permettez, Simon va vous guider à vos appartements et vous indiquer le grand salon.
Vous m’excuserez, je crains ne pouvoir vous recevoir dans cette tenu plus longtemps.
Nous parlerons de cette commande plus en profondeur autour d’un rafraichissement si vous le voulez bien.


Des servants prirent les valises et Simon servit de guide aux demoiselles, tandis que le blond mira un instant la Vicomtesse di Leostilla avant de s’en aller dans un nouveau boucan métallique vers son armurerie.


Désolé également pour le retard.

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Millerose


Une révérence au seigneur des lieux et la jeune femme suivit le domestique vers l'intérieur du château. Les lieux étaient vastes et somptueux, comme généralement les territoires des nobles. Pourtant, le château était bien différent de celui de Gorbio, qui ressemblait plus à une place forte qu'à un château d'aisance. L'horizon ne montrait aucune montagne, aucune dénivellation mais d'immenses terres et forêts à perte de vue. Gorbio surplombait la vallée et les puissants contreforts couverts de forêts et de roches. Millerose était bel et bien dépaysée.

Laissant à chacun le soin de prendre en charge ses malles et son carrosse, la jeune femme monta les marches qui permettaient de pénétrer dans le château-même. Elle se contentait de suivre, admirant les tableaux, le décors. Le valet désigna une chambre et une autre pour sa suite. Les malles déposées, les domestiques de la maison Compiglio se retirèrent pour laisse la vicomtesse seule avec sa nourrice et sa fille. S'adressant à Odette, la nourrisse, la jeune femme désigna une des malles présentes.

Installez ce qu'il faut pour Amédiane. Elle a besoin de dormir, le voyage a été si long. Au moins ici, elle est à l'abri.

S'approchant de la fenêtre qui donnait sur les jardins, la vicomtesse observa longuement un silence, laissant Odette s'occuper de tout. La fillette s'endormit sans attendre.

Ma Dame sera bien à l'abri ici aussi.

Avec son accent particulier, Odette veillait sur la petite tout en parlant doucement à sa maitresse.

Vous avez bien fait de partir, ma Dame, ne regrettez pas.

Oui, Odette. Mais je crains pour mes terres, même si je sais que le capitaine veille. Le duc de Nice n'abandonnera pas si facilement. Il faut que j'écrive à Octave ...

Un bureau se trouvait dans un coin de la pièce, avec vue sur le jardin par les immenses fenêtres. Millerose prit son nécessaire d'écriture, composé d'un encrier, d'une plume et de papiers, ainsi que de cire pour sceller la lettre. Elle alluma une bougie et commença à écrire après avoir installer le tout sur le bureau.

Citation:
Mon cher Octave,

Je suis partie dans le Maine, rendre visite au Vicomte d'Ambrières. Je l'ai brièvement rencontré mais il semble être un homme accueillant et gentil. Vous aviez raison, ici je me sens en sécurité. Pas de Marc Antoine di Leostilla pour tenter de me voler Amédiane. Je ne le supporterais, vous le savez bien.
Vous savez que vous êtes le bienvenu sur mes terres et le Capitaine vous aidera à vous cacher de lui, vous et votre amie, ainsi que tous ceux qui souhaiteront fuir le duc.

J'ai honte de partir ainsi me cacher, même si je justifie ce voyage pour acheter des tenues d'été auprès du Vicomte. Je ne pourrai me cacher bien longtemps ici, je le crains. J'espère pouvoir retarder notre départ le plus possible.
Vous allez rire ma foi, car le Vicomte m'a annoncé que ses visiteurs avaient souvent du mal à repartir. Rester ici. Pourrais-je seulement l'envisager pour le bien de ma fille ?
Amélie a fortement insisté sur le fait que le Vicomte était célibataire.
Et si je trouvais protection de cet homme ? Serait-il de taille à affronter le duc ? A me protéger de ses attaques ? Souvent je crains pour ma vie. Je doute qu'il ferait du mal à Amédiane mais s'il n'aurait aucune hésitation pour ma vie, comme pour la vôtre, vous qui êtes pourtant de son sang, ne pourrait-il par rage la faire tuer s'il ne peut l'avoir ?

Je tâcherai de vous écrire souvent. Vous me manquez mon ami. Je vous dois la vie, jamais je ne l'oublierai. J'aurais aimé vous avoir à mes côtés.

Que le Très-Haut veille sur vous tous.

Fait à Ambrières, le 3 juin 1462.





Prenant le bâton de cire verte, elle le fit fondre à la flamme de la bougie, en fit couler une goutte sur le pli fermé. Millerose retira son sceau de son doigt puis marqua la cire avant qu'elle ne refroidisse.
De l'autre côté de la lettre, la jeune femme écrivit une adresse et un nom qui n'était pas celui d'Octave. Il lui fallait faire attention, afin que le duc de Nice ne retrouve pas son cousin. Sa vie en dépendait. La jeune femme fit sonner la cloche et un domestique arriva quelques instants plus tard.

Pourriez-vous faire parvenir ce courrier dans l'Empire, en Savoie ?

Le domestique acquiesça et emporta le pli. Mais celui-ci ne partit pas immédiatement. La lettre fut amenée au Vicomte d'Ambrières avant d'être livré.

Je vais visiter les lieux, Odette. Veuillez bien sur Amédiane.

Quittant la chambre, cherchant son chemin dans les couloirs du château, Millerose descendit les escaliers pour se retrouver dans le hall. Malgré son statut, elle ne pouvait s'empêcher d'être méfiante et de se sentir mal à l'aise en ces lieux étrangers. La provençale évoluait lentement, ne voulant gêner les allées et venues des domestiques très occupés. Finalement, elle arriva vers la porte menant aux jardins où elle se glissa sans le moindre bruit. Le besoin de solitude reprenait vite le dessus. Elle se souvenait à regret de son premier fief, paisible. La seigneurie qu'elle avait choisi était éloignée, au creux même des montagnes où elle vivait solitaire. C'était avant qu'elle soit duchesse, alors qu'elle avait réussi à fuir, elle aussi, les tortures du duc de Nice. Ces pensées semblaient réveiller en elle les souffrances qu'elle avait subi et qui ne s'en iraient sans doute jamais.

Le parfum d'une rose la sortit de ses souvenirs cauchemardesques. Elle se pencha pour la cueillir.

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Dimaro




Ambrières - Les écuries

Aller du nerf encore un effort ! Hooohiisss .... Haa.

Et voilà la dernière cuissière extirpée de la jambe du Campiglio, non sans mal, qui dévêtis sa cuirasse de son torse en se laissant tomber sur un tas de paille. Tandis que sa monture grignotait la botte en question, le blond souffla d'épuisement face à son écuyer qui s'apprêtait à ranger minutieusement chaque éléments de l'armure.

Après un silence tinté de cliquetis, c'est au tour du valet de se présenter, une lettre à la main. Pressant les mesure de convenance dans un tel endroit, et depuis le temps qu'il côtoyait le Blond, cure des bienséance, il agita la lettre l'air suspicieux.


Maistre, je tiens là une lettre que La Vicomtesse s'apprêtait à envoyer.

Pourquoi m'enverrait-elle une lettre en ces murs?

Elle ne vous ai point destiné sire, d'où ma réquisition avant envoie. Il se peut que ce soit une manœuvre pour vous assassiner, au pire, vous rendre chauve !


A ces derniers mots, le blonds frissonna des racines capillaires et balaya d'un geste de la main l'idée saugrenue.

Que nenni voyons, ce doit être pour prévenir de son arrivé icelieu voyons. Je n'y vois rien d'inquiétant.

Votre Blondissime Altesse est que trop peu méfiant quand on sait que sa grandeur attise la convoitise. Cela me parait étrange une venu si prompte sans prévenir ... Ce n'est pas de coutume.

Et ce n'est ni d'us ni de coutume de contrôler les courriers de nos invités ! Pardi, si je m'étais conformé aux habitudes monotones que l'on nous impose je n'en serais pas là aujourd'hui.

Mais ...

Suffit tant de curiosité. Fait partir cette lettre sur le champ et que je ne t'y reprenne plus!


Sur ces mots assuré, le Vicomte se releva et fila en direction de ses appartements changer l'accoutrement qu'il lui restait pour des vêtements plus appropriés à la prestance de sa marque.



Ambrières - Au château - Le salon d'honneur

Le Campiglio, frais comme un poisson du matin, sans l'odeur de la mer bien sur, arriva dans le petit salon d'honneur ou siégeait trophée, blason et tableau. Une table basse et un attelage de canapés, confident et autres fauteuils tout de velours rouge et bleu brodé d'or prenaient place.

Il avait au passage indiquer à son valet de faire mander la Vicomtesse à venir le rejoindre pour un verre de thé ou autre afin de parler de sa commande.
Le temps d'attendre, faisait quelque pas sur les tapis aux couleurs de sa famille, s'orientant vers la clarté des grandes portes fenêtres donnant sur la terrasse arrière, il alla perdre son regard sur les jardins qui entourait celle-ci.

Quelque chose d'inhabituel dans le décore attira son attention et il migra son iris émeraude vers un amas de tissu et de dentelle aux couleurs provinciales qui se penchait aux colonnade de marbre blanc formant un garde corps avant la fleuraison estivale.

A en plus admirer, il reconnu là sa convive. Voilà qui rendait inutile la course de son valet. Et c'est non sans une pointe de taquinerie, plus fort que sa raison, qu'il se glissa à travers l'entrebâillure de la porte vitrée à pas de chat sur le dédalle de l'esplanade.


Ce sont des roses impériales!
Parait-il qu'elles sont croisées avec des fleurs de thé pour leur donner cette senteur et cette texture unique. Vous aimer les fleurs ?


[color=darkred]Il espérait que sa surprise avait fait son effet, un léger sourire bienveillant sur le visage.[/color]


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Millerose


Tout ce temps, cachée dans ses pensées et tout ce temps à ne jamais croire en rien, Millerose contemplait la rose. Ses pensées tentaient de la brouiller et la faire douter de sa présence en ces lieux. La voix du Vicomte la saisit au point qu'elle se redressa de surprise, se piquant sur les épines de la rose dans un "Aoutch" maladroit. Une goutte de sang perla sur le bout de son doigt, qu'elle porta naturellement à ses lèvres pour en effacer la trace.
Décontenancée, elle posa une regard désolé sur son hôte qui se trouvait à quelques pas d'elle.

Pardonnez-nous de notre audace, Monseigneur. Nous n'aurions pas dû tenter de cueillir cette rose. Elle était si belle et son parfum si envoutant.

Ses joues prenaient continuellement une teinte rosée en la présence de l'homme. Cette gêne constante, elle n'arrivait pas à la faire disparaitre. La jeune femme ressentait pour la seconde fois de sa vie une émotion toute particulière en présence d'un homme. Le vicomte avait quelque chose de beau et de tout aussi attirant que la rose. Était-ce parce qu'elle se sentait en sécurité en ces lieux ou parce qu'il avait accepté de l'accueillir ? Son besoin de trouver un refuge faussait peut-être les sentiments qu'elle ressentait.

Nous aimons les fleurs ...

Ses yeux quittèrent le visage du Vicomte pour se tourner vers les jardins grandioses d'Ambrières. Gorbio était plus rustique, plus terrienne. Ses plantes avaient des usages médicinales et les jardins se limitaient aux plantes supportant des chaleurs assez fortes. Les terres de la Vicomtesse touchait les frontières italiennes et provençales. Juchée sur un promontoire donnant un époustouflant paysage sur la mer et les vallées forestières, la jeune femme se sentait littéralement dépaysée dans le Maine.

Nous n'avons pas de roses à Gorbio. C'est très différent. Il faudra que vous veniez, un jour ...

Une invitation, une envie, un désir. La jeune femme évita encore une fois le regard du Vicomte dans une telle situation. Millerose se rendit compte qu'elle n'aurait pas dû parler ainsi, surtout que la situation avec le duc de Nice compromettait bien des moments de paix. Elle rectifia.

Ceci pour répondre à votre hospitalité, bien entendu. Nous devions parler affaire. Permettez-nous de soigner ceci et nous pourrons nous entretenir.

Oh Dieu, ce qu'elle avait envie de passer du temps avec lui. Pourtant la culpabilité l'envahissait toujours. La mort d'Amédée ne datait que d'une année, une si longue année de solitude et de misère. Et sa fille était là pour lui rappeler qu'il y a peu, elle aimait un autre homme avec qui elle avait fondé une famille, eut un enfant qu'il ne connaitrait jamais. Et cette enfant pourtant méritait un père. Une noble sans époux était tellement vulnérable et Millerose était en danger. Marc Antoine ne la lâcherait jamais, tant il était persuadé qu'elle était à l'origine de la mort de son époux. Et peut-être l'était-elle, indirectement, si elle n'avait pas été convoitée par un autre homme et si Amédée n'était pas tombé malade.

Sa robe se retrouvait tâchée du sang de son doigt.

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