Umbra
[1459, Couvent de Dunkerque]
Une religieuse pouponne une orpheline dans le reflet dun miroir. Ce dernier réfléchit un visage opalin aux traits fins, presque fragiles. Des boucles de jais se tordent dans tous les sens sous la dextérité de la nonne. Les sourcils sarquent puis se fronce étirant la peau parfaite. Deux grands onyx scintillent à léclat dun chandelier à proximité. Des larmes ourlent les longs cils. Quelques une séchappent du regard et dévalent des joues creuses et rosies. Le nez se plisse et renifle, dérangé par des picotements. Les lèvres se pinçent puis rougissent sur la morsure de dents blanches.
Ne pleurez donc pas, Ombeline. Vous êtes magnifique, mon enfant...
[1462, Auberge de Rodez]
Une plaque de verre brisé rejette en un coin limage de ce même faciès. A peine trois années se sont écoulées que le portrait est méconnaissable. La chevelure, en plus davoir poussé, a prématurément commencé à blanchir. Larcade gauche fracturée déforme la ligne du sourcil ainsi que lexpression du visage. Sous ce dernier, la paupière peine à dégonfler, bordée de noir et de violet. Les hématites semblent définitivement avoir perdu leur brillance. Lovale est toujours aussi creusé et se ride déjà damertume. A différents endroits, le cuir a même bleui. Le nez désormais cassé renâcle. Les lippes tremblent puis sétirent en un râle agonisant. Cependant, après tout ce temps passé, toujours les même sanglots...
La dextre se plonge sans vigueur dans un pot donguent douteux. Les mouvements sont longs et las. Seuls les spasmes agitent la carcasse et en éveillent les tourments. LOmbre a conscience que pleurer avive ses plaies mais elle sait aussi quil ne lui reste plus que cela aujourdhui. Allongée sur un lit de fortune, bloquant sa respiration entre deux haut le coeur, les doigts frôlent le poitrail dénudé pour appliquer la pâte malodorante sur sa côte fêlée. Chaque geste est un supplice depuis de longues journées maintenant. La vie est même est un fardeau depuis un sinistre jour.
La Corneille a plumé son orgueil pour se parer dune éternelle honte. Fuyant le contact, se retranchant sur elle-même, elle exige la solitude. Se laissant mourir à petit feu, Umbra ne mange plus, ne boit plus, ne dort plus, ne se lave plus. Sa peau transpire le fumet de la crasse, la fragrance des baumes et le parfum métallique du sang. Ses chairs suppurent son odeur. Celle de cet animal sans vergogne.
A cette idée, le corps se tord de souffrance et lâme se ploie daffliction. Les ongles noirs lacèrent les morsures imprimés sur son sein. Quimporte les maux physique, la Noiraude ne semble plus écouter les restrictions de son enveloppe charnelle. Sourde à cet appel, cest dabord, son esprit qui est en péril. Repenser, remémorer, toujours ruminer, inlassablement ressasser. Ne jamais oublier.
Mais bientôt les nerfs viennent à bout et lêtre sombre dans linconscience. Gisant au milieu des draps à moitié dépenaillée, Ombeline rêve maintenant de ne plus se réveiller.
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Une religieuse pouponne une orpheline dans le reflet dun miroir. Ce dernier réfléchit un visage opalin aux traits fins, presque fragiles. Des boucles de jais se tordent dans tous les sens sous la dextérité de la nonne. Les sourcils sarquent puis se fronce étirant la peau parfaite. Deux grands onyx scintillent à léclat dun chandelier à proximité. Des larmes ourlent les longs cils. Quelques une séchappent du regard et dévalent des joues creuses et rosies. Le nez se plisse et renifle, dérangé par des picotements. Les lèvres se pinçent puis rougissent sur la morsure de dents blanches.
Ne pleurez donc pas, Ombeline. Vous êtes magnifique, mon enfant...
[1462, Auberge de Rodez]
Une plaque de verre brisé rejette en un coin limage de ce même faciès. A peine trois années se sont écoulées que le portrait est méconnaissable. La chevelure, en plus davoir poussé, a prématurément commencé à blanchir. Larcade gauche fracturée déforme la ligne du sourcil ainsi que lexpression du visage. Sous ce dernier, la paupière peine à dégonfler, bordée de noir et de violet. Les hématites semblent définitivement avoir perdu leur brillance. Lovale est toujours aussi creusé et se ride déjà damertume. A différents endroits, le cuir a même bleui. Le nez désormais cassé renâcle. Les lippes tremblent puis sétirent en un râle agonisant. Cependant, après tout ce temps passé, toujours les même sanglots...
La dextre se plonge sans vigueur dans un pot donguent douteux. Les mouvements sont longs et las. Seuls les spasmes agitent la carcasse et en éveillent les tourments. LOmbre a conscience que pleurer avive ses plaies mais elle sait aussi quil ne lui reste plus que cela aujourdhui. Allongée sur un lit de fortune, bloquant sa respiration entre deux haut le coeur, les doigts frôlent le poitrail dénudé pour appliquer la pâte malodorante sur sa côte fêlée. Chaque geste est un supplice depuis de longues journées maintenant. La vie est même est un fardeau depuis un sinistre jour.
La Corneille a plumé son orgueil pour se parer dune éternelle honte. Fuyant le contact, se retranchant sur elle-même, elle exige la solitude. Se laissant mourir à petit feu, Umbra ne mange plus, ne boit plus, ne dort plus, ne se lave plus. Sa peau transpire le fumet de la crasse, la fragrance des baumes et le parfum métallique du sang. Ses chairs suppurent son odeur. Celle de cet animal sans vergogne.
A cette idée, le corps se tord de souffrance et lâme se ploie daffliction. Les ongles noirs lacèrent les morsures imprimés sur son sein. Quimporte les maux physique, la Noiraude ne semble plus écouter les restrictions de son enveloppe charnelle. Sourde à cet appel, cest dabord, son esprit qui est en péril. Repenser, remémorer, toujours ruminer, inlassablement ressasser. Ne jamais oublier.
Mais bientôt les nerfs viennent à bout et lêtre sombre dans linconscience. Gisant au milieu des draps à moitié dépenaillée, Ombeline rêve maintenant de ne plus se réveiller.
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