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[ Rp ] Who Wants To Live Forever( qui pour toujours)

Gianni
16 Août 1462 ...En Soirée


Gianni remanie son étendart. Sur le tissu flotte un dessin d'un groupe d'hommes aux visages menaçants. Il les provoque par sa présence au côté d'une charmante blonde qu'il embrasse, un message au bout de ses lèvres: Je profite les gars, vous pourrez ensuite me faire la Peau. Quand il le brandit à la sortie de la ville, il ne se doute pas un instant, à quel point, ce sera une prémonition. Dans sa besace, il a acheté en excés de la viande, des fruits, du lait et des miches de pain. Il y a toutes ses correspondances depuis plus d'un an et demi, si ce n'est pas deux, sur les routes. Autant dire pas grand chose mais certaines valent leur pesant d'or. Grâce à des affaires commerciales, il amasse bien 300 écus. Il profite de la somme rondelette pour se réarmer, tout ce qu'il a perdu, il y a quelques mois au cours d'un malheureux brigandage dont il a été victime. L'Italien se console de ce périple ennuyeux avec le calcul de ses douze mois sur les chemins. Deux brigandages et trois tentatives auxquels son pied leur a botté les fesses. Son aventure est une partie de plaisir. De Castillon en longeant tout la côte méditerranéenne jusqu'en Italie pour remonter par la Savoie, notamment Chamberry, pour une escale familiale, qui l'incitera à reprendre la route vers le Nord qui lui est inconnu.

De périple en périple, il a une drôle d'occupation, la tentative de prise de mairies. 39 à ce jour. Les dernières ont été au Berry, à Bourges, 12 consécutives. Son record à battre. Jusqu'à aujourd'hui, Gianni est passé à travers les mailles de la Justice, de la sécurité et des services secrets. A peine 7 procés dont 4 reconnus coupables principalement 3 en Italie, 1 en France. Et 3 relaxes. Il n'a pas de casier judiciaire à proprement dit, un procés en attente de verdict qui date de....loin...Il n'est pas fiché. A peine suspecté.


Cette fameuse nuit du 16 Août 1462...


Il se fera transpercer par un groupe. Ils seront à trois sur lui dont un qui s'acharnera à trois reprises. Cinq coups lui seront donnés, de toute part. Ce qui le sauvera, ce sera le galop de son cheval qui fera demi-tour face au danger pour le ramener d'où ils sont venus. Mais les coups stratégiques portés pour le clouer sur place lui feront prendre conscience que c'est grave. Pourquoi cette nuit-là a-t-il prit ce risque incensé de voyager ? Pour retrouver son ex-belle soeur à deux villes plus loin. Connaitre les racines de sa famille.

C'est quasiment sur le flan de l'animal que l'Italien entre en ville. Il grogne entre ses dents sous les douleurs atroces, s'étonne de s'entendre grogner, pas son genre:


Maudit, je suis maudit. C'est qui ses abrutis...

A force, il ne saurait, il en fait tellement aussi. Comment pourrait-il savoir. Il avait repéré une maison en rez de chaussée, les propriétaires en voyage, absents. Il guide pour les derniers mètres son cheval. Une tape sur son flan:

Ca va, ça va...Ici. Ton abreuvoir t'attend, regarde. On va séjourner ici pour un temps...

Il serre les dents à cette idée. Bloqué ici en convaslescense. Il se penche un peu plus sur le côté, glisse sur le flan de l'animal. Il tombe sur le sol poussiéreux dans un bruit sourd. Il se recroqueville sur lui en deux dans un hurlement étouffé, les larmes s'écoulent, sur son visage qu'il ressent chaud, très chaud, la fièvre s'empare de lui:

Je vais pas crever, je veux pas crever...

Il rampe de son mieux dans une douleur qui le lance de partout en des endroits beaucoup plus lancinants. Des blessures ouvertes qui se vident de sang. Il ne serait pas dépaysé. Il avait vécu dans cette maison les quelques jours et nuits de son passage en cette ville. Il s'agrippe au rebord de la fenêtre, pousse la vitre par laquelle il en est sorti, quelques heures auparavant. Elle glisse avec difficulté, pas grande force dans sa main ensanglantée. Gianni a à peine la force nécessaire. Son corps abandonné, vide de volonté, parvient à franchir le plus dur, le rebord. Il prend de l'élan pour se faire basculer dans les rideaux, en avant, dans la maison. Il tombe dans un grand bruit de plancher en bois. Le corps caché au milieu des rideaux ne bouge plus. L'effort de trop l'immobilise pour quelques minutes. L'Italien se débat soudain pour se sortir du rideau. Sur ses coudes, le corps avance entre les pièces. La salle de bain, des serviettes qu'il double, triple en épaisseur, pour plaquer sur ses blessures qu'il découvre sur les zones assombries de sa côte de maille:

De l'arnaque la cotte de maille, ça protége de rien...

Les serviettes s'imbibent de rouge carmin. Il se cale la tête contre le grain bain en bois, les yeux en surveillance sur la porte ouverte. Ses jambes allongées devant lui qu'il sent à peine. Il trouve à rire du pire qui pourrait arriver:

Manquerait plus que les proprios débarquent...Ils seraient fichus dem'achever à coups de balai

Il éclate d'un rire nerveux. Des larmes roulent. L'Italien commence à croire qu'il n'a pas doué pour grand chose. Il éponge au fur et à mesure, reculant l'instant de retirer ce qui est sa peau, la cotte de maille collée à ses plaies profondes. Il ne sert à rien de se plaindre. Il n' a croisé que des parfaits et des parfaites qui n'ont aucune tolérance ni l'ombre d'une compassion. Alors demander de l'aide. Il ne le fera pas. il fait des mimiques pour imiter:

Mais toi aussi Gianni, nous sommes en guerre, tu ne demandes pas d'autorisation pour entrer dans les villes aux frontières fermées...Mais Gianni, tu n'as pas fait de demande de laisser passer...Mais Gianni, tu es un multi-récidivistes, tu dois être listé...Mais Gianni, tu te mets tout le monde à dos, tu ne crois pas, qu'on va te faire de cadeau...

Plus rien à faire. Lui des laisser passer, il n'en a pas eu besoin jusqu'à aujourdhui.

Il retire toutes les serviettes utilisées pour compresses. Elles jonchent le sol à ses côtés. Il remonte par le bas la cotte de maille, la fait remonter. Les cris en silence sous l'habit se font entendre par des grognements rauques longs. Ses plaies semblent béantes sous le passage du vêtement à la matiére reiche. Sans compter, la sueur qui fait un effet ventouze. Ses bras se lèvent vers les airs pour tout retirer aussi de sa tête. Les bras emprisonnés. Il les secoue en vain pour les libérer.Dans un ultime effort, il tire sur ses bras. Tout vient. Il respire avec diffulté, en nage. Le visage blême, les yeux rougis. Il balance l'habit droit devant lui contre la porte. Cela rebondit, s'étend dans le couloir. Son regard n'ose se baisser sur son corps pour réaliser la gravité de ses blessures. Il le baisse. Attiré par les plaies béantes nettes, profondes. Noires, le moindre mouvement est un filet de sang abondant, rouge vif. Une sur le côté, apparement, la lame est passée de l'autre côté. La douleur est des deux côtés. Il plaque de suite dessus une serviette placée en son dos et son flanc. Une estafilade à l'épaule, sur la clavicule. L'Italien au constat doute de sa survie cette fois-ci. Il se satisfait ne rien voir sur ses mains, ni pieds, ni jambes. Il a senti plusieurs coups. Les yeux portés plus bas, il faillit ne pas remarquer sur ses cicatrices de fil fer barbelé les deux blessures sur son torse. Les deux à quelques centimêtres. Les coups portés lui reviennent bien en son esprit. Ce qui l'a déstabilisé. Les deux rapides, précis. Il avait compris qu'ils étaient plusieurs. Une serviette pour les recouvrir. L'effleurement de sa nuque. Il fronce les sourcils. Un derrière oui. Un coup de vent soudain qui avait frôlé le bas de sa tête. Son coeur fait des bonds dans sa poitrine. Non. Son bras se replie en arrière, sa main glisse. Cherche, fouille:


Ils ont voulu me scalper ses tarés!

Sa main réapparait avec du sang. Il abandonne. Il est dépité devant ce sang de partout. Il n'est pas capable de se soigner, pas cette nuit. Plus à espérer qu'il passera la nuit. La peur de fermer les yeux, de ne plus se réveiller, l'Italien lutte. Même si le petit matin n'est plus si loin pour le faire se réveiller avec le froid. Un demi-tour de la tête vers la fenêtre de la salle d'eau. Bien en hauteur surtout. Il ne bougera plus. Sa tête tombera en avant. Son corps s'avachira sur le côté. Sur le bois du parquet. Des mots marmonnés à lui-même:

Seul tu as voulu être, seul tu finiras...Il est temps dans ce cas...Ca me pèse et je ne changerai pas...

Pensées Cauchemardesques : Le lâcher-prise et la mort de l'ego


Si devant le Très Haut, tous sommes égaux, il ne devrait pas y avoir de cauchemars. Le halo lumineux au fin fond du tunnel aspire notre corps, c'est tout. Gianni lutte pour atteindre cette lumière. Il n'avance pas dans ce fichu couloir noir. Pourquoi mais pourquoi. Et pourquoi d'abord. Pourquoi ce n'est pas de tout repos avec lui ? Pourquoi c'est la croix et la bannière même pour en finir ? Zou....Il suffit qu'il plonge dans la clarté éblouissante. Non, même ça, il va se le louper. Pas moyen d'en finir, de mourir, avec dignité, fierté. A moitié étendu au sol, dans une salle d'eau, au milieu d'une vision d'horreur de sang, côté dignité, il peut faire un effort. Peut-être ce détail qui chiffonne Aristote, le repousse vers la Vie. Faire le ménage, il sera condamné à laver ses fautes, par le nettoyage de son sang qui s'est incrusté dans les lames du plancher.

Une tempête, un éclair qui déchire la ville plongée dans le noir. Ses paupières frémissent. Comment peut-il être au-dessus des toits ? Il est sur le rebord d'un immense édifice en pierre. Un édifice trop futuriste pour être une réalité angoissante. Son corps réagit par soubresauts. Il se voit dans la pénombre devant un vide sidéral, le regard ne peut se détacher du vertige d'une telle hauteur et du vertige sous ses pieds. Curieux, Gianni fait des pas vers le recoin sombre. Sous ses yeux, se dessine un homme camouflé par un habit à capuche, de dos, installé à l'allure d'une gargouille. Accroupi, si proche du vide. L'Italien n'ose faire un pas. Il cherche . Muet par la stupeur de la situation que l'inévitable se produise sous ses yeux. L'encapuchonné se redresse devant le vide, provocant.L'ombre surgit face à l'Italien. Elle s'élance sur le bord de la corniche en des mouvements rapides de saltos avant et arrière, enchainés. Ni peur de ça, ni de ça, ni même de ça. Plaqué contre le mur de pierre de ses deux bras en croix pour se maintenir soudain l'homme l'empoigne avec force, sa capuche tombe en arrière. Il se voit lui. Son Jumeau, trait pour trait, Angelo...Gianni est paralysé, angoissé, entre les mains de son double, que se passe-t-il, est-ce possible? Angelo est mort. C'est un cauchemar. Ce n'est pas lui. Alors qu'en face de lui, souriant, Angelo le trouble, échanges de regards entre haine et peur. Gianni se débat, repousse son double dans le vide alors que celui-ci se raccroche à lui, pour l'entrainer avec lui. Ils s'accrochent l'un à l'autre dans une lutte acharnée. Gianni finira par avoir le dessus. Son jumeau disparaitra dans le vide jusqu'à ne plus être qu'une masse plus bas, en contre-plongée, inerte.


Ouvre les yeux, Ouvre les Yeux...N'est peur d'aucun voyage. Accepte les.

Les yeux grands ouverts, la respiration haletante. Le cauchemar quasi réel. Tout s'enchaine dans son esprit. Ne l'a-t-il pas tué en quelque sorte ? Un jour ou l'autre, ils auraient bien vécus chacun leur vie mais Gianni ne lui en avait pas laissé le temps de partager quoique ce soit. Cette manie de croire que tout est éternel.

C'est vrai que....Y a un an...

Le choc que cela fait quand la nouvelle tombe, oui, tombe, qu'un jumeau, le vôtre, vit. Qu'un double. Qu'un autre vous-même vous ressemble ? Oui, Gianni avait eu du mal. Il n'avait pu l'accepter. Il se veut unique, le seul. Tout son monde s'était effondré, lui qui se cherchait depuis si longtemps, n'être que le fruit, d'un même foetus. Toute sa vie avait cette lutte perpétuelle contre lui-même, ce manque insatiable qu'il n'arrivait pas à définir. Ce dédoublement de personnalité qu'il ne comprenait pas. Ses réactions et comportements si à l'opposé. Des craintes, des peurs impulsives de nulle part alors qu'il n'y avait aucune raison. Cette éternelle tristesse qui lui collait à la peau. Non, il n'en avait pas voulu. Il l'avait abandonné, renié de son esprit. Il n'est pas un ange. C'était trop lourd, trop éprouvant à vivre, à comprendre, à supporter. Il ne s'était même pas posé la question si toute cette histoire d'hérédité était bien vraie. Mais c'est pas un revenant dans un cauchemar qui viendra le hanter. Si simple d'être orphelin sans rien devoir à personne. Tout s'écroule sur lui, ses valeurs, tout ce qu'il a vécu sur des bases erronées. Lui si fier, gonflé d'un égo si parfait, sans sentiment ni émotion, sans hérédité de sang ni de coeur. Le solitaire. Seule l'image de sa beauté naturelle fait de lui un menteur invétéré. Un homme. Un séducteur avec des conquêtes à ne plus en finir. Coupable de représenter et non point d'être
.

17 Août 1462...Pourquoi est-il revenu...Qui le raccroche à la Vie


Aux premières lueurs de l'aube, il se raccroche aux poignets des portes pour évoluer au sein de la maison. Les serviettes ne trainent plus au sol, ni la cotte de maille. Il sort dans la cour extérieure à l'arrière, les linges en une main. Il remonte du puit le seau plein d'eau, la corde nouée autour de son avant-bras. Il s'en asperge, se tenant d'une main sur le rebord en pierre, l'autre main, pour enlever le sang séché. Sa main frictionne son visage, les parties de son corps, à proximité des blessures encore à vif. Le carnage se dissipe. Le linge est mit à tremper.L'Italien retourne à l'intérieur. Il se déplace très lentement. Une main en soutien partout où cela est possible. Au salon, il remarque ses bouteilles de laits, ses fruits, ses morceaux de viande, et ses miches de pain éparpillés de part et d'autre, de sa besace éventrée à plat, à peine visible de sous les rideaux tachés de sang.Une mine déconfite. Ils les regroupent pour ramener sur le lit dans la chambre. Il compte se faire une bonne semaine de repos. Il ne bougera pas d'ici. Nourriture, soin et nécessaire dans sa besace pour écrire. Un plateau sur la table de nuit avec une bouteille de rhum, des bandages, des fruits. Le reste de la nourriture rejoint le garde-manger dans la cuisine. Une bassine avec de l'eau. Il entasse les coussins pour venir s'y coller de dos contre, les jambes allongées, sa besace sur lui. Il se penche en grimaçant pour tirer le tiroir de la table de nuit pour y cacher sa besace mais il est obstrué par une liasse de courriers, bien pliés, enroulés d'un ruban rouge.
Gianni fait l'échange, referme le tiroir. Il tourne les lettres pour lire les adresses au dos. Il dénoue le ruban rouge. Il passe en revue. Son attention se porte sur le nom de Xalta Exaltation Lablanche D'Abancourt-Diaconesse. Il tourne l'avant de l'enveloppe pour avoir l'adresse de cette maison où il séjourne. Il pose tout sur la table de chevet, il verra à son prochain réveil. Les minutes avant de s'endormir, seront pour se nettoyer les plaies, les protéger par des bandages serrés autour de son corps. Il n'a pas besoin de se donner du courage avec des gorgées de rhum ingurgitées. Le drap remonté, la couverture chaude pour recouvrir son corps. Il souffle sur la bougie. Sa tête s'enfonce dans les coussins. Allongé sur le dos, il ne bougera plus de la nuit jusqu'au lendemain. Une nuit entière réparatrice. Elle sera d'une traite, parfaite. Imperturbable. Respiration profonde et sourde. Lente.

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https://www.youtube.com/watch?v=xTKfrY4cQ9I
Victoria.d.alaya
Il y a des liens qui s'inventent, il y en a peu qui résistent.

Une lettre. Celle d'un presque inconnu. Presque, parce qu'elle l'avait connu, vague rencontre tout au plus. Une lettre qui pour la seconde fois, la rappelait à un passé qui s'emplissait de gens morts.
Enfin lui était bien vivant. Il lui écrivait encore simplement quelques mots, il venait la voir, il espérait qu'elle soit encore là où elle avait dit être la fois précédente. Juste quelques mots froids et anonymes.
La première fois, elle avait répondu aussi froidement, et pour cause elle lui annonçait la mort de son frère. Elle se sentait responsable de cette mort, alors quelle chaleur aurait-elle bien pu coller entre ses mots ?

Elle avait aimé Angelo, elle n'avait pas su le rendre heureux, il s'était mépris, ils étaient deux incompris. Il était mort et elle s'en voulait encore. Personne ne pouvait revenir en arrière et changer les choses, cependant elle pouvait peut-être retrouver un semblant de sérénité en rencontrant Gianni. Lui parler, espérer qu'il ne lui tienne pas rigueur de la mort de son jumeau, jouer un simulacre de pardon pour alléger son cœur.

Puis la seconde lettre était arrivée presque aussi vite. Comme si la malédiction s'acharnait sur elle, sur ceux qui l'approchaient, comme si les foudres d'un dieu colérique se dirigeaient ostensiblement toujours dans sa direction.
Ce pseudo cousin par alliance, ex futur beau-frère par maladresse, se trouvait entre la vie et la mort dans une ville à quelques lieues d'où résidait la jeune femme. Y aller, ne pas y aller ... Et si la vie le fuyait définitivement, supporterait-elle le poids de deux morts sur sa conscience ?
Le souvenir de ce jour à Castillon revint à sa mémoire. Lui avait rapidement fuit la ville, tandis qu'elle rencontrait Angelo, Angelo dont le sourire et la gentillesse avaient fait fondre tout son scepticisme vis à vis de leur appartenance à la famille Laskarina. Peut-être aurait-elle du laisser tout cela caché. Mais maintenant il était trop tard. Un était mort, l'autre sur le point de l'être.

Sa décision est prise, et comme à chaque fois, elle ne prévient personne lorsqu'elle fugue. En est-ce vraiment une ? Qu'importe, elle a toujours agis ainsi, sur des coups de tête, ce qui ne lui a pas si souvent réussi. La petite anglaise a tôt fait de remplir un sac de voyage, de sceller Darling et de prendre la route. Elle ne sait même pas où il loge, qui l'a récupéré pour le soigner si tel est le cas, si même elle ne fait pas le trajet pour rien, pour un cadavre. Son étreinte sur l'animal se resserre et l'oblige à prendre de l'allure sous ses pensées funestes. Elle le trouvera, elle les a déjà trouvé une fois, tous les deux. Elle le trouvera, dusse-t-elle passer la ville au crible.

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Wolf song (Celtic version)
Manassa
    A Blois, le 16 août 1462


Le soleil s’était couchée depuis peu, l’atmosphère était encore chaude. Au loin, par-dessus les remparts de Blois, la campagne commençait à s’endormir, les miliciens s’étaient rassemblés près des murailles, les villageois s’étaient isolés chez eux. Le duché était en alerte depuis le commencement de la guerre sans fin. L’ambiance s’était détériorée et rencontrer quelques âmes vivantes était devenue un luxe.

Ce soir-là, Manassa quitta son domicile pour s’offrir quelques bières fraîches. Elle arpenta lentement la route, vêtue d’une robe rouge, élégante comme toujours. Elle arriva devant la première taverne, vide, décida de continuer peut-être qu’elle trouverait bien de la compagnie. Le surprise fut grandiose, il était derrière à l’intérieur, c’était bel et bien Gianni, ce jeune provocateur. C’était son ami. Peut-être « ami » n’était pas tout à fait le mot juste… une connaissance, le terme exacte.


Elle s’accouda à la fenêtre en souriant de plaisir, le visage posé dans ses paumes ouvertes appréciant le spectacle de Gianni, ce jeune italien, aux cheveux bouclés mi-longs d’un brun sombre, au visage serein parsemé de quelques cicatrices, aux épaules larges, et aux habits dignes d’un aventurier richissime bien armé. On aurait dit un autre homme qui venait de naître, un être qui ne ressemblait pas à Gianni d’avant… Le gringalet, faiblard, avec son visage pâle, témoignant sa famine et des habits quasi inexistants.
Il a laissé place à un jeune homme charmant, malgré les quelques défauts. Seul son regard n’a pas changé, toujours aussi mélancolique, le passé ne l’avait pas épargné, il porte encore les blessures dans son cœur dont peu de personnes les connaissent. Il n’est pas du genre à étaler sa vie.

Après quelques minutes d’espionnage, la blonde le rejoignit dans la taverne où les retrouvailles étaient plutôt chaleureuses. Un sourire étira ses lèvres, se voulant amical. Le souvenir de leur premier rencontre était encore présent de leur esprit. Elle ne lui en voulait plus. Elle avait également changé, avait sorti son blindage pour ne plus se laisser envahir ou berner par les émotions.

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Gianni
Du 18 au 19 Août 1462...Se Nourrir des Maux ou des Mots

Les jours et les nuits ne font qu'un. Les dates s'emmélent. Les draps se froissent sous le corps de l'Italien en sueur, en fièvre. En proie à des passages de tourmente. De Paix divine. Tout s'enchaine au fil de ses volontés salvatrices ou destructrices. Toute l'opposition de Gianni se situe entre cette capacité à remonter des plus dures défaites et cet abandon total de lui, à caresser la mort de près. Avant cet état de corps amoché, dans des draps souillés de sang, par ses blessures aux chaires entrouvertes non cousues, à peine désinfectées de linge à l'odeur forte de rhum, il avait passé deux soirées, à discuter avec cette femme blonde, rencontrée quelques mois avant, à Orléans. Leurs retrouvailles hasardeuses avaient bousculées bien des certitudes sur son comportement arrogant, dépressif, odieux. Il avait mit cela sur le compte de la perte de son frère jumeau Angelo. Elle avait été d'un secours à son égard, lui, ingrat, avait prit sans vergogne le morceau de viande à bas prix, pour requinquer son état pour la éniéme fois, déshydraté et dénutrionné. Il l'avait lâchement abandonnée à Orléans alors qu'elle ne prendrait qu'une place dans son groupe, pour voyager. Ce qu'il refusa sans forme de diplomatie et avec le plus grand mépris. La douleur mentale peut rendre le meilleur des hommes, le pire de toutes les espèces humaines et animales. Comment aurait-il pu s'en apercevoir ? Il était dans un état second de recherche de rédomption que personne n'était en mesure de lui donner, de lui accorder, en toute confiance. A force de rejet, de mise en quarantaine tel un pestiféré, il devenait aussi enragé qu'un chien qui se révolte contre son Maitre et finit par mordre la main qui le nourrit. Il avait essayé de se mettre à travailler sur pour des chantiers, à se creuver aux labeurs de maçon pour la construction d'une muraille, si sa mémoire ne lui fait pas défaut. Cela ne durera que quelques semaines de présence à Orléans, une ou deux, le temps de se préparer fin Mai 1462, à sa descente vers le Berry où une rumeur de guerre se colportait. Pour en avoir la certitude, il s'y rendit. Il venait de tourner le dos à une jeune femme en qui il avait n'avait vu que le mal qu'elle pouvait voir en lui. Ou vers la fin, leurs discutions étaient des disputes, surtout, de la part de l'Italien. Il voyageait seul. Il était toujours sur des plans de tentatives de révoltes dés que cela le prenait. Et il ne pouvait entrainer de gré ou sans prévenir quiconque intégrerait son groupe de voyage. Le mieux étant d'être seul devant ses faits et actes répréhensibles, qu'il reconnaissait ou bien jouait au petit malin sous des excuses falacieuses pour s'extirper du Tribunal et de la Prison. Inconcevable qu'une jeune femme insiste sur voyager en sa compagnie. Ils finirent par se trouver très moches les deux, réciproquement. A s'en vouloir. A ne plus vouloir entendre parler l'un de l'autre. Il se souvient d'un "Je vous Hais" dans une lettre à son attention. Ce fut la fin d'une rencontre qui n'aurait peut-être pas du avoir lieu. Et dont rien ne laisserait présager que leurs chemins se recroisent. Pas le bon instant. Pas le bon endroit. Pas le bon rien du tout. Gianni n'avait plus rien de sa magie innocente de son arrivée en France, un oiseau tombé du nid, fragile, sans défense. Il était devenu un homme. Avec ses travers et ses humeurs. Rien de plus banal en sorte. Avec une ironie blessante que beaucoup appréciait au début et finir par hair, car, il pensait tout ce qu'il pouvait blesser. Il l'eût oublié très vite, autant l'appel du Berry, lui offre de quoi se battre contre lui-même, et se faire décaniller contre des miliciens aussi souvent qu'il le veut, pour s'épuiser, à ne plus tenir debout. Partir vers l'au-delà.

Leur conversation lors de ses deux soirées de retrouvaille furent un soulagement. Malgré tout le mal qu'il avait pu lui balancer, une joie s'anime. Pervers, vicieux, sadique. Non, l'Italien a la fâcheuse tendance d'oublier ses frasques. Il en est sincère quand il s'insurge avoir été aussi odieux, irrespectueux, désagréable. Un rire amusé. La gravité de la réacion et des paroles de la jeune femme le raméne à une réalité dure. Tout lui revient. Il se voit. Il sait que c'est bien lui. Sans savoir comment est-ce possible ? Comment réparer? Comment se faire pardonner ? Il serait prêt à tout pour lui prouver qu'il n'est pas cet être ignoble, ingrat, sans scrupule. Ce sera difficile de faire changer d'avis la jeune femme à la dent tenace contre l'Italien. La situation les sépare encore. Ils vont se laisser sur des broutilles non élucidées, des choses non-dites. La vie est une chienne. Elle prend plaisir à appuyer sans cesse sur ses défauts, maladresses. Ses douleurs. Ses félures.Il en avait tout oublié. Il était porté sur un nuage sans en connaitre le motif. Si bien qu'il était aller se foutre contre l'armée en Touraine, direction Tours. Comment avait-il ou oublier la situation de guerre, et tous ses aléas. Parce qu'il n'avait cessé depuis plus d'une semaine à bourlinguer entre le Berry, et qu'il ne lui était rien arrivé. Il aurait du passer par le Berry, et oui. On ne se refait pas. Il s'était empressé d'écrire à la jeune femme pour lui annoncer la terrible nouvelle au bout de quelques jours, genre: vous êtes débarassée de moi, je vous dis adieu, je me suis fais poutrer en beauté par une armée. Je n'aurai pas la force de rester 45 jours ni de vouloir vivre.Les courriers deviennent quotidien. Gianni est heureux de la lire. Il est heureux de lui répondre. Elle lui donne de multiples conseils pour se soigner, le temps qu'elle puisse se libérer pour lui rendre visite. Il s'inquiéte pour elle. Comme cela est le cas en retour. Il a une chance de se faire pardonner, il la saisit avec un naturel époustouflant. L'Italien vit, revit malgré d'être aux Portes de la Mort avec ses blessures. Une amie. Sa première de sa vie chaôtique: Manassa. Il ferait tout pour ne pas la perdre. Pour une fois, il accepte une main tendue sans la mordre en retour mais en lui tendant la sienne si elle a besoin.Cela vaut tout l'or du monde. Et toutes les raisons pour s'accrocher à la vie. Lui qui n'a voulu qu'être l'amant, jamais l'ami, dans toutes ses relations. Aujourd'hui, il comprend toute la mesure et l'essentiel de pouvoir se raccrocher à des parcelles d'étoiles filantes qui vont et viennent dans votre vie pour de filantes, être l'étoile scintillante toutes les nuits, présente.


20 Août 1462...La perte de conscience

Ses yeux s'ouvrent à peine. Il est au milieu d'une tâche de sang fraîche imbibée par les draps. Ce qui a du le tirer de son sommeil.Il sent son visage maigre. Une grande fatigue inhabituelle. Ses membres trop faibles pour bouger. Tout tourne autour de lui. Sa vue est trouble. Il devine à peine la fenêtre entrouverte avec son pigeon qui fouine dans ses plumes, un message à sa patte. Il se souvient plus quand la dernière fois, il a pu lire. La veille. A côté de lui, des parchemins aux traces sanguinolentes. Un encrier et une plume sur le coussin à côté. Il sait. Il a prit le temps d'écrire qu'à sa nouvelle amie. Il ne s'est pas nourrit. Il n'a pas bu d'eau. Il ne s'est pas soigné. Il toussotte un peu. Il sent le tissu collé à ses plaies. Mais quelle idée de s'être mit sur le ventre. L'Italien roule le dos, d'une main, retire de ses blessures ouvertes, ce drap maudit. D'un geste sec, qu'il peut, le jette en face de lui, en bout de lit. La pière a une odeur de mort. Elle empeste. Son bras cherche à tâton sur le plateau la bouteille de rhum alors que son autre main, décolle de sa chair, les bandages et serviettes de protection pour contenir le saignement. Maladresse oblige, le rhum coule sur tout corps, alors qu'un coussin sur son visage, maintenu d'une main, pour planter ses dents dedans, serrer fort pour étouffer son hurlement. A-t-on vu quelqu'un se suicider déjà en s'étouffant soi-même, il ne voudrait pas en être le premier cas. La bouteille est vide. Il la lâche. Elle roule sur le lit, continue sa course, dans un choc sans bris de verre en chute surle plancher, le bruit se poursuit puis...Stoppée nette. Le coussin balancé sur le côté, vers le pigeon.Le volatil semble s'envoler vers le plafond, tourner dans la piéce, pour le rejoindre, proximité suffisante pour retirer le message. Gianni repose sa tête en arrière. Son amie doit s'absenter. Elle ne peut rien lui dire de ce qu'il en est. Normal. Lui, le révolté. Le voyou de grand chemin. Le Fauteur de trouble. Celui auquel une confiance infime ne lui sera accordée.Il est las. Las de ne pouvoir rien construire de solide sur n'importe quel plan de sa vie. Il reste les yeux au plafond, exaspéré. Il en a décidé ainsi. Il a voulu être dans le secret, ne rien dévoiler, pour se protéger. L'Italien en paye le prix. Cher. Très cher. Tel cet accident meurtrier qui le cloue sur ce lit.Gianni en assez de cette ambiance d'agonie. Il met en boule les draps. Il s'asseoit sur le bord du lit, vertige sur vertige. Il range tout sur le plateau. Plus rien ne traine. Les lettres sont agrippées entre ses doigts, contre sa peau. Il laisse le rhum l'empester, cuire sa peau, un oeil sur ses contours gonflés, boursouflés, trop à vifs pour se refermer sur les plaies ouvertes suintantes de sang. Il traine ses pieds, se retient par son épaule contre portes et murs. La cuisine où il pose le courrier sur la table. Ses pas le conduisent au garde-manger. Miche de pain, fruit, fromage et de l'eau surtout. Une de ses soifs. A sa grande surprise, il découvre des bouteilles au fond, fraîches, transparentes. Heureux, il débouche. Pas d'odeur. L'Italien boit, puis tête en arrière, le bruit de l'eau qui diminue se fait entendre. La descente est fulgurante, sa pomme d'adam va et vient sous le passage du liquide. De longs gémissements rauques de plaisir s'y joignent. Les yeux fermés, tout son visage reprend vie, son corps ne le fait plus souffrir, il n'y pense plus. Gianni a bout de souffle, s'arrête. Il caresse son ventre, son torse avec la fraicheur de la bouteille. Il a un grand frisson quand cela refroidit ses blessures. Le réveil est abrupte. Bon. Trop bon. Il revient de plein pied à la réalité, il se répéte les conseils de son amie:Boire de l'eau, des aiguilles pour recoudre les plaies, manger, dormir.L'Italien s'y attéle pour sa première grande journée d'initiatives. Il a des objectifs. Il doit s'y tenir. Tandis qu'à son rythme lent, long, il progresse dans ses tâches, il ne peut s'enlever de la tête cette fameuse nuit du 16 Août 1462. Quand il aura un peu de repos pour écrire ses correspondances, il y retournera, comme pour rejoindre son amie, dans ses pensées. Apaisé, il osera peut-être faire tomber le masque, avouer ses sentiments paradoxaux qu'il a en son encontre, mais que ni lui, ni elle, ne pourront vivre pour bien des raisons que la raison n'explique pas en retour. La beauté est une chose. Tous les deux ne peuvent le démentir. Elle ne fait pas tout. L'attirance physique non plus.

La soirée montre son visage. La Maison est nettoyée. la chambre aérée, le lit propre, les draps changés. Les traces de sang ne sont plus. Tout le linge est étendu sur un fil à l'arrière de la maison. La cuisine sent le cochon grillé. La cheminée allumée un peu. Une odeur qu'il retrouve sur sa peau. Avec l'apparition de traces noirâtres sur sa peau. Le sang ne coule plus. Les plaies sont cousues. Il supporte de moins en moins son corps marqué, torturé. Camouflé par une chemise de matiére légére pour ne pas se figer sur les blessures. Gianni n'en peut plus. Les yeux dans le vide. Un fauteuil tourné vers la fenêtre grande ouverte, les jambes étendues sur le rebord, les pieds qui en dépassent, assoupit, pendant des heures.Le froid de la nuit le surprend dans un sursaut. Ses jambes ont du dégringolées du rebord. Debout avec du mal, il songe soudain que deux béquilles hautes placées sous ses aisselles, ce serait une bonne idée. Fenêtre fermée, fauteuil repoussé. Sa correspondance n'a pas avancé d'un pouce. Il raméne tout de la cuisine à la chambre. Et la bonne bouteille d'eau.Une lettre à envoyer par cette nuit. La tête dodelinante au dessus du parchemin, la main tremblante exprime une écriture en biais, sur le côté. Irréguliére. Grosses lettres, minuscules, tout se mélange au rythme du sommeil. Cela devait être une lettre de cet acabit qui fut envoyée:




Diaconesse Xalta,

Gianni veut attirer votre attention sur sa volonté, dernière ou pas, de vouloir se confesser. Pas homme à prendre soin de sa santé, il préfére prendre les devants, si dans ce cas précis, il devait rendre l'Âme, sans qu'il ne prenne au sérieux son état.Votre nom et fonction me sont parvenus à mes yeux par des correspondances que j'ai lu, dans la maison où j'ai trouvé refuge. Des connaissances à vous. Vous devinerez quand vous en lirez l'adresse au dos de cette missive.

La porte d'entrée est ouverte. N'êsitez pas à entrer. Je ne saurai dans quel état, je serai pour vous accueillir. Il serait dommage que vous restiez sur le pas de la porte, et que j'agonise, trépasse à quelques pas de là. Je viens de réaliser. Je ne suis pas baptisé. Donnez-moi une réponse dans tous les cas. Que je sache.

Gianni


La nuit commencerait par cet envoi. L'Italien tombe. Son corps chauffe, une fièvre puissante, une migraine atroce. Un linge sur son front imbibé d'eau fraiche. De grandes gorgées pour se désaltérer. Il ne dort pas. La nuit sera agitée. Le corps travaille. Il s'assoupit. Pour des heures aprés avoir un grand froid soudain. Les draps remontés vite. Cela va et vient jusqu'au petit matin où plus rien ne viendra le perturber, le laissera en paix. Où dormir lui sera possible.
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Xalta
Elle se débattait avec ses propres démons, les nuits étaient courtes, les heures de sommeil trop peu nombreuses et si souvent agitées par des cauchemars, ses tourments qu'elle dissimulait à la vue de tous la journée. Elle affichait toujours une mine affable, courtoise avec chacun ou presque, parfois sa résistance lâchait et elle se montrait alors mordante, incisive même. Comme la veille, les répliques acides avaient fusé. Elle ne regrettait pas. A quoi bon ? Elle était lasse et se sentait parfois si usée, laminée. Mais, elle ne pouvait se permettre de le montrer tant de gens comptaient sur elle et puis elle ne pouvait se permettre de les accabler avec ses tourments alors qu'eux-même bien souvent étaient déjà rongés par d'autres maux.

Le pli lui fut apporté, elle remercia le coursier de quelques deniers. Intriguée car ne reconnaissant point l'écriture, elle ouvrit la missive. Le contenu la surprit. Elle demeura un moment pensive, relisant à plusieurs reprises. L'adresse lui était connue, mais l'homme qui avait rédigé le courrier lui était parfaitement inconnu. Devait-elle s'y rendre ? Etait-ce un traquenard ? Ou bien un véritable appel d'un homme en détresse et mourant ? Un soupir s'échappa de ses lèvres. Devait-elle s'y rendre ou devait-elle ignorer ? Devait-elle laisser sa raison la guider ainsi que la prudence ou bien alors se laisser emporter par son devoir de diaconesse et répondre à cet appel ?

Pour s'éclaircir les idées, elle entreprit d'entrer dans une taverne et de boire quelques verres de vin. Un moyen comme un autre d'éclaircir ses idées. Elle but ainsi quelques verres , de façon raisonnable. le but n'était pas de s’enivrer mais seulement d'y voir plus clair. La lettre tourne entre ses doigts gantés. Elle hésite, se mordille la lèvre inférieure. Puis finalement elle se fait apporter plume, encre et vélin. Elle fait tourner la plume: refuser, accepter ? Puis la plume se met à gratter le grain du papier.


Citation:
Gianni,

Je viendrai.

Que le Très haut vous garde!

Exaltation


Elle fait chercher un homme qui est a son service , elle lui confie le pli. Elle prendra la route au matin. Le reste de sa journée, elle la passe tranquillement, vacant à diverses occupations, elle a donné des consignes, elle voyagera seulement accompagnée d'un homme de confiance, sans prévenir qui que ce soit, sinon elle sait déjà qu'on cherchera à la convaincre de ne pas s'y rendre.

Au petit matin

Habillée de façon masculine, épée au flanc, elle grimpe sur son cheval, elle est accompagnée d'un des siens. Ils partent tous les deux au lieu-dit. Le trajet se fait en silence, il ne demande rien, il sait qu'elle ne parlera que si l'envie lui prend. Quelques temps plus tard, ils arrivent devant la demeure. Elle glisse de sa monture et la lui confie. Une légère appréhension malgré tout l'étreint. Mais elle est là, elle ne reculera pas. En quelques enjambées, elle est devant la porte, par habitude elle toque. Elle connait la maison pour y être venue parfois. Le silence lui répond. Une profonde inspiration et elle pousse la porte qui n'est pas barrée comme dit dans le courrier.

Elle parcourt les pièces, une à une. Les signes de l'absence des habitants est visible partout, mais des traces laissées par leur hôte actuel ne laisse aucun doute sur sa présence. Elle finit par le trouver endormi dans une chambre. Il a l'air mal au point. Sur ce point, il ne lui a pas menti. Alors elle toque sur la porte entrouverte et d'une voix claire et forte.

Gianni ?

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Gianni
L'instant présent figé entre de douces réalités et de violentes vérités

Un paysage défile. Les horizons varient entre montagne, forêt, océan, plage, vallons verts à l'infini...Le ciel voit se confondre son lever du soleil en coucher dans un rythme incessant. La nuit n'y est pas. Elle en a été bannit. Seule la lumière est la Reyne en cette histoire. Il reconnait l'Italie avec son soleil chaud, les sourires chaleureux. Il est jeune, si jeune. Il se reconnait à peine. Une bâtisse aux allures de Monastére. Des hommes. Des tas d'hommes en tenue de prêtres. Sa vision se porte sur lui. Il porte la même en blanc. Une capuche en arrière qu'il devine en tournant la tête sur le côté. L'habit est réche. Il lui gratte le cou et le corps en son ensemble. Ils se mettent tous en file indienne, disparaissent à l'intérieur dans un chant inconnu. Sa capuche se rabat sur sa tête. Ses mains se cachent chacune dans les manches opposées. L'Italie, pays d'enfance, effacé au sein de ses murs d'une blancheur à vous abîmer la cornée. Où seuls les arbres frutiers sont la verdure, la fraicheur. Cette fontaine au bruit relaxant. 17 ans ici à vouloir saisir sa vie pour courir pieds nus dans les rues sinueuses prés du port. L'air marin, les embruns salés suffisait de lever le nez plus haut, pour les percevoir. Oui, parmi tous ses paysages qu'il avait vu pendant deux ans dans les Royaumes, seul, l'Italie l'emporte haut la main.Que fiches-tu ici Gianni ? Pas de famille ? Voué à servir Dieu. Parmi les hommes. Un homme parmi tant. Mais tu sais que c'est impossible. En toi, le démon a prit place, souviens-toi...C'est en arrière qu'il est aspiré par une force décuplée. Tout est flou autour de lui. Le décor se transforme. Perdu, apeuré, il se voit regarder partout, un couteau à la lame couverte de sang en sa main. Sa toge blanche recouverte d'éclats de gouttes. Ses pieds et sandales idem. Le temps de réaction de comprendre qu'il est dans un bureau. Il le connait. Très bien. une panique effroyable s'empare de lui. Le couteau retentit au sol dans un bruit métallique quand une voix entre songe et réalité prononce:

Gianni...

C'est dans une torpeur, que l'Italien accueille la femme qui se présente sur le pas de la porte de la chambre. Il la dévisage sans pouvoir savoir. Prit en flagrant délit, de tout, ce qui est êvident sous ses yeux. Pas grand mot à dire. Les paupières se baissent, perdu, ailleurs. Qui qu'elle soit, qu'elle fasse, ce qu'il lui semble juste, le mieux. L'Italien n' a pas de chance, il l 'a fait avec bien des fois. Il est prêt. Ses paupières se relèvent de son visage bléme d'une nuit agitée dans une chambre clairsemée de preuves de son état de santé, guére reluisant:

Faites ce que vous avez à faire, je n'opposerai aucune résistance. Je suis las de m'opposer. Je vous suis mais je n'ai rien à dire même sous la torture, vous n'aurez rien.

Et c'est les poignets vers l'avant, sur le côté, poings fermés tel un habitué des prisons ou des agissements de certaines organisations, que Gianni, se rend, pour être amené, menotté ou attaché. Pas de course poursuite, de chasse à l'homme, comme il en a tant vécu. Allongé sur son lit, il ne quitte pas des yeux la femme qui lui inspire un tel contexte. Un regain du passé vécu avec Alix Du Viviers mais dont il ne sait mettre le nom à cette minute, trop évaporeux.
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Xalta
Il bouge, il s'éveille. Elle reste pourtant sur le seuil de la pièce, elle explore des yeux la pièce, ici ou là des traces de sang, des vêtements et des morceaux de tissus tachés. Et cette odeur à nulle autre pareil, cette odeur de sang, de fer. Une puanteur qu'elle reconnait trop bien pour l'avoir senti en bien des occasions. Elle grimace. Puis ses yeux s'attardent sur lui, au teint pâle, cette pâleur que l'on retrouve sur les mourant. Un aspect très difficile à imiter même avec le maquillage. Ça aussi elle le reconnait bien pour avoir vu trop souvent ce masque mortuaire sur des visages aimés. Quelque part, cela la rassure, il ne s'agit pas d'un traquenard.

Il prononce quelques mots, il ne sait pas qui elle est. Rien de plus normal en soi, il semble même la confondre avec quelqu'un d'autre. Malgré tout, elle hésite: doit-elle s'avancer ou bien tourner les talons et laisser cet homme agoniser ? Une baffe mentale derrière la tête, elle se morigène : elle ne peut laisser quelqu'un dans un tel état ! Ce ne serait pas digne d'elle ! Alors elle franchit le pas de porte, elle se rapproche de l'homme, assez pour que ses traits luis soient plus visibles. Il lui tend ses mains comme s'il souhaitait être menotté. Ainsi il serait prêt à se rendre. Un fugitif ? Un brigand ? Surement, elle n'est pas surprise.

Elle franchit l'espace restant, se saisit des mains tendues entre les siennes éternellement gantées, et aujourd’hui de cuir fin, produit manufacturé sur les terres de la baronnie de Chaumont, cadeau de son cousin et encore époux. Elle serre doucement les mains de l'homme, elle contemple ses traits tirés, se dit qu'il doit être un bel homme quand il est au mieux de sa forme. Tout en gardant les mains dans les siennes, elle s'assoit sur le bord du lit. Toute appréhension l'a quittée. Elle le regarde avec douceur et se veut rassurante. D'une voix calme qui se veut apaisante, la même qu'elle utilisait quand Tancrède était petit lorsqu'il avait fait un cauchemar ou s'était blessé en jouant, qu'il avait besoin de réconfort, elle s'adresse de nouveau à lui.

Gianni, je suis Exaltation Lablanche, la diaconesse à qui vous avez écrit. Je ne suis pas là pour vous arrêter mais pour vous aider.
Détendez-vous. Vous n'êtes pas en danger.


Elle demeure assise, la petite voix intérieure de la méfiance boude , elle se fait ténue mais ressasse malgré tout un petit avertissement à l'encontre de la diaconesse.

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Gianni
Recoller tous les morceaux de sa vie

Il avait écrit. Un sos jeté avec l'espoir d'être entendu. D'être cru avant tout. Qui pourrait plaisanter avec sa vie ou faire une blague de mauvais goût avec une confession ? Il réalise soudain que la confession n'est peut-être pas que pour les agonisants, sur les lits de mort. Il n'est pas aristoliticien. Il fronce les sourcils à cette constation qu'il vient de se faire en une seconde. Il soulève des tas de questions sur sa vie depuis qu'il est à se battre pour que ne pas laisser échapper son filet de vie. Si l'importance de la vérité sur lui, autour de lui, est capitale. Perdu dans le doute de pouvoir se confesser soudain, l'Italien en oublie tout devant les gestes et l'approche de l'inconnue qui ne l'est plus à ses paroles rassurantes. Il peut délivrer ses mains du poids de serrer ses doigts, leur rendre, un bienfait libres, réchauffés, réconfortés par...Il ne sent pas d'autres doigts en chair et en os entourer les siens. Un léger tissu qu'il a du mal dans son état à reconnaitre, encore faut-il, qu'il en est déjà eu la texture pour savoir. Le lit se baisse sur le côté, à l'assise de la Diaconesse, prés de lui. Son regard suit ses mouvements, essayant de se faire une idée, de la décrire, en silence, en lui. Pour l'instant, ce qui lui importe, c'est qu'elle croit en son message, en son appel au secours, sa volonté de sa confession. Il a besoin de son aide.
Gianni n'ose rien dire, ne rien faire. Il est engourdit par ses cauchemars répétitifs qui lui rappellent sans cesse, toutes ses fautes, tous ses péchés, tout ce, qu'il doit s'absoudre si la vie décide de la quitter ici, en cet endroit. Des larmes se forment, voilent sa vue. Fatigue, soulagé d'être aux portes de sa libération, plus seul devant un tel moment. Les mots de la Diaconesse sont ceux dont sa carapace, sa forteresse, sa tour d'ivoire s'effondre en larmes. Il se détend, s'enfonce plus à même dans les coussins, tout en se relevant face à elle, pour avoir un peu de tenue. De son autre main, il s'essuie les yeux à tour de rôle:


Merci d'être venue. Je comprends que vous puissiez être étonnée qu'un étranger s'adresse à vous.

Il montre la chambre d'un regard évocateur. Sa tête tourne sur la table de nuit où la pile de courriers délassée de son ruban rouge est éventrée en cascade:

Je n'aurai pas du ni entrer en cette maison ni lire ses correspondances.

Gianni ne laisse pas supposer qu'il n'est point un homme respectable, cependant, il en fera l'aveu si utile, après tout, ils ne se connaissent pas du tout, il se doit d'être réservé. il n'a jamais rien confié à quiconque. Il ne veut pas se voir refouler sa confession si prés du but:

Mais si je n'avais pas eu cette audace, je n'aurai pu faire appel à vous. .

Même s'il sait très bien, que bien des services sont alertés. Une amie à lui le sait tout autant. Pas un secret tant que ça. L'Italien n'a pas d'autre choix dans son état. Le plus discret ne pourrait être que le mieux. Il fait silence. Pénible de trop parler, sa gorge se désséche et sa fatigue s'intensifie au fil des émotions déferlantes et différentes à chaque sujet entamé, sentiments et réactions partagés, vécus.Il se détend pour de bon. Bien calé en arrière parmi les coussins. Il offre un sourire de bienvenu, affaiblit, léger . Il espére que Exaltation Lablanche, le sentira, le décélera. Ses yeux se ferment un peu, les rouvre, pour lui demander:

Je peux répondre à certaines questions si c'est nécessaire pour la confession, pour vous rassurer sur mes intentions. J'ai besoin de vous pour recoller les morceaux de ma vie, partir le coeur léger, réparer mes erreurs ou les reconnaitre, si jamais... Aussi...Pour...

Comment l'exprimer...C'est flou pour lui ce qu'il en sera de la suite. Il n'en sait rien lui-même. Sans doute qu'il ne comprend pas le pourquoi de son SOS. Une bouteille jetée à la mer. Combien de temps se confrontera-t-elle aux vagues et au courant, pour être pêcher ou bien s'effondrer par là, brisée ou pas, visible ou pas, le message sauvé lisible ou pas.Personne ne sait les risques de ne pas. Ne pas. Ou pas. Autant à l'infini que l'inverse, d'être découverte, ramassée, ouverte, vidée et lire.L'Italien pose ses yeux mi-clos, un peu brûlants, fiévreux sur la Diaconesse, à la chevelure flamboyante, aux traits rassurants, aux paroles douces. La confiance fait son oeuvre. Il est entre de bonnes mains. Pour ses premières minutes en tout cas.
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Xalta
La petite voix de la méfiance qui boudait et tapait du pied dans un coin de sa conscience est balayée par les larmes qui roulent sur les joues grisâtres du jeune homme. Elle le regarde, muette, un brin impuissante devant ce déferlement de larmes. Il lâche une de ses mains pour canaliser ces rus d'eau salée. Etrangement, elle se sent en confiance en présence de cet homme au passé et à la vie plus que trouble, enfin si elle se fie à son instinct. Il semble aussi se détendre. Il se cale plus profondément dans les coussins tout en se redressant. Elle balaie de nouveau la pièce du regard quand il lui montre la pièce. Des questions elle en a plein. Elles se bousculent mais ne franchissent pas encore la barrière de ses lèvres.

Nécessité fait loi, parfois.

Un adage banal mais elle n'ose pas trop parler pour le moment , il lui faut bénir les dictons tous faits qui permettent souvent de faire face à bien des situations quand on manque parfois de réparties. Elle garde sa main dans la sienne, ne voulant pas rompre un lien, ténu, mais qui se tisse entre lui et elle. Peut-être que cela la rassure aussi. Elle devine la chaleur de sa main au travers de la paroi fine du cuir, elle presse ses doigts entre les siens. Elle est calme, son pouls est régulier, ses craintes se sont envolées, sa voix demeure posée et chaleureuse. Sa voix de mère, sa voix de diaconesse comme aiment parfois lui dire ses proches.

Vous avez bien fait.


Elle le devine fiévreux, des signes de sa faiblesse actuelle, elle cherche du regard de quoi apporter un peu de rafraîchissement. Alors elle finit par lâcher sa main, elle se lève, fait le tour de la pièce.

Je reviens. Ne bougez pas.

La dernière indication est inutile. Dans son état, il n'irait pas loin s'il était pris d'idée de bouger. Elle lui adresse un sourire qui se veut à la fois confiant, réconfortant, et qui doit inspirer la confiance.

Je vais chercher de l'eau.

Elle franchit le seuil et retraverse la maison qu'elle connaît. Elle se dirige vers la cuisine, elle emplit un broc d'eau fraîche, le pose dans une bassine en céramique, avec un verre et un linge propre qu'elle trouve après avoir fouillé dans quelques placards. Un léger sentiment de culpabilité s'empare d'elle lors de ses recherches. Un sentiment qu'elle balaie rapidement. S'il faut, elle fera appel à des petites mains pour tout remettre en ordre quand tout ceci serait fini. Elle retourne rapidement dans la chambre, elle reprend sa place sur le bord du lit.

Elle pose la cuvette sur la table de chevet, en sort le verre qu'elle glisse dans les mains de l'Italien, pose le linge sur ses genoux puis verse de l'eau dans le verre et une partie dans le récipient, puis elle trempe le linge, l’essore et essuie le visage de Gianni. Ses gestes sont doux, un peu hésitants malgré tout. D'une voix ferme mais empreinte de douceur, elle lui intime un ordre.

Buvez.

Elle attend qu'il lui obéisse. Elle repose le linge sur le rebord de la bassine. Puis elle pose ses prunelles mordorées sur lui.

Des questions, j'en ai. Mais je vais les garder pour moi pour le moment. Il me semble plus judicieux de vous laisser me conter ce qui vous est arrivé et ensuite nous passerons à votre confession.

Elle lui sourit de nouveau, les mains gantées croisées sur ses genoux.

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Gianni
Un Puzzle à reconstituer: la Fin d'un Début ou le Début d'une fin

Sans doute n'aurait-il pas trouvé mieux pour être entre de meilleures mains. Tout se charge au fond de lui d'un ressac d'émotions trop lourdes à porter, le font se vider de cette mer salée qui brouillent ses yeux. Comment pourrait-il en être autrement face au peu de force qu'il reste en lui ? Face au début d'une fin ? Si au moins, cela pourrait être la fin d'un début, pour continuer de plein pied son histoire. Il n'est pas médecin. Il ne peut évaluer un diagnostic. Le souflle de la vie lui laissera-t-il le temps donné pour se libérer de tous ses secrets qui ne délivreront pas leurs messages.Ses yeux se perdent vers le cadre de la porte où dans un mouvement flou, la Diaconesse disparait. Il a peine entendu ses mots dans un écho cristallin d'un au-delà qui l'enveloppe, l'emporte avec lui, quelques minutes. Le temps de se retrouver seul avec sa conscience allégée par la douceur et la profondeur des coussins qui calinent sa nuque. Les yeux portés au plafond, comme si toutes les réponses, les aveux se font vers lui, là-haut. Il ferme ses paupiéres. Il décéle des bruits minimes dans les autres pièces. Ses mains se croisent sur son abdomen. L'Italien pourrait rester là ad vitam pour l'éternité. Il sentirait son corps se détacher du monde du vivant en toute sérénité, combien lui faudrait-il de temps, pour tout quitter ?Il croit à tord qu'il est un grand pêcheur. Le pire au monde. Que tout ce qu'il a commit, personne n'autre n'y est passé. Les visages se dévoilent, les masques tombent. Les siens. Les autres. Les siens oui. Homme de l'ombre aux multiples visages, aux éniéme identités, au long voyage autour des Royaumes. Il arrive qu'à trop jouer de rôles, il ne sache plus qui il est. Il arrive qu'au détour d'un hasard, il recroise ceux de son passé. De les voir sous leur vrai visage, de tomber des nues. De savoir des tas de choses alors qu'il ne le devrait. D'entendre les pires mensonges et de ne pouvoir faire éclater la vérité de peur de se trahir. De flanquer en l'air sa couverture. Il est le dilemme. Le dilemme de tant de vies, de tant de vérités, de tant de secrets cachés et sacrifiés au profit de sa vie, à lui.

Gianni se berce des bruits dans la maison. Il a quelques minutes à lui, à se retrouver avec ses pensées. Il avait songé à écrire à quelques connaissances. Des amitiés, il n'en avait pas. Il n'avait gardé contact ni donné signe de vie.Devant ce constat, cette êvidence. Cela en vaut-il la peine de prévenir ? Qu 'attend-il de cette démarche ? Qu'il est grandit, vécu, qu'il soit tolérant, qu'il revienne sur ses paroles, qu'il se fasse pardonner ? Ne l'aurait-il fait auparavant si cela fut si important ? Et son importance à s'attacher à quelques détails dans une vie, dans une histoire, n'est peut-être rien du tout chez les autres ? Les yeux fermés. Il se sent comme il n'a jamais été. Serein. A quoi bon soulever, se battre pour du passé, du présent incertain, où tout le monde s'en fou. Peut-être ne vaut-il mieux pas les entendre dire être désolé alors qu'ils reprendront leur vie, où dés que cette porte sera franchit, tout sera oublié. La force du passé, c'est de garder en soi tout le chemin parcouru. Savoir ce que cela nous a apporté ou enlevé. Si en retirer quelque chose a été bénéfique ou néfaste. Faire confiance, personne ne le peut. C'est jouer avec sa vie à pile ou face. Les bruits semblent se taire dans la maison. Les pas devraient lui parvenir. Ils le font. Il les entend. Les minutes et les secondes s'écoulent de l'ouverture de ses paupières. L'Italien ne prendra aucune décision pour sa correspondane. Il en la force et l'envie, il fera. Il n'en a pas, il laissera tomber. L'homme sans être cloué sur un lit, au bord de l'agonie, est ainsi d'origine. Ne rien s'imposer qui puisse l'abîmer plus qu'il ne l'est depuis toujours. Certaines lettres se doivent. Elles auront toutes l'incidence capitale de laisser derrière lui, la Vérité à son égard. Non point tant de suspicion ni mensonge malléable. Que vaut la parole d'un mourrant comme lui, mieux que la parole de son vivant ?Le bruit entre dans la chambre, ses yeux s'ouvrent sur le plafond. La tête se tourne sur la Diaconesse reprenant sa place assise sur le rebord du lit. Entre ses mains, il reconnait l'aspect et la matière du verre, froid, lisse. Un linge humidifié vient parcoure son visage, le caresser d'un passage lent, bien précautionneux, estomper cette fièvre.Sa gorge asséchée, ses lèvres gercées. Pas besoin de lui ordonner, il s'éxécute tout seul, pour se désaltérer d'une traite. Il garde la position du verre entre ses mains. La fraicheur de l'objet lui fait un bien immense, il ne tarde pas à le porter sur son visage, sur son front. Les mots de la Dianocesse ne lui échappe pas, il gagne du temps, pour choisir par où commencer. Hasard ou subtilité féminine, elle se veut que l'accident, à relater. Gianni s'enfonce bien en arrière, sans perdre le regard porté sur lui, l'accrocher pour rester éveillé, prouver sa bonne foi. Dans une voix rocailleuse du à l'absence d'avoir parler ses derniers temps, il semble fouiller dans son esprit:


Je devais quitter cette ville. J'avais réussis à avoir des nouvelles de mon ex belle soeur. Pour la rejoindre à Chinon. J'ai oublié qu'il aurait été préférable pour moi, de passer par le Berry. Je ne sais plus du tout en fait si l'un ou l'autre aurait été le mieux. J'avais discuté avant mon départ avec une connaissance en taverne.

Là est la question. Qu'il aurait du approfondir. Prochains courriers en vue ? Possible.

Au cours de la nuit, à proximité, de Tours, un drapeau bien en vue flottait. Le nom "Ultima Ratio Turonensis". Je n'ai pas eu le réflexe d'un demi tour. Je n'avais aucune raison. Au Berry, j'aurai pu comprendre mais en Touraine, pourquoi ? Non, rien ne peut laisser supposer que je risquais un danger.

L'Italien plisse les yeux, fouille dans ses souvenirs, paupières closes:

Quelques sabots de plus, de mon cheval, je fus attaqué par trois hommes. J'en ai la description dans mon esprit. Dés que j'ai pu me remettre un peu, j'en ai fais des portraits. Les coups d'épées sont tombés de tout côté. J'ai rebroussé chemin vers ici grâce à ma monture qui m'a servit de soutien.

L'Italien fait une pause. Autant pour reprendre salive de sa bouche qui s'asséche vite que pour exprimer la fin de son récit, résumé à une attaque nocturne.
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Xalta
Elle demeure assise près de lui, parfois elle mouille le linge et lui humecte le visage, voyant le verre vide , elle l'emplit. Elle a les gestes d'une mère envers son enfant malade. Son attention est portée sur ses propos. Cela ressemble à une embuscade ou bien à une erreur , cela arrive. rarement mais cela arrive, elle se souvient de l'erreur tragique qui avait amenée l'armée dont elle était membre à frapper un de ses amis. Elle en avait été malade durant des semaines, elle avait prié pour sa guérison.

Elle avait combattu bien des fois aussi bien sur les champs de bataille que lorsqu'il s'agissait de défendre ou de parcourir les routes. Tant de coups, de sang versé, tant de larmes, tant de dégoût. Malgré les années, elle n'arrivait toujours pas à se faire à cette horreur. Pourtant elle poursuivait car tel était son devoir. Elle ne comprenait pas ceux qui prenaient une sorte de plaisir à tout cela.


Je vois... vous avez eu énormément de chance d'être encore en vie et d'avoir réussi à venir jusqu'ici.
Souhaitez vous que je fasse venir un médecin ?


Elle s'en frapperait le front de ne pas y avoir pensé plus tôt. Mais ses mains se contentent d'essorer plus fort le linge. Et de se morigéner : Tudieu qu'elle était crétine parfois ! Il y avait des fois, elle se demandait où elle pouvait avoir la tête . Elle continue d'essorer son malheureux linge qui finira à force d’être tordu entre ses mains gantées totalement sec.

Vous voulez me raconter ? Soulager votre conscience ?


Elle le regarde droit dans les yeux. Son regard est franc, direct et à la fois chaleureux.

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Deuil.
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Gianni
Le Monde ne cesse pas d'exister parce que je ferme les Yeux

L'Italien a tourné viré maintes et maintes fois en lui, la façon qu'il ferait pour étaler ses années de voyage, un carnet intime dont il suffit de relire les pages écrites de sa main, en italien, sa langue d'origine. Il fronce les sourcils soudain. Il en avait bien un tombé entre les mains d'Alix du Viviers, Maréchale en Guyenne, à l'époque qui l'avait prit en chasse avec ses hommes suite à ses 11 tentatives de révolte sur la Mairie de Castillon. Il remet un peu un coussin en son dos entre grimaces et contorsions. Ce souvenir soudain lui faire perdre de vue ce qui vient de lui arriver. Il est capital pour lui de mettre la main sur ce fichu carnet aux aveux déroutants d'une dizaine de meurtres de femmes laissées derrière sa route, son itinéraire au cœur des Royaumes. Agité, nerveux, il n'arrive pas à retrouver son calme. Gianni laisse échapper entre ses lèvres:

Un médecin, s'il vous plait...

Ses yeux fouillent dans le regard de la Diaconesse. Il n'y a pas que cela dont il doit se confesser, se confier. Il se sent vide, sans savoir par où commencer. Il lève une main avec une mine dépitée:

Par où commencer...

La Fin. Elle est ainsi:

J'avais un frère Angelo, frère jumeau. J'ai appris y a un bout de cela que j'étais un bébé abandonné ou caché pour des raisons mystérieuses. Séparé de ma véritable famille Les Laskarina . Mon enfance et mon adolescence ont été dans une sorte de monastère en Italie, cloîtré, à l'écart de la vie sociale, en retrait dans les montagnes.

Mince, zut. Il divague complet. L'Italien s'embarque direct dans ce qu'il aurait du préserver. Cela fait qu'un tour dans sa tête. Gianni reprend:

Victoria d'Alaya, qui m'avait prévenue à l'époque, suite à des documents retrouvés, est venue avec mon frère jumeau Angelo à Castillon, où j'habitais à l'époque. Nous nous sommes vus à quelques reprises mais le fait d'avoir un double, un sosie, un miroir en face de moi m'a déstabilisé.

Une respiration de prise, un peu d'eau, grâce au verre d'eau penchée contre ses lèvres pour les humidifier, et boire une rasade:

De surcroît, la proposition de les suivre en Savoie, à Chamberry, pour connaitre la Famille entière et prendre mon appartenance aux Laskarina m'a fait faire demi-tour et ne pas les suivre. L'impression que ma vie serait plus la mienne, plus sous mon contrôle.

Il soupire longuement:

Y a quelques mois, fatigué de mes assauts nocturnes sur les Mairies, de errer, marcher sans but précis, à part celui-là, et secoué par les tensions violentes en Provence, le Marquisat des Pyrénées Orientales, je remonte vers Chamberry, à proximité.

Il pose ses bras le long de son corps, la tête penchée sur le côté, vers la Diaconesse:

J'avais pris l'initiative d'accepter d'avoir un jumeau. De vouloir en faire sa connaissance. A mon arrivée, la nouvelle de la mort d'Angelo, mon frère jumeau, depuis quelques mois à peine, m'a fait l'effet...

Il s'arrête net, conscient de l'horreur que ses lèvres vont prononcer comme mots. Un long silence.
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Xalta
Elle patiente, il est muet comme proie à des tourments intérieurs. Elle ne dit rien, elle ne veut pas le brusquer ni précipiter sa fin au cas où. Non point qu'elle ne sache se conduire en présence de mourants ou de morts, jusqu'elle aimerait mieux éviter que celui-ci ne meurt avant d'avoir soulager son âme. Eviter si possible qu'il passe son éternité sur la Lune, lieu des enfers. Cela lui fait penser qu'il faudra aborder le sujet du baptême. Un médecin ! Il souhaite un médecin. Elle se lève, ouvre la fenêtre, une bouffée d'air s'engouffre dans la pièce, elle la respire à pleins poumons, puis du regard elle scrute les alentours. Son homme est là, il patiente, il a relevé les yeux vers elle quand elle a ouvert la fenêtre son attention surement attiré par le bruit même léger. Elle lui fait signe, il s'approche l'air inquiet puis en quelques mots brefs elle lui donne l'ordre d'aller quérir un médecin. Il hésite à la laisser seule avec un étranger mais elle le rassure et surtout elle se fait plus impérieuse. Elle glisse sa main sur le pommeau de son épée qu'elle n'a pas quitté. Elle sait s'en servir. L'homme part, elle lui fait confiance. Il reviendra seulement avec un médecin.

Elle se rassoit près de l'homme. Elle soutient son regard. Elle se veut bienveillante et surtout inspiratrice de confiance. Elle ne juge pas l'homme qu'elle en face d'elle. Pas simple car elle sait que ce n'est pas quelqu'un de bien. Elle sait disons qu'elle devine mais elle ressent aussi beaucoup d'autres choses qui émanent de lui comme une sorte de fragilité. Mais peut-être se leurre-t-elle ? Il commence son récit.

Italien donc, il confirme ce que son prénom laissait entrevoir sur ses origines. Un Italien, donc. L'image d'autres ultramontains viennent alors affleurer en sa mémoire. Aimés, hais et affectionnés. Haï ? Peut-être en effet. Mais avec le temps certaines choses s'apaisent pour ne laisser place qu'à une profonde déception et amertume.

Laskarina ? Ce nom ne lui est pas totalement inconnu mais elle ne saurait dire où, quand ou comment elle a pu entendre un jour l'évocation de ce nom.

Victoria d'Alaya, ce nom aussi elle le connait. Léger froncement de sourcils, son cerveau travaille tout en écoutant. Il lui semble qu'elle a croisé la jeune femme au détour d'une taverne. Fichue mémoire qui lui fait faux bond ! Qu'importe, cela lui reviendra forcément.

Il évoque sa famille. Les sentiments divers qu'il a ressenti. La famille, source de tant de joies, de peines, de problèmes aussi. Rien n'est jamais simple dans une famille, composer avec les autres cela demande beaucoup de compromis sans verser dans les compromissions. Elle peut comprendre cette peur de perdre le contrôle de sa vie. Une peur qu'elle a eu.

Elle demeure impassible quand il narre ses prises de mairies. C'est donc un brigand. Un de ceux contre lesquels elle lutte. Mais en même temps, n'est-elle pas l'amie d'un voleur-pilleur ? Si. Une de ses multiples contradictions. La Provence , le marquisat, la Savoie, des provinces qu'elle connait un peu pour y avoir été ambassadrice orléanaise. Cela la ramène des années plus tôt. Non , elle ne le juge pas. Elle est là pour l'écouter. Même si elle doit faire taire de nouveau la petite voix de la méfiance qui lui souffle qu'elle devrait le laisser là, gisant sur son lit. Par mimétisme empathique, elle penche aussi la tête.

Il lui apprend la mort de son jumeau qu'il ne connaissait pas vraiment. Il ne termine pas sa phrase, mais dans sa tête, un mot surgit, incongru pour poursuivre cette phrase en suspend: soulagement. Pourquoi est-ce le premier mot qui lui vient en tête ? Aucune idée. D'une voix douce, elle reprend ses derniers mots.

Vous a fait l'effet de ?

Elle est suspendue aux lèvres de l'Italien.

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Victoria.d.alaya
Elle tourne, elle tourne dans une ville qui lui est inconnue. Il faut réfléchir, faire par élimination. Sa visite dans une sorte d'asile de soins pour démunis ne donne rien. Il semble même que personne n'ait entendu parler d'un Gianni Laskarina, ou peut-être ne s'adresse-t-elle pas aux bonnes personnes. Mais si c'est le cas, cela veut dire qu'il côtoie un monde qui n'est pas celui de la jeune femme. Un monde qu'elle n'a pas envie de côtoyer. Pourtant elle est venue jusqu'ici pour lui.

Et si il était déjà mort et enfoui sous un tas de chaux ... Aurait-elle échoué encore une fois ? Elle n'avait rien su pour Angelo et il était mort seul. Gianni s’était il éteint dans la même solitude, froide et sombre, sans une main pour tenir la sienne à la dernière seconde ? De nouveau elle se sentit responsable de cette mort possible. Et diable ! Pourquoi avait-il voulu juste à ce moment, juste alors que la guerre rodait dans les duchés voisins, venir à sa rencontre ? Pourquoi elle ?

La petite anglaise stoppa sa monture, observant l'homme qui attendait là, tenant par la bride un second cheval. Il n’était pas seul. Imperturbable, il observait la porte à demi-ouverte d'une maison face à lui. Deux choix s'offraient à elle. Demander à l'homme si il sait quoi que ce soit, en dévoilant le nom et les quelques détails qu'elle connait, au risque de le voir la refouler plus ou moins violemment. Ou ... user de culot. Faire comme si elle logeait ici, au mieux comme si elle connaissait parfaitement les lieux, et y entrer sans même lui laisser le temps de dire ouf.

Mais elle n'a pas l'occasion de faire le choix. Une femme apparait à la fenêtre de la dite maison, et demande à l'homme d'aller quérir un médecin. Victoria n'a guère le temps que de déterminer la couleur rousse de sa chevelure. L'avantage c'est que l'homme file, obéissant à l'ordre donné.

Un médecin, cela pourrait vouloir dire un blessé, un mourant, ou un malade aussi ... Mais jusque là, ça reste la seule piste qu'elle ait pu trouver. Et elle commence à fatiguer. Rien ne lui coutera de demander. Dès la disparition de l'homme, elle vient attacher son cheval près de l'autre et s'approche de la porte. Hésitation un instant, elle se sent partagée entre le désir de savoir et celui de fuir pour ne pas être prise pour une voleuse. Le premier pas est fait, elle avance, lentement, elle longe les murs, elle entend la voix, un homme même si le ton est faible, elle ne distingue pas vraiment les mots. Elle se rapproche de cette porte entrebâillée et écoute, retrouvant son enfance au château de Wrington lorsqu'elle épiait son père et son frère ainé en pleine discussion politico-militaire.

Un silence puis l'homme reprend lentement.


J'avais pris l'initiative d'accepter d'avoir un jumeau. De vouloir en faire sa connaissance. A mon arrivée, la nouvelle de la mort d'Angelo, mon frère jumeau, depuis quelques mois à peine, m'a fait l'effet...

Le sang de Vicky se fige dans ses veines. L'entendre prononcer le nom d'Angelo, c'est comme un coup de poing dans son sternum, ça lui coupe le souffle, elle serre des dents pour ne pas gémir et se colle un peu plus le long du mur, le regard vide fixé sur la tapisserie face à elle.

La femme reprend le fil de la discussion. La brunette est paralysée, incapable de faire ou dire la moindre chose, elle veut savoir aussi. Angelo évitait de parler de son frère, pour lui il l'avait renié lors de ces retrouvailles, avant même de le connaitre, et cela lui faisait mal. C’était comme si une partie de lui était morte avec l’éloignement de son jumeau. Gianni était il "mort" en apprenant celle de son double ...

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Wolf song (Celtic version)
Gianni
La Passion d'une Amante....

Pas de femme dans son récit. Cet homme serait-il le plus grand célibataire des temps ? Peut-être...Le rapport avec son frère jumeau, il y en a un bien dissimulé, sous des tonnes de non-dits. L'Italien sent des va et vient furtifs autour de lui. Ses yeux dérivent sur la silhouette un peu floue. La fenêtre. Un échange rapide, un vent frais balaie ses boucles sur son front. Ce ne peut-être que bon signe. L'action est imminente pour lui, pour le sauver. Il l'espère. Que ce soit en ce sens. Il lui faut dire le mot. Il le lâche:

Libre. Soulagé.

Il prend une grande inspiration:

Je n'ai eu que la tristesse de l'annonce de la mort, qui coupe les jambes, fait partir dans un vertige, à presque perdre conscience, à perdre toute énergie, vidé, égaré.

A ne plus savoir où je suis. J'ai ressenti l'impression d'être coupé en deux, qu'il me manquait cette moitié. Malgré tout, que je pourrai lutter toute ma vie, je me sentirai seul, vide, sans cesse. A deux doigts de mourir pour n'importe quelle raison. A ne pas avoir ou plus avoir de raison de vivre.


Il serre les dents:

Vous n'imaginez pas combien c'est fort, que ça vous dévore de l'intérieur, sans comprendre. Sans savoir d'où ça vient, et pourquoi. Cela vous travaille, ne vous lâche pas tant que vous ne prenez pas votre courage à deux mains, pour affronter.

Il secoue la tête, il réalise soudain qu'il avait occulté la raison non point du reniement de son frère jumeau, de ne point vouloir le connaitre, qu'il s'est construit une idée fausse à laquelle, il y a cru au point d'en culpabiliser, de s'en persuader. Les larmes lui montent devant cette vérité soudaine:

Je n'en suis pas plus soulagé, c'est faux. Je me suis persuadé que c'était le cas, que je ne voulais pas suivre Angelo pour garder ma vie, ma part entière à moi sans qu'il ne vienne, tout chambouler. C'est faux. La seule peur était cette nouvelle famille et son rang.

Il renifle par accoût, se passe la main sur les yeux:

J'avais fais un choix. Celui de ne pas vouloir m'éloigner de Castillon, d'une amante. Notre relation secréte dont peu devait savoir si ce n'est sa meilleure amie. Peut-être quelques uns de ses autres amants ou amis qui l'ont été ou le deviendront peut-être amants.

Un secret. D'une Passion.

Gianni s'affaiblit soudain de plus en plus, sa voix se fait plus faible:

Comme j'aurai aimé que tout ça soit différent mais je ne peux revenir en arrière, tout refaire autrement. Je regrette. Je regrette.

Il s'enfonce davantage dans les coussins, recherche le moelleux, qui peut l'entrainer dans le vide, si appréciable:

Je ne devais pas tomber amoureux. Je ne le devais pas. Plus elle venait à moi pour s'en enquérir, être rassurée. Je mentais. Pour ne pas perdre nos instants charnels, que nous ne pouvions réfréner, plus forts que nous. Impossible.

Il pousse un long soupir:

J'ai préféré la rejeter, ne plus avoir de contact avec elle. Je ne voulais plus lui offrir ce que le lendemain effacerait par d'autres rencontres. D'autres hommes. D'autres corps qu'elle gouterait, y prendrait du plaisir, en jouirait pleinement, et l'affirmant à haute voix à la moindre pointe de jalousie qui m'échapperait malgré moi.

L'homme raconte:

Nos retrouvailles ont été ponctuées par ses voyages à elle. Peut-être quelques uns des miens, c'est flou.

Je ne suis pas d'un tempérament à me mélanger à la foule. J'avais été échaudé bien des fois par des incidents. Elle était la seule que je cotoyais, voyais à Castillon.

Elle avait ses amis en journée et soirée. Nous n'avions jamais partagé d'instants avec eux. Nous nous retrouvions que tous les deux quand l'occasion et les opportunités nous convenaient ou nous le permettaient.

Ce que beaucoup se pavane d'être libertin ou libertine.


Il laisse ses mains caresser le drap:

Un soir, j'ai voulu enfreindre toute régle. Ne plus resté dans une taverne à côté qu'elle veuille bien me rejoindre. J'ai fais le pas, l'effort de venir à elle malgré du monde. Je ne sais pas ce que j'ai cru. Rien de ce que j'aurai aimé ne fut.

A peine arrivé, elle prit la poudre d'escampette avec un gars. Je me suis retrouvé dans le vide, sans aucune considération pour moi, pour ce que j'aurai pu représenter à ses yeux.


Ses larmes se sèchent, son visage à la moindre expression se tire:

Tout s'est effondré. Je me suis vu n'être rien. Un moins que rien. Invisible. Elle, à s'amuser, à vivre son présent, sans se soucier, de moi, de ce que nous partagions.

Je m'en serai tenu là sans réellement en tenir compte, passer mon chemin, entrevoir de partir de Castillon, parce que je n'avais plus ma place au milieu de cette ronde dans laquelle, elle, seule, est maitresse du jeu.


Gianni hausse les épaules, tourne son regard dans celui de la Diaconesse:

Nous avions une régle, ne pas être amoureux. Je ne l'ai pas respecté. Cela aurait pu en rester là cette soirée-là. Alors que j'étais perdu dans mes pensées, il y avait un couple présent. Sa meilleure amie et l'amant de celle_ci. Amant propriétaire de la taverne où nous nous tenions.

Il m'a apostrophé sans ménagement avec " qu'est-ce que t'as, t'es amoureux". Vérité, confidences entre amis, soutien du groupe à mon amante. La vérité blesse aussi. Surtout quand elle est perçue par des étrangers, des regards extérieurs. Là, difficile de nier. N'avais-je point eu envie de lui balancer de s'occuper de son amante à lui, plutôt, de la mienne ? Si...Je n'en fis rien, comme muet, sourd, aveugle soudain.

Vous sentez le terrain qui glisse sous vos pieds, la chute inêvitable vers laquelle vous allez tomber, parce que, vous n'avez rien à perdre, parce que vous croyez impunément que personne n'a à se méler de votre vie et de ce que vous vivez avec autrui.


Il serre les mâchoires:

Comme si ce n'était pas assez de ne point être son Roy de la soirée. Comme si j'en avais pas assez prit en pleine figure. Comme si la vérité soudaine ne m'était pas assez dure à affronter. Il fallait cette touche de protection des amis. Au courant, semble-t-il, de leur relation et des conditions.

Il fait une longue pause, perdu, revoyant la scéne comme si il y était encore. Cette onde de colère maitrisée qui l'avait envahit, qu'il controlait jusqu'à ce que ses pieds se posent sur la table en face de lui, et que cela fasse sortir de ses gongs le proprio:

Ca a prit une ampleur quand mes pieds ont envahit la table. J'avais besoin d'être détendu, au calme, la décision que je prendrai au cours de cette nuit. Dans un état second. J'ai à peine réalisé que la proprio du lieu m'avertissait de retirer mes pieds, que j'étais viré dehors.

Il lève une main pour lui faire comprendre, en signe d'attente:

Je vais vous expliquer où je veux en venir. Je me suis réjouis quand mon amante a prit la route avec le fameux gars qui avait quitté la taverne en sa compagnie. Ils prirent la route avec une fortune, et beaucoup de marchandises. Ils ont été brigandés et ont tout perdu.

Il ne cache pas son sourire qui s'étale soudain:

Oui, je l'ai pensé haut et fort que c'était bien fait pour eux. Qu'il lui aurait été préférable à la blondinette de passer une soirée agréable en ma compagnie plutôt que ce départ improvisé.

Pour le proprio de la taverne, j'ai été réjouis, quand quelques mois plus tard, il n'était plus avec la meilleure amie de mon amante. Oui...


Gianni pense au retour de bâton de la vie:

La roue tourne. Je m'en réjouis. Je n'avais jamais souhaité du mal à quiconque. Et jubiler des malheurs d'autrui, je sais, que cela ne devrait pas.
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