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Si la Garonne racontait...ou les jours Agenois

Kallias
Dans la journée, alors que le temps était pour le moins clair mais frais, le jeune Rom rentrait paisiblement de l'université, où il avait encore éprouvé la furieuse envie de faire manger un livre de tactique de base à la rectrice, mais il s'était contenu. Il avait déjà assez de procès, et ne souhaitait pas retourner en prison pour avoir voulu enseigner à une cruche... Cette pensée le fit rire, et il s'imagina la rectrice s'étouffant avec les pages d'un livre. C'est donc d'un pas très joyeux quoique toujours ralenti et soutenu par une canne qu'il parcourait la petite distance hors-la-ville qui menait jusqu'à la cabane.

Soudain, ses yeux noirs se portèrent sur la petite maison, et se figèrent sur un cheval. Heulynn et Kallias voyageant à pied, il était surprenant de trouver pareille monture devant chez eux. Il y avait donc quelqu'un... Sachant son épouse normalement seule à l'intérieur, le bohémien changea sa canne de main, pour que la droite puisse venir se poser sur la garde de sa rapière... Il eut un léger sourire en tâtant son arme, se rappelant que par deux fois il avait du la reforger, et qu'elle resterait à sa ceinture pour toujours, et peu importe le nombre de lames qu'elle connaitrait.

Kallias poussa tranquillement la porte de la cabane, du bout de sa canne, rassuré d'avoir entendu quelques bruits de simple conversation. Il vit d'abord son épouse, à qui il lança un sourire amoureux, puis l'étrangère à la chevelure flamboyante. Pensées pour d'autres rouquines... Il eut un élan de confiance, peu habituel chez le gitan, et fit un sourire parfaitement poli et sincère, avant de se présenter d'une voix à l'accent de l'Espagne méridionale.


Hola...

Il s'inclina main sur le torse.

Je suis Kallias Alciato, la bienvenue à vous que ma femme semble accueillir.

D'un geste vif, il jeta sa cape sombre sur l'unique lit de la pièce, et défit son foulard qui laissa retomber une foule de boucles noires.
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Truth - Casa Sitomni & Alciato
Enored
La rouquine sourit lorsque la Tsigane parla d'une maladresse, il lui arrivait aussi d'être maladroite de la sorte lorsqu'elle avait un accès de colère. Elle accepta un verre de vin que lui proposait Heulynn en souriant.

Slainte ! dame Heulynn comme on dit chez moi. dit elle en levant son verre. J'aime beaucoup votre ... curiosité. D'habitude on me traite de sorcière sans chercher à savoir qui je suis. Quelques ... mésaventures m'ont poussée à fuir mon pays je n'y suis plus la bienvenue pour longtemps ... mais j'y ai perdu tous les miens plus rien ne m'y retient.

Enored avait parlé plus qu'elle ne l'aurait voulu. Il y avait chez la jeune femme qui se tenait en face d'elle quelque chose qui d'inexplicable qui donnait confiance à l'Irlandaise. Alors que le silence était retombé, la porte s'ouvrit.

Hola... Je suis Kallias Alciato, la bienvenue à vous que ma femme semble accueillir.


Un sourire franc, aucune arrière pensée, décidément, ces gens étaient étonnants. Ils l'accueillaient comme Guillaume et ses hommes l'avaient fait. La rouquine lui rendit son sourire.


Latha math messire Kallias ! Moran... merci de votre accueil. Je suis Enored Ó Ceallaigh.

Pour la première fois depuis le départ de Guillaume et Cassandre, la jeune femme baissa sa garde et laissa sa méfiance s'endormir. Elle se sentait bien là avec eux.
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Heulynn
Oui, je comprends...les a priori ont la dent dure pour ceux qui sont différents...
Le nez dans son gobelets d'hypocras, Heulynn entendit la porte s'ouvrir.
Ses yeux rencontrèrent ceux de son époux, elle lui rendit son sourire et vint vers lui, pour déposer un baiser tendre sur sa joue en passant son bras autour de sa taille.
Elle observa les deux protagonistes se présenter l'un à l'autre. L'éclat du regard du Scorpion indiquait que Enored lui inspirait confiance. Ainsi donc, elle ne s'était pas trompée en l'invitant à demeurer là.
Les différences, les gens rejetés ou ignorés lient parfois des liens difficilement explicables. Telle était l'influence des caractères et des auras que peu prenaient en considération.
Heulynn libéra son étreinte lorsque Kallias se défit de ses vêtements et admira une fois encore le mouvement de ses cheveux, sur ses épaules.

Enored aussi avait l'air à l'aise, ce qui réjouit Heulynn.
A Agen, ils avaient préféré ne pas fréquenter les gens du crû. Ils étaient arrivés ici avec une armée et avaient été blessés lors d'un combat particulièrement inégal. On n'hésitait pas à les taxer de vandales, de pilleurs de mairie et de marché alors que rien de tout cela n'était vrai.
Aussi, faire une nouvelle connaissance faisait du bien !

Vous êtes arrivée récemment, par ici ? Vous êtes seule pour voyager ?
Heulynn déposa un autre gobelet sur la table mais ne le remplit pas. Elle mit de l'eau à chauffer, dans le chaudron, au coin de la cheminée avec un sourire entendu vers son mari.
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Enored
Vous êtes arrivée récemment, par ici ? Vous êtes seule pour voyager ?

La rouquine n'aurait sut dire depuis combien de temps elle était là. Elle regarda la jeune femme s'activer et en profita pour réfléchir.


Cela fait un long moment que je suis dans ce pays. Plusieurs saisons je dirai. J'ai vécu quelques temps à la Teste, où j'ai été accueillie par la bande de ... mercenaires ... le mot était lâché ... la rouquine verrait bien quelle serait leur réaction.. de Guillaume de Rastignac. Je suis restée avec eux jusqu'à ce que Guillaume et l'ancienne duchesse Cassandre, décident de partir vivre en mer. J'ai failli les accompagner mais ... c'était trop dangereux pour moi. Je ne suis pas seule, Jean-jean est quelque part non loin mais je ne sais où j'ai perdu sa trace.

La rouquine se tut et releva les yeux de son gobelet et fixa le couple intensément.

A vous confier ceci ... je me met en danger et je vous mets peut être en danger, la bande de Guillaume n'était pas appréciée de tous ici en Guyenne... mais je ne sais comment ... j'ai confiance en vous.
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Kallias
Il sourit à l'étreinte sincère de son épouse, et lui donna un nouveau baiser avant de s'attabler face à l'étrangère.

Latha math messire Kallias ! Moran... merci de votre accueil. Je suis Enored Ó Ceallaigh.

Encantado Enored, pour ma part je suis Rom Kalo, gitano de Castille si vous préferez.

Kallias eut un nouveau sourire, voyant sa jeune Romni s'activer pour lui préparer de la tisane. En effet, hormis quelques rares exceptions, il ne buvait pas, haïssant perdre le contrôle sur sa personne. Il écoutait d'une oreille attentive les propos de la rouquine.

A vous confier ceci ... je me met en danger et je vous mets peut être en danger, la bande de Guillaume n'était pas appréciée de tous ici en Guyenne... mais je ne sais comment ... j'ai confiance en vous.

Usted sabe... Dans ce duché, j'ai participé à la prise d'une ville, Cahors, il y a quelques mois, tailladant de ma rapière quelques gadjé qui défendaient leur cité...

Il eut un sourire, repensant à cette aventure pour le moins violente, mais de laquelle il était sorti indemne. Il ne savait trop pourquoi il confiait ce genre de renseignement sur sa personne à une totale inconnue, simplement, la confiance semblait partagée.

D'autre part, nous sommes arrivés blessés ici après avoir combattu un ost de Guyenne, donc ne vous préoccupez pour le danger... Nosotros gitanos tenemos la costumbre.

Le Scorpion se retourna alors vers son épouse, et éclata d'un rire discret, après lui avoir lancé un regard complice.
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Truth - Casa Sitomni & Alciato
Enored
La rouquine sourit. Depuis son arrivée dans le royaume de France, elle avait eut le don de tomber sur des gens comme elle. Les mercenaires de Guillaume d'abord, eux maintenant. La jeune femme se détendit complètement.

Mòran taing de cette confiance et surtout de cet accueil. Je me sens ... moins seule.


Elle aurait voulu leur conter son histoire. Elle aussi dans son pays avait une bonne part de l'Ost Anglois à ses trousses. Mais elle ne voyait pas l'utilité d'ennuyer ces gens avec ses histoires... histoires qui ravivaient une blessure loin d'être guérie. Un voile de tristesse passa dans le regard de la jeune femme. La complicité de ce couple ouvrait une autre blessure... Il lui fallut un effort particulier pour chasser ces pensées douloureuses.


Je ne veux abuser de votre hospitalité. Merci encore de m'avoir accordé du temps. Je pense vous laisser à présent.
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Heulynn
L'eau chaude vint baigner quelques herbes retenues dans une étamine au fond du gobelet. L'odeur qui s'en échappa laissait deviner qu'on y avait mis très certainement du thym serpolet.
Heulynn versa ensuite un autre gobelet d'Hypocras à Enored pendant qu'elle discutait avec Kallias.
Elle n'intervint pas dans la discussion. Ces deux-là se trouvaient des points communs et elle se contenta de les écouter en venant s'asseoir au bord du lit.
Enored semblait à l'aise et prendre plaisir à faire une petite halte dans une vie qui semblait tout aussi hasardeuse que celles du couple Alciato.
Pourtant, Heulynn nota un changement, le regard perdit de son éclat et devint triste. Peut-être était-ce de parler des souvenirs qui la remuait...dans ce cas, il valait mieux laisser s'apaiser le trouble.

La jeune femme décida de s'en aller.
Heulynn se leva pour la rejoindre, de l'autre côté de la table.

Dame Enored, vous n'abusez absolument pas de notre hospitalité. C'est une joie de partager des moments comme celui-ci.
Sachez que notre porte vous est ouverte et que nous serons là, pour vous accueillir.

Heulynn se tourna vers son mari.
Kallias et moi sommes ici pour encore un petit moment.
Puis, posant à nouveau le regard sur la rousse...
Et si nous nous croisons à nouveau ailleurs...la joie de vous revoir sera grande, croyez-le bien !
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Enored
La rouquine acquiesça d'un hochement de tête et leur sourit.

Je ne sais combien de temps je restera là. Une semaine ... un mois... qu'importe. Pour moi le temps n'a aucune... importance. Et un lieu où parler sans être jugée est un lieu important. A bientôt donc. Slan agat Dame Heulynn hag Sieur Kallias.

Enored sortit de la cabane et siffla. Elle n'eut pas longtemps à attendre. Son cheval la rejoint. Au loin, Louis revenait avec un fagot de bois. La rouquine grimpa sur le dos de sa monture. En passant près du gamin elle le salua, se promettant de revenir voir le couple qui l'avait si gentiment accueillit.

Une pression de genoux sur la croupe du cheval et celui ci se mit au galop. L'animal et sa cavalière s'enfoncèrent dans la forêt. Seul lieu où la rouquine se sentait vraiment en sécurité depuis qu'elle avait quitté les mercenaires. Lieu où seul celui qu'elle voulait serait capable de la retrouver... la jeune femme laissa ses pensées vagabonder jusqu'à ce qu'elle arrive dans le refuge qu'elle s'était choisie depuis son arrivée à Agen.

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Heulynn
La jeune femme s'en alla...Ils étaient à nouveau eux deux, à l'abri du vent froid qui commençait à souffler, balayant les dernières feuilles d'automne.

Si seulement, ce vent pouvait pousser les heures et les faire avancer plus vite que leur habituelle course qui devenait longue et monotone.

Qu'est-ce qui était le plus difficile à supporter ?
Agen était certes une ville plutôt calme qui ne correspondait pas vraiment à ce qu'elle aimait. De plus, une épidémie de lumbago empêchait les taverniers de laver les vitres de leur bui-bui, ce qui n'incitait guère à y entrer. Faire le tour de toutes les tavernes pour y découvrir un pochtron endormi était décourageant !
Les lois, en Guyenne, étaient plutôt casse-pieds et enfermantes, ça, c'était plus que certain !
Deux procès sur le dos...Un pour la fameuse armée des Pourfendeurs pourfendus et l'autre pour avoir suivi des cours publics et payant sans une prétendue visite préalable dans un château qui se trouvait à 43 lieues de là où ils étaient obligés de séjourner.
Ca n'aidait pas à trouver la situation agréable...
Ensuite, évidemment, c'était cette impossibilité de se dire : "On part, demain ? On va ici ou là ?" Non, ils étaient coincés dans ce village, sans autre possibilité que d'en faire le tour encore et encore...
Ca, c'était vraiment le plus dur !

Pour des Tsiganes, habitués à voyager, à ne séjourner que peu de temps dans un même endroit, se savoir dans l'obligation de renoncer à cette liberté, cela dépassait toutes les peines possibles et imaginables.
C'était comme de couper les ailes à un aigle et l'obliger à rester au sol, sans jamais plus revoir le ciel.
Heulynn se sentait comme ça, empêchée de vivre, on lui avait pris sa liberté, on leur avait volé ce qu'il avait de plus cher !

Il était fort à parier que le matin même de leur libération, ils seraient sur les routes, à se laisser porter par le vent...

Heulynn revint auprès de son époux, passa ses bras autour de son cou, posa un regard fier sur lui.

Je l'aime bien, cette rousse !
Tu as remarqué comme nous avons des rousses dans notre entourage ?
Elle rit...Certains les disent sorcières...quelle drôle d'idée...
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