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[RP]Pour déplacer 1 montagne, enlève les petites pierres !

Spirit_a.
"Dis-toi d'abord ce que tu veux être, puis fais ce qu'il faut pour le devenir.
Epictète

[Pau, Janvier 1462]

La petite blonde qu'elle était avait eu une journée à la fois compliqué et comblante. Mais comme chaque instant mauvais semblait prendre plus de place que les autres, ceux-ci l'emportaient. Elle s'était disputé avec sa tante et son père. Le sujet ? Son apprentissage plutôt vide encore, et son obligation d'être loin d'eux. Elle faisait de son mieux pourtant. Elle les aimait. Mais elle voulait devenir chevalier. Depuis longtemps maintenant. Et par dessus tout, elle voulait que sa famille, comme son précepteur soient fiers d'elle. Elle tentait donc de faire ce qu'il fallait pour réussir. Elle avait donc demandé à la mercenaire de Pau qui l'avait le plus intriguée de l'aider. De lui apprendre à se battre. Afin de pouvoir épater son maître quand il se déciderait à lui accorder du temps pour lui apprendre cela. Mais là encore, il y avait une épine dans le pied de l'enfant. Si rapidement, elle avait respecté et s"était intéressée à cette femme, les membres de sa famille, eux, ne semblaient pas l'apprécier. Vexée, blessée et têtue, elle avait pourtant tenu tête, et avait décidé de prendre son avenir proche en main. Que cela plaise ou non.

L'intrigante Evil, à la fois inquiétante et captivante avait accepté de la guider et de lui enseigner son art. Le premier contact laissait présager un caractère dur, et froid. Le second laissait s'imaginer une entente possible. Sorte d'image de sa mère un peu étonnante. Alors, pour fuir ses conflits, et pour apprendre, elle la suivrait dans ce voyage. Ils allaient déplacer les petits cailloux du bas de la montagne, pour la déplacer. Escorter, travailler, bouger, prendre l'air, apprendre, souffrir et découvrir. Cela lui ferait le plus grand bien. Sa besace contenant une tenue de rechange et sa poupée fétiche, nommée Espérance était bouclée. Elle prit également sa dague. Le tout étant prêt, elle le prit sur elle, et se dirigea vers l'extérieur, à la recherche de sa professeur de ce jour et des suivants. Elle l'avait choisi, malgré cette petite voix en elle qui lui disait qu'elle allait en chier. L'emmerdante gamine - comme le disait affectueusement Jurgen - avait son caractère, et malgré sa faiblesse apparente, elle avait un mental plutôt fort pour son âge. Il ne restait plus qu'à le prouver.

Elle rejoingnit la demoiselle au point de rendez-vous, tout autonome qu'elle était depuis qu'elle se trouvait dans cette ville, et la salua d'un hochement de tête, poli en ajoutanr :


Bonjour,
On part tout d'suite ? Ou on s'entraine d'abord ? On s'entrainera pendant l'voyage dis ?
En fait, dis, j'ai pris ça, y'a besoin d'autre chose ?
Y d'vait pas y'avoir un aut' gens avec nous d'ailleurs ?


Anna et ses mille et une questions simultannée. On ne la changerait pas de suite là-dessus. Il serait peut-être bon de penser à prendre ton cheval par exemple. Celui que t'as si gentiment offert ton précepteur. Même si monter ce cheval pendant tout un trajet risque d'être phénoménalement épique tant il s'agit d'une discipline si nouvelle encore pour la blondinette. L'espoir reste néanmoins. Il ne reste plus qu'à... assumer, prendre le départ et...
aller ramasser les petits cailloux et les déposer où chacun voulait être déposer.
La grande aventure pouvait commencer.

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Evil_erin
« On ne peut rien apprendre aux gens. On peut seulement les aider à découvrir qu’ils possèdent déjà en eux tout ce qui est à apprendre. » Galilée

Avais-je perdu la tête ? Assise auprès du feu, dans l'obscurité miroitante des flammes, je me demandais encore ce qui m'avait pris d'accepter la demande de la gamine. Elle avait quoi ... six, huit ans à tout casser. Peut-être cette masse de cheveux blonds qui avait fait ressurgir en moi le manque de ma chair. Et puis après tout, il y avait longtemps que je n'avais eu une élève. Et qui sait, peut-être que celle-ci aurait un caractère suffisamment fort pour supporter ce que je pouvais lui enseigner.

De retour à Pau, j'étais bien certaine qu'elle m'attendait de pied ferme. Le peu de fois où je l'avais croisée en taverne, elle me semblait à la fois réfléchie et déterminée, ce qui pour son âge était plutôt une bonne chose.
J'étais repassée chez moi, avais mis en ordre mes affaires, refait l'inventaire de ma besace, et vérifié l'état de mes armes. Ma longue épée dans mon dos qui ne me quittait jamais, mes deux dagues dans leur étui respectif, cachées aux endroits stratégiques, ainsi qu'une de ces petites épées Séleucides dont j'avais fait l'acquisition à Montpellier, simplement par gout des armes et celles-ci étaient plutôt belles. Oui, même les démons pouvaient être esthètes et apprécier qualité et harmonie dans certains arts.

Je lui avais dit de me rejoindre sur la route à l'ouest de la ville, la direction d'Orthez, autant voir d'entrée de jeu si elle était capable de comprendre un ordre simple et d'y obéir. Et visiblement, c'était le cas, elle avait même du faire usage de son sens de l'orientation, ou fort possible qu'elle était assez maline pour demander sa route.


Bonjour,
On part tout d'suite ? Ou on s'entraine d'abord ? On s'entrainera pendant l'voyage dis ?
En fait, dis, j'ai pris ça, y'a besoin d'autre chose ?
Y d'vait pas y'avoir un aut' gens avec nous d'ailleurs ?


Je grinçais des dents sous le flot de questions. Je pouvais au moins remercier l'autre enfoiré d'une chose, m'avoir obligée à apprendre la patience malgré moi.

Bon alors écoute ... Première leçon ... On obéit à mes ordres sans discuter, on ne prend pas d'initiative, et .... On évite de poser trop de questions. Pigé ? Bien ...

Je gardais un instant mes émeraudes étincelantes sur elle puis les laissais faire un tour d'horizon.

T'as raison pour une chose ... Doit y avoir un autre "gens" avec nous, et il a intérêt de rappliquer ...

Que foutait le ténébreux ? Il ne perdrait rien pour attendre si je devais me déplacer pour le ramener par la force.
Me retournant vers la gamine, je remontais un peu son col sur sa figure.


On risque de passer quelques nuits dehors. T'as pris une couverture chaude au moins ?

De nouveau, je jetais un coup d'œil vers la ville puis vers le ciel. Il était d'un gris maussade, pluie ou neige, je n'aurai pu dire ce qui était le pire, mais il ne tarderait pas à tomber quelque chose de là haut. Je resserrais mes gants sur mes mains tout en maugréant sur la ponctualité masculine ...
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Evil_erin
Parce que rien ne se déroule jamais comme prévu ...

Nous avions finalement quitté la ville à deux, la petite et moi, le ténébreux restant introuvable. Il n'était pas aux endroits habituels et je n'avais pas envie de repousser le départ pour le chercher, de toute apparence, il n'était même pas en ville.

Et nous avions pris la route sous une bruine fine et mordante, elle ne semblait pas avoir de fin, pénétrant lentement mais irrémédiablement à travers nos vêtements. Nous marchions depuis un bon moment lorsqu'on bifurqua, quittant la grand' route pour longer l'orée du bois par son intérieur. La densité des arbres nous protégeait un peu malgré l'absence de feuilles, la pluie insidieuse s'était transformée en une brume givrante.

La gamine semblait aller toujours bien. Bavarde, elle ne cessait de poser des questions, de jacasser, de chantonner parfois. Pour ce qui était de la discrétion c'était loupé, et il y avait bien longtemps que ma solitude n'avait été brisée par le pépiement d'une fillette. Nous n'étions pas vraiment en danger, alors je la laissais faire, répondant parfois d'un ou deux mots.

Pau/Orthez ne devait pas poser de problème. A priori. J'avais même passé quelques jours dans la forêt un peu avant et c'était très calme comme endroit. Sauf que c'est toujours quand on s'y attend le moins, quand on baisse sa vigilance, que les problèmes surgissent.

Sous la forme d'un homme, un brun, que nous n'avions ni entendu ni aperçu. D'un geste rapide, il attrapa Anna en l'enserrant d'un bras, lui collant une dague sous la gorge. Mon réflexe fut de porter ma main dans mon dos pour en extirper ma lame mais il émit un petit grognement et resserra sa prise sur la petite.


Donnez moi vos besaces ... vite !

J'enrageais mais je ne pouvais rien faire, l'attaquer mettrait à coup sur la vie de la petite en danger, mais le laisser faire ... Je déposais lentement mon sac à terre puis fis deux pas sur le coté. Il commença à se rapprocher et j'en profitais pour bondir, lui collant mon poing dans la figure. Il lança une bordée d'injures et, rejetant sa proie sur le coté, l'envoyant valdinguer un peu plus loin, il lança son bras armé de sa dague contre moi. Je la sentis pénétrer la chair du muscle de mon bras. Je grimaçais sous la douleur et portais aussitot la main sur la blessure.

Le brigand ne demanda pas son reste, il attrapa nos affaires au sol et fila dans l'ombre humide du bois. Je me penchais aussitot sur la blondinette à terre, le sang s'écoulant lentement le long de mon bras.


Hé la gamine ... C'était pas une leçon prévue ca ... Tu n'as rien ?

Je la regardais essayant de distinguer dans la pénombre si elle était blessée ou pas. Décidément, les grains de sable avaient la fâcheuse habitude d'arriver au mauvais moment.
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Spirit_a.
Oui, Anna était débrouillarde et bavarde. Trop bavarde vraisemblablement. Ce fut une des premières remarques du démon sur patte qui lui servait de professeur de combat. Obéir aux ordre sans discuter ne représentait pas de réels problèmes. L'habitude cillienique referrait surface rapidement. Pour l'initiative se serait certainement un peu plus dur, mais tout restait faisable malgré tout. Par contre pour le trop plein de questions, là, ça risquait d'être quasiment impossible ! Petit être sociale et sociable par excellence, la blondinette avait besoin d'exprimer ses doutes, ses questions, ses joies, ses peines, ses surprises, ses découvertes, ses... Bavarde. Simplement bavarde. Pourtant les yeux eviliens la fixant, elle se contenta muettement d'hocher la tête en silence. Elle ferait un effort. Elle essayerait.

Le départ fut pris. Leurs pas les emmenaient lentement vers un drôle de destin. S'éloignant de ses repères, et des gens qu'elle aimait, la môme suivait docilement la mercenaire. La curiosité et le besoin de se changer les idées pour oublier tant la pluie fine que la distance qui augmentait la poussèrent à reprendre quelque peu ses piaillements. Le froid la faisant quelque peu frissonner. Elle n'était plus habituée à de telles conditions de vie. Depuis un an et demi, elle vivait dans l'opulence d'une richesse paternelle exorbitante, qui n'avait de limite que le confort d'une petite princesse et de son père, si attentif.

L'idée de se plaindre lui avait effleuré l'esprit et pourtant, son ami imaginaire avait fait irruption subitement à ses côtés pour lui rappeler des souvenirs heureux. Lénaïc et les voyages. Lénaïc râlant à chaque pas en demandant le sempiternelle : "c'est quand qu'on arrive ? J'ai mal aux pieds !!" Lénaïc en somme. Présence en filigranne à ses côtés, brêves apparitions qui venaient toujours consoler, ou réconforter la miocharde. Alors, les bavardages reprirent, encouragés par des réponses - certes brèves mais existantes - de la jeune femme.

Et puis tout s'accélerra. Tant que l'enfant fut collé contre des jambes masculines, une dague sous la gorge sans comprendre ce qu'il se passait. Saisie. La peur l'envahit subitement, et le regard perçant fixe, de façon apeurée et surprise, la mercenaire. Elle ne comprit rien. Rien de ce qui se passa par la suite. Elle fut projettée plus loin, telle une plume, et tomba lourdement sur le sol, mangeant un peu de boue au passage. Evil arrivait déjà. A sa question, elle se contenta de secouer la tête. Elle n'avait pas pour habitude de se plaindre de ses bobos. Elle se redressa et s'essuyant le visage d'un revers de manche. Son poignet gauche la faisait légèrement souffrir. Une petite coupure dû à la dague et au coup de poing paraît son cou d'un bijou étonnant. Plus de peur que de mal. L'enfant fixa ses prunelles sur Evil, et se contenta de murmurer un :


Et vous ?

Debout, et délestée, l'enfant était sous le choc. C'était la deuxième attaque de brigands qu'elle vivait. La première avait signé la mort de sa mère. Le mauvais souvenir la choquait plus que la scène en elle-même. Pourtant, honteuse, confuse, elle assimilait là une leçon qui n'en était pas une. Sa besace disparue, elle regrettait déjà amèrement d'y avoir glissé sa poupée fétiche, son Espérance, maigre souvenir, et seul lien qui la ramenait à un passé joyeux, et évoquait ses proches. Seul soutien possible en cas de véritable coup dur. Elle avait à nouveau perdu un être cher. Se souvenant de la leçon de son premier précepteur, elle se mordit la lèvre pour ne pas laisser couler une larme à l'idée de cette perte. Une larme d'inquiétude, d'amertume et de regret. Car : "voir un enfant pleurer énerve les grandes personnes". Seul un murmure s'échappa de nouveau de ses lèvres, pour exprimer ce flot chaotique de sentiment :

Je suis désolée...

Elle aurait voulu dire bien plus. La phrase fut suspendue pourtant. Elle se contenta de suivre la mercenaire à nouveau. Vengeance ou non, ce début de voyage avait déjà semé le trouble dans l'esprit et le coeur enfantin. Pour bien commencer, cela commençait bien ! Les sourcils se froncent pourtant sur une nouvelle résolution, qu'elle énonce très clairement alors :

Faut vraiment, vraiment que j'apprenne à me battre... Je connais quelqu'un qui sait Témasculer les gens. Tu sais faire toi ? Parce que si j'le revois lui...

Premier pas vers l'apprentissage du combat : la colère. Qui n'est pas bonne conseillère. Mais tout de même. Il ne restait plus qu'à se remettre de ces émotions fortes, de ses petites blessures et... poursuivre. Bien que plein de questions habitent sa petite tête, elle les tait pour le reste du chemin. La leçon a fait son office. Mais... Dit, Evil ? Comment on va faire sans couverture maintenant ? Sans argent ? Sans...
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Evil_erin
La gamine semblait secouée mais indemne. Elle se releva seule et je me retins de l'aider, ce n'était pas ma fille, il ne fallait pas que ma tête s'y perde. Une légère entaille ornait son cou où une goutte de sang perlait. Je posais deux doigts sous son menton pour lui soulever la tête et vérifier que ce n'était rien. Je doutais que son père ne me pardonne un égorgement.

Et vous ?

Ma frustration colérique me fait plus mal que le coup de dague, vois tu ... marmonnais-je entre mes dents.

Anna était désemparée, elle cherchait autour d'elle et je voyais bien à son regard que si elle n'avait pas été si forte, elle se serait laissée aller à pleurer la perte de ses biens.


Je suis désolée...

Ne le sois pas. C'est moi qui dois l'être, j'aurai du être plus vigilante malgré la courte distance qu'on a à parcourir.

Je m'accroupis alors devant elle.

Ca ne se reproduira pas ...

L'éclat de mes émeraudes qui la fixaient valait mieux que le serment que je ne prononcerai pas.

Nous allons marcher jusqu'à Orthez, nous nous reposerons là bas. Tu penses que tu peux le faire ?

Je me redressais et commençais à marcher, la laissant reprendre ses esprits et decider par elle-même qu'elle en était capable. A ses mots, je sentais sa détermination, elle y arriverait.
Au bout d'un moment, les bruits de pas derriere moi m'assurant qu'elle y était, je repris la parole.


Dès que nous serons arrivées, j'achèterai ce qu'il faut pour remplacer ce que nous avons perdu. Avais-tu quelques objets personnels dans ta besace ?

Je resserrais le col de ma cape et tirais sur mes gants, le froid et l'humidité me transperçant de partout.

Vois dans chaque chose qui t'arrive, le moyen d'en tirer un avantage, un apprentissage, une alliance. La vengeance viendra à son heure ...

Je continuais d'avancer sans me retourner. Il fallait qu'elle trouve la force de surmonter la peur qu'elle avait eu, qu'elle soit capable de résister au froid qui devait lui faire claquer les dents et les rotules, qu'elle apprenne puisqu'elle avait voulu venir pour cela.
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Spirit_a.
Quand son père et sa tante voyait en Evil une personne froide en laquelle ils n'avaient pas confiance, la mioche y voyait tout l'inverse. Elle n'était pas débordante de tendresse, certes. Elle était simplement... Evil. Justement ou non, l'enfant sentait en elle que cette réserve, cette distance qu'elle créait était avant tout une barrière, une protection. Bien plus facile à franchir que celle de feue sa mère. C'est ce qu'elle ressentit quand la mercenaire lui fit lever doucement le menton pour vérifier son cou. Distante mais accessible. Et attentive. Et, si elle était désemparée, attristée et quelque peu apeurée, elle n'en regrettait pas pour autant son choix. Elle l'avait suivi. Et il faudrait plus que cela pour la démotiver.

A ses phrases réconfortantes, à la façon dont elle se mit à sa hauteur, et à son regard perçant, elle y lu de la gentillesse. Elle ne la grondait pas, alors que, sans elle, la mercenaire aurait toujours sa besace sur l'épaule. Elle y lu aussi une promesse. ça ne reproduire pas. Elle se contenta d'hocher doucement la tête et d'esquisser un maigre sourire, encore sous le choc et pourtant, ô combien rassurée par sa présence, par sa voix. Un nouvel éclat brilla dans ses yeux à la question de la marche. Bien sûr qu'elle pouvait le faire. Et elle le ferait sans broncher. Après quelques secondes où son esprit s'égarait, elle revint à elle-même, et entreprit de la rejoindre, la suivant d'abord à quelques mètres de distance. Et puis, elle parvient à la rattraper à grands coups de petites enjambées rapides et écouta en silence la nouvelle réplique évilienne avant de répondre tout bas - leçon avait été retenue :


J'avais juste une couverture, un vêtement de rechange et ma... La phrase fut suspendu quelques secondes dans le silence ambiant. Oserait-elle lui avouer ? Et ma poupée Espérance. Mais ça... Juste le temps de secouer la tête, en songeant à l'impossibilité de remplacer une telle perte sentimentale et elle enchaîne : Vous n'avez pas trop mal, quand vous marchez ? C'est profond ? Faudra vous soigner aussi quand même, hein ?

Parce qu'Anna est ainsi. Toujours à s'inquiéter pour les autres. Bien plus pour les autres que pour elle. La douleur de son poignet était déjà bien loin de ses préoccupations premières. Sa mère lui avait appris à endurer la douleur en silence. Et à attendre qu'elle passe. La perte d'Espérance, au-delà de l'aspect matériel restait un vide étonnant, mais elle sentait derrière elle, le fantôme imaginaire de son ami Lénaïc qui traînait les pieds en ronchonnant, et le moral lui revenait alors rapidement. Elle savait que la mercenaire était forte, et qu'elle lui donnerait un bon exemple. Cela ne l'empêchait pas de s'inquiéter pour elle, pour sa santé, et son bien-être.

Elle l'écouta en silence, continuant de mettre ses pas dans les siens. Elle frissonnait, retenant tant bien que mal ses dents de claquer. Le froid était saisissant. Ses mains s'enfoncèrent dans les poches de sa jupe, se glissant le plus près possible de l'intérieur des cuisses. Elle avait trouvé instinctivement l'endroit le plus chaud de son corps. Enfonçant son cou au maximum pour rentrer son menton sous les bords de ses hauts, elle avançait. Un pas après l'autre. Et si Lénaïc lui demandait sans cesse : "c'est quand qu'on arrive ? On est encore loin ?" elle ne posa jamais la question à sa maîtresse. C'était bien difficile déjà. Et ce n'était que le premier jour. Elle rêvait d'un feu et d'une bonne nuit de sommeil pour se remettre de ses émotions. On n'apprend pas si facilement à surmonter ses peurs. Pourtant sa voix s'élève, lasse et tremblante à cause du froid et de la fatigue, mais elle formule une idée enfantine pourtant pas si bête :


Quand tu auras fait ce qu'il faut quand on sera arrivé en ville, Est-ce que tu pourras m'apprendre ce que je dois faire ou ce que je peux faire dans un cas comme ça ? Est-ce que je peux taper quelque part ? Ou... je sais pas... Y doit bien y avoir un cruc à faire nan ?

Enfin, elles franchirent l'entrée de la ville. Enfin... Il ne restait plus qu'à faire ce qui avait été dit. Juste le temps de souffler un peu, de se reposer vaguement, et de reprendre la route. Evil avait une nouvelle ombre. Une ombre un peu bavarde, mais qui ferait de son mieux pour ne pas l'agacer, ou la décevoir. Une ombre qui avait encore énormément à apprendre... Mais si elle pouvait éviter que cela se reproduise...
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Evil_erin
Les vagues de souvenirs et de manques qui venaient s'écraser contre ma mémoire me noyaient parfois sous un flot de contradictions. Le loup voulait fuir les humains, le dragon voulait les détruire, et le démon ... le démon, lui, voulait se venger, en vain, comme une malédiction qu'il portait en son âme sombre, s'être fait duper par les enfers et à présent en supporter le choix pour l'éternité.

Sa sollicitude m'agaçait. Ce n'était pas à une môme de cet âge de s'inquiéter de ma blessure. J'avais arraché la manche déchirée de ma chemise pour en faire une sorte de bandage serré et arrêter l'hémorragie, de toute façon, je n'avais d'autre solution que d'attendre que nous soyons arrivées.

Je marchais comme à mon habitude et je savais bien que pour elle c'était une allure un peu rapide, mais me ralentir pour l'attendre lui aurait laissé croire qu'elle-même pouvait ralentir, le cercle vicieux de la pensée connexe il valait mieux éviter. Ne pas endormir l'esprit tient le corps éveillé.


Quand tu auras fait ce qu'il faut quand on sera arrivé en ville, Est-ce que tu pourras m'apprendre ce que je dois faire ou ce que je peux faire dans un cas comme ça ? Est-ce que je peux taper quelque part ? Ou... je sais pas... Y doit bien y avoir un cruc à faire nan ?

Sans la regarder, j'esquissais un sourire en entendant son petit défaut de prononciation. Il n'était pas dit qu'il ne soit perdu avant la fin de ce qu'elle voulait apprendre.

Lorsque nous franchîmes les portes d'Orthez, je nous dirigeais directement vers l'auberge municipale. Une soupe bien chaude, une chambre pour quelques heures de sommeil réparateur, j'avais rapidement désinfecté ma plaie pour l'envelopper d'un linge propre. J'avais passé outre les indiscrétions de l'aubergiste : "vous avez une jolie petite fille" ... "vous avez été attaquées sur la route?" Qu'est ce que tout cela pouvait bien lui foutre ? Nous avions besoin de repos et je n'avais pas de temps à perdre à le remettre à sa place.

Une poignée d'heures plus tard, j'avais laissé Anna dormir de son sommeil d'enfant pour me rendre au marché du village. Le message laissé la veille au ténébreux semblait avoir porté ses fruits, il était là, adossé nonchalamment à un pilier d'étal, à discuter avec une brune vendeuse de pain de son état.

Je me plaçais entre eux deux et le fixais de mes émeraudes, sans aucun sourire.


Donne moi ta bourse.

Le ton était simple, sans aucune accentuation, sans aucun sentiment. Ses yeux sombres furent traversés un instant par un éclair, puis sa main bougea lentement pour disparaitre dans les replis de sa cape et en ressortir avec l'objet. Son regard se porta sur le bandage qui dépassait de la chemise déchirée.

Tu peux pas t'empêcher, hein !

J'attrapais l'objet et, sans répondre, je le laissais à sa discussion pour entrer dans une échoppe de tisserand. Une chemise neuve pour moi, une tenue de rechange pour la gamine et deux couvertures de facture grossière mais qui semblaient bien chaudes. Il ne restait plus grand chose dans la bourse et il faudrait encore que l'on mange et paie la chambre de l'auberge.

J'y retournais aussitot et en entrant dans la chambre, je vis qu'elle était toujours endormie. Un autre visage de petite blonde se superposa au sien et j'esquissais le mouvement de tendre la main vers elle. Le cri d'un vendeur ambulant dans la rue me ramena à la réalité et, lorsqu'elle bougea dans son sommeil, je laissais tomber mes achats sur le lit sans ménagement.


Réveille toi !

Je changeais ma chemise rapidement puis roulais une couverture et les vêtements de garçon que j'avais acheté pour elle dans la seconde couverture, en faisant une sorte de baluchon.

Allez ! Lève toi, enfile tes bottes, on y va !

J'avais encore à envoyer un message au Borgne pour qu'il nous envoie une bourse bien pleine par coursier. Puis nous reprendrions la route vers Bordeaux.

Les trois jours qui suivirent furent calmes. Le ténébreux avait finalement suivi, nous marchions en début de journée si le temps était beau, profitant d'un soleil hivernal non négligeable, évitant les heures froides de la fin de journée. Et le Borgne avait été efficace.

A Mimizan, j'avais profité de la plage pour m'entrainer seule bien qu'Anna ait tenu à m'accompagner. Après tout, elle était là pour ca et rien d'autre. Je passais une bonne demi-heure à m'entrainer avec Chantebrume, parant, esquivant, fendant l'air froid marin qui piquait mes joues et semblait vouloir geler mes oreilles à les en faire tomber.
Puis j'avais planté l'arme dans le sol sableux, la laissant vibrer sous le vent qui chantait une chanson d'au delà de l'horizon, et je m'étais rapprochée d'elle. A deux mètres environ, je l'avais observé un moment, tout comme elle m'observait juste avant, puis j'avais hoché la tête lentement.

D'un mouvement leste et vif, je l'avais attrapée par les épaules, retournée contre moi et j'avais posé ma main sous sa gorge, un doigt tendu représentant la lame sur sa carotide.


Vas y ... Montre moi ce que tu pourrais faire ... Mais n'oublie pas ... Je n'hésiterai pas à te tuer ...

Je sentais son pouls battre plus vite contre ma main et je resserrais la pression autour de ses épaules, presque à lui faire mal.
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Spirit_a.
La fin de ce jour de voyage s'était faite en silence. La petiote, épuisée, suivait la mercenaire, telle un bon petit toutou bien dressée. La peur de se perdre, de rester seule au milieu de nulle part lui donnant les forces nécessaires pour la suivre dans cette longue marche rapide. Elle ne pipa mot quand elles arrivèrent à l'auberge et que le tenancier posa plus de questions qu'elle à la seconde, laissant Evil tout gérer. Elle en avait assez fait pour la journée et la soirée. Il était temps qu'elle apprenne à fermer son clapet de temps à autre. Quand la soupe fut avalé, réchauffant un peu, et dilatant légèrement le petit nœud de son estomac, elle s'endormit comme une masse.

Le rêve fortement agité et angoissant au départ, où elle se retrouvait une dague au cou - oui oui, y'a comme une impression de déjà vu - à hurler de douleur et de peur sous un mouvement quelconque de l'attaquant dont elle ne voyait pas le visage ; se transforma lentement en un conte dé fée merveilleux, où son chevalier Naïc arrivait sur son blanc destrier et terrassait l'ennemi avant de la prendre dans ses bras et de l'emmener loin de tout ça, courir dans les prés verts, naviguer sur les flots agités, et se faire couronné princesse. Le rêve était si beau finalement qu'elle ne voulait pas se réveiller. Malgré les bruits montant de la rue, malgré la présence qui se glissait dans sa chambre. Malgré le mouvement et le bruit provoqué par les achats qu'Evil avait laissé tombé sur le lit. Seul l'ordre evilien fut capable de faire ouvrir les yeux à l'enfant, qui lâcha malgré tout un léger grommellement. Au deuxième ordre, la blondinette s'exécuta, et s'asseyant, elle enfila ses bottes sans commentaires, observant discrètement sa professeur s'afférer.

Anna suivait partout Evil, quitte à rester des heures à l'observer. En silence, elle tentait de mémoriser les mouvements qu'elle faisait avec son épée, sautillant d'un pied sur l'autre pour se réchauffer. Jusqu'à ce que la mercenaire s'avance, et qu'elle s'immobilise. Pleine d'envie, d'impatience, d'espérance. Apprends-moi, voilà ce que ses yeux lui criaient. La joie qu'elle avait ressenti au hochement de tête avait vite disparu sous la surprise de l'attaque qu'elle lui porta. Sur son épaule, les doigts se crispent et l'enfant retient un "aïe" en se mordant la lèvre.

Des premiers instants d'incompréhension, et d'inquiétude qui font accélérer les battements de son petit cœur, elle se demande ce qu'elle fait... Elle ne sait pas ce qu'elle peut faire pour se sortir de cette situation. Surtout qu'Evil ne semble pas plaisanter. Elle ne sait pas, elle pensait qu'Evil lui dirait comment réagir. Où donner un coup... Que faire. A quoi joue Evil ? A-t-elle fait une erreur en la suivant dans ce périple, arguant à qui voulait l'entendre qu'elle était gentille, et qu'elle lui faisait confiance ? Pourtant, la situation était bien réelle. Evil la laisse à son incertitude et à son ignorance en lui proposant de trouver seule une solution. Elle ne voulait pas la décevoir et pourtant,... Pourtant elle ne savait pas. Et le doute s'amplifiait du fait qu'elle ne voulait pas lui faire mal. Jusqu'à ce que le déclic se fasse, et qu'elle comprenne qu'Evil ne lui en voudrait pas. Que c'était peut-être en essayant qu'elle comprendrait le mieux. Qu'elle devait au moins essayer quelque chose. Se ressaisir. Parce qu'elle était là pour apprendre. Et que répondre aux coups ne seraient probablement pas punis comme du temps où elle grandissait auprès de sa défunte mère/

Alors, de toutes ses forces elle tenta d'écraser le pied de sa partenaire devenue subitement brigande. Oui mais, un poids plume qui écrase un pied ne fait pas réellement de résultats... Mauvaise idée qu'elle avait eu là. Oubliait-elle la menace de la dague imaginaire qui pesait sur sa gorge ? L'idée était mauvaise, elle le comprit bien vite... Son bras libre d'emprise sur l'épaule se meut par réflexe, et bouge légèrement, effleurant une partie du corps de la mercenaire. Hasard totale. La môme ne trouve plus d'idée et quand les idées viennent à elle, elle ne les voit pas. Peut-être qu'un de boule marcherait ? Si elle parvenait à lancer fortement sa tête en arrière, le choc ferait bouger l'agresseur, et lui permettrait peut-être de s'échapper de son emprise... Mais les doutes persistant, la môme ne fait rien de plus et se contente de bafouiller un :


Je... J'vois pas trop...
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Evil_erin
Je patientais. Le vent marin soulevait le sable par rafales et venait l'abattre contre nos jambes. Le bruit de l'eau clapotait avec force derrière nous, mais seul le bruit de la respiration de la petite fixait mon attention. Elle hésitait, je le sentais bien, c’était normal. Une enfant plus fragile aurait fondu en larmes et appelé son père, une plus nerveuse se serait débattue et aurait risqué sa vie inutilement.
Anna semblait réfléchir. Surement essayait-elle d'abord de comprendre, de savoir si sa confiance n'avait pas été mal placée. Elle perdait un temps précieux, mais elle apprendrait par la suite à réagir avec rapidité pour garder au maximum le contrôle de la situation.

Enfin elle tenta quelque chose et écrasa de toutes ses forces mon pied. C’était loin d’être agréable mais insuffisant pour faire lâcher prise à un sale type, et je resserrai mon étreinte contre ses épaules, comme si la douleur me faisait rassembler mes forces pour la supporter. Puis je penchais mon visage contre elle pour lui murmurer d'une voix rauque.


Tu sais ce que j'aurai fait moi ?

Je marquais un léger blanc, mon souffle chaud et régulier contre son oreille, laissant son esprit mettre en place son système de tri des informations qui lui parvenaient.

J'aurai enfoncé profondément mes dents dans la main qui tient la dague. Si fort que j'aurai eu le gout de son sang dans la bouche. Si violemment que le réflexe de mon assaillant aurait été d'ouvrir la main, lâchant l'arme. Il aurait hurlé comme un diable et il m'aurait jetée à terre. Et là, j'aurai eu une chance de mon coté ... Tu comprends ?

D'un geste brusque, comme si j'avais ressenti ce que je venais de décrire, je la jetais à deux ou trois mètres devant moi. L’élan du mouvement la fit rouler à terre et je continuais de l'observer pour voir chacune de ses réactions.

Quand tu te trouves face à un ennemi que tu ne peux pas abattre, tu dois d'abord penser à te donner une chance de survivre. Inutile de te débattre et de crier, d’extérioriser ta peur, tu perds juste tes forces et tu ne réfléchis plus.

Maintenant tu peux fuir. Courir sans te retourner. Tu auras perdu tes biens, mais gardé le plus précieux, ta vie.

Ou alors ... tu te prépares à la riposte. Il va revenir à la charge. Il te faut agir la première. Tu as une arme ? Sers t'en ! De la terre, du sable autour de toi ? Aveugle le ! Il a lâché son arme ? Sers toi de ta petite taille, roule entre ses pieds, récupère son arme ...


Je m'accroupis près d'elle alors que ses yeux ne me quittent pas, où je peux y lire un millier de sentiments et de questions.

Frappe où çà fait mal ... Avec mon doigt, je pointe sur son corps les noms que j’énonce. Rein ... Foie ... Entre jambes ... Cœur ... Jugulaire ...

Je me relève et récupère mon épée pour la glisser dans mon dos. Sans un regard pour elle, je me remets en route.

Un jour je te montrerai comment en un seul coup sur une jambe ou un bras, tu peux faire se vider un type de tout son sang ...

Les jours de voyage se poursuivaient tranquillement, je récupérais les "bagages" à prendre à droite, à gauche, et la gamine continuait de développer ses sens, son intuition, et parfois ses réflexes dans nos petites joutes.
Arrivée à Saintes, je me rendis compte qu'il lui fallait un peu de repos, et je fis l'aller-retour à Angoulême sans elle, la laissant en sécurité sous la surveillance cachée de ma meilleure ennemie. Je la retrouvais fraîche et dispose, et nous pouvions poursuivre la route. Par chance, mes ordres étaient suivis par tous et je n'avais perdu personne en chemin.

Autour d'un feu, entourées de pins des landes qui sifflaient dans la bise du soir, je fis signe à Anna de s'approcher de moi et lui tendit un linge qui renfermait un couteau.


Tiens ... Il est petit, son manche est fin, idéal pour la taille de ta main, et sa lame aiguisée, excellente pour découper la viande. Je veux que tu t’entraînes à le manipuler.

Je sortis une pomme de ma besace puis ma dague de son étui accroché à ma hanche. Mon poignet tourna un instant, faisant valser l'arme, la laissant glisser entre mes doigts. Puis finalement je lançais la pomme à quelques centimètres au dessus de ma main ouverte, la tranchais en deux d'un mouvement vif pour laisser retomber les morceaux dans ma paume.
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