Anne_blanche
Chapitre Premier : Enfance
Mère pleurait, encore et toujours. Elle senfermait dans sa chambre, mais les enfants entendaient le silence.
Un jour, on avait fait monter Anne dans le coche aux armoiries de Culan en Berry, avec Matheline, la camérière de sa mère. Bacchus, le gros cocher que la petite fille connaissait depuis sa naissance, et qui la regardait toujours avec des yeux mouillés, menait lattelage. Mère lavait embrassée sur le front, lui avait recommandé dêtre sage, et avait promis quelle arriverait bientôt avec Gabriel et Blanche.
Blanche Sa jumelle. Cétait la première fois que les deux fillettes étaient séparées. Pendant toute la durée de linterminable voyage, du Berry jusquà Vienne, Anne avait ressenti comme un arrachement. Elle se serrait contre Matheline, comme jadis contre sa jumelle. Mais ce nétait pas pareil. Matheline en profitait toujours pour la moucher, ou replacer une mèche de ses cheveux sous le bonnet de toile fine, ou pousser de gros soupirs en marmottant des « tout le portrait de son pauvre père » ou « lest trop futée, ct enfant-là ! »
Enfin, un beau matin, Bacchus avait arrêté le coche, avait tapé du manche de son fouet à la portière, sans descendre de son siège.
Nous y vlà ! Agadez donc si cnest point biau !
Vienne. Mère avait choisi Vienne, pour oublier Culan et le Berry. Lon disait que cétait une ville fort agréable, loin des sombres forêts de St-Aignan, loin des tombes de Culan.
Anne sétait penchée par la portière, pour voir, aussitôt rassise dautorité par la camérière.
Voyons, Anne. Que dirait votre mère ?
Ben justement ! Anne nen savait rien ! Pourquoi navait-elle pas le droit de regarder la ville où lon allait vivre, désormais ? Une vague de colère serra les petites lèvres, qui demeurèrent cependant closes. Lenfant savait déjà quil est inutile de raisonner une grande personne. Elle se blottit dans son coin, attendit que la camérière mette la tête à sa portière, et coula un il discret sous le rideau de cuir qui obturait la sienne. Bacchus fit claquer son fouet, le coche sébranla. Lon traversa Vienne.
Tout ce quAnne en vit, ce furent des maisons, toutes serrées les unes contre les autres. Des maisons, et encore des maisons. Les gens se plaquaient contre les murs pour faire place à limposant véhicule. Lon parvint enfin dans une cour, et la petite fille eut le droit de descendre.
Mère pleurait, encore et toujours. Elle senfermait dans sa chambre, mais les enfants entendaient le silence.
Un jour, on avait fait monter Anne dans le coche aux armoiries de Culan en Berry, avec Matheline, la camérière de sa mère. Bacchus, le gros cocher que la petite fille connaissait depuis sa naissance, et qui la regardait toujours avec des yeux mouillés, menait lattelage. Mère lavait embrassée sur le front, lui avait recommandé dêtre sage, et avait promis quelle arriverait bientôt avec Gabriel et Blanche.
Blanche Sa jumelle. Cétait la première fois que les deux fillettes étaient séparées. Pendant toute la durée de linterminable voyage, du Berry jusquà Vienne, Anne avait ressenti comme un arrachement. Elle se serrait contre Matheline, comme jadis contre sa jumelle. Mais ce nétait pas pareil. Matheline en profitait toujours pour la moucher, ou replacer une mèche de ses cheveux sous le bonnet de toile fine, ou pousser de gros soupirs en marmottant des « tout le portrait de son pauvre père » ou « lest trop futée, ct enfant-là ! »
Enfin, un beau matin, Bacchus avait arrêté le coche, avait tapé du manche de son fouet à la portière, sans descendre de son siège.
Nous y vlà ! Agadez donc si cnest point biau !
Vienne. Mère avait choisi Vienne, pour oublier Culan et le Berry. Lon disait que cétait une ville fort agréable, loin des sombres forêts de St-Aignan, loin des tombes de Culan.
Anne sétait penchée par la portière, pour voir, aussitôt rassise dautorité par la camérière.
Voyons, Anne. Que dirait votre mère ?
Ben justement ! Anne nen savait rien ! Pourquoi navait-elle pas le droit de regarder la ville où lon allait vivre, désormais ? Une vague de colère serra les petites lèvres, qui demeurèrent cependant closes. Lenfant savait déjà quil est inutile de raisonner une grande personne. Elle se blottit dans son coin, attendit que la camérière mette la tête à sa portière, et coula un il discret sous le rideau de cuir qui obturait la sienne. Bacchus fit claquer son fouet, le coche sébranla. Lon traversa Vienne.
Tout ce quAnne en vit, ce furent des maisons, toutes serrées les unes contre les autres. Des maisons, et encore des maisons. Les gens se plaquaient contre les murs pour faire place à limposant véhicule. Lon parvint enfin dans une cour, et la petite fille eut le droit de descendre.