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[RP ouvert]L'hôtel de Culan.

Homme_des_bois
Je ... je suis ... Anne de Culan.

Anne, la fille de Valatar Cornedrue, Vicomte de Culan... Le Baron regarda la jeune fille avec intensité. Le regard était le même, plien d'intelligence et révélateur d'une grande volonté.

Il posa un genou à terre et baisa la main d'Anne.

Jeune damoiselle, je suis votre serviteur, je me suis engagé devant la dépouille de votre père à assurer protection à sa famille, et c'est pour accomplir ce serment que je suis là aujourd'hui


Il vit dans le regard de la jeune fille un mélange de bonheur et de crainte, sans doute avait il été trop cérémonieux. Il se releva.[/b]
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Homme_des_bois, dit HDB, Baron d'Aupic
Veuf de Mentaig et du Berry
"Pour le bien de tous et non la gloire d'un seul."
Anne_blanche
Jeune damoiselle, je suis votre serviteur, je me suis engagé devant la dépouille de votre père à assurer protection à sa famille, et c'est pour accomplir ce serment que je suis là aujourd'hui.

Un baise-main ! Il lui faisait un baise-main, comme si elle avait été sa suzeraine, ou à tout le moins une grande personne comme Mère...

Interloquée, Anne ne sut que murmurer un "euh..." du plus mauvais effet, dont elle rougit aussitôt. Fort heureusement, le baron d'Aupic se releva rapidement, dissipant la gêne de la petite. Dans son coin de la taverne, Vignol lové sur les genoux, Dame Giemsa observait la scène.

Messire Baron, Mère est absente, ce soir. Gabriel travaille avec le Père Comis, notre précepteur. Mais vous allez venir chez nous, à l'hôtel de Culan. Mère ne me le pardonnerait pas si je vous laissais passer la nuit en quelque auberge.


Elle devait lever haut la tête pour regarder le voyageur dans les yeux, comme on lui avait appris à le faire quand on parle à quelqu'un. Il lui semblait si grand !
Anne refusait de s'interroger plus avant sur son empressement faire venir le baron à l'hôtel familial. Elle savait déjà qu'il avait été un proche de sa famille, et venait d'apprendre le serment qu'il avait prononcé à la mort de son père. Une petite voix lui soufflait que lui, au moins, accepterait de lui parler de feu le vicomte Valatar. Il n'aurait pas les réticences de Mère, ni celles de Bacchus, encore moins celles de Gabriel. Elle avait besoin de savoir.
Mais une autre voix lui soufflait de ne point demander. Elle avait essuyé tant de rebuffades qu'elle en craignait une supplémentaire. Cette fois, elle serait plus fine. Elle voulait savoir, et elle saurait.


C'est chose dite, n'est-ce pas ?
Homme_des_bois
C'est chose dite, n'est-ce pas ?

Tout en elle respirait la noblesse de coeur, et si ce n'est sa taille, elle n'eut pas paru déplacée au coté des plus grandes Dames du royaume. Le Baron tenta bien de décliner poliment l'invitation, mais il lui fallu accepter finalement, sous peine de voir Anne se facher définitivement.


Soit jeune fille, je vous accompagne, vous trouverez bien en votre demeure une étable digne de m'héberger.

Il salua les occupants de la taverne et ouvrit la porte à Anne.[/i]
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Homme_des_bois, dit HDB, Baron d'Aupic
Veuf de Mentaig et du Berry
"Pour le bien de tous et non la gloire d'un seul."
Anne_blanche
Soit jeune fille, je vous accompagne, vous trouverez bien en votre demeure une étable digne de m'héberger.

Oh !!! Messire mon oncle ! Une étable, vraiment ?! Vous aurez...


Anne s'interrompit. D'une part, elle avait appelé spontanément le baron d'Aupic "mon oncle", sans savoir si cela lui convenait. D'autre part, elle était furieuse de n'avoir pas compris immédiatement la plaisanterie.
Sans rancune, elle logea sa main dans celle d'Homme_des_bois, et le suivit en saluant les rares personnes encore présentes.


Il faisait moins froid, dehors, soudain. Elle guida le baron jusqu'à l'hôtel de Culan, de l'autre côté de la place. Il faisait nuit noire, mais elle avait si souvent fait le trajet, surtout à l'époque où sa mère n'était pas encore arrivée à Vienne, qu'elle en connaissait le moindre pavé. Elle savait aussi que, par l'imposte ménagée au-dessus de la porte piétonne, Bacchus la guettait, comme chaque fois qu'elle sortait.
Un accord tacite s'était établi entre le cocher et sa jeune maîtresse : il ne disait rien de ses fugues, et elle n'allait jamais plus loin, le soir, que l'autre côté de la place. Ainsi, il pouvait veiller sur elle, et elle s'en sentait rassurée, bien qu'elle n'eût jamais consenti à l'admettre.


C'est ici, mon oncle. Bacchus ! Bacchus ! Dites à Matheline de faire préparer une chambre, je vous prie.
--Bacchus
Confortablement assis à mi-chemin de l'escalier qui mène à la grand-salle, Bacchus se cure consciencieusement les dents. Il a la panse pleine, la soupe était agréablement garnie d'un bon morceau de lard frais, ce soir.
La petite demoiselle lui a adressé un sourire au passage, quand elle a filé à la taverne. Par la fenêtre, Bacchus l'a vue se dépêcher. La porte de la taverne s'est ouverte plusieurs fois, depuis. Mais il sait qu'il a le temps. Elle ne rentrera pas de si tôt. Madame la Vicomtesse s'est absentée.


Norf de norf !

Ah ben non, elle est de retour. Aïe ! Si elle s'aperçoit de l'absence de sa fille, le Bacchus va en entendre de vertes et de pas mûres... C'est qu'elle a la langue bien pendue, la vicomtesse, et un répertoire que lui envierait n'importe quel cocher. Que faire ? Bacchus hésite. S'il va chercher la petite, elle n'aimera pas ça. Ça ferait jaser dans Vienne. Déjà que ça jase pas mal, rapport à la liberté d'allures de la damoiselle... Tout un tas de bâsins mal dégrossis lui reprochent toujours et encore de ne pas être une enfant comme les autres.

Ouf ! Bacchus pousse un soupir de soulagement. Il n'aura pas à aller chercher la demoiselle, il entend son pas. Il descend de son poste d'observation, d'où il ne peut plus rien observer, vu que la nuit est plus sombre qu'un cul de chaudron.

Bacchus ! Bacchus ! Dites à Matheline de faire préparer une chambre, je vous prie.

Houlà ! Qui donc ramène-t-elle à la maison ? S'agirait pas que ce soit n'importe quel voy... Nooorrrrffffff !!! Messire Baron !!!


Bacchus n'en croit pas ses yeux. Dans la lumière des torches qui éclairent la cour, il a reconnu le baron d'Aupic, celui que Dame Mentaïg appelait "mon âme". Il en perd ses moyens, le Bacchus, et même la voix. Il se dandine d'un pied sur l'autre, les paupières plus humides que s'il avait battu le blé toute la journée.

Messire Baron... Demoiselle Anne, c'est Messire Baron !

Il file soudain par l'escalier, titubant sous le coup de l'émotion.

Dame Maryan ! Dame Maryan ! Messire Baron est là ! Mais qu'est-ce que je fais, moi ? Heulà !

Il reprend une attitude plus digne, achève la montée des marches d'un pas moins rapide, sans se rendre compte que ses cris ont attiré Matheline et deux ou trois autres valets.
pnj
Elle était rentrée fourbue, mais satisfaite. Cette histoire de porte cassée était enfin réglée. Le charpentier viendrait demain, dès le petit matin.
Entendant quelques bruits provenant de la chambre de Gabriel, la Vicomtesse supposa que son fils était rentré de ses études avec le père Commis, et qu’il avait invité sa sœur à venir jouer avec lui dans sa chambrée.
Parfait. Cela lui laissait un peu de temps pour se rafraîchir et écrire quelques missives personnelles dans ses appartements. Les jeux des enfants prenaient toujours beaucoup de temps, au grand bonheur de leur mère, qui pouvait alors vaquer à ses propres occupations tranquille.

Mais ce soir-là, le calme n’avait pas été invité. Maryan venait tout juste de s’installer face à son pupitre, quand tout à coup un barouf de tous les diables se fit entendre dans l’hostel. La voix tonitruante de Bacchus parvint aux oreilles délicates de la Vicomtesse, laquelle se leva d’un bond, ouvrit la porte de sa chambrée à la volée et jeta un regard acéré à Bacchus qui restait planté au sommet des escaliers, un air béat s’affichant sur ses traits rubiconds.



« Mais enfin, que signifie ce vacarme, par la barbe d’Aristote ?! Apprenez, Bacchus, qu’il existe d’autres manières de s’exprimer que de beugler tel un goret qu’on égorge. Tudieu ! »



Elle s’apprêtait à regagner sa chambre, lançant un dernier regard furieux au valet, lorsqu’elle se rappela vaguement des quelques mots hurlés tantôt par le cocher.
Ses iris azurés se posèrent de nouveau sur Bacchus, et de sa bouche joliment ourlée sortit ces mots :



« Que vouliez-vous me dire, au juste, avant qu’un sort du Sans-Nom ne semble vous emporter dans une tempête de chambards ? »
Gabriel_de_culan
    Gallia est omnis diuisa in partes tres.

Il faudra que je dise au bon Père Comis que ses textes sont trop faciles. Il me donne du César que Père Patrick me faisait travailler à Brest il y a déjà un an ou deux. Et puis, je ne comprends pas que ce César ne parle pas de Culan dans sa Guerre des Gaules.

A cette pensée, un sourire éclaira le visage de l'enfant. César décrivant les collines de Culan. Il s'imagina un instant les phrases latines que cela donnerait, mais sa rêverie dut s'interrompre rapidement, car l'exercice était autrement plus difficile. Il fut tenté de regarder à la fenêtre ce qui se tramait dans la cour intérieure de l'hôtel, mais même là, il ne trouvait aucun secours: il ne se passait rien, ce qui ne lui laissait pas d'autre choix que de travailler à cette version "trop facile".

Il trempa sa plume:


    La Gaule est toute divisée en trois parties.

Ce n'est pas beau ainsi! dit-il tout haut. Il écrivit au-dessous:

    La Gaule est toute entière divisée en trois parties.

Ca ne veut rien dire! Il se gratta la tête de cette façon que Maryan et Anne lui détestaient.

    La Gaule entière se divise en trois parties.

J'aime mieux, mais je crains que le Père Comis ne me reproche ce changement de voie. A moins que ce ne soit un participe parfait, et là, on ne pourra rien me reprocher, puisqu'il est attribut. Pfff...

Il se frotta les yeux.

Saint-Noël, Patron des enfants, faites que je puisse cesser là ce travail qui m'ennuie. Amen.

Le Saint, obséquieux comme jamais, s'exécuta en poussant Bacchus à hurler de toutes ses forces dans l'escalier. Gabriel se leva et se positionna près de la porte pour écouter. Il ne fallut pas plus de quelques secondes pour que Maryan lui réponde avec des mots choisis. En attendant la réponse du rustre, Gabriel se tint prêt à intervenir à la moindre occasion.
--Bacchus
Mais enfin, que signifie ce vacarme, par la barbe d’Aristote ?! Apprenez, Bacchus, qu’il existe d’autres manières de s’exprimer que de beugler tel un goret qu’on égorge. Tudieu !

Bacchus s'arrête net. Arrêter un cheval emballé, soulever à bout de bras un tonneau d'un demi-muid, affronter le bourgmestre si le besoin s'en fait un jour sentir, il peut le faire. Mais encourir les foudres de la vicomtesse, c'est au-dessus de ses forces.
Il est là, à se dandiner d'un pied sur l'autre, bonnet tirebouchonné entre ses gros doigts, que déjà Dame Maryan fait demi-tour. Bacchus pousse un profond soupir. Mais son soulagement est de courte durée.


Comment qu'c'est-y que j'vais y dire, aneu ?

La vicomtesse fait demi-tour. Bacchus se fige à nouveau. L'avoinée n'est pas terminée.

Que vouliez-vous me dire, au juste, avant qu’un sort du Sans-Nom ne semble vous emporter dans une tempête de chambards ?


Bacchus reprend son dandinement. Sa main s'agite vaguement en direction de la cour, où Matheline est en pleine révérence devant le baron.

Ben, Dame, ya Demoiselle Anne qu'a ramené ...

Norf de norf ! Voilà qu'il a failli dire que la gazoute était encore à traîner la taverne.

'fin... Demoiselle Anne et Messire d'Aupic i' sont là en bas. Ya Messire d'Aupic qu'arrive tout dret de cheu nous.

Il s'efface, pour laisser passer la Vicomtesse. Son message est délivré.
Son pauvre cœur bat la chamade, soudain trop grand pour sa vaste poitrine. Messire Baron à Vienne, c'est comme un vent de souvenirs qui souffle sur la tête du cocher, et lui tirerait des larmes s'il osait les laisser couler.
Homme_des_bois
L'émoi du brave Bacchus faisait grand bruit dans la demeure, et HdB craint un instant que celà ne coute au brave homme quelque réprimande.

L'agitation ainsi créée fit sortir de la batisse la servante qui s'inclina devant le Baron. Comme il entendait Bacchus beguayer devant sa maîtresse, il prit pitier et emprunta la porte qui devait le conduire auprès de Maryan.


'fin... Demoiselle Anne et Messire d'Aupic i' sont là en bas. Ya Messire d'Aupic qu'arrive tout dret de cheu nous.

Au moment où le brave homme s'écartait, HdB arriva derrière lui, et salua .

Dame Maryan, c'est un honneur de me présenter devant vous aujourd'hui. Je viens accomplir la promesse que je vous aie faite autrefois, à Culan. A compter de ce jour, je suis à votre service, pour votre protection et celle de vos enfants.
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Homme_des_bois, dit HDB, Baron d'Aupic
Veuf de Mentaig et du Berry
"Pour le bien de tous et non la gloire d'un seul."
pnj
« Ben, Dame, ya Demoiselle Anne qu'a ramené ... 'fin... Demoiselle Anne et Messire d'Aupic i' sont là en bas. Ya Messire d'Aupic qu'arrive tout dret de cheu nous. »


La Vicomtesse cilla, et prit un air pincé, agacée par le fort accent berrichon dont le cocher n’avait su se défaire durant tout ce temps.
Mais le sourire revint bien vite étirer les douces lèvres de la fougueuse noble : le charmant Baron d’Aupic, ami de longue date de la famille, venait de faire son entrée.



« Dame Maryan, c'est un honneur de me présenter devant vous aujourd'hui. Je viens accomplir la promesse que je vous aie faite autrefois, à Culan. A compter de ce jour, je suis à votre service, pour votre protection et celle de vos enfants. »


Touchée par tant de bonté loyale et d’honneur dévoué, Maryan se fendit d’abord d’une révérence chargée de respect, avant de poser à nouveau son regard azuré sur le baron et de prononcer ces mots :


« Messire Baron, c’est là trop d’honneur que vous me faîtes. Laissez-moi, avant toutes choses, vous remerciez de votre venue. C’est grand plaisir que de vous revoir et de vous accueillir icelieu. Vous nous ferez, bien entendu, le bonheur de votre présence pour souper, n’est-ce pas ? Matheline va vous préparer une chambrée pour la nuit. »


Coup d’œil impérieux en direction de la dite Matheline, qui s’exécuta aussitôt. On ne faisait pas attendre la Vicomtesse.
La camérière eût tout de même le temps de couler un regard benêt et niaiseux à souhait vers le Baron, ce qui eût le don d’exaspérer sa maîtresse. Cette gourde commençait à prendre un vilain tournant. Elle semblait s’enticher de tout ce qui avait une barbe (à l’exception de Flamenque, la cuisinière), et passait le plus clair de son temps à minauder ou à parler d’hommes avec les autres domestiques.
Hier encore, Maryan l’avait surprise en train de s’extasier sur la prestance et le charme discret du Bourgmestre de Vienne. Observations, au reste, que la Vicomtesse elle-même trouvaient tout à fait pertinentes, mais qu’elle ne manquait pas de trouver grossières et inopportunes, venant d’une simple roturière à son service.
Homme_des_bois
Messire Baron, c’est là trop d’honneur que vous me faîtes. Laissez-moi, avant toutes choses, vous remerciez de votre venue. C’est grand plaisir que de vous revoir et de vous accueillir icelieu. Vous nous ferez, bien entendu, le bonheur de votre présence pour souper, n’est-ce pas ? Matheline va vous préparer une chambrée pour la nuit.

Le baron s'inclina



Je vous remercie pour cet accueil, je serais aussi discret que possible.


Il regarda partir la nommée Matheline qui lui lança un regard pour le moins effronté. Difficile de trouver du personnel de qualité, même ici, pensa t'il.
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Anne_blanche
Chapitre Second : Majorité.

Meleagant a écrit:
Nous, Jehan Méléagant, archevêque de Vienne et cardinal émérite de la Sainte Eglise Aristotélicienne et Romaine, avons célébré sous le regard du Très Haut le baptême de Gabriel et Anne de Culan en la chapelle Sainte Boulasse sise au château de Culan, dépendante du diocèse de Bourges le 28 janvier de l'an 1457.



Anne contemplait, pour la centième fois depuis la veille, son certificat de baptême. Enfin, c'était fait ! La cérémonie, elle l'avait vécue comme un rêve éveillé. L'on était rentré à Vienne, juste à temps pour le mariage de Dame Ulan, et la vie avait repris son cours. Il avait fallu qu'un porteur de la maison de Son Eminence Meleagant vînt porter ce parchemin pour que, enfin, Anne reprît pied dans la réalité.
Elle se sentait grandie. D'ailleurs, elle avait vérifié, le matin-même. Depuis qu'elle était à Vienne, elle taillait dans le bois de sa porte une encoche discrète, et se désespérait de la lente progression en hauteur des marques. Mais le séjour en Berry avait été plus long que prévu. Ce matin-là, Anne s'était glissée dans l'atelier de tissage appartenant à sa mère, et avait subtilisé une toise. Elle mesurait désormais près de quatre pieds et demi !
Certes, ce n'était pas bien grand, pour quelqu'un qui approchait 12 ans, et allait bientôt fêter sa majorité. Mais elle s'était fait une raison depuis longtemps. Jamais elle ne serait grande et blonde comme Mère. Tant pis...


Est-ce que c'est important, d'être grand ?


Grave question ... Mais comme il n'y avait personne à qui elle pût la poser, elle était condamnée à chercher elle-même la réponse.
Ce qui l'embêtait bien davantage, c'était cette question du mariage. Dès sa majorité atteinte, Mère se mettrait en quête d'un époux convenable pour elle.


Il faudrait que j'en parle à Parrain... Si seulement il pouvait venir à Vienne ! Les courriers, ce n'est pas pareil. Je vais demander à Gabriel ce qu'il en pense.

A cette heure du jour, il serait probablement encore dans sa chambre. Anne roula soigneusement le certificat de baptême, et l'emporta jusqu'aux appartements de son frère.
--Pere_comis
Le Père Comis observe son élève, sans en avoir l'air. Il lui a donné à traduire un poème d'Ovide. Le volumen est déroulé sur ses genoux, la tablette de cire est posée devant elle sur son écritoire.
Mais la fillette a la tête ailleurs. Sans cesse, elle déroule le parchemin reçu la veille. Le Père Comis sait qu'il s'agit de son certificat de baptême.
Quelles pensées - que beaucoup diraient hors de son âge - peuvent bien s'agiter sous ce haut front bombé ? Anne est pieuse, mais pas trop. Elle aspirait à ce baptême comme la guimauve aspire à l'air marin.


Est-ce que c'est important, d'être grand ?

Quel rapport avec le baptême, par Aristote ?! Le Père Comis ne répond pas. La question ne s'adresse pas à lui. Anne a parlé tout haut, comme bien souvent quand elle se croit seule, perdue dans ses rêves ou ses réflexions. Dans ces cas-là, le Père Comis n'a pas plus d'existence que l'escabeau sur lequel elle est assise ou la bûche d'une toise qui se consume lentement dans l'âtre.
Le digne ecclésiastique ne s'en offusque pas. Il se fait tout petit dans son coin, et observe, écoute.


Il faudrait que j'en parle à Parrain... Si seulement il pouvait venir à Vienne ! Les courriers, ce n'est pas pareil. Je vais demander à Gabriel ce qu'il en pense.

Et la voilà partie ! Le Père Comis soupire. Ovide attendra. Il range soigneusement le volumen dans le coffre, jette un coup d'œil sur la tablette de cire. Anne y a gravé, de la pointe de son stylet, des entrelacs erratiques, et quelques mots :

Citation:
Ars amatoria non mihi


"Je ne possède pas l'art d'aimer" ... Hum... Il va falloir songer à la marier, cette petite...
pnj
[ Appartements de la Vicomtesse – Au petit matin ]


De légers coups frappés à la porte de la chambrée vicomtale, puis :

« Dame Vicomtesse ?

- Huuumpf !

- … J’avions une bafouille pour vous, M’dame.

- Pardon ?

- Heuu… **efforts visibles et audibles** J’ai en ma possession une missive qui vous est destinée, Madame la Vicomtesse.

- Eh bien portez-la moi donc, bougre de sotte ! Ne restez pas plantée derrière cette porte. »


Le regard fixé sur ses chausses, Matheline, la camérière, entra dans la chambrée, s’avança vivement vers le lit à baldaquin de la Vicomtesse et déposa prestement le billet sur une petit table à côté avant de se retirer aussi vite qu’elle était venue.

Plongée dans la lecture d’un énième ouvrage envoyé par sa sœur Johanara, friande des arts littéraires comme elle, Maryan ne prit pas même la peine de lever ses iris azurés vers sa domestique. Inutile donc d’ajouter que la seule idée d’un quelconque remerciement ne traversa aucunement l’esprit de la noble dame.

La missive fût oubliée quelque temps, puis revint au souvenir de la jeune femme lorsqu’elle se sépara de son livre pour cause de maux de tête fulgurants.
Voilà des jours qu’elle restait cloîtrée dans ses appartements, nonchalamment alitée, occupant ses journées à lire, écrire ou broder. Le long voyage jusqu’en Berry l’avait fatiguée plus qu’elle ne l’aurait pensé. Moralement et physiquement.

Toutes ces cérémonies, ces sourires forcés, ces visages retrouvés, ces paysages revisités, ces lieues parcourues, ces souvenirs revenus…
Et puis une nouvelle, pas forcément horrifiante, mais qui avait profondément attristé Maryan : sa petite fille, la jeune Blanche, avait décidé de prendre le voile. L’instruction des nonnes avait été plus efficace que prévu, et la Vicomtesse ne s’était absolument pas préparée à une telle éventualité.
Mais qui pouvait reprocher ce choix à la jeune fille ?
Elle aurait une vie douce et pieuse, loin des regards lubriques et de la bassesse des hommes.

Maigre consolation pour la jeune mère…
Pour autant, la décision de sa fille, si elle avait profondément minée la Vicomtesse, n’était pas la seule raison des soupirs mélancoliques que cette dernière ne cessait de pousser depuis quelques temps, enfermée dans sa chambrée.
Une certaine soirée passée en taverne l’avait intensément mortifiée, et avait fait naître en elle le désir absurde de se couper du monde pendant quelques jours, voire quelques mois. Le temps qu’il faudrait, en somme, pour se faire oublier, et surtout faire oublier sa sottise.

Voilà qu’alors la missive reçue allait changer radicalement cet état d’esprit, ainsi que toute l’expression et l’attitude générale de la jeune femme.
Ce jour-là, la Vicomtesse s’activa comme une abeille, mettant de l’ordre dans toutes choses, parlementant avec tout le monde, s’extasiant d’un rien et riant de tout.

Au cours de la journée, elle trouva tout de même le temps de réprimander sévèrement Matheline pour une broutille, en profitant pour lui servir son habituel langage fleuri.
Certaines choses ne changent jamais.
Gabriel_de_culan
Toutes ces années passées entre Culan et Vienne avaient été pour Gabriel aussi rapides que des jours, ou des semaines tout au plus. A son âge, il n'était pas encore fiancé, mais il avait le temps, finalement.

Il n'avait pas osé en parler à sa soeur, et encore moins à sa mère, mais durant toutes ces années, Gabriel s'était concentré sur l'étude des textes sacrés car il avait senti en lui une flamme incompressible. Il s'agissait pour Gabriel d'un élan d'amour incontrôlé, dont l'objet n'était pas une femme, ni un homme, mais simplement Dieu, le Créateur. Chaque jour, le garçon - qui devenait un homme - rendait grâce au Très-Haut d'avoir daigné lui faire l'honneur de lui donner la vie. Il était né vicomte, il était né français, et c'étaient là deux honneurs immenses. Cela faisait quelques années, déjà, qu'il avait envisagé l'idée de consacrer sa vie au service de Dieu. A la mort de son ami roturier Pierre-Henri, il avait même pensé devenir moine, car il supportait mal d'avoir vu son ami mourir de faim quand lui se trouvait à quelques lieues de là dans un château, et de n'avoir pas eu le droit d'assister à son enterrement.


Dieu réunit les Hommes. Pour le Très-Haut, il n'est ni noblesse, ni roture. Il y a les hommes qui doivent servir leur Maître. Cette idée me plaît résolument.

Il avait chuchoté, comme cela lui arrivait souvent, quand, étendu négligemment sur le sol froid de sa chambre, il pensait à son avenir. Il avait les yeux fermés, et, alors que certains rêvaient de châteaux forts, de chevalerie et de princesse, lui rêvait de monastères, d'églises, et de croix. Un jeune homme bizarre? Non, un jeune homme dont l'idéal a dépassé la condition et l'âge. Sa décision était désormais prise, il écrirait au cardinal Méléagant avant même de prévenir sa famille. Cela permettrait déjà d'avoir un avis extérieur. Mère serait plus prompte à accepter la chose, si elle était appuyée par la pourpre d'un cardinal.
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