Lanceline, incarné par Basile
- Et lesprit assoiffé déternel, dimpossible,
Dinfini, je voulus moduler largement
Un hymne de magie et démerveillement.
Mais la strophe monta bégayante et pénible,
Reflet naïf, écho puéril, vol heurté,
Vers ta Divinité.
Renée Vivien, Etudes et préludes.
Sous ses mains, son corps se tendait avant de se détendre, pour frissonner plus encore sous le tracé brûlant quelles laissaient après leur passage. La Blonde laccueillit volontiers contre elle, laissant sa chaleur se diffuser sur son épiderme. La Balafrée lobserva à loisir, sans honte ni rougeur aux joues.
- " Tu es ravissante "
Elle lui adressa un fin sourire avant quil ne lembrasse. Lanceline ferma les yeux, se laissant porter par ces lèvres qui la dévoraient doucement. Il la regarda avant de reculer son visage. Elle ne bougea plus, attendant une suite qui lui sembla bien longue à venir.
- " Je pense à toi. A nous. A ... J'ai peur de te perdre, tu as éveillé en moi une passion sans nom, un feu d'une ardeur cyclopéenne. Je.. je tiens à toi bien plus que je ne pouvais le penser. "
- Cest le bien qui fait mal
Quand tu aimes
Tout à fait banale
Ta peine
Les vrais délices
Passent par le supplice [1]
Ses mots lui donnèrent envie de rire et de pleurer tout à la fois. Elle le regarda, encore et encore, se mordillant la lèvre. Elle sut quelle était allée trop loin ; elle sut quil était trop tard. Pour lui comme pour elle.
La Blonde se contenta de lui sourire, doucement. « À nous ». Sauf quil ny avait pas de place pour eux. Sauf quelle ne savait pas. Quelle ne savait plus. Était-ce possible déveiller une telle ardeur ? Était-ce possible quil puisse lui dire cela, alors que deux jours avant, ils ne se connaissaient pas ? Pouvait-il lui annoncer ainsi de telles choses, alors quelle était fiancée avec Ernst ? Mais Cétait de sa faute à elle. Cependant, il était trop tard. Trop tard pour reculer.
La Valdesti choisit de ne pas répondre. Elle eut peur de ne pas être à la hauteur. Elle lembrassa à son tour, espérant y transmettre tout ce quelle ne voulait pas dire. Ses bras lenlacèrent. Elle posa son nez contre le sien, avant de le chasser pour y déposer ses lèvres.
Elle murmura enfin :
- Il ne faut pas
Il pouvait être en colère contre elle. Il pouvait la chasser comme la malpropre quelle était. Il pouvait la frapper. Il pouvait devenir violent ; effacer sa relative beauté et la rendre laide.
Tu ne peux pas savoir. Tu me tues. Tu me fais du bien. Tu me tues. Tu me fais du bien. Jai le temps. Je ten prie. Dévore-moi. Déforme-moi jusquà la laideur. [2] Elle errerait dans la ville, les cheveux défaits, jusquau petit matin. Elle demeurerait là, perdue par ce quelle avait fait. Au fond delle, elle serait enlaidie. Mais elle ne sen plaindrait pas : elle avait ce quelle avait mérité. Demain, plus tard, il lui faudrait retourner auprès de Gabriel. Assumer son rôle de mère.
« Très-Haut sors-moi de là. »
Mais elle voulait rester. Soublier encore un peu, dans le silence de cette nuit froide, auprès du crépitement du feu et de ces doigts qui la parcouraient. Alors ses mains à elle se crispèrent sur la peau masculine. Prendre ce quelle pouvait, prendre ce quil voulait bien lui donner, avant de partir. Fuir comme une voleuse, peut-être. Mais il lui faudrait bien se relever : elle ne pouvait rester éternellement même si le temps se dilatait.
« Je.. je tiens à toi bien plus que je ne pouvais le penser. ».
Elle navait presque rien dit. Fallait-il répondre à cela ? Elle ne le voulait pas de peur de briser lenchantement. Alors elle vint fourrer ses lèvres dans son cou, timidement, pour y laisser un baiser.
[1] « Cest le bien qui fait mal », de Mozart lopéra rock.
[2] « Hiroshima mon amour » de Jean Resnais.
[2] « Hiroshima mon amour » de Jean Resnais.
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