Eliance
Dôle. Dôle la bien-aimée. Dôle la maudite. Dôle...
Elle devait être la ville de leurs retrouvailles, la ville qui protège sous son aile un frère et une sur, la ville qui leur permettrait de se connaître un peu plus, de s'aimer, se retrouver. Au lieu de ça, Dôle la maudite a fait son apparition, révélant ses talents de belliqueuse, éloignant le sang, brouillant les pistes de la compréhension, de la confiance, soufflant le château de carte de leurs liens fragiles. Mais Dôle a d'autres atours, réservant des rencontres, modelant des choses insoupçonnées chez la Ménudière, sculptant son destin, modifiant certaines choses qu'elle pensait impossible.
Dôle l'aura transformée, un peu. D'abord parce qu'elle a perdu une partie de son sang. Elle a trahi sa confiance, sans trop s'en rendre compte, sans penser à mal. Elle a merdé. Il a merdé. Ils se sont ratés. Éloignés. Et puis, elle sait simplement certaines choses possibles, maintenant. Elle sait que l'Italien n'est pas complètement fou à partager son âme entre plusieurs femmes. Elle sait que c'est possible. Que tout est possible. Elle le comprend, ce jour, plus que jamais. Et pourtant, ce qui lui fait comprendre ça risque de la séparer de son époux. Ou plutôt celui. L'Italien n'est pas partageur. L'Italien n'est pas confiant quant à sa capacité à être un bon mari. Il n'aimera pas être mis face au chevalier. Il n'aimera pas savoir qu'un autre attire les bons sentiments de sa femme. Il va la détester, elle l'attend. Depuis plusieurs jours, déjà, elle attend de lui lancer cet aveu, de voir la colère envahir son visage, la déception aussi, sans doute. Depuis plusieurs jours, elle se prépare à un changement de destin. Qu'il parte, qu'il reste, rien ne sera jamais comme avant.
Elle pense à ça, la Ménudière, en ce début de journée. Elle pense à son Italien qui ne doit plus être loin, elle pense à son chevalier qu'elle va retrouver, là, dans son auberge. Elle s'est levée tôt, une idée bien calée derrière la tête. Pour la mettre à exécution, elle devait être une des premières au marché, pour trouver ce qu'elle cherche. Et elle l'a trouvée, la perle rare, une bouteille de vin dont on lui a parlé il y a quelques mois et qu'elle veut offrir au chevalier pour le remercier de tout. De la chambrée offerte, de ses conseils, de ces discussions qui n'en finissent pas, ces journées agréables passées à ses côtés, son soutien. La bouteille est coincée sous son bras pour la cacher au mieux de la vue des badauds et la Ménudière marche, rapidement, vers l'auberge.
Les ruelles commencent à peine à être animées, la ville se réveille lentement, la rousse marche, plongée dans ses pensées, heureuse d'avoir trouvé un cadeau au chevalier. Elle n'entend pas ce qui l'entoure. Ou peu. Elle n'entend pas les sabots qui frappent le sol derrière elle. Elle n'entend pas le tumulte que produit le cavalier pressé lancé à plein galop. Elle n'entend rien et traverse la ruelle pour rejoindre celle de droite, celle de l'auberge. Le choc est terrible. Elle est percutée de plein fouet par le canasson qui ne parvient pas à l'éviter et est éjectée contre le mur de la chaumière qui borde la rue. Le raffut des sabots a laissé place à un silence brutal, suivi de près par le craquement de la rencontre entre le crâne de la Ménudière et la pierre. Le cavalier a stoppé sa monture, s'est précipité vers la femme accidentée, pris de panique. Elle, git par terre, inconsciente, la précieuse bouteille brisée à ses pieds. Le cheval est laissé à l'abandon, la Ménudière prise dans ses bras et emportée dans l'auberge à quelques pas de là. Celle du chevalier.
La porte est poussée brusquement, le cavalier, livide, dépose sa proie sur la première table, hurlant.
Une blessée ! Une blessée ! Faut quelqu'un !
Le pauvre homme ne s'en remet pas. Pourtant, la Ménudière semble dormir d'un sommeil paisible. Mis à part une bosse éclatée sur son front, aucune trace de saignement, aucune trace d'os brisés. Elle semble paisible.
_________________
Elle devait être la ville de leurs retrouvailles, la ville qui protège sous son aile un frère et une sur, la ville qui leur permettrait de se connaître un peu plus, de s'aimer, se retrouver. Au lieu de ça, Dôle la maudite a fait son apparition, révélant ses talents de belliqueuse, éloignant le sang, brouillant les pistes de la compréhension, de la confiance, soufflant le château de carte de leurs liens fragiles. Mais Dôle a d'autres atours, réservant des rencontres, modelant des choses insoupçonnées chez la Ménudière, sculptant son destin, modifiant certaines choses qu'elle pensait impossible.
Dôle l'aura transformée, un peu. D'abord parce qu'elle a perdu une partie de son sang. Elle a trahi sa confiance, sans trop s'en rendre compte, sans penser à mal. Elle a merdé. Il a merdé. Ils se sont ratés. Éloignés. Et puis, elle sait simplement certaines choses possibles, maintenant. Elle sait que l'Italien n'est pas complètement fou à partager son âme entre plusieurs femmes. Elle sait que c'est possible. Que tout est possible. Elle le comprend, ce jour, plus que jamais. Et pourtant, ce qui lui fait comprendre ça risque de la séparer de son époux. Ou plutôt celui. L'Italien n'est pas partageur. L'Italien n'est pas confiant quant à sa capacité à être un bon mari. Il n'aimera pas être mis face au chevalier. Il n'aimera pas savoir qu'un autre attire les bons sentiments de sa femme. Il va la détester, elle l'attend. Depuis plusieurs jours, déjà, elle attend de lui lancer cet aveu, de voir la colère envahir son visage, la déception aussi, sans doute. Depuis plusieurs jours, elle se prépare à un changement de destin. Qu'il parte, qu'il reste, rien ne sera jamais comme avant.
Elle pense à ça, la Ménudière, en ce début de journée. Elle pense à son Italien qui ne doit plus être loin, elle pense à son chevalier qu'elle va retrouver, là, dans son auberge. Elle s'est levée tôt, une idée bien calée derrière la tête. Pour la mettre à exécution, elle devait être une des premières au marché, pour trouver ce qu'elle cherche. Et elle l'a trouvée, la perle rare, une bouteille de vin dont on lui a parlé il y a quelques mois et qu'elle veut offrir au chevalier pour le remercier de tout. De la chambrée offerte, de ses conseils, de ces discussions qui n'en finissent pas, ces journées agréables passées à ses côtés, son soutien. La bouteille est coincée sous son bras pour la cacher au mieux de la vue des badauds et la Ménudière marche, rapidement, vers l'auberge.
Les ruelles commencent à peine à être animées, la ville se réveille lentement, la rousse marche, plongée dans ses pensées, heureuse d'avoir trouvé un cadeau au chevalier. Elle n'entend pas ce qui l'entoure. Ou peu. Elle n'entend pas les sabots qui frappent le sol derrière elle. Elle n'entend pas le tumulte que produit le cavalier pressé lancé à plein galop. Elle n'entend rien et traverse la ruelle pour rejoindre celle de droite, celle de l'auberge. Le choc est terrible. Elle est percutée de plein fouet par le canasson qui ne parvient pas à l'éviter et est éjectée contre le mur de la chaumière qui borde la rue. Le raffut des sabots a laissé place à un silence brutal, suivi de près par le craquement de la rencontre entre le crâne de la Ménudière et la pierre. Le cavalier a stoppé sa monture, s'est précipité vers la femme accidentée, pris de panique. Elle, git par terre, inconsciente, la précieuse bouteille brisée à ses pieds. Le cheval est laissé à l'abandon, la Ménudière prise dans ses bras et emportée dans l'auberge à quelques pas de là. Celle du chevalier.
La porte est poussée brusquement, le cavalier, livide, dépose sa proie sur la première table, hurlant.
Une blessée ! Une blessée ! Faut quelqu'un !
Le pauvre homme ne s'en remet pas. Pourtant, la Ménudière semble dormir d'un sommeil paisible. Mis à part une bosse éclatée sur son front, aucune trace de saignement, aucune trace d'os brisés. Elle semble paisible.
_________________