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[RP] Azzera, forgeron....

Eamon....


Mille et une questions soudain.

Une bombarde eut explosé dans la forge que ça n'aurait pas fait autant d'effet que les révélations de Mère.

D'abord, je m'attendais à un refus, car, chaque fois qu'il avait été fait allusion à ce symbole celte, le visage de Maman se fermait... ses yeux s'assombrissait... je l'avais vu même essuyer une larme à son évocation...
Que signifiait-il donc pour elle... souvenirs douloureux ... sans aucun doute... On a beau être un enfant, on ressent ces choses-là, surtout lorsqu'elles affectent un être cher... et le Très Haut sait combien j'aime ma Mère !

Triskel... Ami irlandais... Aengus... Sa lame !... Tout cela tournait dans ma tête à la vitesse de Zébulon au galop - et il courait vite, le bougre - Je devinais des réponses... qui induisaient d'autres questions...

Je percevais qu'un grand mystère, un grand secret enveloppait cette arme et ce symbole... Je percevais aussi, plus subtilement, que le silence de mes parents n'avait pour but que de me protéger... mais de quoi ?
Ils savaient des choses que j'ignorais sur ce passé... sur ces choses précises.
Mais alors, pourquoi en ressentais-je depuis toujours des effets étranges... comme si... Non !... c'était trop invraisemblable, même pour un enfant à l'imagination fertile... Mais , comme si je 'savais" ces choses moi aussi !

L'épée et la longue dague me fascinaient... malgré la poussière, elles luisaient d'un éclat quasi irréel... j'en sentais l'âme... ces lames étaient... vivantes... Oui... vivantes.
Le tissus à carreaux, étrangement familier lui aussi me "parle"...
Je ferme un instant les yeux et alors... J'entends... J'entends la voix de mon ami caché... Aengus !... C'est lui... je suis dans ses bras, sur le parvis de notre église... Il me regarde avec une lueur émouvante dans les yeux... je crois y déceler une larme... Visage ravagé mais d'une telle douceur qu'il le transcende... Un ange !
Qui murmure à mon oreille :

- Un jour... un jour tu sauras la vérité... un jour, tu recevras ton héritage... Et, quoi qu'il arrive, aimes et respectes tes parents... Tu ne pouvais en avoir de meilleurs... Va, mais saches que je serai toujours en ton coeur... à jamais. Comme tu es dans le mien... au-delà de la Mort, même.


Je m'en souviens.. Oh... comme si c'était hier... Il m'a serré dans ses bras et a posé les lèvres sur mon front... comme si c'était la dernière fois qu'on se voyait.. comme un adieu...
A ce moment, je n'avais rien compris... sauf que c'était bien lui mon ami caché.

La Maman de Margaut vint alors me chercher et, lorsque je me retournai pour lui faire un dernier signe d'adieu, il s'en allait, tournant le dos, la main levée en guise d'au revoir... Longue silhouette sombre qui se perdait dans la foule...

Je rouvres les yeux, les levai sur mes parents... Un silence profond seulement troublé par le battements de nos coeurs... Je sens une tension palpable qui alourdit l'atmosphère de la forge...
Un voile va se déchirer, je le sais, je le sens.... mais je n'en perçois pas encore les conséquences.
Tout mon jeune passé me revient en mémoire et je comprends que mon avenir va basculer... Ce qui se passe ici et maintenant est la croisée de mon chemin...
Le regard de Maman est métamorphosé... transcendé... malgré ce pli soucieux, presque douloureux, malgré cette perle qui roule le long de sa joue...son visage est serein, calme.
Je comprends, en la regardant comme on regarde les êtres chers, que quelque chose en elle a changé...
Autrefois, parler de Triskel, d'épée, eût déclenché en elle courroux et réprobation... là... Elle semble résignée, mais soulagée en même temps... Comme si dévoiler un secret allégeait son âme.
Père, quant à lui, l'entoure de son bras protecteur... Il "sait", lui aussi... et la gravité de son sourire me laisse penser que ce qui se passe ici lui est douloureux.
Cependant son regard posé tantôt sur Mère, tantôt sur moi ne se départit pas de bonté et de tendresse... Cet homme-là n'est qu'Amour dans le sens le plus noble du terme et ma gorge se noue d'émotion en le réalisant.

Que le Très-Haut me pardonne, mais il me semblait vivre alors des instant magiques, surnaturels... je visitais des sphères inconnues...celles des âmes des êtres qui comptaient le plus pour moi... celles de l'Au-delà aussi...
A travers ces armes, Aengus me parlait... mon ami caché ne m'avait pas menti... J'avais là des parents exceptionnels.

Le silence s'installe, lourd, presque palpable... Maman jette un regard suppliant vers Papa... L'émotion l 'étreint... Instinctivement, je m'approche d'eux je les sens si proches dans cette épreuve et je me sens si concerné... je me dois de faire corps avec ceux qui représentent ce que j'ai de plus cher au monde.

Oser poser la main sur le métal froid... ressentir en un éclair une myriade d'impressions, de sentiments... entrevoir l'espace d'une seconde des images de combats, sentir le goût du sang... crainte, orgueil et euphorie mélangées dans ce contact quasi-charnel...
Oser porter le regard sur cette lame qui me fascine, m'attire inexorablement et y découvrir ces mots :

"Onoraig agus dilis"... Honneur et Fidélité !

_________________
Gil_de_treviere
Il ne l'avait pas cru possible, mais il avait espéré que l'incident serait passé inaperçu, mais cela aurait été mal connaître son fils.
Eamon était curieux, intelligent et surtout têtu comme une bourrique, quand il avait une chose en tête, il ne l'avait pas ailleurs. Tôt ou tard, cette question serait à n'en point douter revenue à la charge.


... ze peux le voir , dis... ze peux ?...

Ce ne fut pas tellement la question qui sema le trouble dans la forge, mais bien la réponse...

Oui, tu peux le voir mon Ange!

Une réponse plutôt banale en d'autres circonstances. Là, ce fut comme une bourrasque glaciale qui envahit la forge, aussitôt suivit d'une sensation de chaleur digne des enfers. Enfin ce fut l'effet qu'en ressentit le corps du diacre...
En son cœur et en son esprit il en fut de même. Une peur viscérale du changement que cette découverte pouvait engendrer, et un grand soulagement, une vérité. Certains secrets sont lourds à porter.

Le couple attendait le moment opportun pour dévoiler la vérité sur le père d'Eamon. Ils s'étaient promis d'affronter cette épreuve à deux quand leur fils à leurs yeux serait prêt à entendre cette révélation. Mais parfois la vie en décide autrement.
Combien de fois Gil avait failli craquer. Il était fier d'Eamon, fier de son évolution. Dans toutes choses qu'il entreprenait il excellait. Sans rire... Il étudiait brillamment et ce, dans n'importe quelle matière. Sa dextérité n'avait d'égale que son courage et son cœur. Il n'eut pas fallu beaucoup d'entrainements pour que ce soit le fils qui tape sur les doigts du père en lui disant... Pas bonne ta garde là... Ou encore, son comportement envers l'humanité, sa gentillesse, sa bonté et ses petites taquineries. Un tout qui faisait dire à Gil... Je suis fier de toi mon fils. Fier de son fils ... Un grand dilemme. Pas à chaque fois bien sur, car le diacre aimait Eamon comme son fils, mais de temps en temps, cette fierté était entachée par une réalité. Aengus était le père d'Eamon, pas lui. Maintes fois Gil, dut se retenir pour ne pas crever l'abcès .

Le diacre sentit plus qu'il ne vit Azzera prendre sa main et l'attirer vers elle. Elle avait besoin de son soutien et de sa force pour cette révélation. Le soutien, elle l'avait, sans aucun doute. Gil se devait d'être là, jamais il ne laisserait son épouse dans l'épreuve . Sa force, il la puiserait dans l'amour qu'il porte en chacun d'eux, et il en faudrait pour trois. Eamon allait lui aussi en souffrir. Néanmoins il afficha un sourire et écouta sa bien aimée.

Son regard allait de sa belle à Eamon, un sourire solidaire vers chacun.
Elle était belle son écuyère. Son séjour chez les nonnes, l'avait changé, elle affichait une sérénité que le diacre n'avait jamais vu chez elle. Son âme avait trouvé le calme. Gil pouvait apprécier les traits détendus de son visage.
Eamon quant à lui ne perdait pas une miette du discours de sa mère, un regard de temps en temps plein de questionnement vers son père. Tout en continuant à écouter sa maman, Eamon s'approchait d'eux. Par ce geste, il démontrait l'amour sans limite qu'il avait pour ses parents. Une façon de leur dire, je suis prêt, je vous écoute. C'est ce que pensait le diacre. Un passage à vide...

Malgré le silence pesant, Gil avait du mal à prendre la parole, le regard suppliant de sa belle, le décida. Il prit les lames des mains d'Azz...


Vous permettez mon ange?

Il en caressa presque religieusement l'acier et regarda son fils...

Tu sais mon garçon, Il y a déjà quelques années, un homme est rentré dans cette forge. Il cherchait un véritable forgeron, héhé, et tu sais qui il est venu trouver … Moi … Gil sourit...Il aurait pu trouver mieux. Néanmoins Imon, j'ai eu grand plaisir à aiguiser ces deux lames. D'une part, je n'avais jamais vu un si bel ouvrage. Et, d'autre part j'ai tout de suite senti une grandeur d'âme chez cet homme. Gil se remémora, cette rencontre et ce qu'il en suivit.

Je ne l'ai pas assez vu pour que je puisse le considérer comme un ami. Mais juste ce qu'il fallait pour que j'ai un grand respect pour lui. C'était un homme d'honneur, un guerrier et en quelque sorte, un chevalier.

D'un geste de la main, Gil tâta son crâne afin de vérifier que la cicatrice qu'Aengus lui avait laissé en souvenir était toujours là et sourit...

J'en ai pour preuve quelque chose qui prouve qu'il se battait férocement pour ceux qu'il aimait.

Tout comme le diacre, mais ce jour là, il avait perdu. Du doigt, Gil montra l'inscription qui était gravé sur les lames.

Mon garçon, tu sais que je n'ai aucune faculté à lire ces caractères. Mais, j'ai fait comme toi, je me suis instruit grâce aux ouvrages que j'ai pu trouver... Et cela veut dire … Honneur et fidélité. Cela décrit parfaitement Aengus. Le diacre déposa un bisou sur le front d'Eamon... Tout comme toi mon garçon, je sais que ce sera ta devise.

Un nouveau long silence... Seigneur, donnes nous la force, je t'en conjure.

Maintenant, Imon il y a autre chose que tu dois savoir.

Gil plongea ses yeux dans ceux d'Azz, cherchant un accord, ou tout au moins un confort dans le choix des événements à suivre. Il embrassa tour à tour ses deux anges...

N'oubliez jamais tous les deux, que je vous aime et que quoiqu'il advienne, je serais toujours là.

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Zigom
Zigom aperçut la petite famille en pleine discussion...
Alors il n'osa pas rentrer et passa son chemin...
Eamon....


Comment une simple curiosité enfantine peut-elle engendrer un tel climat de tension ?....

Quelques mots de Père et des regards échangés entre mes parents suffirent à me laisser percevoir une tension palpable... intense au point qu'immédiatement je me sentis plongé dans un univers de... "grands" où, malgré mon jeune âge, je savais avoir ma place Mieux... j'en étais soudain le centre.

Père ma parlait d'Aengus avec une admiration non feinte... Maman buvait ses paroles et je crus déceler dans son regard empreint d'une grande tristesse soudain, un éclat étrange...

Dlle semblait perdue dans un songe... dans des souvenirs, à la fois tendres et douloureux.

Quel mystère se cachait derrière les visages aimés de mes parents ?...

Malgré les tensions dues à ma volonté de ne pas devenir diacre, je vouais à Mère un amour immodéré... par une sorte de pudeur de jeune coq, je me gardais bien de le lui montrer, mais s'il était une personne pour qui j'eus donné ma vie, c'était elle... je priais le Très Haut tous les soirs avec ferveur afin qu'il veille sur elle... Je ne manquais pas de réitérer cette supplique envers Papa, bien évidemment.

Cet homme n'était qu'amour... Tous dans ses attitudes tendait vers le Bien... dans toute l'acception du terme. Bonté, mansuétude, compassion, solidarité... je ne trouvais jamais les mots pour qualifier cet homme hors normes.

Les regards qu'il posait sur moi étaient empreints d'un amour sans borne et, le Ciel m'en soit témoin, au fond de mon coeur je le lui rendais au centuple.

La chaleur de la forge alourdissait encore le climat ambiant... Grave, mais non dénué, paradoxalement, de sérénité, je m'apprêtais à entendre LA vérité.... Mais quelle vérité ?... Celle dont me parlait mon ami caché lors des noces de mes parents ?
Un autre encore peut-être dont je ne soupçonnais pas l'existence ?...

J'eus la certitude, tout à coup, que cela me concernait directement. Il me semblait que le Destin avait réuni ce jour là, toutes les conditions pour rendre cette "chose" possible.
Très bizarrement, toute curiosité m'avait quitté. La présence des lames d'Aengus à la forge était significative... : Aengus ne les portait plus !
Evidence même, mais ... pourquoi ?....

Lorsque je le vis à l'église, il ne semblait pas armé... Oh, sans doute dissimulait-il, comme presque tout voyageur, une dague dans sa botte, mais tout dans son attitude révélait - j'en fus conscient bien des années plus tard - un désir, une volonté de s'écarter de toute tentation de violence...

Un guerrier ?... Oui... dans toute la noblesse du terme : Celui qui ne se bat que lorsqu'il ne peut faire autrement.

Mais, le mystère demeurait encore entier... Que faisaient ses lames chez moi ?

Longtemps nié par Maman, l'existence de mon "ami caché" ne faisait aujourd'hui aucun doute... Mieux, il avait un nom... et mes parents le connaissaient... presque... intimement oserais-je dire.

Je fronçai les sourcils... Pourquoi me l'avoir caché si longtemps ?... La réponse vint d'elle-même : J'étais trop jeune pour comprendre certaines choses.

Aujourd'hui, il en allait tout autrement semblait-il. J'avais... "grandi"... vite... Plus vite que la moyenne des enfants de mon âge... j'avais mûri sous le bénéfice de l'éducation de mes parents... sans avoir subi d'épreuves pénibles... simplement en étant élevé avec amour.

Aussi lorsque Papounet prononça cette phrase, j'eus un regard étonné vers lui... comment douter de cet amour et de cette constante bienveillance ?

- N'oubliez jamais tous les deux, que je vous aime et que quoiqu'il advienne, je serais toujours là.

- Bin... pourquoi qu'on l'oublierait Papounet ?

... et je vins me serrer contre lui.


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Azzera
Un ami?
Non, Aengus n'était pas son ami, il était bien plus que cela. Il était son premier époux, peu étaient ceux qui en avaient connaissance. Mais l’Irlandais devint son mari, juste avant qu’elle le crut mort en Bourgogne.
Par la suite, alors qu’elle revenait seule à Mimizan, Gil l’avait accueillie comme si elle l’avait quitté la veille
Gil le savait, même si elle ne lui en avait jamais parlé ouvertement, il savait. Son second époux avait la faculté d'interpréter très justement les silences de l'écuyère.

Regard couvant les lames pendant que Gil parle de ce qu'il a vécu, elle en a mal, tout son corps est douloureux en l'instant.
Bien sûr qu'elle imaginait que le moment viendrait, mais pourquoi aujourd'hui?
Pourquoi ne peuvent-ils pas passer encore quelques années dans l'insouciance?


Eamon… Écoute ton père !

Seuls mots qui sortent de sa gorge nouée par l’émotion de les voir si proche. Qu’il est adorable son fils, qu’il ressemble tant à son père, à ses pères.

Tendre une main tremblante, lui caresser la joue doucement...

**respire Azz, respire, il est temps ! Courage ma sirène, il va comprendre**

La présence de son premier époux ne fait plus aucun doute, ô bien sur, pas en chair et en os, ni même en fumée d’une couleur ou d’une autre, non, non, juste se sentir O’Sullivan une dernière fois. Fermer les yeux pour entendre la voix, Eamon avait donc raison!

Mon Ange!
Ce que papa veut te dire, c’est qu’il t’aime, ça tu le sais, un papa est celui qui t’élève, celui qui guide tes pas, celui qui est présent quand tu tombes, pas pour t’empêcher de tomber, non, mais pour t’aider à te relever.

Et de lui expliquer tout ce que Gil a fait pour lui depuis sa venue au monde.


** Allez ma douce, tu y es presque **

Toujours la voix d’Aengus qui l’encourage. Qu'il est doux de l'entendre, et pourtant que cela la fait souffrir, comment peut-elle ressentir deux sentiment si opposé en même temps?


Tu es un Trévière… mais dans tes veines coule le sang des O’Sullivan.

Son ventre est douloureux, elle ne peut cacher une grimace de souffrance.
Aux larmes se mêlent maintenant des goutes de sueurs, la blanche sait pourtant qu’elle est loin de mettre au monde cet enfant tant attendu par le couple.
Être assise et pourtant perdre pieds, diantre qu’il est difficile d’annoncer de telles choses à son enfant, heureusement Gil est là, il saura trouver les mots, il a toujours su !


Gil, vous pouvez m’amener de l’eau je vous prie ?
Esquisser un maigre sourire en se voulant rassurante.
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Eamon....


L'atmosphère de la forge, déjà lourde devenait soudain oppressante...
Du moins, je ressentais une tension nouvelle. Pas réellement angoissante, mais, comment dire... Il me semblait que le Destin avait choisi cet endroit pour ouvrir des portes...révéler des choses, sinon cachées, du moins tues jusqu'ici.
Et je sentais confusément que cela me concernait directement...

Pourquoi Papounet insistait-il sur le fait qu'il nous aimait et qu'il serait toujours à nos côtés ?... C'était, pour moi d'une telle évidence que jamais je n'eus remis cela en cause.

Et voilà que Maman semblait, elle aussi anxieuse... les traits tirés, une expression de douloureuse tristesse sur le visage, son regard allait de Papa à moi... comme si elle eut voulu se rassurer de l'unité qui soudait nos vies depuis ma naissance .. et sans doute avant.

Les armes - et d'autres objets - d'Aengus étaient entreposés dans la forge. Cela signifiait autre chose qu'un simple dépôt, voire un oubli de sa part. Je ne pouvais concevoir qu'un guerrier, homme d'honneur de surcroît - aux dires de mes parents - puisse se séparer sans une raison impérative de ces objets.
De plus, à mesure que le temps passait, et chaque fois que le nom d'Aengus était évoqué, les tensions se faisaient plus lourdes... Un rapport puissant unissait mes parents à ce personnage pour le moins mystérieux. Et ce rapport semblait me concerner d'importance.

- Mon Ange!
Ce que papa veut te dire, c’est qu’il t’aime, ça tu le sais, un papa est celui qui t’élève, celui qui guide tes pas, celui qui est présent quand tu tombes, pas pour t’empêcher de tomber, non, mais pour t’aider à te relever.


Tout cela, je le savais, évidemment... L'absence obligée de Maman durant ses missions nous avait rapprochés, Père et moi en une osmose subtile où les mots n'avaient guère cours. Gil, omniprésent, m'avait élevé dans le respect, la Foi, l'Honneur et la Fidélité... en une curieuse conformité avec cette devise gravée sur les magnifiques lames d'Aengus.
De quelle mission s'était donc investi cet homme hors normes ?

Mais pourquoi cette précision de la part de mère ?

Ce furent les derniers mots de Maman qui m'en donnèrent la réponse :

- Tu es un Trévière… mais dans tes veines coule le sang des O’Sullivan.

Oh, pas immédiatement... Il me fallut quelques minutes pour en saisir le sens profond.

Loin d'être niais et ignorant de certaines choses de la vie, je savais que le nom d'une personne ne représentait pas obligatoirement ses origines... Nombre de Nobles en changeaient selon le fief qui leur était octroyé... Le nom ne fait pas la paternité. Je ne l'ignorais point.

J'étais bien un Trévière - et, du reste, fier de l'être - mais apprendre que le sang des O'Sullivan coulait dans mes veines me plongea dans une profonde perplexité.

Et, peu à peu, des bribes d'événements, de paroles, d'allusions me revenaient en mémoire. Comme, par exemple; le jour où, sur le parvis de l'église; mon ami caché - Aengus O'Sullivan puisque tel est son nom - me murmura d'une voix émue : "Un jour, Fils, tu sauras la vérité"

Quelle vérité ?... Et pourquoi m'appela-t-il "fils" ce jour là ?

La réponse, soudain, me parut évidente et j'articulai, comme pour moi-même :

- Je suis un Trévière parce que... c'est le nom que je reçus à ma naissance, mais je suis un O'Sullivan parce que je suis le... fils...


Jusque là, j'avais gardé les yeux baissés, plongé dans mes réflexions, écoutant attentivement les paroles de Maman et Papounet... mais soudain, je levai les yeux vers eux, comme ébloui par cette révélation :

- ...d'Aengus O'Sullivan !

Comment mettre cela en doute puisque c'est ce que semblaient vouloir me dire mes parents !

Les mots de Gil et Mère prenaient soudain tout leur sens... Gil ... Papounet... Père... et mon ami caché... Aengus... Père aussi... Tout cela devenait clair, mais confus aussi... comment pouvais-je avoir deux pères ?

Maman avait le visage défait, Papounet, malgré son expression sereine semblait, lui aussi anxieux... Je pouvais lire sur son visage l'incertitude, l'inquiétude aussi... et je sentais que ces sentiments étaient engendrés par l'anxiété de savoir ma réaction face à ces révélations.

Oui, la tension était à son comble, mon coeur battait à tout rompre et, découvrant ce secret, je me mis à trembler pour mon avenir.
Quelles conséquences allaient avoir ces révélations ?...

Depuis peu, j'avais la certitude que mon ami caché n'était plus de ce monde... Je l'avais dit à Papounet qui sembla affecté... Je me souvenais de cette matinée sur la plage, en compagnie d'Enored, où le chagrin me laissa anéanti. Certes, je n'avais pas reçu confirmation de la mort d'Aengus, mais je sentais cela au plus profond de moi.
Cette sensation se justifiait aujourd'hui... Il existe des liens étranges entre les êtres que la raison n'explique pas... Et ce sang qui bouillonnait en moi me liait à jamais sans doute, à cet homme...

Je me rappelais aussi ma réaction face à cet homme qui, me privant de travail avait encouru ma colère... Ce n'était pas le tempérament de Gil qui m'avait fait agir, mais bien celui, fougueux et colérique d'un Irlandais pugnace pour qui l'affront d'un Honneur bafoué se lavait dans le sang et non dans un confessionnal.

Je regardai mes parents, les yeux débordants. Par Aristote, comme je les aimais... Que d'amour en eux... Toutes ces années passées à me protéger, à m'aider à grandir... Gil était mon Père...Nul ne m'en aurait fait changer d'avis...Même sous la torture, je l'aurais crié haut et fort !
Mais où était Aengus durant toutes ces années ?... Pourquoi Gil s'était-il substitué à lui ?...

Je me précipitai vers Maman aux pieds de laquelle je m'agenouillai et, la serrant dans mes bras, je posai la tête sur ses genoux, le corps secoué de sanglots.... Libéré d'un poids, mais déchiré encore de mille questions...

- Pourquoi ?... Pourquoi il est pas là ?... Pourquoi il nous a abandonnés ?... Qui je suis... vraiment ?... Maman... Maman....


Brisé par une émotion soudaine, je dus me taire... hoquetant et pleurant à chaudes larmes...

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Azzera
Comment le Cœur d’une maman peut-il survivre à cela?
Imaginez votre enfant dans un tel état de malêtre !
Pourquoi est-il si malheureux, c’est de votre faute, votre unique délit vous lui avez menti par omission.
Comment rester insensible à cela?


- Pourquoi ?...

Parce que tu nous as demandé de te dire la vérité, mon Ange !
Et bien que nous aurions préféré, Papa et moi, garder encore un peu ce secret pour nous, je pense qu’il est temps !
Vérité ? Si seulement Gil avait pu faire attention, on en serait pas là maintenant.
Mais très loin d’elle l’envie des reproches, non, l’heure était aux authenticités !


- Pourquoi il est pas là ?...

Je ne sais pas mon Ange !

Bien des choses se bousculaient également dans sa tête, parce qu’elle ne comprenait pas comment le messager pouvait lui avoir rapporté les lames il y a des années, alors qu’on avait vu Aengus à son propre mariage.
Alors comment cela se fait-il ? Comment était-ce possible ?
La main de la blanche caressa tendrement la joue de son fils. Comme pour soulager sa peine.

La douleur qui irradiait son ventre, était véritablement présente, mais oubliée pour l’instant… il y avait des choses plus importantes.


- Pourquoi il nous a abandonnés ?...


Oh si elle avait eu l’irlandais, là devant elle, elle l’aurait sans doute tué de ses propres mains, le faire payer ce qu’elle endurait à cause de Lui, voila à quoi elle concevait.
Mais elle se reprit, son fils continuait à sangloter, lui arrachant des larmes à elle aussi.

Il ne nous a pas abandonnés mon Ange, il est ailleurs, loin, très loin.

- Qui je suis... vraiment ?...



Tu es notre fils Eamon, notre enfant, celui que nous aimons plus que nous même, celui pour qui nous donnerions notre vie…


- Maman... Maman....


Se lever comme une machine sans réaction, se saisir de la cassette, toujours rangée au dessus de l’étagère, à l’abri de regards indiscrets.
Reprendre place auprès des siens.
D’un geste assuré, la blanche ouvre la boite et prend le premier objet qu’elle y trouve.
Une missive.
Gil… un coup d’oeil à son époux comme pour lui demander l’autorisation de poursuivre.
Elle déroule le parchemin et lit à voix haute.





Azzera, ma douce Sirène,

Si tu lis ces lignes, c'est que les Dieux, hélàs, m'ont arrachés à tes bras, m'ont rappelés à eux.
Nul vivant ne peut en donner les raisons, mais quelles qu'elles soient, nous devons les accepter, même si, le coeur déchiré, nous pensons nous être perdus à jamais.
Je sais moi qu'il n'en est rien car, un jour, par delà le temps et les Mondes, je t'emmènerai chevaucher les licornes sur les landes de la Verte Erin.

Mes forces m'abandonnent peu à peu et avec elles ce souffle de vie qui nous permit de braver le Monde et les Hommes, de les défier du haut de notre Amour inaccessible au commun des mortels.


Prendre le temps de lire la missive d'une voix qui se veut claire, posée et franche.
Instant suspendu, retour en arrière. Bourgogne, fin d’une mission.
Yeux embués. Diantre qu’il est difficile de lire ces mots. Pourtant chaque écrit lui arrache un souvenir !






Toute ma trop courte vie défile sous mes yeux éblouis. Chaque jour qui me rapproche de la Grande Faucheuse aiguise ma mémoire, faisant rejaillir chaque instant passé auprès de toi depuis Mimizan jusqu'à cette sinistre journée où je te perdis à jamais.


**Perdus à jamais ?
Non Aengus, tu te trompes, à aucun moment tu n’es loin de moi, de ton fils, et même de Gil.**




A jamais ?... Voire.

Tu resteras mienne à travers l'Eternité et tu donneras le jour à mon fils... NOTRE fils... Issu de nos amours sauvages et passionnées, issu de nos étreintes folles, irraisonnées mais irrésistibles tout comme cette pulsion qui nous jeta dans les bras l'un de l'autre... irrémédiablement unis à jamais.
Oui, tu auras un fils... je le savais depuis toujours, il ne pouvait en être autrement, je l'ai su dès que tu l'as su. Tout comme je savais dès l'abord que nous étions l'un à l'autre avant sans doute que d'être nés.


**Mon fier Irlandais, si tu savais comme je ne cesserai jamais de t’aimer, oui, je suis tienne, même si ma vie appartient désormais à mon époux, cet homme nous aime d’un amour infini, ton fils et moi ne serons jamais en manque de rien avec lui… de rien sauf de toi !**




Je ne peux traîner... Elle est là... Elle m'attend... Elle me laisse un dernier répit avant de m'emporter afin, sans doute, de me permettre, une dernière fois, de te parler. Làs... elle aura beau faire, la dernière image que j'emporte là-bas sera celle de ton regard... Celui que tu me donnas tout au long de notre courte union, celui qui savait si bien meubler tes silences... Celui dans lequel je me mirais et dans lequel je retrouvais toutes les valeurs de ma condition d'Homme.
Ce regard qui me disait tout l'Amour du monde, qui me rassurait et me rendait fier d'être à toi.
Personne, même pas Elle, ne pourra jamais plus ôter ces images de ma mémoire.

Mais le temps presse... Malgré la discrétion de leurs préparatifs, les moines me font comprendre que mon heure approche... Leurs regards compatissants ne me trompent pas. Le Père Matheus est à mon chevet, je l'ai fait mander et il a reçu ma confession... plus rien ne peut m'arriver à présent... Mais Elle, je l'ai déjà aperçue tant de fois qu'Elle ne peut me tromper. Elle est si peu discrète, finalement !


**Elle…
Combien de fois l’ai-je haïe ? Haïe pour t’avoir pris à mon amour, haïe d’avoir avorté notre union secrète, haïe de ne pas te laisser voir notre enfant.**




Tant de choses à dire, en vérité et au final... pas assez d'une vie pour les exprimer. Sans doute le seul réel regret de m'en aller si vite.

Tant de choses dont tu sais déjà l'essentiel qui tient en trois petits mots : "Je t'aime."
Je n'ai jamais cessé de t'aimer et du fond de mon Eternité ces mots resteront vibrants. Je les hurlerai du fond de mon impuissance, du fond de mon tombeau, de mon dernier souffle... car ce seront les derniers mots que je prononcerai ici-bas. Que le Frère qui recevra ma confession en soit le témoin !
Ma dernière prière ira vers toi : Donnes à notre fils tout l'amour dont je te sais capable. Transmets lui les valeurs auxquelles je croyais. Parles-lui de sa Patrie, ne l'en détourne jamais. Parles-lui de son Père qui mourra sans jamais avoir pu le serrer
dans ses bras... sans même l'avoir vu naître.


**Bien que sur ce point, tu as fait connaissance de notre Ange, mon Amour, il me l’a dit, je ne voulais pas y croire, ce jour bénit de mes noces, tu étais donc là, caché… je ne l’ai su que plus tard ! Bien plus tard ! Je t’en ai voulu de ne pas te montrer, bien que tu saches sans doute que ma vie existe maintenant grâce à Lui.**





Parles-lui des Korrigans et des Fées, des landes et des chevaux du Connemara... Parles-lui de son pays... Eire !...Parles-lui de nous, de l'Amour qui fut le nôtre.... Apprends lui l'Honneur et le Courage... la Fidélité, la Droiture et la Compassion... Toutes choses qui nous étaient chères... qui faisaient de nous des êtres bons et sincères.

Certes, je n'ai pas toujours été sans taches... Il me revient le jour où, dans cet élan de passion qui nous liait, je t'ai enlevée aux tiens et à ton village... Souvent, je me remémore ce jour non sans une certaine honte.

Il me reste un dernier voeu à formuler.

Je ne veux pas que notre enfant grandisse sans un guide, sans Père... et, hélàs... je ne serai plus là pour le guider. Mais il me revient avec acuité le souvenir d'un homme admirable. Un homme dont je sais qu'il te vouait un amour sans bornes... Un homme que la passion me poussa à affronter et à qui je dois des excuses... Ce que je lui fis alors ternira à jamais la pureté de notre Amour... Puisse-t-il comprendre et me pardonner... j'eus tant aimé en faire mon ami.

Tu l'auras compris, il s'agit de Gil... S'il est un homme digne de prendre soin de notre fils, c'est bien lui... et s'il te prenait l'envie ou le besoin de refaire ta vie, je pense que tu ne pourrais faire meilleur choix.
S'il l'accepte, je serais fier de savoir qu'il guidera notre enfant dans son cheminement vers la Lumière.


**Tu le sais… je sais que tu le sais, Gil est un époux débordant d’attentions, un père aimant, un ami fidèle, un homme intègre**




Voilà... un regard glacé se pose sur moi, l'air de dire : "On y va ?... Il est l'heure à présent !"... Oui, la Camarde, oui... j'arrive... Juste le temps d'un dernier "Je t'aime" à la plus belle femme du Monde...

Adieu ma Sirène... Je t'aime... pour l'Eternité...Vis... vis et pour l'amour de nous : "Sois heureuse"... je ne serai jamais bien loin.

Aengus O'Sullivan


Au fur et à mesure de sa lecture sa voix devenait de moins en moins claire.
Comment avait-elle pu vivre des années sans prendre connaissance de cette lettre ?
Pourquoi la curiosité ne l’avait-elle pas poussée à ouvrir ce coffret ?
Sans doute la réponse coulait-elle de source !

Gil, je….



Visage déformé par une douleur ignorée.
Respiration haletante. Mains crispées, poings serrés jusqu’à se faire saigner.
Comment parler ? Comment expliquer tout cela à son fils ? Comment ne pas devenir folle de souffrance ?




Édit pour ajout
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Gil_de_treviere
Bin... pourquoi qu'on l'oublierait Papounet

Passer un bras protecteur autour des épaules d'Eamon, lui sourire du mieux qu'il le pouvait.

Je sais que vous ne l'oublierez pas. Tu me connais mon garçon, il m'arrive parfois de dire n'importe quoi.

C'était faux bien sur, il était rare que le diacre dise n'importe quoi. Ce n'était pas un mensonge non plus, Gil ne mentait pas. Il avait la peur au ventre... Pas pour lui, pour toute sa petite famille. Cette révélation n'allait elle pas les faire souffrir, n'allait elle pas anéantir tout ce qu'ils avaient construit jusque là ?? Non !!! Cela ne se ferait pas. L'amour qui les unissait tous les trois serait le plus fort.

Une partie de pêche un matin de printemps. Tout trois embarqués au soleil levant prêt à défier tous les poissons de l'ocean. Les rires d'Eamon à chaque fois que son père pestait contre l'univers car les poissons semblaient le narguer en passant à coté de sa ligne, emplissaient la petite baies où ils avaient jeté l'ancre. Tout cela sous le regard attendri d'Azzera...


Amour ??? Peut être qu'avec un appât au bout de votre ligne ça vous simplifierez la tâche.

Hm !!! Rouge de honte d'avoir oublié l'essentiel … Bien sur mon ange … Mais il me fallait d'abord tester la profondeur... Se tourner vers son fils et lui dire plus bas … Au lieu de te marrer comme une baleine, tu pouvais pas me le dire... Chenapan va !!

voilà où en était le diacre quand …


Tu es un Trévière… mais dans tes veines coule le sang des O’Sullivan.

Un retour à la réalité, mais pas des plus heureux. Cette phrase tombée comme un couperet lui avait glacé le sang. Cherchant à tâtons la main de son épouse, Gil ne pouvait quitter son fils des yeux. Guetter la réaction d'Eamon, tout en espérant que rien ne changerait. Resserrer son étreinte pour faire sentir qu'il était là, qu'il vivait pleinement cette histoire de vie, aussi difficile soit elle.

Gil, vous pouvez m’amener de l’eau je vous prie ? Un petit sursis pour le diacre. Azz sans le vouloir allait permettre à Gil de se reprendre. Le temps d'un aller retour il allait se ressourcer, il retrouverait le courage qui lui faisait défaut en cet instant.

C'est avec deux verres d'eau bien fraiche qu'il revint auprès de ses amours. La tête trempée. Vi, un verre d'eau pour lui n'aurait été d'aucune utilité. Rien de mieux pensait il qu'une immersion de son crane dans un baquet pour tenter de reprendre ses esprits.

Donner un verre à son épouse, accompagné d'un sourire crispé. S'asseoir et tendre à Eamon le sien...
As tu soif Imon???

Et, se taire. Se taire pour laisser Azz rassurer leur fils, lui laisser le temps de répondre à ses interrogations, tout en acquiesçant les dires de son épouse. Supplier aussi Aristote (et oui, on ne se refait pas) qu'il les aide dans cette épreuve, qu'il veuille bien abréger la souffrance que traversait sa petite famille. Et pourtant ce n'était pas encore terminé.
Le coeur du diacre se bloqua quand Azz attrapa la cassette sur l'étagère. Gil savait qu'il y avait un courrier qui n'avait jamais été lu, ni par l'un ni par l'autre. Il n'avait pas vraiment envie d'en connaître le contenu, mais néanmoins il encouragea sa belle écuyère à leur en faire la lecture.
Au fur et à mesure, le diacre éprouvait une multitude de sentiments différents, allant de la jalousie...
*Azzera, ma douce sirène * Quoi sa douce sirène ? Que croyait il qu'elle était pour moi?
La colère aussi, quand par traitrise, il lui avait enlevé Azz sans qu'il ne puisse s'interposer.
La honte aussi, il avait parfois l'impression d'avoir volé la paternité d'Aengus... l'impression d'avoir volé ce bonheur auquel il tenait tant.
De la compassion pour cet homme qui de son vivant avait assisté sans mot dire à leur mariage. Cet homme qui avait du souffrir en voyant le bonheur du diacre sur son visage en serrant contre lui sa bien aimée et Imon.
Une certaine fierté aussi, du fait qu'Aengus lui avait confié les deux êtres qu'il aimait le plus.

Si tu m'entends Aengus, soit certain que je veillerais sur Azz et ton fils, non … Notre fils. Et, je le dis sans crainte, le très haut ne nous a pas laissé le temps d'en profiter et de nous en rendre compte, mais nous étions amis, sinon, je t'aurais cherché dans tout le royaume. Paix à ton âme mon frère.

La lecture avait éprouvé Azzera, Eamon avait il compris tout le sens de ceci? Gil ne savait pas vraiment. Il les pris tous les deux dans ses bras...

Gil, je …

Rien mon ange, je sais tout cela depuis longtemps et je ne m'en blesse pas. En connaissance de cause, j'ai continué à vous aimer et … Je n'ai eu aucune difficulté à aimer Imon comme mon propre fils. Que je le veuille ou non, Aengus fait parti de notre vie. Alors nous vivrons avec ce souvenir.

Le diacre les embrassa tout deux avec toute la tendresse dont il était capable. Que faire maintenant? Attendre une réaction d'Eamon ? Ou bien lire la missive que lui avait remit le messager, il y a déjà longtemps ?

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Eamon....


On dit que l'expérience ne vient pas avant l'âge... Je pense que rien n'est plus faux.
Vous pouvez passer votre vie entre vos quatre murs et cheminer tranquillement vers votre dernière demeure sans que la vie vous affecte, sans que les épreuves vous apportent leur lot d'expérience, de déboires ou de bonheur...
Vous pouvez vivoter entre banalité et morosité sans avoir jamais l'occasion d'ouvrir un oeil, de porter un regard sur le Monde et disparaître aussi discrètement que vous avez vécu... sans que personne ne se rende compte de votre passage ici-bas.... mais surtout, sans avoir engrangé d'autre expérience que celle de votre environnement immédiat... et ce, à un âge très avancé.

Du haut de mes sept ans, sans en avoir encore totalement conscience, j'avais l'impression ce jour là, d'avoir vieilli de deux lustres.

Mère et Papounet posaient à présent un regard angoissé sur moi... comme si, de ma réaction à ces révélations, dépendaient à présent leur existence à venir.

Mon silence prolongé devait y contribuer sans nul doute, mais j'avais besoin de trier toutes ces informations, j'avais besoin de chasser tout ce qu'elles avaient d'émotionnel afin d'harmoniser mes réactions en tenant compte de tout ce que cela allait impliquer par la suite...

Il me fallait... analyser... oui...surtout ne pas "subir", ne pas tomber dans le drame, dans les sentiments ravageurs qui, trop souvent, nous font agir impulsivement, instinctivement... Préserver ce qui devait l'être, ne garder de tout ceci que le côté positif, enrichissant... constructif.

Raisonnement d'adulte, me direz-vous... peut-être, mais, comme je le laissais entendre en commençant, la vie m'avait gâté sur le plan de l'expérience... Papounet, Maman, Aengus... Baile et tant d'autres m''avaient apporté bien des sources de réflexions... Mes prédispositions au combat et à l'étude m'apportaient aussi un lot non négligeable de maturité quasi innée et si, malgré tout, je restais un enfant, il m'arrivait bien souvent de penser que j'avais déjà vécu plusieurs vies.

Peu de choses m'étonnaient vraiment... Certes, j'étais curieux et avide d'apprendre... tout m'intéressait car, je sentais que je ne pouvais grandir sans la connaissance de la Vie...
Depuis ma rencontre avec Marie Alice, qui fut déterminante quant p ma volonté de devenir Chevalier de la Licorne jusqu'à ce jour où mes origines me sont révélées, je n'ai jamais cessé de dévorer la vie à pleines dents et de tenter d'en découvrir les mystères.... Avec parfois, certes, l'insouciance de la jeunesse, pour preuve ce combat en lice qui eut pu très mal tourner.

L'enseignement de Papounet et celui de Maman - sur des plans bien opposés quelques fois - font de moi un enfant précoce... ouvert, pas toujours docile, rebelle même, mais attentif à découvrir et comprendre le pourquoi et le comment des choses.

Depuis des années, je sentais gronder en moi un autre "moi"... Une part de mon être me semblait... étrangère... oui, étrangère aux normes que la vie en ce Royaume m'imposait, me dictait. La connaissance presque innée de cette langue gaélique et ma facilité d'en perfectionner l'usage et comprendre le sens, n'étaient pas... "naturelles"... Les visions onirique d'un ailleurs féerique semblaient me susurrer que j'appartenais à un autre monde... que mes racines étaient ailleurs.

Ma rencontre avec Aengus ne pouvait être fortuite car elle confirmait tout ce ressenti...

Et aujourd'hui... cette vérité... LA Vérité, celle dont "il" me parla sur le parvis... Cette vérité éclate enfin au grand jour.

Aengus O'Sullivan est mon Père... Celui à qui je dois de vivre.

Je suis partagé entre chagrin et fierté... Complexité de l'âme et de l'intelligence... difficile mariage entre sentiments et raison... Ne pas juger surtout... comme Papounet me l'a appris... Construire, bâtir, même sur des cendres... celles du passé, en l'occurrence.

Je sais que mes parents attendent une réaction de ma part... et sans doute, l'avenir de notre famille en dépend, j'en suis confusément conscient, mais il y avait encore tant de coins d'ombre dans ces révélations que je ne pouvais encore émettre le moindre commentaire sur ces révélations, ni même en percevoir toutes les implications.
Le premier moment d'émotion passé, je retrouve cet esprit logique qui contraste bizarrement avec le romantisme naïf d'un enfant de mon âge.
Si bien que, et sans doute afin de laisser les idées se mettre en place, je ne peux m'empêcher de poser une question qui me torture les méninges... suscitée par une phrase de la lettre lue par Maman :

- Pourquoi dit-il qu'il ne me verra jamais, alors qu'il m'a pris dans ses bras à l'église ?... Il dit qu'il va mourir sans me voir naître... Je veux comprendre Maman...


Un regard vers Gil :

- Tu le sais, toi, Papounet ?

Maman n'ose pas dire les choses parfois, je le sais... Oh... elle ne ment pas... non... Elle détourne ou contourne les questions lorsqu'elle pense que les réponses risquent de me perturber... Elle me protège et c'est normal. D'autre part, je sens que la... "perte" d'Aengus l'affecte plus qu'elle ne veut l'avouer.
Mais Papounet, lui... Oh, je le connais si bien...tant de complicité nous unit... Il ne peut me tromper et je le sais - il doit le savoir, lui aussi ... C'est pourquoi c'est à lui que je m'adresse encore :

- Toi... toi tu sais toute l'histoire, hein ?... J'ai besoin de savoir !

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Gil_de_treviere
Comment se persuader que tout ce qui allait suivre n'allait pas traumatiser son petit bonhomme ?
Comment être sur de ne pas faire plus de mal que de bien ?
Toute vérité n'est pas bonne à dire diront certains. Le diacre pensait le contraire. Il fallait seulement attendre le moment opportun et le courage pour des révélations.

Comment Azz allait elle réagir en s'apercevant que Gil en savait bien plus qu'il n'en avait dit jusque là ?
D'un autre coté, elle ne lui avait rien demandé, pas plus qu'elle n'avait voulu prendre connaissance du contenu du coffret qu'un messager leur avait remis quelques années plus tôt.

Quoiqu'il en soit Eamon devait trouver réponses à ses questions. Il fallait qu'il sache que son père ne les avait pas abandonné, même si le diacre devait en pâtir, il en soulagerait sa conscience. Il y a des secrets bien plus lourds à porter, que les réactions qu'ils peuvent engendrer.

Sans mot dire il se leva, s'éclipsa quelques secondes et revint avec un parchemin quelque peu froissé entre ses mains.
Le regard qu'il posa sur son épouse ressemblait à une demande de pardon. Pardon car il avait fauté. Il avait pris connaissance d'une missive qui ne lui était pas destiné. Il pourrait bien trouver comme excuse qu'elle émanait d'un confrère, mais ce n'était pas vraiment le cas. C'était une souffrance profonde qui l'avait poussé à lire cette lettre. Il voulait savoir. Sa première réaction après lecture fut de faire une boule de ce parchemin et de le jeter dans le brasier de la forge... Allez savoir pourquoi, au lieu de choir au milieu des flammes et de se consumer, elle avait roulé sur le coté.
Cette confession avait bouleversé le diacre. Il découvrait un peu plus Aengus et inconsciemment, il l'admirait. A tel point qu'il se surpris plusieurs fois à prier pour cet homme.

Gil s'installa en face de son fils.

Oui Imon, je sais. Je sais que ton père ne vous a pas abandonné. Mais comme je te l'ai souvent dit, la vie nous réserve bien des surprises et l'on ne fait pas toujours ce que l'on aimerait.

Le diacre prit la main d'Eamon et l'incita à se rapprocher un peu plus de lui.

Tu vois Imon, ce parchemin contient la confession d'Aengus à un de mes collègues, un moine qui par sa bienveillance l'a accompagné jusqu'à ce qu'il croyait son dernier souffle.

Sans plus attendre Gil en fit la lecture


A l'attention de Dame Azzera, ecuyère de l'Ordre Royal de la Dame Blanche à l’écu vert.



Ma chère enfant,

Même pour un homme d'Eglise, habitué à donner les Derniers Sacrements à ses semblables, il m'est extrêmement pénible de m'acquitter de cette tâche auprès de vous au vu des circonstances dans lesquelles il m'a été donné d'accomplir les dernières volontés d'un mourant.

Mais, il me faut hélàs vous les conter par le menu ainsi que le souhaitait feu Messire Aengus O'Sullivan.
Je vous avoue que j'ai dû m'y reprendre à plusieurs fois avant de pouvoir me résoudre à rédiger cette missive, tant l'émotion fut grande en recevant la confession de cet homme pour le moins étonnant.

Notre monastère reçut un soir d'été, la visite d'un homme aux traits durs mais harmonieux et dont les yeux révélant à la fois une grande douceur et une immense détermination, brillaient d'un éclat farouche... presque sauvage.
Il se tenait sur le seuil la main crispée sur son flanc gauche, le visage déformé par une grimace de douleur, à n'en point douter.
Il portait une tenue étrange sous sa longue cape et portait dague et bâtarde de fort belle facture, comme vous devez le savoir.
On devinait en lui une grande noblesse et nous eûmes la certitude - confirmée par la suite - que jamais il ne mit sa lame au service du Mal.

Au Frère séculier qui le reçut, il demanda à se faire examiner par un barbier, un médecin car, disait-il, une blessure récente le faisait souffrir bien qu'elle fût refermée et en partie cicatrisée.
Mes connaissances en médecine m'amenèrent tout naturellement à devoir l'examiner.
Il me dit avoir quitté un campement militaire auquel il était affecté et souhaitait se faire soigner avant de rentrer auprès de ses compagnons d'armes. Sa démarche discrète n'avait d'autre but que d'éviter l'inquiétude à une personne chère : Vous, Dame Azzera, il me l'apprit par la suite.

Las... la suite ...

Mais il me faut reprendre le fil.

J'examinai donc sa plaie. A première vue, elle semblait en voie de guérison, mais je remarquai un suintement purulent suspect au delà des derniers points de suture. A la pression, un liquide jaunâtre en jaillit tandis qu'une vive douleur arracha un cri à Messire Aengus.

Nos regards se croisèrent et je pus lire dans le sien une froide détermination lorsqu'il me demanda :
- Mon Père... Si vous pouvez faire quelque chose : Faites-le !... Quoi qu'il m'en coûte. Ma compagne m'attend et mes compagnons ont besoin de moi... Faites-le... mais faites vite !.

Son ton était sans réplique, même sans avoir élevé la voix. Même si cette voix était basse et douce, je ne m'y trompai point... il me donnait un ordre.

Je le dévisageai un moment, puis, je me décidai :

- Soit mon fils. suivez-moi.

Il se leva en réprimant une grimace de douleur. Il faisait mille efforts pour se tenir droit... Fier, noble et altier... comme si la souffrance était pour lui chose à dominer, vaincre... écraser.
Il était porté par l'amour Madame... un amour de vous et des Hommes... Un amour digne d'un Roi !

Je l'amenai dans une cellule monacale qui me servait d'infirmerie et le fit se dévêtir et allonger sur la couche.
Une à une, avec un soin méticuleux, il ôta les pièces qui composaient sa vêture et son équipement, les rangeant soigneusement sur un banc à côté du lit.
Il dut remarquer mon air intrigué lorsqu'il se débarrassa de son espèce de robe car il me regarda en souriant et dit :

- Je manque à tous mes devoirs mon Père. Mon nom est Aengus O'Sullivan. Je suis Irlandais et ceci est un Tartan aux couleurs de ma famille. C'est un vêtement traditionnel dans mon pays... Je ne m'en sépare que pour dormir... et encore. Ajouta-t-il en riant légèrement... ce qui lui arracha une nouvelle grimace de douleur.

- Allongez-vous mon fils, lui dis-je, vous m'en direz plus tout à l'heure.

Ce qu'il fit trop péniblement à mon goût au vu de l'apparente bénignité de la plaie... ce fut à mon tour de grimacer, ces douleurs n'auguraient rien de bon, je le craignais.

Enfin, je l'examinai plus méthodiquement, palpant, pressant écartant légèrement les bords de la cicatrice qui n'était pas complètement cautérisée. Mon examen prit plus de vingt minutes au terme desquelles je relevai la tête le regardant droit dans les yeux. Tout au long de l'examen j'avais senti le poids de son regard sur moi.
Nos regards se croisèrent. Il dut lire dans le mien une certaine inquiétude car avant que ne prisse la parole, il me dit :

- C'est plus grave qu'il n'y paraît, n'est-ce pas mon Père ?

Comment mentir à un tel homme ?

- Oui, mon fils... Très grave... trop pour que vous puissiez reprendre la route ce soir encore.

Il parut contrarié, mais résigné... La gravité de sa blessure devait lui apparaître avec plus d'acuité. Mais il était déterminé à tout faire pour guérir.

- Pouvez-vous me guérir ?

- Vous guérir ?... Vous soigner... sans aucun doute... Quant à guérir... seul le très Haut peut en décider mon fils...

Je pense que dès cet instant, il sut qu'il ne quitterait plus jamais le Monastère... alors que personnellement, j'en avais le secret espoir.

Je vous passe les détails de l'intervention qu'il subit... Je dus rouvrir la plaie et la cureter, la refermer, la nettoyer, la panser chaque jour.
Mais, curieusement, alors que cette plaie semblait guérir, Aengus dépérissait à vue d'oeil, son visage se creusait, ses yeux s'enfonçaient dans leur orbite sans perdre pour autant leur éclat.
Il perdait l'appétit et maigrissait davantage de jour en jour... Bientôt, il n'eut même plus la force de se lever pour sa promenade.
Les potions et onguents... rien n'y fit... Il luttait pourtant... bec et ongles, avec une rage de vivre hors du commun... Parfois, entre ses dents il sifflait rageusement : " Azz... j'arrive... j'arrive... elle m'aura pas..."
Il parlait de la Camarde, évidemment.
Parfois, avant de ne plus pouvoir se lever, il tirait sa lame et s'essayait à quelques passes... son visage s'éclairait alors et il me disait, triomphant :
- Mon Père... dans une semaine, je vous dis adieu !!
Mais ces moments de regain se firent de plus en plus rares...
Cette curieuse agonie dura plus de six mois... quelque chose le tenait en vie... Une volonté d'acier, un désir inouï de vous revoir et de voir son fils... votre fils. Car il savait me disait-il que vous attendiez un enfant de lui.
Il se fatiguait vite, mais aimait parler avec moi... il me contait son pays, ses aventures, votre amour... Riant parfois de quelques scènes rocambolesques que vous aviez vécu ensemble... Je vous avoue en avoir rit avec lui car nous étions devenus des amis, je le sais.
Il m'interdit d'aller vous trouver car disait-il : "Je veux qu'elle garde de moi l'image d'Aengus O'Sullivan le Guerrier, le Fou, l'Amant terrible ... et non pas celle de cette loque que je suis devenu. Promettez mon Père... Promettez !..."
Je ne pus que promettre, contre mon gré... mais nous savions tous deux que ses jours étaient comptés et je n'eus pas le coeur de lui désobéir. D'autant qu'il ajouta : "Quand je ne.. quand je serai parti... allez la trouver... et donnez lui mes affaires... Contez-lui cette histoire..."

Puis, un soir, il me fit mander.

Assis dans son lit, il semblait en pleine forme... je crus qu'il m'appelait pour l'aider à se lever, mais il me dit avec un calme étonnant :

- Mon Père... c'est pour ce soir ! J'ai besoin de vous.

Nous étions tellement habitués à passer des heures ensemble que je ne compris pas immédiatement le sens de ses paroles. Devant ma mine ahurie, il rit et ce fut lui qui précisa, un peu cyniquement :

- La Faucheuse, mon Père, Elle m'a donné rendez-vous... et c'est ce soir !... Je veux me confesser. Il est temps.
Puis, il me demanda une plume et un vélin et se mit à écrire... je voulus m'éclipser discrètement, mais il me retint :

- Restez mon Père... il n'y en plus pour très longtemps à présent.

J'avais envie de pleurer à chaudes larmes... Je me surpris même à blasphémer, maudissant le Très Haut de tant de cruauté, d'injustice !... Mais vous le savez ma Fille, les Voies du Très Haut sont impénétrables et je dus ravaler ma douleur pour me mettre à Son service et à celui d'Aengus.

Il put à peine terminer sa lettre... Il porta la main au côté... une ultime douleur... me regarda droit dans les yeux et murmura : "Azz... Azz... dites lui... qu.. que je l' aime......"

Son buste retomba sur l'oreiller et sa tête roula de côté, ses longs cheveux éparpillés sur l'oreiller... Je ne pus m'empêcher de le prendre dans mes bras... et, que le Très Haut me pardonne, je le pleurai à chaudes larmes... sans honte aucune.

Selon ses dernières volontés, sa dépouille fut brûlée sur le lac.. à bord d'une barque funéraire conforme à celle qu'il me décrivit et qui faisait partie des rites anciens de son Irlande Natale... Hommage réservé aux braves et aux chefs avait il ajouté avec un sourire taquin.
Mais, je sais aujourd'hui qu'il y avait une autre raison à cette volonté. Aengus est décédé des suites d'une grave infection dont nous ignorons encore l'origine, mais qui dut lui être inoculée par la dent de la bête ou lors de la traversée de villages infestés par quelque épidémie. En se purifiant par le feu, Aengus devait savoir qu'il détruisait aussi tout foyer de pourriture.... Jusqu'au bout, il pensa aux autres.
L'Humanité perd un grand Homme.

L'évocation de ces souvenirs me laisse une grande douleur à l'âme ma Fille... Le serviteur du Très Haut que je suis vous implore de ne jamais ternir la mémoire de cet être hors du commun... et s'il est exact que vous portez son enfant, dites lui que son père était un homme d'exception... qu'il en soit fier et qu'il porte son nom comme un étendard !
Vous avez dû être une femme comblée et j'en suis heureux pour vous... vous deviez le mériter si vous avez été aimée de lui.

Vous trouverez les objets personnels du défunt dans le paquet que je vous transmets par le truchement d'un messager... ne l'accablez point, il ne sait pas la triste nouvelle qu'il vous apporte.

Je reste votre serviteur si d'aventure je pouvais vous être de quelque utilité.

Que le Très Haut vous ait en sa Sainte Garde.


A l'évocation de ce récit quelques larmes avait coulé sur les joues du diacre. Des larmes de compassion. Bien qu'il ait toutes les raisons de haïr cet homme, Gil lui aussi aimait Aengus. Il ne savait pourquoi, mais c'était comme ça.

Voilà Imon qui était ton père.

Eamon avait l'esprit vif et réflechi. Bien que le diacre se douta que cela ne suffirait surement pas il préféra s'arrêter là, guettant tour à tour les réactions de ses deux anges

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Azzera
- Pourquoi dit-il qu'il ne me verra jamais, alors qu'il m'a pris dans ses bras à l'église ?... Il dit qu'il va mourir sans me voir naître... Je veux comprendre Maman...

Je ne sais pas par quel miracle il a survécu mon Ange !
Il ne me l’a pas fait savoir, sur ce point, je suis aussi ignorante que toi.
Demande à ton père, il semble en savoir bien plus que moi !


Non, mais c’est pas possible ça… visage crispé en entendant la lecture faite par son époux.
Une missive ?
Comment cela ? Il en avait caché l’existence depuis si longtemps ?
Pourquoi ?
Savait-il quelque chose dont il ne voulait pas parler ? La blanche ne voulait rien montrer de sa rage, mais en l’instant, elle en voulait terriblement à Gil d’avoir omis cette confession. Qu’est-ce qu’il savait vraiment ? La confiance s’effritait au fur et à mesure de la lecture.
Se reprendre, il avait sans doute ses raisons !
Oui, ben, lesquelles ?

Ton Papounet... sera toujours là pour nous!
Regards se voulant affectueux lancés à Gil, comme pour l'encourager à poursuivre le décodage de la missive. Il fallait qu’elle sache ! Mieux vaut tard que jamais !

Crampes au ventre lui arrachant des cris étouffés de douleur.
Cela peut paraitre anodin, cela peut sembler normal dans la situation qu'ils vivent à l'instant.
Sauf qu'elle se doute que ce mal est différent.
La souffrance ressentie, elle la connait... des contractions!
Ce sont des contractions!
Sauf que le bébé qu'elle attend n'est pas encore prêt à sortir... ou s'il est prêt, et bien, il ne sera pas en vie! C'est trop tôt, elle le sait, elle le sent, alors elle se tait, voulant par cette action serrer les cuisses et retenir cet enfant à naitre en elle.


Eamon, j'ai rencontré ton père un an avant ta naissance, il est tombé amoureux de moi sans que l'on s'en rende compte, il semblait perdu dans une vie qui ne lui ressemblait pas, nous t'avons ardemment désiré, je ...
Yeux implorant Gil de lui pardonner ce qu'elle s'apprêtait à révéler à son Ange...... j'étais éperdument amoureuse de cet homme.
Tu as hérité de lui ce regard déterminé que tu arbores souvent, tu lui ressembles de plus en plus!
Mains qui lui ébouriffent les cheveux... Même le blé dans tes cheveux fait penser aux enfants d'Irlande.
Mon Ange...

Elle voudrait dire à son enfant à quel point elle s’en veut de ne pas avoir été présente pour Aengus. Toujours occupée par ses missions, qui, bien des fois, lui font rater l’essentiel.
Comment a-t-elle pu le laisser en Bourgogne ?
Comment, en sachant ce que Gil vient de lui apprendre, ne pas s’en vouloir et se dire que si elle avait été là, tout aurait été différent ?

Impossible de continuer, la blanche est prise de violente nausées, son ventre est dur comme la pierre, la douleur irradie dans le bas du dos.
Caractère établi de ce qui constitue maintenant une certitude d’hypothèse : elle va perdre le bébé qu’elle attend.

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Eamon....


Il est des moments dans la vie d'un être où le Monde, l'Univers connu, semble s'effondrer brutalement à la lumière de certaines révélations, certaines découvertes.

Après la lecture de la lettre du Moine, il aurait dû en être ainsi pour moi, je pense. Curieusement, il n'en fut rien.

Depuis toujours je savais, sans réelle cognition, que mon Destin n'était pas banal... Je savais que j'étais différent de mes petits camarades, d'ailleurs, je ne me plaisais guère en leur compagnie. Et si, souvent, je trouvais les adultes vains et complexes, mes condisciples m'ennuyaient, me lassaient par leur manque de maturité... du moins à mon sens. Mes parents étaient pour moi une source de savoir et d'amour inépuisable et leurs amis, sans le savoir, m'instruisaient de plein de choses dont je tirais, bien évidemment grand profit.

En réalité, c'est moi qui n'étais pas dans la norme pour un enfant de presque 7 ans.
Doté d'une curiosité insatiable et d'un appétit de connaissance gargantuesque, j'assimilais les choses avec une facilité déconcertante, si bien qu'il m'arrivait parfois de "faire l'enfant" afin de ne pas décontenancer mon entourage.

Après la lecture de cette missive, je restai un long moment silencieux... Presque chaque mot de cette lettre me "parlaient"... Il me semblait qu'à travers sa destinataire, ils s'adressaient à moi aussi.

Si bien qu'au lieu de s'effondrer, mon Univers s'ouvrait soudain à une Vérité nouvelle... J'avais "perdu" un Père, mais j'avais été pris en charge par un homme de Dieu... Un Guerrier s'effaçait pour laisser la place à un Saint... et tous deux réussissaient, l'un par son absence, l'autre par sa présence à m'enseigner la vie... la Droiture, la Fidélité et l'Honneur. Tous deux faisaient de moi un Homme... tout simplement.

J'eus dû pleurer Aengus et maudire Gil... Ce fut tout le contraire qui se passa... J'idéalisai mon géniteur comme une espèce de Demi-Dieu Celte, sachant manier l'épée comme la harpe... Une espèce de Barde Guerrier... Et dans le même temps, je portai Gil sur un piédestal de respect et d'Amour.
Ces deux hommes, admirables de droiture et de compassion, de foi et de volonté m'apparaissaient soudain comme des Anges protecteurs.

Finalement, peu m'importait de savoir lequel des deux m'avait "fait"... Mère constituait le trait d'union entre ces êtres d'exception et je trouvais qu'elle avait bien de la chance d'être aimée de ces deux hommes.

J'avais envie de pleurer, certes, mais si j'avais dit à ce moment que mes pleurs étaient des larmes de bonheur, Papounet et Maman n'auraient sans doute pas compris... aussi, je me contentai de renifler discrètement sans grande émotion apparente.

Comment les rassurer ? Gil m'observait non sans anxiété et Maman, replongée brutalement dans ses souvenirs semblait en perdition.

Mes réflexions fusaient à la vitesse de l'éclair dans mon cerveau en ébullition.

Si Aengus n'était pas mort des suites de cette blessure, nous serions sans doute Elle et moi à ses côtés... peut-être en Irlande... A moins que, lors d'une bataille avec les Soeurs de son Ordre, Mère serait tombée au combat et Aengus m'aurait élevé seul... et sans doute aussi ramené en Irlande.
A présent, c'est Gil qui nous prenait en charge avec tout l'amour que je lui connais.
Dans tous les cas, j'étais, comment dire... gagnant.

La mémoire d'Aengus était respectée par Gil et les sentiments que Mère avait - ou éprouvait encore - pour mon Père naturel l'étaient tout autant. Gil retrouvait son "doux coeur" éprouvé par la perte d'un Homme qui l'arracha sans doute à lui, mais semblait ne pas leur en vouloir. C'est la vie diront les plus fatalistes... Mais, moi, je savais que ce n'était pas de la fatalité, mais Dieu qui nous mettait à l'épreuve.
L'attitude des uns et des autres dans cette affaire démontrait de manière éclatante que de bonnes Fées m'avaient entouré d'âmes nobles.

J'en pris conscience et rejetai vivement cette attitude tout d'abord courroucée... dirigée contre Aengus et Maman pour des raisons purement égoïstes à peine justifiées par l'ignorance d'éléments importants.

La lettre du Moine révélait bien des zones d'ombre. Mais une question restait encore sans réponse.

Aengus avait brûlé sur une barque funéraire "avant" ma naissance... Alors l'Aengus aperçu à l'Eglise ?... Un revenant ?... un Fantôme ?... Les fantômes n'ont pas - dit-on - de consistance ni ne peuvent parler ou nous toucher... et de plus, moi, je ne croyais pas aux fantômes... C'était bien un homme qui m'avait tenu dans ses bras et parlé... Et, au fond de moi, je savais que c'était Aengus.

Comme se pouvait-il qu'ils soit à la fois mort et vivant ?

J'étais déchiré entre deux sentiments... entre deux oppositions. Il FALLAIT que je sache toute la vérité, mais d'autre part, je voyais que ce rappel d'un passé heureux et douloureux à la fois, avait un effet désastreux sur Maman... Gil, quant à lui semblait investi d'un devoir envers moi et se résignait à subir les conséquences de ces révélations... confiant vraisemblablement en la Justice Divine... Brave, merveilleux Papounet... l'abnégation faite homme... Plus tard, il faudrait lui ériger une statue sur la place de Mimizan...le canoniser !

- Eamon, j'ai rencontré ton père un an avant ta naissance, il est tombé amoureux de moi sans que l'on s'en rende compte, il semblait perdu dans une vie qui ne lui ressemblait pas, nous t'avons ardemment désiré, je ... j'étais éperdument amoureuse de cet homme.
Tu as hérité de lui ce regard déterminé que tu arbores souvent, tu lui ressembles de plus en plus! Même le blé dans tes cheveux fait penser aux enfants d'Irlande.
Mon Ange...


Les paroles de Maman me touchent... son geste me force à fermer les yeux pour éviter qu'ils débordent... " Mon Ange"... Ces mots... dans sa bouche, ce sont des mots d'amour...et soudain, je réalise que c'est, à travers moi, toujours Aengus qu'elle aime... cet amour, elle l'a transcendé, l'a reporté sur moi... en a fait une dévotion...
Me perdre serait pour elle perdre Aengus une deuxième fois... Voilà pourquoi ce refus de me voir porter les armes, Voilà pour quoi elle craint de me voir... "grandir"... Voilà pourquoi mon désir d'entrer à la Licorne la met de méchante humeur... "Diacre... tu seras Diacre... comme ton Père..."
Ces mots perdent de leur sens aujourd'hui... Mon Père était un Guerrier !

Je lève les yeux vers mes parents... Je me sens soudain leur égal... du haut de mes 7 ans (bientôt) je suis celui à qui ils doivent des explications... non pas des excuses, la vie les a meurtris tous trois... et sans doute bien des gens dans leur entourage.
Mais nous réalisons tous en cet instant que mon Destin va s'accomplir quoi qu'on fasse.

- Vous êtes ce que j'ai de plus cher au Monde... Maman tu as souffert mille mort de celle d'un seul être... Tu as été plus qu'une mère pour moi, je le sais aujourd'hui. Je ne serai jamais Diacre, même si je sais toute la noblesse de ce sacerdoce... Mais je fais ici le serment sur les lames de mon Père de ne jamais faillir à mon devoir d'Homme avec Honneur et Fidélité !

Je regarde Papounet avec des yeux brillants :

- Père... oui... Père, car c'est ce que tu as été pour moi depuis le premier jour. A l'exception d'Aengus, sans doute, tu étais le seul à pouvoir prendre ce rôle avec joie... parce que ton âme n'est qu'amour comme l'enseigne Aristote. Tu savais que ce moment arriverait et tu as fait fi de tout par amour.
Pour cela, je t'aime en retour et jamais, moi vivant, le nom des Trévière ne sera bafoué sans que son honneur soit lavé dans le sang !


Je me tais un moment et pose la main sur la bâtarde au Triskel... Je la saisis par la poignée - elle me semble bien légère soudain - puis, empoignant la garde des deux mains, je porte le pommeau à mes lèvres et articule :

- Aengus O'Sullivan... Père... Je jure de ne jamais mettre ces lames au service du Mal. Car désormais, la devise qu'elles portent gravée en leur fer sera mienne. Je suis Eamon O'Sullivan de Trévière... Je serai Chevalier de la Licorne et je combattrai le Mal jusqu'à la Mort !

Plus ému que je ne le voudrais, je dépose enfin l'arme sur le tartan plié et, d'une voix ferme :

- Je ne peux encore porter cette épée, je n'en suis pas digne... et puis,... c'est vrai qu'elle est encore un peu lourde pour moi... petit sourire enjoué pour dédramatiser l'atmosphère et je poursuis :

- Mais je veux la dague... et, Mère... Je veux porter les couleurs de mon Père... Ce sera ma manière d'appartenir à Son Clan !... Mon Clan !

Je me serre contre Maman tout en cherchant la main de Papounet et murmure :

- Je vous aime....

Puis, levant encore les yeux vers eux :

- Que lui est-il arrivé... ensuite... Car il n'est pas mort, n'est-ce pas ?... Puisqu'il est venu à l'église ...

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Azzera
Douleur de plus en plus violente.
Surtout, ne rien montrer, faire face, refuser de se laisser emporter par la morsure acerbe de l'intensité de sa souffrance.

Son Ange se montre différent.
Il est certain que tout ceci doit le perturber, mais à quel point?
Comment être certaine que c'était le bon moment pour un aveux non désiré?
Pourquoi la Vie décide-t-elle pour eux?

Les échanges épistolaire...
Elle doit parler à son fils des missives...
Maintenant?

Visage crispé, lèvres tremblantes, regard perdu...
Que faire?
Pas maintenant, la douleur l'empêche de faire le moindre mouvement.
Laisser son époux parler... Pas fière d'elle la Blanche... non, pas fière dutoutdutoutdutout.

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Gil_de_treviere
Malgré la tension pesante qui régnait dans la forge, Gil se sentait soulagé. Faute avouée, à moitié pardonnée dit on. Et puis quelle faute y avait il ? Bien sur il avait lu cette missive, bien sur il n'en avait pas parlé. Pourtant ce n'est pas l'envie qui lui avait manqué, mais il n'avait jamais trouvé le moment opportun pour le faire jusqu'à aujourd'hui.

La réaction d'Eamon à la lecture de ce pli, bien que Gil l'eut appréhendée, l'apaisa.
Son fils, pouvait il l'appeler encore ainsi ? Pour Gil, quelque soit les décisions de son petit il resterait à jamais son enfant. Rien ne pourrait effacer les moments privilégiés qu'ils avaient vécus ensemble.
Son fils surement tourneboulé par ces révélations lui semblait, lui aussi sortir d'une période difficile, pleine de doute et de questionnement sur ses origines. Gil le connaissait bien son Eamon, il savait qu'il saurait faire la part des choses et dans le pire des cas, le diacre saurait s'effacer humblement.

Quant à Azzera, ses souvenirs surement douloureux en cet instant refaisaient surface, et tout cela par la bouche du diacre. Plus il l'aimait, plus il la découvrait. Plus il la découvrait , plus il l'aimait. Il voyait bien qu'elle souffrait en silence, ses yeux étaient le miroir de cette souffrance.
Il aurait voulu la prendre dans ses bras, lui dire combien elle comptait pour lui. Mais il pensait que pour le moment ce n'était pas ce qu'elle voulait entendre.

Après un long silence , qui sembla une éternité , Eamon prit la parole. Il s'adressa à sa mère. Tout ce qu'il pu dire, le diacre le savait déjà. Certes les tensions entre la mère et l'enfant avaient été nombreuses, mais cela n'entachait en rien l'amour qu'il portait à cette femme hors du commun.

Je ne serais jamais diacre lui avait il dit. Cela fit sourire Gil. Lui, il le savait depuis longtemps. Volontairement ou involontairement, il avait au grand dam d'Azzera influencé Eamon en ce sens. On ne devient pas clerc ou quoique ce soit pour faire plaisir. L'âme d'un guerrier dominait dans l'esprit d'Eamon. Tout comme son géniteur.

Le diacre souriait encore quand son fils s'adressa à lui.

Père... oui... Père, car c'est ce que tu as été pour moi depuis le premier jour.

Le reste , Gil l'entendit à peine. Le sourire toujours présent, fut ponctué par des larmes qu'il ne put retenir. L'homme d'église qu'il était aurait du remercier le très haut. Pour Gil, la foy n'avait rien à voir en ces paroles et c est l'homme qui remerciait silencieusement son fils de l'amour qu'il donnait à son père.

Fier, fier d'Eamon quand il l'écouta prêter serment. Non seulement ce petit homme lutterait pour une cause juste, mais en plus il savait trouver les mots pour ne blesser quiconque.

De ses deux mains Gil enveloppa celle d'Eamon...

Nous aussi on t'aime Imon. Aristote m'en est témoin, mon garçon, pour toi, je donnerai ma vie

Faisait il chaud, faisait il froid. La nuit était elle tombée, ou le soleil était il à son zénith ? Le diacre était bien incapable de le dire. Il aurait tant aimé que cela finisse. Tant aimé être n'importe où avec ses deux anges vivant à nouveau les plaisir de la vie. Mais ils en étaient encore loin. Il restait tellement de chose à dire encore.

Que lui est-il arrivé... ensuite... Car il n'est pas mort, n'est-ce pas ?... Puisqu'il est venu à l'église ...

Le diacre se leva, attrapa un tabouret et invita Eamon à s'asseoir.

Je vais tout te raconter Imon, tout ce que je sais et que tu dois savoir. A vous aussi Azz.

Du regard il chercha l'approbation de son épouse. Bien qu'il s'en passerait quoiqu'elle en pense.

Un jour mon garçon, je me trouvais dans mon bureau de tribun. Il sourit. Et oui Imon, un poste que j'ai eu plaisir à occuper.
Donc, le nez sur les listes de nos nouveaux arrivants à Mimizan, je ne vis pas une reine entrer et s'asseoir devant moi. Quand je me décidais enfin à lever la tête et poser un regard sur son visage, je fus ébloui par l'éclat de ses yeux. Une mer émeraude sur laquelle quelques instants je me laissais aller à naviguer. Je sus bien plus tard que j'allais devenir esclave de ces mirettes.

C'est un regard empli d'amour que le diacre dirigea vers son épouse. Il revivait ce passage de sa vie comme si cela se passait aujourd'hui.

Mais ce jour là, au fond de ces yeux, ce n'est que chagrin et tristesse que je trouvai. Tu me connais Imon, je ne peux rester insensible au malheur des autres. Et, c'est sans chercher que je trouvai les mots, afin de tenter de soulager sa peine. Je peux te dire que bien m'en pris, sinon, je ne serais pas là à te raconter tout cela.

Je revis ta mère plusieurs fois dans les jours qui suivirent.
Gil sourit. Oui c'est de ta mère que je parle, cette reine qui fit irruption dans mon bureau.

Au fur et à mesure de nos rencontres, nous sympathisions. J'étais à ce jour un apprenti forgeron et je venais de recevoir une commande pour une épée. Un peu paniqué , j'avais besoin d'aide. Je ne le savais pas à l'époque mais je pense que ce fut un prétexte tout trouvé pour me rapprocher un peu plus d'Azz.
Je crois qu'elle a accédé à ma demande avec plaisir. Le lendemain, le cœur battant, les genoux flageolants, je me trouvai devant la porte de la forge.

Je sais aujourd'hui que c'est ce jour là que je me suis rendu compte que j'étais éperdument amoureux de ta mère. Ce que je ne lui pas dit à ce moment là, mais je pense qu'elle l'avait deviné.

Tout cela mon fils c'était sans compter sur l'arrivée d'Aengus.
Gil ébouriffa les cheveux d'Eamon. Je veux que tu saches, tout comme vous mon ange, que je n'ai aucune rancœur envers cette homme, bien au contraire.

Gil resta silencieux quelques secondes, mais il lui fallait continuer avant qu'il perde courage. Il mit la main dans sa poche d'où il sorti une autre missive.

Comme pour s'excuser il dit à Azz.

Elle m'est parvenue il y a peu. Et cette fois c'est bien à moi qu'elle était adressée.

Son regard se tourna vers Eamon... Oui Imon, Aengus est bien vivant. J'en remercie Aristote.

Il leur fit un sourire timide.... Bon, je me lance

Citation:
Messire de Trévière, Mon Père, Maître Gil... ou tout simplement Gil... comme un ami que vous eussiez pu être.

Vi ben, on enlève le messire, le père et le maître. Quelle idée de m'appeler Maître... Amis, on aurait pu l'être, et bien que ni l'un ni l'autre ne le sachions nous le sommes surement

Citation:
Trois années... trois longues années avant que je puisse me résoudre à vous écrire.
Trois années depuis vos noces, trois années qu'il m'a fallu pour digérer, admettre pour moi l'inadmissible.
Trois longues années pour me faire à l'idée que mon silence pouvait être criminel... tout comme pouvait l'être mon retour à Mimizan.
Trois années pour qu'enfin ma plume se délie sous la contrainte d'un besoin de vérité, d'un devoir de justice... mais aussi par devoir envers un enfant. Mon enfant.


Euh … Ton enfant, ton enfant... C'est un peu le mien quand même.

Citation:
Je vois dois à tous des explications et à vous, des excuses jamais formulées.

Loin de moi l'idée de me "justifier"... Les épreuves que j'ai endurées m'en dégagent... J'ai payé le prix fort pour gagner le droit à une conscience nette et sans tache.
Je ne sais encore comment vous allez pouvoir révéler le contenu de ce courrier à Azzera et Eamon, mais je vous sais assez habile et honnête pour vous acquitter de cette tâche avec brio et sincérité.
Après tout, il y va quand même du bonheur de deux êtres qui nous sont aussi chers à vous qu'à moi.

Qu'il me soit donc permis, par la présente de vous narrer par le menu les événements qui ont conduit à ce qui se passe aujourd'hui.

Lorsque nous quittâmes Mimizan, Azzera et moi, dans les circonstances que vous savez et, permettez moi une digression à ce propos - Six ans plus tard, le remord de vous avoir lâchement frappé me ronge encore... puissiez vous jamais me pardonner ce geste - Or donc, nous devions rejoindre le campement des Blanches en Bourgogne.


Alors là … Si quelqu'un peut connaître les circonstances... C'est bien moi. Pour sur. Mais une chose est sur Aengus, je t'ai pardonné. Ce qui ne veut pas dire, qu'un maillet … Le même dont tu t'es servi pour m'estourbir n'attends que toi pour servir à nouveau.

Citation:
Las, une partie de chasse improvisée tourna au drame et, vous passant les détails, je fus alors blessé assez grièvement au flanc par une laie blessée en fureur. L'animal chargeait Azzera et je m'interposai pour la sauver.

Azz n'a jamais vraiment su la gravité de cette blessure. Pour ne pas l'inquiéter, j'en avais minimisé les séquelles. Toutefois, lors d'un entraînement au bâton avec une Blanche, la plaie se rouvrit me faisant souffrir mille morts.
A l'insu de ma S... d'Azzera, je me rendis alors nuitamment dans un monastère proche aux fins de me faire examiner par un médicastre.

Je n'en sortis jamais.

Ma blessure s'était aggravée par manque de soins corrects et l'homme de Dieu qui s'était occupé de moi m'avoua, non sans rechigner, que mes jours étaient comptés. Je voulais la vérité, comprenez-vous ?... Je voulais savoir.

Les jours passèrent et entre-temps, morte d'inquiétude, Azzera entreprit de me rechercher... Elle me retrouva enfin, alors que j'étais à l'article de la mort, m'annonçant qu'elle attendait un enfant... Notre enfant... oui... Eamon.

Je dus, bien évidemment lui avouer la vérité : Cet enfant ne verrait jamais son père ! Mais cela faisait d'elle une fille-mère. Cette idée m'était insupportable... aussi je demandai au Père qui me soignait de nous marier. Ce qu'il fit bien évidemment car il s'agissait de la dernière volonté d'un mourant.

Ensuite, je forçai Azzera à retourner au Camp des Blanches car je ne voulais pas qu'elle assistât à ... ma mort. Je voulais qu'elle garde de moi une image vivante... en piètre état, mais vivante.
Elle s'y résigna de mauvais gré sous les instances du Père et de nos amis Pluie et Cora venus l'assister dans ses recherches...
Ce qu'il advint d'elle par la suite, je ne le sais... si ce n'est depuis... mais n'anticipons pas.

Un soir, la douleur me terrassa sur mon grabat de souffrance et je mandai le Père à mon chevet afin de me confesser. La Faucheuse m'avait donné rendez-vous ce soir là, semble-t-il.
Je priai le brave Moine de me donner des obsèques conformes à une ancienne tradition de mon pays : Un brûlot funéraire lancé sur le lac proche... le feu purifie ... et chez nous, il y a bien longtemps, on honorait nos Chefs et nos Guerriers par la crémation selon ce rituel.
Il m'assura qu'il en serait fait selon ma volonté... et il ne me mentit pas.
Quelques minutes à peine après cet entretien, une douleur plus vive encore me terrassa et je perdis conscience... Je n'ai pas le souvenir de ce qui m'arriva alors... J'étais là, inondé de sueur et le regard trouble... puis, ... l'instant d'après... Le Néant !

Mais alors... me direz-vous, comment se fait-il que je sois là ?...

Je sais aujourd'hui que le Moine signa mon acte de décès... je sais aussi qu'il exécuta mes dernières volontés scrupuleusement. Tellement scrupuleusement que, par je ne sais quel miracle, je me réveillai au milieu des flammes d'un brûlot funéraire... que la douleur provoquée par la morsure du feu me galvanisa et me fit reprendre conscience... enfin... quand je dis conscience... Je ne savais pas ce qui m'arrivait... j'avais oublié... qui j'étais et pourquoi j'étais là.

Il me fallut bien des mois pour que la mémoire me revienne et bien des années pour que je comprenne comment un tel miracle avait pu se produire.

Toujours est-il que je me retrouvai brûlé à vif sur une énorme partie de mon corps flottant entre deux eaux dans un lac Bourguignon parce que sous mes gesticulations, l'esquif chavira et me sauva des flammes... C'est l'instinct de survie qui, soudain me sauva, lui, de la noyade.

J'atteignis la rive, sans en avoir vraiment conscience. Hagard et perdu... ignorant de tout ce qui me concernait, mais mû par un besoin de vivre... Très curieusement, ma plaie au flanc ne me faisait plus souffrir du tout... cautérisée par le feu, elle semblait guérie.

Vous conter par le menu ce que fut ma vie pendant l' année qui suivit serait fastidieux et aussi, fort douloureux pour moi... je vous laisse imaginer ce que pourrait être l'existence d'un homme ignorant tout de lui et de son environnement mais qui sait que son apparence est répugnante... cloques et croûtes profondes marquaient mon corps et mon visage au point que je n'osais me montrer.
j'ai donc vécu comme un sauvage jusqu'à ce que, peu à peu la mémoire me revienne et que mon apparence s'humanise quelque peu.
Des séquelles ?... Certes... Marques indélébiles sur la visage et tout le corps... il me fallut des années pour retrouver toute la mobilité de mes doigts, pour que ma peau se régénère par des onguents que je confectionnai d'après des recettes ancestrales.

Mais, j'étais devenu un monstre, Gil... méconnaissable, défiguré... Mon image dans le miroir du lac me faisait horreur.

Et lorsque la mémoire me revint entièrement je réalisai que tout le monde me croyait mort...

Et dans le fond... vu mon aspect, cela ne valait-il pas mieux ?

C'est avec cet état d'esprit que je repris la route. Vêtu d'oripeaux soustraits à un épouvantail, peu à peu, j'osai m'aventurer dans les campagnes désertes... chapardant par-ci par-là un fruit ou une carotte... posant collets et chassant un peu, je parvins à me redonner une apparence décente... Je travaillai dans des fermes... évitant de montrer mon visage. Prétextant un grave accident... J'eus la chance de tomber souvent sur des gens compatissants.

Petit, à petit, je parvins à m'offrir des vêtements corrects et mes pas me conduisirent en Bretagne à Fougères où je décidai de m'installer.
Un élevage de porc sur le déclin me fut presque donné par son propriétaire dégoûté et j'entrepris alors de le faire revivre. Il me permit d'ailleurs, sinon de faire fortune, du moins de m'assurer un confort décent, mais surtout d'amasser suffisamment d'écus pour constituer un petit patrimoine dont vous savez à présent la destination.

Puisque c'est de là que je pris contact avec vous et Mélusine sous le nom de "Scatatch" afin de vous faire parvenir ce pécule destiné à Eamon.

Voilà... vous savez tout... ou presque.

Je ne suis pas un miraculé... Aristote serait trop content, n'est-ce pas Gil ?... Mais laissons lui le bénéfice du doute, car, oui... j'eus pu ne jamais me réveiller.
Mais l'explication est plus prosaïque que cela.
Un médicastre me fit part un soir en taverne qu'il lui avait été donné de voir un de ses patient "renaître" après une mort apparente.
Il s'agit, me dit-il, d'une perte de conscience totale, provoquant une catalepsie donnant l'apparence du décès... toutes fonctions vitales tellement ralenties qu'on ne perçoit même plus les battements du coeur du patient.
Cette perte de conscience peut être provoquée par une douleur intense ou un choc émotionnel important.
En Bourgogne, le Moine crut à mon décès... d'autant qu'il semblait inévitable... annoncé par mon état.

Mais je sais qu'une question vous brûle les lèvres : Pourquoi être resté sans donner de nouvelles... Pourquoi ne pas ne pas m'être manifesté , ne serait-ce qu'à Azzera.

La réponse est simple Gil... et je sais que vous la comprendrez. Azz a connu un homme jeune... beau - même si ma modestie doit en souffrir, je sais le succès que mon physique remportait auprès des Dames - un homme fort et déterminé.
Làs, Gil, ces épreuves firent de moi un sous-homme, laid, défiguré et peu ragoûtant... la peau parcheminée, brunâtre par plaques... le poil épars qui n'a pas repoussé partout... bref... un monstre... et que dire aussi du regard que mon fils pouvait poser sur ce père monstrueux ?
De plus, mon caractère s'est aigri... la joie m'a quitté... je suis "obligé" de vivre encore puisque, finalement, la faucheuse ne m'a pas eu !

Et puis, j'étais loin de Mimizan lorsque j'ai appris l'annonce de vos noces... Il était alors trop tard pour refaire surface auprès d'Elle...
J'ai compris très vite qu'elle s'était tournée vers le seul homme qui était digne d'elle... Aengus mort, elle ne pouvait que vous revenir... Avais-je le droit de la soustraire à ce bonheur ? Et puis, Eamon avait besoin d'un Père, pas d'un spectre, d'un fantôme.

Pourquoi être venu à l'église le jour de vos noces ?

Ma foi... honnêtement, je n'en sais rien... ce fut une folie... une impulsion primaire... Oh... j'ai bien eu, un instant l'envie de hurler " MOI... JE M'Y OPPOSE !"... de reprendre celle que je considérais comme ma femme et qui l'était de fait... Mais je savais qu'un acte de décès avait été établi... Azz veuve n'était plus ma femme... mais surtout... c'est la vue de mon fils qui me fit taire.
Je ne me sentais pas le droit d'ôter à mon enfant le bonheur d'une vraie famille.
J'étais venu là sans doute pour exorciser un mal... remiser une fois pour toute mes espoirs insensés au placard des souvenirs et des actes manqués.
Le Seigneur permit que je puisse serrer mon enfant dans mes bras. Et c'est cela qui nous sauva tous.

Voilà Gil, voilà toute mon histoire.

Histoire d'un homme à qui la vie a tout donné... puis tout repris. J'ai appris la vanité de toute chose... appris que rien n'est jamais acquis. J'ai appris le sacrifice, le renoncement... la douleur, la rage... l'impuissance... J'ai appris la Mort aussi... et la pire que je connaisse Gil... Celle où l'on est vivant !

Aengus O'Sullivan n'existe plus... seul son sang coule dans les veines d'un enfant. Oengus le Noir a pris sa place... et sans doute finira-t-il dans l'oubli... changeant de nom , de visage, de lieu...
Aujourd'hui en Bretagne, demain ... ma foi... quelle importance, n'est-ce pas ?

Tout cela dit, s'il arrivait que mon fils ressente le besoin de savoir... s'il lui arrivait d'apprendre qui il est, je sais que vous serez celui qui saura lui dire ces choses simplement, honnêtement car, s'il fut un homme dont j'eus aimé être l'ami... eh oui... c'est vous Gil de Trévière. Je mourrais heureux sans doute si j'apprenais votre pardon pour le mal que je vous fis...
Je sais aussi qu'Azzera me maudira de ne pas m'être manifesté... Je pense que, aveuglée par l'amour et le chagrin, elle clamera que peu lui importe mon apparence car ce n'est pas une image, mais une âme qu'elle aima en moi.
Mais je sais qu'à la fin elle se serait détournée de moi... Et puis, de toute manière, l'homme que je suis devenu n'aurait plus supporté son regard posé sur mes mutilations...

Puisse-t-elle, elle aussi me pardonner. Puisse mon fils comprendre et pardonner mon absence... Mais, je voudrais qu'il sache... qu'il sache tout l'amour qui est en moi et déborde de ce coeur qui n'a jamais pu exprimer cet amour... l'adresser à ses ayants droits...
Qu'il sache la souffrance d'un père amputé de l'amour de son fils...

J'expie sans aucun doute le méfait que je commis en vous enlevant Azzera... Mais Gil... Aristote m'est témoin que la punition est démesurée... qu'il eut mieux valu pour moi de périr dans les flammes plutôt que d'endurer tout ceci.

Je jure devant Aristote que jamais, non jamais je n'ai souhaité un tel calvaire à l'homme que tu es Aengus.

Citation:
Baste... Cesse de te lamenter Aengus... ton fils sera heureux... n'est-ce pas ce qui compte ?

Pardonnez la longueur de cette missive Gil... mais, je vous devais ces explications. Il me semble qu'à présent ma conscience est soulagée... Disons que cette confession ne tombe pas sous le sceau du secret, mais s'il y avait quelqu'un à qui je voulais me confier, c'était vous.

S'il vous prenait l'envie de me répondre, gardez donc ce pigeon... il saura bien me retrouver, le cas échéant.

Oui... Une chose encore, ne vous formalisez pas du nom de l'expéditeur, c'est un nom d'emprunt... le nom d'un ami Irlandais qui m'offre en ce moment gîte et couvert.

Je ne sais si le Destin fera que nous nous croisions encore, mais si ce n'était pas le cas, je vous souhaite à tous le plus grand bonheur.


Aengus O'Sullivan.


Les mains tremblantes, Gil replia la missive et la remit dans sa poche. Il regarda tour à tour Eamon et Azz.

Voilà mes amours vous en savez autant que moi maintenant.

_________________
Azzera
Elle sourit tendrement en l’entendant raconter à leur fils l’instant des premiers émois.
S’il savait combien sa présence comptait à ses yeux, s’il pouvait imaginer combien elle avait rendu grâce au Très Haut de lui avoir permis de rencontrer cet homme ! Gil, elle l’avait aimé au premier regard.


A vous aussi Azz.

Comment cela à elle aussi? Que veut-il dire ? De quoi parle-t-il ?
Crampes ignorées en attendant la suite.
Le laisser continuer sans broncher...
Pour celui qui savait l'observer, on pouvait comprendre qu'elle se refermait comme un coquillage! Le non verbal est souvent plus probant que les mots ! Surtout dans le cas de non dits avoués sur le tard !

Elle m'est parvenue il y a peu. Et cette fois c'est bien à moi qu'elle était adressée.

Main du diacre attrapant une autre missive.
L'ambiance se fit de plus en plus pesante. Tout au moins, pour la blanche.
Tout ceci avait du mal à se rassembler dans sa petite tête!

Aucun sens!
Cela n'avait aucun sens!
Si elle devait en croire la lettre lue par son époux, son Irlandais avait écrit il y a des années? À moins que cela ne soit récent! Azz ne comprenait rien... Rien?
Peut-être que son esprit ne désirait pas connaitre la vérité!
Il est des choses qu'il vaut parfois mieux ignorer, non?

En tout cas elle n'avait jamais rien su de ce pli!
Pourquoi? Et surtout comment ? À moins que cela ne soit le contraire.

Lecture achevée.
Son époux la regardait avec toute la tendresse du monde. Tendresse qu'elle fut incapable de lire sur son visage, tant la colère d'avoir été trahie par son époux la rendait odieuse.


Voilà mes amours vous en savez autant que moi maintenant.

Nous en savons autant que vous?
Savez-vous ce que vous dites?
Êtes-vous conscient de ce que cela induit?

Azz n'était plus elle même, son regard sombre arbalétisa (Ndl'A: mot inventé) son époux!
Consumée par une lamentable animosité brutale envers son mari, elle débita des paroles qu'elle ne maitrisait plus.


Il y a peu ... quand cela?
Souffrez-vous d’ignorer que tout est maintenant différent?
Que cette missive que vous avez pris soin de me cacher informe qu'Il est toujours en vie?
Je ne me pardonnerai jamais de l'avoir laissé en Bourgogne.
Qui serais-je si je ne pars pas illico à sa recherche?


Sans plus attendre elle se leva d'un bon!
Aller prendre une besace prête pour une éventuelle mission.
Revenir auprès de son Diacre et de son enfant, les regarder tour à tour sans aucune émotion dans le regard.

Puisque vous êtes si fort pour vous occuper des enfants, faites-le!
Amusez vous bien!
Pardon Eamon… je…


Un tiraillement brutal lui parcourt le ventre, arrêtant net sa progression vers la porte!
Ne plus sentir ses jambes sous elle!
Vision qui se trouble! Défaillance ! Faiblesse ! Asphyxie !
Corps tombant au sol tel un patin dont le marionnettiste a lâché les liens.
Disparaitre ! Ne plus être perceptible ! Ne plus être elle-même ! Étrange suspension de la douleur !

Elle vient de perdre connaissance... Elle vient de perdre bien plus que cela!

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