Eliance
Le sang a tâché ses frusques poussiéreuses. Son sang. Mais celui de Diego, aussi. Quand elle a ouvert les yeux, elle a tout vu. Ils sont amochés. Salement amochés. Et allongés sur des paillasses, tous les deux, côte-à-côte. Les jumeaux sont couchés sur une autre. La chambre est vide et calme.
L'instinct l'a fait regarder son Dracou et s'inquiéter pour lui. Elle a vu le rouge. Partout. Le rouge qui a tout coloré à la manière d'une malédiction. Elle a soulevé la chemise tâchée et a vu les bandages. Il va mal, mais il n'est pas perdu. En se penchant au-dessus de ses lèvres entrouvertes, elle a perçu un souffle. Son souffle. Elle s'est alors mise à pleurer et elle a enfin sentie ses plaies à elle. Sa main est venu vérifier que ses blessures aussi sont entourées de tissus. L'eau s'est encore déversée sur ses joues, abondamment. À défaut de leur offrir la ville où elle règne en maître, la ville dont Diego lui a tant parler comme étant le plus belle ville qu'il ait vu, Venise, cette eau s'invite dans son désarroi.
Elle pleure parce que c'en est trop. Elle pleure parce qu'elle est née sous une mauvaise étoile et qu'elle se maudit de précipiter Diego et les enfants avec elle. Elle pleure parce qu'elle a peur. Parce qu'elle est effrayée. Parce qu'elle est pas à la hauteur.
Sa main a enserré celle de l'Italien. Même ses doigts sont écorchés. Il s'est battu bec et ongle. Pour elle, pour eux. Ils sont une famille. Et ils ont failli mourir. Pleurer l'a épuisé. Eliance pose un il inquiet sur les jumeaux qui semblent paisibles, avant de se rendormir, collée à celui qui les a sauvé, l'esprit secoué par une litanie de prières en tout genre pour que tout aille mieux. Que tout aille bien.
Ce n'est que plus tard qu'elle aura pu se lever, se glissant hors de la paillasse le plus silencieusement possible, tout en essayant de contrôler cette douleur inédite qui envahit sa jambe. Écrire qu'elle est vivante, comme un pied-de-nez au destin. Rassurer les compagnons de voyage. Et puis répondre à Maryah. Se confier. Décharger sa colère.
L'instinct l'a fait regarder son Dracou et s'inquiéter pour lui. Elle a vu le rouge. Partout. Le rouge qui a tout coloré à la manière d'une malédiction. Elle a soulevé la chemise tâchée et a vu les bandages. Il va mal, mais il n'est pas perdu. En se penchant au-dessus de ses lèvres entrouvertes, elle a perçu un souffle. Son souffle. Elle s'est alors mise à pleurer et elle a enfin sentie ses plaies à elle. Sa main est venu vérifier que ses blessures aussi sont entourées de tissus. L'eau s'est encore déversée sur ses joues, abondamment. À défaut de leur offrir la ville où elle règne en maître, la ville dont Diego lui a tant parler comme étant le plus belle ville qu'il ait vu, Venise, cette eau s'invite dans son désarroi.
Elle pleure parce que c'en est trop. Elle pleure parce qu'elle est née sous une mauvaise étoile et qu'elle se maudit de précipiter Diego et les enfants avec elle. Elle pleure parce qu'elle a peur. Parce qu'elle est effrayée. Parce qu'elle est pas à la hauteur.
Sa main a enserré celle de l'Italien. Même ses doigts sont écorchés. Il s'est battu bec et ongle. Pour elle, pour eux. Ils sont une famille. Et ils ont failli mourir. Pleurer l'a épuisé. Eliance pose un il inquiet sur les jumeaux qui semblent paisibles, avant de se rendormir, collée à celui qui les a sauvé, l'esprit secoué par une litanie de prières en tout genre pour que tout aille mieux. Que tout aille bien.
Ce n'est que plus tard qu'elle aura pu se lever, se glissant hors de la paillasse le plus silencieusement possible, tout en essayant de contrôler cette douleur inédite qui envahit sa jambe. Écrire qu'elle est vivante, comme un pied-de-nez au destin. Rassurer les compagnons de voyage. Et puis répondre à Maryah. Se confier. Décharger sa colère.
Citation:
Maryah,
Je donnerais tout et n'importe quoi pour ressentir uniquement la bonne vieille douleur du tannage de postérieur à chevaucher si longuement. Mais cette nuit, il est arrivé malheur. Non, j'exagère un peu. Je recommence. Cette nuit, il nous est arrivé une épreuve peu plaisante. On s'est fait rouster la tronche pas des soldats italiens. Des saletés d'Italiens sortis de nul part qui se sont mis à beugler en cognant de toutes leurs forces avec leurs lames.
Diego est salement amoché. Moi, je vais relativement bien. Il nous a protégé, avec les jumeaux. Je n'ai pris que les coups d'un fourbe qui a attendu que Diego faiblisse et pose un genou à terre pour m'asséner quelques griffures en traître, par derrière.
Tu l'as compris, on était parti ensemble en Italie. J'avais peur de te le dire, Maryah. Peur de te décevoir, encore une fois. Je me rends compte aujourd'hui que c'était stupide de ma part. Et faible. Si faible. Et pourtant, tes mots sont beaux. Je limite la casse. C'est cela.
L'Italie n'est plus. Les rêves de voir une cité aux ruelles en ruisseaux se sont évaporés. Les cours d'italien sont partis aux oubliettes des choses inutiles.
Quelqu'un nous aura trouvé sur le chemin et conduit ici. On ne se souvient de rien. Et nos amis ne sont pas avec nous. J'ai espoir qu'ils s'en soient mieux sortis que nous. Ou bien que ces foutus Italiens en aient eu seulement après Diego et moi. Va savoir pourquoi... j'ai jamais vu quelque chose d'aussi débile qu'un chef d'armée. Les politiciens leur arrivent parfois au même niveau. Ils sont du genre à lister et à traquer des gens innocents. Même une écrevisse a plus de jugeote.
Tu me connais, Maryah. Je suis même incapable de faire du mal à Diego. Alors me battre et tuer, c'est impossible. J'ai bien assisté à quelque chose d'ignoble avec le clan. Une torture. Ils ont torturé un homme pour se venger du fouet qu'il avait fait cingler sur leur peau. Même ça, c'était trop dur pour moi. Je n'ai pas pu regarder. Je les ai trouvé cruels. Tellement cruels.
Mais je suis bien sur une foutue liste comme étant quelqu'un de dangereux. J'ai une idée d'où ça sort. Et crois-moi, ça date.
Quand on s'est marié avec Diego, on était sur les routes. C'était l'été dernier. On a atterrit dans un village pommé. Mais dans ce village pommé, on a trouvé un vieux prêtre un peu sénile qui a accepté de nous marier à notre façon. On a dû y rester trois jours en tout et pour tout. On a appris par les commères du coin que les Corleone avaient pillé le village voisin du nôtre. Murat. Alors on a évité Murat, fait un crochet par le sud pour repartir. Figure-toi que quelques temps après, on a reçu une lettre d'un politicien auvergnat qui nous signifiait qu'on ne serait plus les bienvenus chez eux. Notre erreur ? Je ne l'ai jamais su. Il n'a jamais répondu à mes questions.
J'ai l'impression d'être punie pour m'être mariée chez eux. Je n'ai jamais rien fait de mal.
Est-ce que se marier, c'est illégal ? Ou est-ce qu'on nous reproche d'avoir été pas loin au mauvais moment ?
Maryah, ce que tu as écrit, ça montre bien que tu as souffert. Alors j'arrête de me plaindre. Je souffre peu, en considérant ce que tu as enduré. Je suis en colère. La colère, c'est cet endroit qui se trouve entre la haine et la peur. Et tu as raison de haïr les hommes. Je les déteste aussi. Je ne les détestais pas il y a encore peu. Je me mets à les détester petit à petit. Tu sais ce que je fais quand je suis en colère ? J'écris. Je veux écrire. J'ai envie de crier sur le papier ta saleté d'histoire. J'ai envie que les gens sachent ce qu'ils t'ont fait. Je sais, tu n'es pas d'accord, pas prête. Je le comprends. Je respecte. Mais si tu savais cette boule qui s'est formée dans mon ventre. Elle est pour toi. Elle est pour toute la rage que j'ai depuis cette nuit où j'ai vu ces enfoirés s'acharner sur Diego.
Je vais écrire sur la lâcheté des armées. Je voudrais écrire sur la lâcheté des hommes qui sont venus te chercher, qui t'ont transportés en enfer.
Les Italiens sont les plus grands enfoirés du monde. Tu voulais savoir ? Voilà la vérité.
Ton Percy a mal. Son étoile s'est envolée. Sa vie est dure. Mais tu n'y es pour rien. Retiens ça. Tu ne fais que l'adoucir, sa vie. Sans toi, elle serait encore plus cruelle avec lui.
Tu me diras comment va le Cosaque ? On ne s'écrit plus. Ou du moins, il ne m'écrit plus. Je n'ai plus de nouvelles. J'ai toujours peur qu'il soit crevé dans un fossé. J'ai toujours peur qu'il aille mal.
J'ai mal, Maryah. Pourquoi ça fait si mal, la connerie des autres ?
Fais très attention sur les chemins. Je ne veux pas qu'il vous arrive malheur.
Tu comptes. Tu comptes tant.
Eliance
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