Sandino
Cest un homme dâge mûr qui revient là où a commencé sa vie. Mûr et presque pourri lui aurait dit ses anciens compagnons de sang qui ne sont plus au monde depuis des années.
A ce quil en sait, il doit être lunique soldat IT encore vivant. Si lon considère quun humain vivant lest dés lors quil se réveille après avoir dormi.
Revenir na pas été une décision facile, la cour il la quitté pour ne jamais y remettre les pieds et le présent lui prouve quil ne faut jamais dire jamais.
Pourtant ce nest pas faute davoir essayé de vivre au milieu du troupeau, donnant tout ce quil pouvait pour se faire une place et y étant parvenu au regard du commun.
Qui nen serait pas satisfait ?
Lui assurément, et son souhait de faire le chemin à lenvers en témoigne. Revenir à la cour quil considérait perdue, cela ne pouvait être plus clair. Que venait-il y faire, lui-même nen savait rien, il y revenait comme on va à Montfaucon voir au bout de leurs cravates de chanvre, osciller les pendus du jour.
Il allait renifler lodeur de sa terre première, et sil y trouvait son comptant de puanteur, faire grincer les dents et pourrir la vie de quelques uns, allait être son passe temps favori lors de ses séjours.
Des victimes potentielles il nen manquait pas dans ce quartier, il ne le savait que trop, et cela ne pouvait pas avoir changé sur ce point. Du campagnard lourdaud à la damoiselle qui veut voir lombre du vice, tous, une fois franchie la frontière invisible qui sépare la cour des miracles du reste du monde, tombaient sous sa loi. La loi du plus fort, ou du plus tordu si la force lui fait défaut, et à ce jeu notre homme avait depuis si longtemps muselé sa rage, quavant même dentrevoir la silhouette de sa première victime, il salivait à sa seule évocation.
Et quoi de mieux quun tord boyau où lon trouve de lalcool de potence et de la terrine à la langue de condamnés pour attirer déventuelles victimes. « La pochée » nexistant plus, sa tenancière cette vieille truie dAnn, décomposée depuis des lunes, la place était libre.
Cest dans une ancienne boucherie en sous-bassement, que le vieux ténébreux a installé sa taverne. Lodeur de sang est encore prégnante, et plus encore, on ressent dans latmosphère un relent de mort.
Satisfait davoir trouvé pareil endroit, il na pas mis longtemps à y installer le minimum pour recevoir la clientèle, il lui a suffit de trouver le chef des voleurs de la cour des miracles et de lui payer lécot. A partir de là, accès lui a été ouvert aux entrepôts où lon trouve pour pas cher, tout et même ce qui ny est pas encore. Passer commande faisant partie du marché.
De la ruelle, de part sa situation en contrebas, on ne voit rien de lintérieur de lestaminet. Le client est obligé dy entrer quand bien même cela soit pour contrôler la présence dun ami ou autres susceptibles de sy trouver. Seule une enseigne indique la présence dune taverne aux passants, on peut y lire « In Tenebris In Memoriam ». Sous lenseigne débute une volée de marches couvertes.
Au bas de lescalier, à droite, une porte de fer ajourée barre lentrée de la taverne. Au-dessus de la porte, fraîchement gravé, le client ne va pas manquer de lire la sentence qui sonne quasiment comme une condamnation « La mort ne fait pas crédit ».
Une fois poussé un des lourds battants, qui ne se laisse pas manuvrer sans émettre des couinements aigus, on pénètre dans un intérieur meublé de style hétéroclite, et pauvrement éclairé, sauf le seuil sur lequel tombe une lumière quasi céleste, tant lespace grâce à une myriade de chandelles est plongé dans une lumière vive.
Quand le bruit du battant signale quon entre, le seuil révèle lapparence de celui qui pénètre dans létablissement, moyen pour le patron de contrôler le passage. La mise en lumière exposant le visiteur ébloui pour quelques instants, juste assez pour quil ne puisse aller plus loin, soit en prenant le risque de mourir sur place, soit en acceptant de faire demi-tour à la première demande du patron, si ce dernier ne trouve pas le nouvel arrivant à son goût.
Si la rusticité de laccueil vaut celle de lameublement, sur les murs on peut voir quelques gravures accrochées dans lombre, et en plus petit nombre, des panneaux de bois colorés qui égayent un tant soit peu latmosphère générale, laquelle tient plus de la veillée mortuaire que de la réunion des veuves joyeuses.
Bien en vue sur le mur derrière le comptoir, une pancarte mentionne.
« En cas dabsence du patron, ne posez pas de question, buvez ou passez votre route »
Cest cette pancarte qui va tenir lieu de dialogue entre Igor, lemployé qui va vivre dans la taverne et la faire tourner en labsence du patron, et les clients.
Aussi arriéré que fort, Igor naura rien dautre à répondre aux clients. Muet après quon lui eu coupé la langue, à toute demande il va désigner la pancarte de son gourdin clouté, et si la personne insiste il lâchera son chien lépreux qui na pas dautre passion que de mordre les fâcheux, quitte à le rejoindre pour le seconder si lanimal rencontre une trop forte résistance.
Certain quIgor ne comprend quun mot sur dix, le dernier Tenebris ne sen formalise pas, au contraire, outre la brutalité du personnage cest au regard du peu de profondeur desprit et de labsence de langue quil la choisi comme bras droit.
Assis dans la salle pour ce jour douverture, Igor a pour mission dobserver pendant que son employeur va assurer le service. Ce dernier, assis derrière un amas de planches posé sur des tonneaux qui na du comptoir que le nom, lit un manuscrit qui lui tire parfois de brefs ricanements nerveux.
A ce quil en sait, il doit être lunique soldat IT encore vivant. Si lon considère quun humain vivant lest dés lors quil se réveille après avoir dormi.
Revenir na pas été une décision facile, la cour il la quitté pour ne jamais y remettre les pieds et le présent lui prouve quil ne faut jamais dire jamais.
Pourtant ce nest pas faute davoir essayé de vivre au milieu du troupeau, donnant tout ce quil pouvait pour se faire une place et y étant parvenu au regard du commun.
Qui nen serait pas satisfait ?
Lui assurément, et son souhait de faire le chemin à lenvers en témoigne. Revenir à la cour quil considérait perdue, cela ne pouvait être plus clair. Que venait-il y faire, lui-même nen savait rien, il y revenait comme on va à Montfaucon voir au bout de leurs cravates de chanvre, osciller les pendus du jour.
Il allait renifler lodeur de sa terre première, et sil y trouvait son comptant de puanteur, faire grincer les dents et pourrir la vie de quelques uns, allait être son passe temps favori lors de ses séjours.
Des victimes potentielles il nen manquait pas dans ce quartier, il ne le savait que trop, et cela ne pouvait pas avoir changé sur ce point. Du campagnard lourdaud à la damoiselle qui veut voir lombre du vice, tous, une fois franchie la frontière invisible qui sépare la cour des miracles du reste du monde, tombaient sous sa loi. La loi du plus fort, ou du plus tordu si la force lui fait défaut, et à ce jeu notre homme avait depuis si longtemps muselé sa rage, quavant même dentrevoir la silhouette de sa première victime, il salivait à sa seule évocation.
Et quoi de mieux quun tord boyau où lon trouve de lalcool de potence et de la terrine à la langue de condamnés pour attirer déventuelles victimes. « La pochée » nexistant plus, sa tenancière cette vieille truie dAnn, décomposée depuis des lunes, la place était libre.
Cest dans une ancienne boucherie en sous-bassement, que le vieux ténébreux a installé sa taverne. Lodeur de sang est encore prégnante, et plus encore, on ressent dans latmosphère un relent de mort.
Satisfait davoir trouvé pareil endroit, il na pas mis longtemps à y installer le minimum pour recevoir la clientèle, il lui a suffit de trouver le chef des voleurs de la cour des miracles et de lui payer lécot. A partir de là, accès lui a été ouvert aux entrepôts où lon trouve pour pas cher, tout et même ce qui ny est pas encore. Passer commande faisant partie du marché.
De la ruelle, de part sa situation en contrebas, on ne voit rien de lintérieur de lestaminet. Le client est obligé dy entrer quand bien même cela soit pour contrôler la présence dun ami ou autres susceptibles de sy trouver. Seule une enseigne indique la présence dune taverne aux passants, on peut y lire « In Tenebris In Memoriam ». Sous lenseigne débute une volée de marches couvertes.
Au bas de lescalier, à droite, une porte de fer ajourée barre lentrée de la taverne. Au-dessus de la porte, fraîchement gravé, le client ne va pas manquer de lire la sentence qui sonne quasiment comme une condamnation « La mort ne fait pas crédit ».
Une fois poussé un des lourds battants, qui ne se laisse pas manuvrer sans émettre des couinements aigus, on pénètre dans un intérieur meublé de style hétéroclite, et pauvrement éclairé, sauf le seuil sur lequel tombe une lumière quasi céleste, tant lespace grâce à une myriade de chandelles est plongé dans une lumière vive.
Quand le bruit du battant signale quon entre, le seuil révèle lapparence de celui qui pénètre dans létablissement, moyen pour le patron de contrôler le passage. La mise en lumière exposant le visiteur ébloui pour quelques instants, juste assez pour quil ne puisse aller plus loin, soit en prenant le risque de mourir sur place, soit en acceptant de faire demi-tour à la première demande du patron, si ce dernier ne trouve pas le nouvel arrivant à son goût.
Si la rusticité de laccueil vaut celle de lameublement, sur les murs on peut voir quelques gravures accrochées dans lombre, et en plus petit nombre, des panneaux de bois colorés qui égayent un tant soit peu latmosphère générale, laquelle tient plus de la veillée mortuaire que de la réunion des veuves joyeuses.
Bien en vue sur le mur derrière le comptoir, une pancarte mentionne.
« En cas dabsence du patron, ne posez pas de question, buvez ou passez votre route »
Cest cette pancarte qui va tenir lieu de dialogue entre Igor, lemployé qui va vivre dans la taverne et la faire tourner en labsence du patron, et les clients.
Aussi arriéré que fort, Igor naura rien dautre à répondre aux clients. Muet après quon lui eu coupé la langue, à toute demande il va désigner la pancarte de son gourdin clouté, et si la personne insiste il lâchera son chien lépreux qui na pas dautre passion que de mordre les fâcheux, quitte à le rejoindre pour le seconder si lanimal rencontre une trop forte résistance.
Certain quIgor ne comprend quun mot sur dix, le dernier Tenebris ne sen formalise pas, au contraire, outre la brutalité du personnage cest au regard du peu de profondeur desprit et de labsence de langue quil la choisi comme bras droit.
Assis dans la salle pour ce jour douverture, Igor a pour mission dobserver pendant que son employeur va assurer le service. Ce dernier, assis derrière un amas de planches posé sur des tonneaux qui na du comptoir que le nom, lit un manuscrit qui lui tire parfois de brefs ricanements nerveux.