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[RP] Chute.

Alphonse_tabouret
Janvier avait été dissipé à même l’application acharnée qu’il avait mis à s’enfermer dans son bureau pour compulser, carnivore, les moindres données à portée de son attention, résolu à ne garder aucun souvenir des jours passés, des mots proférés et des vérités que l’on recherchait toujours avec une application studieuse alors que l’on était , bien souvent, incapable de les entendre.
Le carnage de Noël avait laissé le comptable plus exsangue qu’il ne l’aurait cru, vacillant aux vents d’une colère qu’il savait juguler quand bien même elle le talonnait avec une voracité surprenante, quand ses tempes s’offraient aux chants des sirènes d’un monde étroit et pourtant tellement plus confortable où les visages d’Antoine, d’Axelle, de Sabaude ou d’Erwelyn se mêlaient parfois lorsqu’il passait une main à ses yeux fatigués. Il paraissait si simple de refermer les livres l’immergeant, de poser la plume gorgée d’encre et de se lever, de quitter cet univers sans cesse soumis aux tempêtes pour vivre quelques instants, les poumons plein, le cœur s’autorisant enfin à battre au-delà de la douleur quotidienne, mais à chaque fois que le rêve l’éveillait, il se découvrait fait de plomb, incapable de s’extirper de son fauteuil, ses désirs immédiatement vaincus par les obligations et la peur, idiomes perpétuels qui se partageaient l’âme tout autant que la réflexion.
La peur tenait en quelques mots, un bruissement de sensations, l’électrique étincelle qui ne cesserait jamais de le tourmenter… La liberté était un fardeau à sa conscience dès lors qu’elle ne s’attachait plus à le soustraire épisodiquement à ses impératifs. Né esclave, éduqué tel quel, le chat ne savait que faire d’un horizon vierge, trop longtemps habitué à serpenter aux ruelles de ses devoirs, à escalader un mur d’obligations pour n’en rejoindre la pierre qu’au fil de quelques heures salvatrices, et même encore maintenant, quand sa fortune le lui permettait et que sa dette était depuis si longtemps payée à cet amant mort au travers de l’opulence du lupanar, il se retrouvait incapable, rigide créature, de la savourer dans son entièreté. L’âme malformée, trop longtemps soumise au joug d’une éducation métallique, boitait irrémédiablement malgré les baumes que d’autres y posaient, rares brises auxquelles il avait consenti à accorder le courant d’air, lui qui, résolu, restait craintif tout autant que rigoureux à ne plus se laisser enferrer à l’addiction.

S’il s’était épargné aux premiers jours de l’année la vision de chacun des membres du bordel, emmuré dans ses livres, les factures avaient fini par le mener à l’exact endroit qu’il redoutait, cailloux semés le long des pages noircies qui n’offraient plus aucune alternative autre que la confrontation.
Les Hommes mentaient. Les chiffres, plus rarement.
Depuis deux semaines déjà, les livraisons réservées à la Maison Haute hoquetaient, et les millésimes que l’on trouvait habituellement en nombre sur le comptoir du bordel s’étaient raréfiés. Les stocks avaient été vidés pour répondre aux besoins de la clientèle et faute d’avoir pu être remplis dans un laps de temps raisonnable, attendaient, toujours, ventre béants, que l’on les fournisse pour retrouver le faste habituel des commandes.
De tous, Adryan était certainement celui qu’il avait le moins envie de voir, Parasite que la douleur et la rage avaient mené si loin à la fin du bal qu’il redoutait lui-même de savoir dans quelles conditions le nobliau avait survécu au premier mois de l’année, à ce magma informe et cruel de vérités qui s’étaient répandus ce soir-là sans aucune retenue, écho insupportable le ramenant fatalement à ses propres démons. Pourtant, ce soir-là, c’était bien le Castillon qu’Alphonse attendait, la mine sombre, l’œil rivé sur l’improbable inattention du nobliau à s’acquitter de sa tache quand il n’avait pourtant jamais failli jusque-là, entêté tout autant l’un que l’autre, à servir en priorité les exigences que l’on attendait d’eux, trop fier pour supporter la critique, et l’inexactitude relative au travail fourni.
La main fit jouer l‘ambre au fond du verre tandis que l’oreille se tendait, écoutant les pas menant à son bureau, reconnaissant sans mal les appuis du jeune homme, chat maitre en son royaume qui savait déceler chacun de ceux vivant à ses côtés par la simple pression accueillie au sol, accordant d’un ton plat, la permission d’entrer dès lors que l’on toqua à sa porte.


_________________
--Adryan
Rue de l’Arbre sec. Comme elle portait bien son nom, cette ruelle perfide qui avait engourdi les sens du Castillon pour le frapper de la certitude que cette réalité là prendrait le pas sur toutes autres. Intransigeante et possessive au point même que les éclats de rire ironiques et affamés de l’Aphrodite semblaient se faire doux et attendus.

Pourtant, trois jours durant, les pas du Castillon n’avaient pas retenti dans les couloirs du lupanar. Certainement aurait-il été absent plus longtemps, si le besoin de ce qui se présentait à présent comme la normalité ne l’avait attiré d’une voix incongrument rassurante. Trois jours passés sous les soins mutiques d’Osman. Trois jours à payer une trop forte tête.

En passant le seuil de l’hôtel particulier, les relents de violette avaient assailli ses narines, encore, signant la superstition des bigots de croire que le parfum d’une si petite fleur recelait en son sein le pouvoir de chasser les mauvais esprits. Pourtant en ces lieux, rien de mystique et aucun encensoir ne se balançait mollement pour répandre la fumée de l’encens. Ici n’étaient que rituels sournois, répétant, semaine après semaine, avec une précision implacable, le rythme de ces messes. Messes oui, sacrificielles en mémoire d’un mort. Les officiants, de même, s’attachaient à des poses invariables. Sur son trône, siégeait le pape boudiné dans son velours, le visage masqué et sans blason malgré l’identité connue par Adryan. A sa droite et à sa gauche, ses camerlingues aux masques de chien, le torse et les muscles saillants, n’attendant qu’un claquement de doigt pour aboyer dans un silence insoutenable. Enfin venaient les cardinaux. Trois femmes lascives, à moitié nues, aux seins lourds et aux hanches épaisses dont les loups noirs peinaient à camoufler la lubricité des regards. Ainsi toujours résonnait le début de l’obscure liturgie.

Nu, alors que la première injonction avait coulé, gluante de miel des lèvres grasses et roses du maitre de cérémonie, le Castillon muré dans un silence glacé n’avait pas esquissé le moindre mouvement. Le premier coup était tombé, mat et brut à son dos, le bois du bâton éraflant la peau. Sous la douleur, sa vue s’était brouillée, ses pas avaient chancelés, et au prix d’un effort aussi stupide qu’improbable, Adryan avait redressé le menton, se figeant à nouveau dans l’immobilité et le mutisme le plus complet, ne laissant que son regard déposer tout son mépris aux pieds du pape. Inévitablement devant cet affront inadmissible, le second coup fracassa l’air et l’échine, sans pourtant parvenir à fracasser l’entêtée volonté castillonne. Qu’il fut âpre. Qu’il fut douloureux. Qu’il fut insensé. Qu’il fut fébrile et vacillant l’effort à fournir pour se relever encore. Le troisième coup fut vainqueur, écrasant d’un coup ultime tant les vertèbres que la volonté. A genoux, les mains nobiliaires accrochées au sol se savaient incapables d’abandonner cet appui au risque de chuter davantage encore. Alors, le regard gris plein de larmes où s’embrassaient à pleine bouche la douleur, la honte et la colère, il léchât méticuleusement chaque orteil. Un à un. Réprimant les hoquets écœurés nouant sa gorge et soumis à la caresse d’une main à son bas ventre, s’entêtant à lui rendre la tâche agréable.

Ce qui avait bien pu suivre était perdu dans un nuage obscur qu’il n’avait pas même cherché à éclaircir sous les doigts arachnéens d’Osman tentant de calmer le feu des meurtrissures violacées d’onguents aux parfums piquants. Trois jours, avant que son pas puisse être stable, se maquillant même de normalité sous l’écorce de saule diluant son sang. Trois jours avant de pouvoir fouler les tapis du lupanar et d’y trouver la convocation du comptable, lumineuse d’évidence. La porte fut refermée aussi laconiquement que l’avait été la permission d’entrer dans l’antre du Félin. Aucun regard ne fut accordé, alors qu’avec une lenteur étudiée, la carcasse nobiliaire avançait vers le bureau, délaissant le siège par excès de prudence. Relevant enfin un visage aux traits doucement tirés vers la face intimement ennemie, il lâcha simplement d’une voix blanche.


Je t’écoute comptable.

Je sais Comptable. Je sais tout. Alors tiens ta promesse et reprends ta place.
Alphonse_tabouret
La première chose qu’il remarqua fut la lenteur du Parasite, danse étudiée, parfaitement orchestrée et pourtant étonnamment raidie d’un effort qui força l’œil du chat à s’attacher à la silhouette mâle quand il en aurait de coutume, rejeté toute interaction avant que cela ne soit inévitable. Le siège ignoré désintéressa fatalement le chat du vélin qu’il venait de rédiger, y attardant un doigt absent tandis qu’Adryan s’immobilisait devant lui, daignant enfin relever les perles grises sur le visage ennemi, départ consenti de la discussion à venir dont il n’ignorait rien, et comment aurait-il pu se méprendre sur cette convocation quand l’un comme l’autre s’évitaient aussi soigneusement que possible tant qu’ils le pouvaient.
Sous l’index, le vélin noirci d’encre compulsait quelques données, résumé d’un ensemble de lignes qui avaient contraint le comptable à prendre la décision de cette réunion, laissant apparaitre les recettes bénéficiaires des trois dernières semaines, leurs jumelles de 1462 et l’état des stocks répertorié à raison d’une unité par type d’alcool.

1462, Janvier, Semaine 2: 3455
Stock : 33/35
1463, Janvier, Semaine 2: 3532
Stock : 35/35

1462, Janvier, Semaine 3: 3277
Stock : 31/35
1463, Janvier, Semaine 3: 2488
Stock : 18/35

1462; Janvier, Semaine 4: 3590
Stock : 34/35
1463, Janvier, Semaine 4: 1807
Stock : 10/35


Les chiffres s’étalaient, incapables d’être contrariés, jusqu’au différentiel, surligné pour l’occasion, tenu encore secret par l’empreinte du doigt comptable masquant la somme avant de la faire apparaitre en glissant sans un mot le parchemin vers Adryan ; 2495 écus de perte sèche au comptoir de la maison haute, étalés sur trois semaines qui avaient vu le Castillon devenir une ombre quand ce n’était pas tout simplement un fantôme, présence en pointillé qui délaissait les tâches à accomplir au profit d’un temps libre dont nul ne connaissait la saveur.

Ce fut alors l’odorat qui décela la seconde anormalité, trouvant aux effluves du nobliau une fragrance qu’il n’identifia pas de suite, tendant aux ramifications de ses savoirs soigneusement compulsés, l’étendue de son attention pour chercher à identifier cet accent qu’il n’avait encore jamais senti sur la peau déjà goutée du Parasite. Le visage impassible quand les tempes s’embrasaient d’une interrogation agacée, Alphonse quitta le siège de son bureau, mû par un reliquat de souvenir embaumant les nerfs d’une soirée passée qui avait forcé le Castillon à s’en remettre à un médicastre appelé d’urgence pour panser une plaie qui entravait jusqu’à ses réflexes les plus élémentaires…


Je t’ai cherché hier… Demie-vérité égrainée tandis qu’il attrapait la bouteille de malt laissée sur le recoin du bureau pour leur en servir un verre, si loin des préoccupations relatives à une quelconque convivialité quand c’était la gestuelle du nobliau qu’il cherchait à jauger. Adryan était un imbécile, mais un imbécile fier, qui eut préféré souffrir bien des maux plutôt que de lui laisser la moindre marge de manœuvre à la remontrance, et pourtant, les chiffres étaient sans appel, les stocks vides, l’absence recensée. Trois jours pleins durant lesquels on ne l’avait vu ni entrer, ni sortir, et si ce n’avait été les stocks éventrés permettant à peine de quoi voir venir la fin de la semaine avant que les livraisons attendues ne leur parviennent enfin, Alphonse n’aurait jamais cherché une explication ; tant que le nobliau s’attachait à ses œuvres, il pouvait bien faire ce qu’il voulait de son temps.
Avant-hier aussi…, poursuivit-il d’un ton neutre en tendant un verre quand il aurait pu se contenter de le faire glisser devant lui, attentif au visage qui découvrait ce qu’il savait déjà au travers du vélin exposé mais plus encore aux gestes qu’il exécuterait dans sa parade de faux semblant. Prenant appui sur le bureau pour s’y assoir, outrageusement près pour des ennemis qui ne se supportaient qu’au crépuscule de l’ivresse bêtifiante ou à l’aube d’une concupiscence inextinguible, volontairement trop, Alphonse observa un temps de silence tandis que la mémoire s’illuminait d’un éclat tranchant.
Hélichryse.
Voilà ce que sentait Adryan. La douleur et le baume. La chair meurtrie et le soin.
Le regard se voila brièvement d’une satisfaction qui n’appartenait qu’à leur proximité, cruelle autant que loyale, sans concession et pourtant si proche de l’empathie qu’en d’autres circonstances elle eut pu être belle.

En fait, je te cherche depuis lundi… Où étais tu ?

Que m’importe où tu étais Parasite, à quelle rixe tu as pris parti, le motif ridicule pour lequel tu t’es cette fois battu... Je veux savoir ce qui t'écorche au point de me laisser la faveur de te le reprocher… Ma place est à tes cotés jusqu’à la chute et cette promesse-là, je la tiendrai malgré toi.

_________________
--Adryan
Il reniflait le Comptable, comme un de ces animaux qui flairent leur proie pour en juger la force avant de décider qu’ils vont mordre ou pas.

Mords.

Et si Alphonse flânait dans tous les esprits sous l’agilité d’un chat, c’est l’image d’une hyène qui secoua les pensées castillonnes, animal sur le dos duquel couraient toutes sortes de croyances issues des temps reculés de l’Egypte, sans que personne ne sache bien si en croiser une était signe de bons ou de mauvais présages.

Mords.

Figé dans son immobilité silencieuse, le Castillon observait ce doigt empaquetant une surprise qu’il devinait. 2495 écus de perte sèche. Si Adryan se doutait du déficit, il fut néanmoins atterré de la fulgurance des chiffres. Sa bouche se contracta furtivement pour mieux laisser le marbre froid reprendre ses droits dans un même élan. 2495 écus. Pour le travailleur tatillon et dévoué qu’était le noble, la somme était énorme, cruelle et révoltante, mais tel était le prix à payer pour épargner le lupanar d’une facture sans commune mesure. Adryan ne doutait pas un seul instant être en faute pour le bien de l’établissement. Le Pape, jamais, ne faisait de promesses en l’air, et chaque partie du corps et de l’esprit de l’incriminé l’apprenait un peu plus semaine après semaine.

« Je t’ai cherché hier… »

Mords.


L’agaçante voix lui vrilla les oreilles alors que le regard délaissant l’implacable réalité des chiffres se cloua au le mur face à lui, étudiant avec une attention amoureuse un point qui n’existait pas.

« Avant-hier aussi… »


Mords.


Le léger cliquetis de la bouteille sur les verres m’entama en rien sa concentration. Le calcul était fait depuis de nombreuses heures déjà. Dans trois jours, se glisserait dans son courrier le riche vélin à la cire cramoisie vierge d’armoirie. Quatre jours donc pour gaver au mieux les réserves du lupanar. Quatre jours, c’était peu, trop peu pour que le travail soit fignolé comme il avait coutume de l’être quand en outre, la perspective de longues heures assis sur une chaise raide le broyait déjà.

« En fait, je te cherche depuis lundi… Où étais tu ? »

Mords Comptable, mais n’use pas ta salive en vain, car cette réponse là, jamais tu ne l’auras. Et quoique tu puisses en penser, ce n’est pas pour me protéger moi. Mais ces murs, et toi avec, aussi insupportable sois-tu. Comptable.

Le regard gris, enfin, daigna abandonner l’objet fictif de sa contemplation, découvrant le visage du félin si près. Trop près pour ne pas être secoué par cette détestable attirance charnelle qui leur avait valu une nuit orgiaque qui restait, jumeaux malgré eux, coincée dans chacune des deux gorges mâles. Pourtant aucun mouvement n’anima la statue, pas la moindre esquisse de vie dans sa main quand les prunelles nobiliaires se posèrent sur le verre tendu. Refusant la moindre courtoisie, aussi corrompue et calculatrice puisse-t-elle être, tout autant qu’acharné à laisser la douleur somnoler tant qu’elle acceptait de se taire un peu, il dédaigna l’alcool dont, pourtant, le besoin de s’y bruler la gorge braillait entre ses tempes. La commissure de sa bouche s’étira lentement, mue d’une ironie féroce alors que la tête se penchait doucement, grignotant encore l’espace pourtant si salutaire entre leurs visages, et souffla


Vraiment ? Je t’ai manqué à ce point Comptable?


Tout était bon, pour pousser le Chat dans une colère espérée dans le seul dessein de chasser les questions. Même ça.
Alphonse_tabouret
Aucun mouvement ne rompit le fil de l’immobile statue au fumet du verre qui lui était tendu, le regard seul pour l’instant s’était permis la mobilité pour jauger d’une vérité qu’aucun d’eux ne pouvait nier, experts qu’ils étaient dans leurs affrontements dès lors qu’ils oubliaient la guerre pour contempler l’ennemi.
Enfin il bougea, écornant le marbre pour éventrer le peu d’espace qui les séparait encore, amenant le souffle à effleurer la peau du comptable dont un sourire parfaitement courtois répondait à l’ironie jumelle.

Vraiment ? Je t’ai manqué à ce point Comptable?

Qu’il devait être épuisé son Parasite, pour miser sur ce genre de sous-entendus pour le désintéresser des lignes qu’il voulait remonter, points d’interrogation suspendus qui scintillaient si fort que la curiosité du chat se trouvait excitée comme un loup à la vue du sang. Des deux mâles dans la pièce, si chacun trouvait l’attractive beauté de l’autre nauséeuse bien avant d’être entêtante, un seul pourtant s’entravait encore aux affres d’une conscience forgée par vingt ans de déni ; Adryan avait beau avoir ouvert les yeux sur les appétits les plus instinctifs de son corps, il n’avait cette lascivité déviante dans la chair que lorsqu’il s’égarait, incapable encore de mettre l’épicurien qu’était Alphonse plus embarrassé qu’il ne le serait jamais dans l’attraction sélénite, et cela, le chat le savait.

Ce n’est visiblement pas à moi que tu as le plus manqué, répondit-il, sarcastique, au fil de la bouche brune, jugeant inutile de jeter un coup d’œil au vélin proposé à la lecture pour appuyer ses mots, mais posant d’un mouvement lent le verre sur le bureau sans le faire résonner, poursuivit sans rompre l’insolent sourire à ses lèvres, volutes narquoises illuminant jusqu’aux prunelles rivées sur le Castillon qu’elles éperonnaient d’une moue suave.
Ce qui me manque Parasite, c’est une feuille de stocks raisonnable, l’assurance que mes livraisons arriveront avant l’ouverture de ce soir, savoir comment tu as pu perdre 2495 écus en trois semaines quand tu n’as, jusque-là, jamais gaspillé un denier dans des contrats hasardeux… Je ne peux pas croire qu’il t’ait fallu un tel prétexte pour me quémander un rendez-vous quand te mettre à genoux aurait suffi à me convaincre, poursuivit d’une voix aussi douce que déterminée à égratigner le calme factice dont s’était enveloppé le nobliau, avant de conclure sur une nouvelle interrogation, peut être pire que les précédentes pour qui connaissait l’orgueil implacable du parasite :
Vais-je devoir ajouter cette perte à ta dette ?
_________________
--Adryan
Si ses lèvres démangeaient Adryan de cracher le limon perfide qui l’engourdissait lentement depuis deux mois d’un battement régulier et patient, la raison bâtissait des murailles interdisant violemment l’accès à toute tentation visant à déverser sur d’autres épaules que les siennes, l’ombre funeste planant sur l’établissement. Alphonse n’était pas homme à se contenter d’un amuse gueule pour se rassasier, le Comptable voudrait le menu complet. Et incongrument, pour sauvegarder cet être au sourire agaçant flottant indéfiniment à sa bouche, le noble ne servirait rien. Là aurait été la chute, dans tout son incommensurable éclat. Jamais, à l’Ennemi sur la langue duquel s’accrochait le serment, ne serait avoué l’éboulement provoqué par un autre.

Mais alors, comment répondre en étant à ce point acculé ? Comment réagir face une réalité impossible à nier quand en sus, le mensonge n’avait pas besoin de chiffres pour être banni ? Quand l’adversité se hissait à des cieux tant clairs et limpides qu’elle n’admettait plus la traitrise depuis longtemps. Quand rien des efforts pour protéger l’Ennemi ne devait suinter, pour que jamais, la moindre trace d’intérêt ne trouve la plus petite fissure pour s’insinuer, bien trop félonne qu’elle pourrait-être en cet instant. Bien plus destructrice que n’aurait pu l’être chacun de leur intermède, jusqu’à cette nuit infamante où leurs peaux s’étaient brulées à un désir décharné de toute retenue.

A un jeune disciple inexpérimenté, un maitre de guerre, rompu à la tactique, aurait conseillé de retourner les propres armes de l’ennemi contre lui. Et parfois, tacticien, quand le sang fougueux s’enlisait dans la nécessité, Adryan savait l’être. Dans la manche nobiliaire, battait une carte que le Félin, malgré sa hardiesse habituelle à deviner les autres, avait omis de calculer. Après avoir été violé sur le carreau bleuté d’un bain trop chaud de poison. Après subir, semaine après semaine, humiliations et coups, la piqure d’une déviance si longtemps refoulée pouvait-elle être toujours aussi aigüe ?

Non.

Les armes de l’Adversaire s’émoussaient d’une ignorance dont il n’était pas fautif. Et si finalement, le Castillon fut blessé, ce fut de ce constat là. Le Pape petit à petit, parvenait à ses fins, grignotant lentement tel un vers immonde, ce qui maintenait Adryan debout, ses réflexes, sa fierté, en distribuant d’autres cartes qui n’avaient qu’une couleur. Le visage castillon se voila furtivement de l’aura morne du vide avant que l’éclat de la bataille n’éclaire la prunelle. Tu m’as trop ressemblé pour ne pas comprendre déjà trop. Pardonne-moi Comptable. Aujourd’hui, je refuse. De gestes mesurés pour laisser la douleur sommeiller, la dextre nobiliaire se posa au creux des braies comptables pour y délaisser la sournoiserie de caresses habiles à dénicher l’outrage. Bouche contre bouche, sans pourtant qu’elles ne se touchent, il égraina d’une voix neutre malgré son propre ventre s’agitant d’une odieuse envie sous ses doigts aiguisant leur audace.


Les réserves de Saint-Emilion sont d’ores et déjà pleines. La livraison du Chablis est prévue pour demain, celle du Petrus dans deux jours. Le contrat pour le cognac n’attend qu’une signature pour être finalisé. Perfide, la senestre s’invita à la manigance et dénouant sans hésitation la lourde boucle du ceinturon comptable, écarta le tissu, complice d’une dextre à commettre son méfait avec plus d’emphase encore. La gorge étouffant l’esquisse d’un soupir au contact de cette peau lisse et douce sous la pulpe de ses doigts, poursuivit dans une indifférence forcée. Par contre, il te faudra restreindre ta générosité pour le whisky quelques temps encore. Le gallois est encore trop gourmand.

D’une chorégraphie que seule le fracas de l’agacement félin pourrait enrailler, le Castillon se mit à genoux, observant ce vit dont l’œil de cyclope le narguait de ce désir brutal l’envoutant tout autant qu’il l’écharpait. Œil, que vengeur, il agaça du bout de la langue pour mieux le faire pleurer.

Quant à la perte, vois, c’est ainsi que je la rembourse. conclut-il alors que les lèvres nobiliaires emprisonnaient déjà le comptable de leur souffle rauque et envieux malgré lui.

Toi, toi que l’idée du proxénétisme révulse, Feule ! Feule, tu m’en laisses pas le choix. Feule et oublie tes questions.
Alphonse_tabouret
La main s’invita aux braies, raidissant le comptable non point du désir mû de cet insupportable Parasite dont la beauté avait tout du poison, mais d’une somme où le mépris immédiat né de ce voile résigné qui côtoyait aux profondeurs exsangues des prunelles grises, l’étincelle de l’attaque se mêlait à l’écœurant frisson d’excitation dévalant ses reins à ce contact
Les mots débordèrent des lèvres nobiliaires, égrenant les dispositions quand les doigts s’aventuraient à la chaleur de l’interdit, s’appropriant l’esquisse d’une involontaire rigidité sans que rien ne transparaisse sur le visage comptable, ni l’excitation naissante au parfum de la peau Castillonne dont les accents troublés par des odeurs d’apothicaire parvenait quand même à piquer les tempes brunes, ni le moindre plaisir né des caresses appuyées qui se prolongeaient, terribles, frimas extatiques d’un futur dont l’aube se hasardait dans le duel en cours. Chacun d’eux avait revêtu le costume de son choix et l’offrait à la chorégraphie abrupte de ce début de soirée sans aucune intention d’offrir à l’autre ces étincelles de vie qui leur échappait malgré eux et dont ils se savaient dépositaires à l’égide d’un serment aussi cruel que vital.
L’échine du parasite ploya sans que le chat ne la suive de suite du regard, les prunelles fixées en en feu grégeois sur un point invisible, n’appartenant pas au monde du matériel mais à celui des considérations, les mots bouillonnant à la mélodie sourde de la colère grandissante sans que nul remous ne vienne entacher le masque fermé qu’il opposait à cet instant ci à son adversaire.


Quant à la perte, vois, c’est ainsi que je la rembourse

La langue s’aventura, perfide volage qui semait les mensonges du jour et le baume de pacotille en guise de pardon, à la raideur définitive qui se déployait, crispant à l’arrête du bureau, la senestre de l’animal pour juguler l’inspiration expressive menaçant sa gorge.
Brusque, la dextre empoigna les cheveux du Castillon sans ménagement pour la basculer en arrière, la privant du jouet qu’elle était venue chercher et qui propageait au ventre du Chat les filins noirs d’une rancœur exaspérée d’entrapercevoir la facilité avec laquelle il aurait pu s’abandonner à la gangue chaude et luisante qu’offrait le supplicié. Mais de ce supplice-là, il n’était pas bourreau, créature boiteuse qui assumait les maux qu’ils dispersaient aux horizons des autres sans jamais s’en cacher, discernant dans cette vacuité de l’âme, une griffe qu’il ne connaissait pas et qui aiguisa la bile serpentant à ses veines.

Je ne vois pas tes fers mais je les sens peser dans chacun de tes gestes.
Qui?
Qui a osé s’approprier ma proie, Parasite ?


Si peu d’orgueil pour tant de fierté… murmura-t-il, le dédain d’un sourire lové à sa bouche en plongeant son regard dans les perles grises remontées vers lui, sans desserrer la poigne inflexible qui mêlait ses doigts aux cheveux d’Adryan.

Que me caches-tu Parasite, qu’il te semble logique de me donner ce que tu méprises tant ?
Qui te force à baisser la tête pour que tu me donnes raison sans même étouffer une plainte.


Adryan avait visé juste, impitoyable adversaire , car de tout ce que l’on pouvait dire de lui aux rumeurs des salons embaumés de la capitale, rien n’agaçait plus l’animal que l’on le prenne pour un vulgaire proxénète quand il s’était toujours attaché à faire du ventre brulant de l’Aphrodite, un paradis à putains et s’il se contentait en règle générale de souligner avec une humilité étrangement non feinte qu’il n’était que comptable, la provocation venant de l’antre même qu’il avait porté à bout de bras assécha toute affabilité sans qu’il ne cherche à s’en masquer ; Dacien et ses fixations nauséeuses en avaient fait les frais.

Je n’ai pas pour habitude de payer pour me faire baiser, Adryan…, poursuivit-il d’une voix dénuée de tout enrobage quand le sourire triomphait d’une joie indéfectible à pouvoir s’extérioriser, portant la première attaque à l’écho de cette conviction que ce n’était pas ce mirage là, aussi tentant soit-il, qui diluerait ses doutes… et quoiqu’en pense Dacien, tu ne vaux pas une telle somme… conclut- il froidement sans l’ombre d’une hésitation à mêler le putride du Noël passé à l’horreur du jour présent.
Il n’y aurait plus de répit accordé puisque le Castillon avait amené la bataille aux confins de leurs propres limites, l’intransigeance féline enflant aux nerfs quand l’envie suggérée ne désarmait pas l’amplitude de son renflement encore exhibé à hauteur de la bouche nobiliaire.

Si tu as tant envie de moi, ne t’invente pas de prétexte, il te suffit de me le dire, lui confia-t-il un ton plus bas visant par sa douceur gelée à finir d’écorcher ce qui restait du Castillon, inclinant à la manière d’une provocation, la tête emprisonnée vers le vit dressé … En attendant, si ce n’est pas pour te mettre à quatre pattes de ton plein gré, relève-toi, ordonna-t-il au gel d’une voix basse. J’ai toujours préféré, pour te parler, t’avoir à hauteur d’homme…
_________________
--Adryan
A peine les saveurs mâles éclatèrent à sa langue qu’elles lui furent brusquement interdites d’une poigne résolue. De la frustration de se voir privé de cet odieux méfait ou d’être contraint à regarder ce visage souriant qui ne cessait de l’écharper autant de mépris que d’envie, il n’aurait su trancher quelle éraflure était la plus acérée. Pourtant, malgré les mots acerbes, Adryan avait eu exactement ce qu’il se souhaitait. Le Chat s’éloignait de ces rationnels questionnements pour porter des attaques finalement moins vives, tant, étrangement, elles le berçaient d’un reconnu salutaire. Reconnu auquel il s’accrocha avec toute la force que son regard pouvait receler, se gorgeant de ce visage aussi insupportable que beau, buvant le sourire méprisé autant que la découpe nette de la mâchoire, en devinant que dans quatre jours, il aurait besoin de cela aussi pour se redresser après avoir été jeté par terre.

Quelle meilleure défense face à un adversaire que le voile d’un ennemi voulu et façonné suivant des règles n’appartenant qu’à eux ? Car s’il était une certitude divagant vaguement entre les tempes nobiliaires, c’était bien que le comptable n’était ennemi que par l’incapacité commune à être ami. Au sein de cette famille boiteuse, embrouillée d’âmes étirées de noir, chacun faisait ce qu’il pouvait avec ce qu’il avait.


Le silence grignotait les murs à nouveau, sans que le Castillon ne le trouble d’aucune parole, soigneux de cet abandon félin à le poursuivre sur des chemins qu’il refusait de livrer. Seul le tissu de sa chemise le froissa furtivement alors que le bras nobiliaire s’élevait dans une contraction douloureuse de la mâchoire. Envie de lui ? Le renflement dans ses propres braies suffisait à la réponse. Oui, Adryan avait envie de se perdre à l’ourlée de cette bouche au sourire accablant. De pervertir son souffle et sa raison contre cette peau parfumée de vices. Oui, il le désirait, avec autant de force que lors de cette nuit égarée à une nativité qui n’avait rien eu de pieuse mais tout de païenne. Il en crevait d’envie même, pour oublier tout, le temps d’un entracte. Pour briser l’engrenage sordide se refermant sur lui. Pour rayer de la carte de Paris la rue de l’Arbre sec et celles qui ne manqueraient pas de suivre. Pour s’échapper de l’attente qui minute après minute, le rapprochait inéluctablement de la prochaine messe macabre. Pourtant, la poigne castillone se referma sur le poignet comptable, le serrant jusqu’à ce que les doigts blancs s’arrachent de ses cheveux et se releva, les yeux toujours fixées aux prunelles noires quand le vit clair le harponnait jusqu’à affoler le sang frappant à ses tempes. Mais ce mensonge là, jamais ne serait servi à l’Ennemi trop intime pour être utilisé à des fins trop égoïstes. La bataille embourbée de respect avait ses limites, et si les barrières ne cessaient de valser sous leurs humeurs, celle-ci était écrouée dans le roc. Le regard gris s’appesantit encore de longues secondes sur les traits comptables, cachant toutes les contradictions et les hésitations sous le feu glacé d’une lueur fictive.

Tu ne peux faire plus, Comptable, que de te taire et de me mépriser. N’essaie pas de faire davantage.


Et à nouveau mur, Adryan retrouva ce point d’ancrage à la paroi face à lui. Ajoute les pertes à ma dette. La voix claqua, rêche, refusant la confrontation quand il avait gagné ce qu’il voulait et que ses pas n’aspiraient plus qu’à sortir de la pièce. Comme il aurait été facile et jouissif, pourtant, de renvoyer le comptable dans ses cordes en opposant les déficits aux gains engrangés durant des mois, en confrontant son absence à celles d’autres. Mais si le Chat l’épargnait de l’entêtement à vouloir percer son fardeau, en retour, il était aisé à Adryan de le ménager de la mesquinerie et les coups dans le dos. L’un d’eux, pour l’Aphrodite devait rester debout, et ce serait Alphonse. Nous nous sommes tout dit. Comme tu l’as souligné toi-même, j’ai du travail en retard. Tu ne voudrais pas être responsable d’un déficit supplémentaire pour le simple plaisir de me voir.

J’ai quatre jours certains Comptable, pas un de plus, pour tenter de corriger ce qui me bouffe d’aigreur autant que toi. Alors laisse-moi partir et faire ce que je peux, comme je l’ai toujours fait. Cela, tu le sais, et il n’y a que ça que tu doives savoir.
Alphonse_tabouret
Contaminer jusqu’à l’oubli était une chose que l’animal aurait pu faire pour le Parasite, détenteur de ce pacte insensé promettant la mise à mort à l’aube d’une volonté qui n’aurait appartenu qu’à eux une fois ses contours révélés, mais il y avait chez le Castillon, ce parfum insensé de résignation qu’il n’avait jamais pu supporter chez les autres dès lors qu’il s’était rendu compte des fragrances à sa propre peau. Les doigts du nobliau enserrèrent les siens jusqu’à ce qu’il lâche prise, défaite accordée sans le moindre regret, essaimant aux tempes félines l’aiguillon d’une amertume neuve en contemplant le Castillon qui trouvait un sursaut de force à rompre sa pantomime quand il n’avait visiblement pas celle de briser le joug posé à ses épaules, excitant la jalousie cruelle de l’animal à ne point être le seul à assujettir la chair d’Adryan au chemin de la guerre sans encore discerner les tranchées dévastées que ce nouvel adversaire abandonnait aux tempes du Parasite.
Au regard répondit la pleine morgue du sien, Chat orgueilleux dont le flegme servait autant de repères que de contreforts, et qui, malgré la curiosité grandissante, restait sagement assis à la lisière de l’instant joué dans le bureau clos. Adryan résistait, et ce n’était pas tant le comment que le pourquoi qui affamait la créature lovée à son âme, monstre attentif à la moindre goutte de sang ou de rage qui ne lui était pas dévouée, admirable narcisse capable de jalousie dans ces cas les plus extrêmes, car si les sentiments ne l’avaient jamais poussé à l’appropriation, trop farouchement porteur de ses libértés pour les reprocher aux autres, la rancune liée à l’ennemi avait des accents de propriété qu’il ne s’expliquait pas.


Ajoute les pertes à ma dette
Nous nous sommes tout dits. Comme tu l’as souligné toi-même, j’ai du travail en retard. Tu ne voudrais pas être responsable d’un déficit supplémentaire pour le simple plaisir de me voir.


Certainement pas…, admit il au fil d’un sourire étonnamment suave en relaçant ses braies, comme si, revenant les griffes propres du sang qu’il avait cherché, le fauve avait trouvé une autre source à laquelle se nourrir, et là était la clef de toutes choses, le nœud d’une survie longtemps difforme sous l’égide paternelle ; les miettes avaient parfois la saveur d’un festin. Ceux qui trouvaient à s’en priver par excès d’orgueil n’avaient jamais réellement eu cette faim insensée déchirant les entrailles tout autant que le cœur … d’autant que si c’était le cas, je me chargerai alors personnellement des livraisons attenantes au comptoir … Priver Adryan de la fonction qu’il avait gagnée à la force d’un investissement sans faille était certainement la punition la plus arbitraire qu’il eut pu trouver mais s’il savait Le Castillon capable de s’avilir pour cette famille désargentée, il ne l’imaginait pas ployer pour un caprice injustifié

Tu veux jouer avec moi, Parasite ? Voilà les nouvelles règles que je te propose.
Si tu ne veux rien me dire, arme toi.


Je ne te retiens pas, fit l’animal en ne quittant pas encore le rebord du bureau où il était assis, les doigts agrippant le verre de whisky pour en porter le parfum à son nez avant de conclure à la bouffée d’une fatalité férocement réjouie au dos qui se présentait à lui quand le nobliau attrapait la poignée de la porte pour quitter la pièce: J’imagine sans mal que nous nous reverrons la semaine prochaine pour faire un point...

Une fois seul, le chat resta tout aussi immobile, le verre à portée de lèvres sans pour autant les y tremper, le regard noir porté au-delà du cadre, ramenant à lui les maigres détails pourtant précieux extirpés à cette entrevue stérile, en jaugeant l’importance au fil d’une concentration muette jusqu’à devoir se résoudre à une vérité qui ne lui plaisait pourtant pas ; ce n’était là qu’une mise en bouche. Quittant son siège provisoire, Alphonse traversa la pièce, ouvrant la petite porte qui jouxtait l’entrée de la Maison Basse pour y interpeler Hubert qui achever de dispenser quelques ordres à deux hommes chaudement vêtus sur le départ. S’appuyant à l’encadrement boisé, il attendit, immobile, que les missions soient définitivement confiées et que les consignés aient passé la porte pour cueillir son regard :

Lequel de tes hommes est le plus discret ?
Actuellement, c’est plutôt une femme, répondit l’homme de main après s’être gratté le cou dans un silence concerné, observant le patron dont le visage contrarié n’incitait pas à quémander la moindre information.
Amène la moi, conclut le jeune homme en refermant la porte du bureau pour retrouver le fil de son fauteuil , y prenant place avec une lenteur pensive quand la main s’appuyait au bois patiné, les prunelles cueillant les chiffres abandonnés sur le bureau quand l’index de la senestre les ramenait devant lui.
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Esmee_
Je profitais de ma pause. Je m'étais glissée dans la salle d'arme de la Maison Basse, non pas pour m'entraîner, mais simplement assise au sol dans un coin, le dos appuyé contre l'un des énormes piliers, j'avais sous les yeux le journal de mon aïeule Corleone. Celui que j'avais dérobé dans cette bibliothèque et l'une des raisons pour lesquelles je m'estimais aujourd'hui damnée.
Depuis quelques semaines, dès que j'étais seule et que j'en avais l'occasion en sachant que je ne me ferai pas repérer, surtout par l'un des membres du clan, je dévorais des feuillets entiers. J'apprenais l'histoire de celle qui avait créé le clan familial et cette aïeule que je ne connaitrais jamais, faisait partie de ces personnes sur lesquelles j'avais décidé de prendre exemple.

Quand je venais ici, je prenais soin de toujours relever et nouer ma chevelure en catogan. Car même si je ne cachais nullement mon âge, je savais que cela me vieillissait de quelques années et mon visage ainsi paré prenait alors une once de sévérité qu'il n'avait pas à l'accoutumée. Aujourd'hui est jour commun, alors c'est l'élégance de ma tunique blanche, de mon doublet armant et de mes braies de couleur ocrées, assorties à mes bottes de peau que j'ai endossé.

Il aurait été bien difficile de savoir d'emblée que je suis une mercenaire. Mais c'est là ma force. Je suis une habituée de l'infiltration et j'ai quelques autres cordes à mon arc qui me font en règle générale, toujours passer pour ce que je ne suis pas. De par ma frêle stature et mon visage angélique je sais pouvoir donner l'illusion. Néanmoins, le tout est contrarié par une vivacité dans les gestes et dans l'esprit et je suis très loin, en ce domaine du moins, d'être une novice. Malgré mes douze années durant lesquelles on m'a inculqué tout le savoir-vivre de la haute noblesse, je ne me pare de mon orgueil que pour porter haut le nom de mon père. Celui de ma mère, je lui crache dessus. Et mes cinq années de formation, passées au sein du lupanar de Verone ont achevées de parfaire ce que je suis devenue aujourd'hui.

Mercenaire dans la peau mais qui a le don de pouvoir jouer au caméléon et se faire passer pour ce qu'elle n'est pas. Il m'est donc aisé d'évoluer au sein du lupanar et d'y étendre ma surveillance accrue.
Je commence à connaitre les lieux et j'ai pris quelques marques. Il n'est pas rare de me voir arpenter en journée les couloirs de la Maison Basse.

Je ne connais pas encore grand-monde. J'ai eu l'occasion d'entrapercevoir, dans un détour de couloir, le Directeur des lieux, croisé fort succintement mais je suis restée sur ma faim. Parce que j'ai reconnu une lueur dans le regard à peine croisé, qui est identique à la mienne. Ce qui a eu le don de m'intriguer. Mais en dehors du Directeur et du personnel de la Maison Basse, je n'ai pas croisé grand-monde encore.

Et c'est donc sans grande surprise que je vois alors surgir Hubert, l'homme de main en chef. Lui forcément, je l'ai déjà vu. Lorsqu'il me dit que le patron me fait demander, je range sans un mot le journal de mon aïeule dans son écrin de cuir qui rejoint ma besace et je me redresse, afin de lui emboîter le pas.

Je ne me pose pas la question de savoir ce que l'on me veut, je dois y aller, alors j'y vais. J'ignore lequel des patrons me fait mander. Mais je le saurai rapidement à n'en pas douter.

Lorsqu'il m'ouvre une porte je pénètre dans un bureau et j'aperçois un homme qui semble absorbé à sa table de travail.

La porte est refermée sur moi et je m'approche d'un pas.

Il n'y a que quelques mois que je suis en France et ma voix douce et rauque porte les stigmates de mon Italie natale.

Jusque même dans ma voix, il est indécelable que je puisse être une mercenaire. Surtout lorsque je ne me promène pas en compagnie de membres de ma famille.


" - Monsieur. Me voici."
--Adryan
[De l’antre comptable à la celle du Castillon]

Les pas nobiliaires déambulaient encore dans le couloir que le Castillon s’interrogeait toujours sur la nature des méandres sibyllins qui lui avaient permis de fermer la porte du bureau comptable sans le moindre éclat. Sans même que son visage ne reflète la révolte tout autant que la crainte sous le soufflet de la menace ennemie abattu sur sa nuque.

Quelle que puisse avoir été la stratégie du Félin lors de cette entrevue, la carte maitresse était restée dissimulée jusqu’à la fin de la partie, pour s’abattre triomphante sur le plateau bistré de leur échiquier. Sale manie d’être à ce point habile à refermer ses griffes sur la proie. Sale manie que le Comptable avait d’écharper tout en tendant, même involontaire, une perche à saisir. C’était pour cela qu’en guise de réponse n’avait retenti que le cliquetis appliqué de la gâche. Toute réplique n’aurait pu que sonner la victoire féline. Quelle qu’elle soit. Et cela, bien que corrompu par un adversaire intrus à leur bataille, Adryan s’y refusait. Respect pour l’ennemi ou félonie savante pour ne rien donner qu’un mur brut, le Castillon lui-même n’aurait su le dire. Et s’asseyant à son bureau improvisé, il se trouva gorgé d’une force qu’il n’espérait plus, pour s’acharner au travail qui l’appelait de sa pile de vélins soigneusement empilés.

Cette besogne était et serait sa béquille, le Castillon en était pleinement conscient, l’extirpant de l’attente en gavant son crane d’obligations, de formules de politesse et de négociations à couteau tirés. Qu’on lui ôte ce magma aux effluves d’encre, et il tomberait, quant à coté de lui, le Chat ne pourrait qu’être témoin d’une chute dont il n’aurait été que l’instrument détourné, répondant favorablement à la demande d’un Pape dont il ignorait tout.

Pas encore Comptable… Pas encore…

Murmura-il sans plus perdre de temps alors que, ravalant la meurtrissure du bois sec frottant son dos, il se penchait déjà sur les premières missives en attente de réponse.
Alphonse_tabouret
Le regard se leva pour cueillir la silhouette de la donzelle, quittant les nébuleuses pensées auxquelles il avait sombré pour se concentrer sur la visite qu’il avait lui-même provoquée. C’était Hubert qui se chargeait le plus souvent de trouver la main d’œuvre nécessaire à prendre soin des Maisons Hautes et Basses, le chat connaissant assez bien l’étendue de ses savoirs pour ne point se risquer à se croire recruteur. Si le comptable brillait le plus souvent pour son choix des courtisans ou sa manière de faire fructifier n’importe quel service au sein du lupanar, il n’aurait su deviner derrière un visage les valeurs qu’exigeaient les travaux d’armes, aussi, se contentait il la plus part du temps, de recevoir les candidats selon la liste fournie par l’Homme de main pour signer avec eux leurs contrats. D’Esmée, il se souvenait la courbe des lèvres pleines, le tranchant de l’œil vert et le fil du voile italien de son timbre, faisant danser les syllabes dans une valse étrangement macabre pour son jeune âge, intrigante donzelle qui avait l'air de porcelaine aux regards les moins aguerris.

S’il subissait parfois ses passions les plus pleines, l’animal avait été trop longtemps esclave pour ne pas savoir dissocier ses humeurs, science élémentaire à la survie la plus primaire pour qui était né du diable le faisant danser jour après jour selon son bon vouloir, aussi, remisant la pâle colère qu’avait fait germer le Castillon, il accueillit la donzelle d’un sourire discret mais avenant.


Bonjour Esmée, la salua-t-il en l’invitant d’un geste à s’assoir dans l’un des confortables fauteuils brodés qu’offrait le bureau, attardant le regard plus longuement qu’il ne l’avait fait auparavant sur la silhouette femelle sans pour autant l’alourdir d’une quelconque pensée.
Des corps, Alphonse connaissait les saveurs mais également les langages, observateur silencieux à qui l’on avait appris à décrypter les humeurs plus que les capacités, et qui, dans ses examens, s’attachait toujours aux menus détails les plus insignifiants mais les plus instinctifs offerts par ses hôtes ; une mèche replacée derrière l’oreille, un mordillement de lèvres, un doigt s’attardant au contact du mobilier, tout n’était que cailloux blancs semés sur un chemin sombre, menant le plus souvent aux portes dérobées de ses semblables. Celui de la Corleone chantait, à la manière d’un oiseau en cage, exhalant une féminité niée tout autant que jugulée, et si chaque courbe jouait d’harmonie pour promettre au futur les délices des chairs tendres, il n’en demeurait pas moins une retenue qui devait à l’immaturité juvénile des expériences. Le visage se parait de lignes douces et tendres, que le feu des prunelles et son recrutement au sein de la Maison Basse contredisaient sans commune mesure, doublant les joyaux herbeux d’une lueur diffuse à laquelle le Faune se laissa aller pendant une poignée de secondes, ne s’arrachant à sa contemplation silencieuse que lorsqu’elle fut assise.

Hubert vous a recommandé pour un travail requérant discrétion et silence… Je ne doute pas que vous en soyez à la hauteur… précisa-t-il dans la parfum d’un sourire épicé. Le jugement de l’Homme de main valait pour autant que le sien dès qu’il s’agissait d’aller à l’essentiel dans les coulisses du lupanar, et de ce fait, assurait au félin le choix judicieux qui avait amené l’italienne jusqu’à lui… mais je souhaiterais que vous portiez à cette besogne un intérêt tout particulier puisqu’elle concerne l’un des employés de l’Aphrodite…Il étira un silence bref, rivant le velours noir de son regard aux jades devant lui, y encrant le message muet de ceux qui se taisent pour ne dire que l’essentiel, posant aux braises des prunelles l’exigence du travail bien fait. Connaissez-vous Adryan ? demanda-t-il enfin.
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Esmee_
La première chose que je remarquais en entrant dans la pièce, fut l'élégance du lieu. Car si la vie m'avait forgée et que je haïssais aujourd'hui toutes ces femmes issues de la noblesse, séquelles d'une mère indigne de la Haute italienne, à laquelle je faisais honte, j'avais néanmoins gardé cette passion de l'Art et l'oeil se faisait vite connaisseur ou reconnaisseur sur tel ou tel mobilier.

Invitée d'un sourire et d'une gestuelle à prendre place dans l'un des confortables fauteuils des lieux, je m'assois mais je ne m'enfonce nullement dans le moelleux qui invite à la détente. Je reste droite, les mains jointes, pointant vers le bas, à l'orée de mes genoux.
Et si je me sens observée, je n'en montre rien, le laissant tout à sa découverte, alors que mes yeux se posent fugitivement sur les mains de mon hôte. Dextre et senestre qui captent mon attention parce qu'elles ressemblent à celles de mon frère, Gabriele. De longues mains fines et soignées, mais d'expérience, je sais ce genre de mains, capable d'autant de douceur que de cruauté.
De sa haute stature, de ses manières soignées, de ce regard où l'insolence est sublimée, Alphonse me rappelle un peu Gabriele.

Ce qui peut expliquer ce cocon de confiance qui se tisse alors dans mon esprit, encore fragile mais bien présent.

Je relève mes émeraudes pâles et je les ancre aux onyx félins. Je ne suis pas de celles qui prennent des détours pour s'exprimer, je vais en général à l'Essentiel. Et nul besoin de beaucoup de mots pour le faire.
J'ai appris l'art de la conversation. L'échange de regards et les points de vue différents. Je sais observer les expressions et les réactions et un haussement de sourcil ou un sourire peuvent en dire beaucoup. Au fil du temps, rien ne m'échappait et je savais faire preuve d'un discernement sans commune mesure.

Le regard du comptable est bien plus explicite que de longues phrases et je prend conscience de la tâche qui m'attend.

Lorsqu'il me demande si je connais Adryan, je me complais quelques secondes dans mon silence avant de répondre. On ne connait jamais vraiment une personne, pas même ses intimes. Mais lorsque je croisais un visage, j'avais ce don inné de ne plus jamais l'oublier. Ainsi oui, par déduction, j'avais compris que l'homme à la mine assombrie, que j'avais croisé dehors, le soir où Angellus s'était auto-proclamé portier de l'Aphrodite, ne pouvait être que l'un des membres responsables dans l'établissement.

J'avais bien vite saisi qu'il ne s'agissait ni du Comptable, ni du Directeur. Et j'étais même désormais capable, après m'être discrètement renseigné, de citer chacune des fonctions des membres de l'Aphrodite et le nom des personnes s'y référant. Je n'avais pourtant pas encore rencontré beaucoup de monde, et j'ignorais donc pour certains à quoi ils pouvaient ressembler.

Mais ce n'était pas le cas d'Adryan. Même si je ne l'avais croisé que quelques minutes, mon esprit lui était apte à le reconnaitre.


" - S'il s'agit du responsable des boissons au sein de l'Aphrodite, je l'ai déjà aperçu. Est-ce à lui que je dois attacher mes pas ?"
Alphonse_tabouret
Le comptable hocha sobrement la tête, quelque part soulagé de ne point avoir à brosser un tableau qui aurait pu trouver quelques accents flatteurs quand c’était encore la frustration du mystère qui nimbait ses envies premières.

Adryan de St Flavien, acquiesça-t-il en ne fournissant point les titres s’attachant au nom déjà précieux. La noblesse du Parasite n’était pas un secret mais étrangement, Alphonse comprenait l’orgueil mis à mal d’ajouter plus à cette particule déjà outrancière dans le décor d’un bordel ; c’était l’un des points faibles du Castillon sur lequel il n’avait encore jamais appuyé, ne s’attachant qu’à ceux qu’ils s’étaient créés et en aucun cas à ceux fournis avec son héritage. Posséder le nom complet pourra éventuellement vous servir si d’occasion vous aviez besoin de lire par-dessus un comptoir ou bien une épaule…
Il ne prit pas la peine d’injurier la donzelle en s’assurant d’une question qu’elle savait lire et écrire, jugeant au port de tête droit et à cette façon de rester assise sans prendre les aises de tout convives, les traces parfumées d’une éducation qui avait dû se charger des bases élémentaires d’une survie plus raffinée que celle des masses.
La main pianota quelques instants sur le bois patiné du bureau, non pas par indécision mais dans le seul but de voir si elle s’attacherait à son regard ou au mouvement orchestré.

Où, qui, combien de temps…, commença-t-il en allant au plus court, animal taiseux qui ne délayait le badinage qu’à l’accalmie des parenthèses les plus inattendues et, qui méticuleux et consciencieux à ne pas gaspiller son temps et celui des autres, synthétisait au plus simples ses demandes pour éviter tout malentendu et trop de transparence à ses motivations… à quelle fréquence, allure, état… Esmée, à compter de cet instant, vous devenez mes yeux, et j’aime tout regarder, poursuivit il en laissant l’espièglerie d’un sous-entendu peindre brièvement l’éclat de son sourire, la dextre disparaissant pour ouvrir un tiroir d’où il extirpa une petite bourse qu’il ramena devant lui.
Cela sera certainement un travail fastidieux, vous demandant de l’attention et peu d’heures de sommeil, aussi durant le temps que durera cette filature, votre solde sera doublée… La pulpe des doigts s’amusa de la cordelette quelques instants avant de la pincer pour la faire graviter quelques secondes. L’Aphrodite avait toujours été généreuse avec son personnel, le comptable étant convaincu que l’effort récompensé façonnait les prémices de la fidélité … et chaque information pertinente apportée à vos allégations sera récompensée. Vous me ferez un rapport tous les deux jours si possible, quelle que soit l’heure. Si vous ne me trouvez pas, adressez-vous à Hubert… Le velours du regard quitta le cuir souple de la bourse pour éperonner les jades italiens… et uniquement à lui, appuya-t-il en lui lançant l’aumônière au son cliquetant de la somme replète y dormant. Ceci servira à couvrir les frais que vous pourriez avoir. Ce qui vous restera à la fin de la semaine vous appartiendra.
L’animal s’appuya au dossier droit de son fauteuil, délaissant la table comme appui, observant quelques instants de silence avant de lui demander, curieux félin que la tranquillité apparente de la jeune recrue mettait indéniablement en appétit :
Avez vous des questions?
_________________
Esmee_
Il est noble. Je ne laisse rien transparaître, mais heureusement qu'il s'agit d'un homme. Car j'aurai du me coltiner une femme de la haute à surveiller, nul doute que je l'aurai fait mais que j'aurai eu moi-même des pulsions malsaines envers elle. Moi qui avait été élevée dans les sphères d'une haute noblesse j'en avais ensuite gardé un amer et cruel souvenir. A mes yeux les spécimens féminins de la noblesse n'arrivaient pas même à la cheville des catins du lupanar où j'avais été recueillie, lorsque ma superficielle, manipulatrice, cancaneuse, et tarée de duchesse mère, avait décidé de m'abandonner.
Et il y avait quelques semaines de cela, j'avais manqué sauter à la gorge de l'une de ces femmes. Nul doute que si Gabriele et Jurgen n'avaient pas été là pour me retenir, assurément que je m'y serais risquée malgré l'idiot et pédant garde qui l'accompagnait. Malheureusement je ne pouvais pas réécrire mon histoire, je devais vivre avec et la chose n'était pas aisée tous les jours.

Adryan de St Flavien. L'essentiel à retenir. Et qu'il est un membre du personnel de l'Aphrodite et surtout, il semble que le Comptable tienne à ce que le travail soit fait de manière irréprochable.
Soit. Il en sera ainsi.
Je hoche la tête de manière affirmative lorsqu'il me dit que son nom peut m'être utile. J'entends bien son jeu de main sur le bureau mais je me focalise sur le regard animal. Et je vois offrande rémunératoire pour mon travail se présenter entre une patte de velours.
C'est ainsi que je qualifierai Alphonse à l'instant présent. Il est tout de velours.
Peut-être pour mieux attirer mon attention ou ma confiance car je suis certaine que ce n'est que l'une des nombreuses facettes du Comptable.

Mon esprit lui, enregistre les exigences détaillées sobrement et j'étire un infime sourire de malice sur mes lèvres en réponse au sien lorsqu'il m'annonce que je deviens ses yeux et qu'il aime tout regarder.
Je n'en ai sans doute pas l'air lorsque l'on me regarde, mais le fait des années passées à être éduquée au sein du Lupanar de Verone me font amplement saisir le sous-entendu emmené par Alphonse.
Je comprends d'autant plus combien mon travail lui tient à coeur lorsqu'il m'informe de ne rendre des comptes qu'à lui ou bien à Hubert. Et la manière dont les onyx viennent se planter dans mes jades en scandant cela est péremptoire.

J'attrape l'aumônière généreuse qui m'est lancé au vol d'un geste vif. J'ai un rapport à l'argent assez particulier. Je suis fourmi jusqu'à obtenir ce que je désire. Mais je sais assouvir le moindre de mes désirs. Et la fourmi sait se faire cigale dès qu'il s'agit de m'adonner à l'une de mes passions.

Je le regarde se redresser sur son fauteuil, alors que, telle une callypige, je ne bouge pas d'un iota du mien.


" - Je suppose que mon travail commence dès que j'aurai franchi le seuil de votre porte ?"

Ce qui implique que je vais maintenant m'atteler à ne plus lâcher Adryan d'une semelle. Et ce de la manière la plus discrète qui soit. Et j'ai plusieurs cordes à mon arc pour qu'il ne se doute de rien. De toute manière, s'il est encore aussi amorphe que la dernière fois où je l'ai vu, il y a de grandes chances pour qu'il ne sache même pas qui je suis.
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