Brygh_ailean « Jai beaucoup mieux à faire que minquiéter de lavenir. Jai à le préparer. »
Depuis Sarlat, à la première impression, lîle semble isolée par le lac. Mais il suffit dentrer sur les terres néocalédoniennes (ouais parce que leur route vers la mine et vers la capitale, elle traverse les terres calédoniennes et même que sils étaient aussi méchants quon prétend, les néocalédoniens, ils leur pèteraient les dents et la bourse à chaque passage, aux guignols!), de sortir des chemins battus par des siècles et de siècles de mineurs, pour découvrir quil existe aussi un gué pour se rendre sur lîle.
Le passage est étroit, tout juste celui dune carriole à bras, mais à la saison sèche, le pèlerin se mouillera à peine les pieds. Au cur de lhiver, cette partie est tout au plus verglacé, faisant le délice des enfants, sans risquer de tomber à leau.
Cest au bout de ce gué que deux grandes discutent ensemble. Les surs Bastide et Brigitte... L'une est aussi massive, que l'autre est longiligne. L'une est hohenzollern, l'autre orcadienne. De lautre côté de la maison étroite et haute quon appelle le Phare, une immense table est dressée, tandis quun large brasier réchauffe et illumine le lieu. Mais pour l'instant, elles se tiennent là à vérifier les derniers préparatifs.
Ché nen peux plusse, Schwester. Tu chanches enkoreuh uneuh fois dafis et ché kitteuh le coufent, pour té frai.
Si tu crois mimpressionner par tes promesses que tu ne tiendras pas...
Ché té préfénue... Tant pis pour toâ...
Tss... Où en sommes-nous ?
Sechs* fûts de pière à lhospital, drei* ici.
Tu prends les escotes pour des alcooliques ?
Ach, pas plusse que les Prussiens...
Hmm... Et pour les coucher ?..
Afec tout ce quils font poire, ils peuvent sentormir nimporte où... mais Astrid a préparé quatre cellules toute seule, et deux petites tortoirs. Paille fraiche sur le sol et tans les paillasses. Ché croyais que fous tormiez toutechours téhors fu comment fous êtes forts et prafes ?
Dans les Highlands, oui. Ici, le temps est incertain. Dehors, nous risquerions davoir trop chaud.
Quatsch*...
A question idiote, réponse à mesure... Pour leur indiquer le chemin jusquici ?
Meine geehrte Brygh, dein Sohn ist im Burg Sarlat... Brauchst du irgendwelchen anderen Flötespieler ?*
Pff... Yen a aussi qui peuvent arriver par Périgueux, hein ?
Si tu lé tis... Ché fais quoi mainténant ?
Rien. Il ne reste plus quà accueillir nos invités...
Alorsse, ché retourné au koufent... Tes infités, pas les miennes...
La grande de hausser les yeux au ciel. Ca commence très fort en effet.
*Six, trois
« Nawak » ou pour faire plus dépoque « Foutaise ».
Ma chère Brygh, ton fils se trouve à Sarlat. As-tu vraiment besoin dun autre joueur de flûte ?
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Adepte des vertus insecticides du Camembert au Calvados.
... "Je ne parle pas aux cons, ça les instruit."
Soren_eriksen
Cela faisait trois jours qu'il était arrivé à Sarlat dans le Périgord en provenance de Paris. Trois jours à découvrir les lieux, les gens. Observer et analyser. L'homme n'était pas d'un naturel fonceur et la raison qui l'amenait ici exigeait tact et doigté. A Sarlat, il n'avait vu que vice et dépravation sans grande valeur. La ville l'avait profondément déçu autant que Paris l'avait subjugué. Le seul avantage qu'il y trouvait par rapport à la capitale du royaume de France, c'était la douceur de la météo. Niels de Castral-Roc était certes un scandinave mais il avait appris à apprécier la bien-être d'un temps plus méditerranéen.
Lui et ses hommes s'étaient installés à la taverne dite des Amazones. Sitôt entré dans le comté, il avait appris par hasard que les frontières étaient fermées et que le passage ou le séjour requérait un laisser-passer. Mieux valait mettre ses affaires en ordre afin d'éviter tout problème.
Citation:
A Djull, prévôt des maréchaux
de Niels de Castral-Roc, voyageur
Prévôt,
J'ai appris par le plus grand des hasards que les frontières du comté sont fermées et que ma présence ici requiert un laisser-passer. Je fais donc ma demande par le biais de cette missive pour moi et mes hommes. Je compte séjourner ici une semaine, deux au grand maximum.
Que le Très-Haut vous protège
Niels de Castral-Roc.
Niels s'était contenté du minimum. Il n'aimait guère donner d'explications et encore moins aux prévôts. L'homme est de la race qui commandait, non de celle qui se pliait. Il était attablé aux Amazones, jouant avec une dague qu'il avait récemment acquis dans une transaction fort avantageuse pour lui, lorsqu'entra une blonde armoire normande qui lui parla dans un dialecte étranger à la plupart des habitants du coin. Un sourire de satisfaction éclaira sa petite gueule d'amour, ce qui lui valut un regard mutin de la petite soubrette qui s'occupait de sa chambre. L'île sur la lac: voilà l'endroit qu'il cherchait depuis qu'il était arrivé. C'est là qu'il devait se rendre. C'est là qu'on requérait sa présence.
Il faisait encore nuit lorsque la petite troupe mit la barque à l'eau. Le Castral-Roc était accompagné de quatre solides rameurs blonds, visiblement de la même origine que lui. Le vent s'était levé, ridant la surface noirâtre du lac sarladais, claquant les pans de sa cape les uns contre les autres, ébouriffant ses cheveux. Sur l'horizon au delà de l'île, une lumière irisée commençait à poindre. La lune cédait le pas à son compagnon de tous les jours. Les premiers cris d'un coq se firent entendre. Ils étaient en retard. Niels avait voulu sa visite au lever du jour. Il était un homme ponctuel. Le seul retard qu'il envisageait comme acceptable, c'était celui de sa propre mort. Les hommes avaient remonté le bateau sur la berge pendant que leur chef scrutait les quelques demeures. Ils réajustèrent leurs armes, leur tenue et se mirent en route. Le coq était parti réveiller ses récalcitrantes et le soleil avait définitivement chassé la lune de la voute céleste lorsqu'ils frappèrent à la porte. Trois lourds coups! - Oyez! Oyez! le seigneur Niels de Castral-Roc, représentant de sa Grandeur le Duc Lars Eriksen a fait le voyage d'Helsingør jusqu'ici pour s'entretenir avec Brunehilde MacFadyen!_________________
Brygh_ailean Y'a personne de ce nom-là ici mon gars... Brunhilde est morte et enterrée depuis longtemps.
Pieds nus, la Grande foulait le sol herbeux, faisant craquer au passage les petits pics de gelée matinale qui s'y formaient. Elle déposa ensuite les deux anguilles qu'elle tenait sur l'épaule dans son filet, sur la margelle du puits.
La table était toujours sortie pour accueillir les invités, mais ils étaient presque tous passés par l'autre côté. C'est bien la peine de se casser le cul, j'vous jure. Deux anguilles suffiraient néanmoins à préparer une entrée pour tout ce beau monde.
J'vous r'gardais manoeuvrer... Pour un peuple de marins, z'êtes quand même franchement couillons. Parce que le truc en bois, là, qu'tu vois, ça s'appelle un ponton... dans vot' langue de malotrus, ça fait "ponton"... Incroyab', non ? Même mot, même fonction : amarrer les bateaux... Cela dit vous seriez passé à gué de l'autre côté, vous auriez mis moins de temps, en plus...
De son coutelas, à la taille, elle décapita la première anguille qui continuait à s'agiter dans sa main. Elle l'a précipita alors violemment sur le muret de pierre pour lui rompre suffisamment de vertebres et de nerfs que l'agitation s'arrêta net.
Tu comprends au moins ce que je dis, ou bien tu savais dire que ce que tu as balancé t'al'heure ?
Même ça t'aurais pu l'apprendre proprement. Dans cette langue, pour un Duc, ils disent sa Grâce. Ca ne veut rien dire, entendons-nous bien, mais ils sont heureux avec ça.
La deuxième anguille suivi le même sort. Toujours aussi calmement, la grande se pencha alors pour essuyer son couteau puis ses mains dans l'herbe froide.
Bon, pis pour ton édification personnelle, ici, en Nouvelle-Calédonie, t'es senher de ton trou de balle, Niels du bout-du-monde. Alors, tu la joues "humilité". Ouais, namé, je sais, c'est un mot que vous avez du mal à comprendre
Mais comme je suis bien élevée, moi, vu que je ne suis pas norse... j'vais aussi me présenter.
Elle prit le soin de prendre son temps de revenir jusqu'à la porte d'y prendre le linge accroché pour se sécher les pieds avant de les glisser dans des gros bas de laine courts, puis dans ses bottes.
Tu es ici chez moi, et je suis Brygh-Ailean Urquhart... née MacFadyen. Si tu as réveillé ma mesnie, avec ton bordel, je te promets une mort humide... et humiliante.
Petit sourire en coin.
Forstå ?
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Brygh_ailean Elle éclata de rire à la face de "Sombre petit pet". Oui, je sais. Elle a la facheuse manie des surnoms toujours un peu coprologiques. Il faudrait chercher dans son histoire personnelle, sans doute. Mais pas maintenant...
Une fois suffisamment rasserénée pour poursuivre :
Non, tu n'es pas heureux, Niels... Ta tête ressemble à peu près à celle de mes anguilles. J'espère pour toi que tu es moins gluant... Tu ne sais pas ce que tu fais ici, tu te demandes qui je suis vraiment. Bref une bière et une pute de l'autre côté du lac te siéraient bien mieux, n'est-ce pas ?
Et je ne suis pas à l'origine de l'union des familles MacFadyen et Erikssen. Tu te trompes de personne... Je te conseille d'aller voir Rosheen Daire MacFadyen... A Hoy...
Elle allait ouvrir la porte de la maison, mais se rappelant qu'elle avait toujours les anguilles à la main, elle changea d'avis : d'un pas assuré, faisant totalement fi des jaunes à ses basques, elle traversa la cour vers la grange.
Tu pouvais largement passer par le gué ou d'amarrer au ponton, car tu n'étais pas attendu ici, ni aujourd'hui ni jamais. Tu n'y es pas le bienvenu non plus. Je n'ai pas sorti les chiens par égard pour mes invités... Et tu n'en es pas.
Maintenant, je te conseille toi et tes hommes d'aller faire un tour ailleurs que sur mon île... car mes chiens sont effectivement là, derrière cette porte... et ils ne mangent pas de poissons du tout.
De deux doigts au travers des lèvres, elle siffle. Les chiens jappent derrière la porte.
Tu diras à Lars que je me désintéresse de ce qu'une vieille outre à foutre comme lui peux avoir à dire en général, à moi en particulier... Quant à Hakon... Cela ne me regarde pas non plus. Mais il est déjà marié, hein ? Tu le savais ? Ca va être compliqué pour vous...
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Brygh_ailean Si Rosheen Daire avait ouvert quoi que ce soit, c'était avant tout son portefeuille patrimonial... Le jeune coq faisait semblant, comme font si bien les norses. D'informations il n'avait point : il allait à la pêche. Voleur... même de renseignements. Foutue race !
Ca y est ? T'as fini ?
Lui parler comme au gosse qu'il était, ce n'était pas forcément la bonne solution. Le but était qu'il disparaisse, sans croiser Hakon. Sans lui pourrir la vie, comme toute sa race de m... lui avait pourri à elle, bien longtemps après qu'elle se soit débarrassé du précédent Hakon.
Je ne sais pas de quoi tu parles, mais je n'ai pas d'ami qui vienne de la part de Lars, ni même de ton pays... Au-cun.
Rosheen était morte, certes, mais le godelurot et le dégénéré qu'il servait n'avaient visiblement pas connaissance du contrat de mariage et ce que cela impliquait pour Hakon IV, son fils à elle.
Je ne sais même pas où se trouve Hakon et sa femme actuellement... Une blonde, une fille de chez vous, dont le frère est Duc... Avec des dents pointues, forcément... Vos femmes ne ressemblent qu'à des juments.
Elle non plus n'a pas le droit de venir ici...
La grande cracha sur le sol de manière très ostensible.
Crois tu que ton avis m'importe sur moi ou sur mon fils ? Oublies-tu qui je suis ? Crois-tu qu'il soit vraissemblable que Lars demande quoi que ce soit à la femme qui a fait tué son frère et s'est chargé elle-même de son neveu ? Crois-tu vraiment qu'en débarquant ici comme un voleur, je pourrais te traiter comme autre chose qu'un voleur ? Je suis déjà condamnée à mort chez vous... Alors, baste ! Passe ton chemin et ne revient point... Mes chiens ont faim !
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Brygh_ailean Les histoires du passé, dis-tu ?
L'homme était aussi bête que prévisible. Il n'y avait vraiment rien à attendre d'eux. Ni fierté, ni honneur... ni même un peu de jugeotte. Entre bouffons et souillons, voilà ce qu'ils étaient. Voilà sans doute ce que son propre fils avait été. Un sourire en coin monta aux lèvres de la grande tandis que le couinement des roues de la première charette conventuelle grinçaient en remontant sur le chaotique terre plain de l'île.
Je vais devoir ouvrir cette porte aux nonnes, Niels. C'est l'un de leurs ateliers. Je te conseille donc à toi et à tes hommes de poser un genou à terre, pour ne pas effrayer mes chiens. Même votre cuir bouilli ne pourrait arrêter la force de leurs machoires.
Sans prendre la précaution d'attendre quoi que ce soit, elle leva la clanche et appuya de tout son corps sur la porte lourde pour la repousser.Les animaux se propulsèrent vers l'extérieur, devenus fous par l'attente de savoir ce qui se tramait dehors. Certains se contentèrent de se mettre à l'arrêt en grognant, aboyant ou hurlant, d'autres se jetèrent directement sur les Danois.
Je vous avais prévenus... Setzen !
On apprend pourtant beaucoup du passé, non ? Par exemple, que je n'ai cure de vous ou de vos souhaits... Que je serais forcément trop gourmande puisqu'à part votre mort à tous Lars inclus , je ne vois pas franchement ce qui pourrait m'intéresser de vous...
Il lui fallait gagner du temps, trouver un moyen de contacter Soren sans que l'autre le sache. Lui dire de ne pas venir au Phare ce matin, par exemple. Mais elle ne lacherait rien, et rien ne viendrait contracter le moindre muscle de son visage.
Qu'est ce qui peut te faire penser que totu ce que tu raconte ait un sens pour moi ? Qui a été assez stupide ou vicieux pour te laisser penser une seconde que je puisse envisager quoi que ce soit avec vous ? Qu'est-ce qui pourrait intéresser Brygh Ailean MacFadyen chez vous ? Ceci n'est pas de la rhétorique. J'aimerais franchement entendre de ta bouche la réponse à ces questions.
Elle avait ses terres, toutes ses terres. La Couronne écossaise lui avait rendu Mull qui reviendrait à Una selon les us MacFadyen, et Soren était déjà propriétaire non seulement de ses terres sur Hoy mais également des terres des Stewart, par le contrat de mariage de Rosheen. Toutes les terres étaient leurs désormais, comme du temps de grand-mère. Certes, Soren se sentait toujours plus danois qu'écossais mais il était son fils après tout.
Que faisait cet homme chez elle ? C'était le plus grand des mystères. Elle tendit la main avec les anguilles vers une petite soeur dodue, qui s'en empara ravie.
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Brygh_ailean C'est tout vu.
La réponse était aussi claire que nette. Elle, elle entendait bien.
Je ne fous pas les pieds à Sarlat... Alors, tu en pars ou tu y crèves. Dès lors que tu quittes la Nouvelle Calédonie, plus rien ne me concerne.
Elle le regarde s'éloigner, les cornettes lui faisaient à elle aussi une sorte de garde de curieuses.
C'est qui ?
Personne...
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